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mercredi 31 juillet 2013

Ils sont fous ces Ricains !


Étrange pays que les États-Unis, et sur tous les plans ; si admirable par certains côtés, si déconcertant voire absurde par d'autres. 

Dans ce pays, où il est, somme toute, moins dangereux pour le voyageur de passer en douce dans sa valise, une kalachnikov qu'un sauciflard ou un camembert au lait cru, le principe de précaution est poussé à l'extrême mais le laxisme mercantile total.

Ainsi, en même temps, on y laisse les drugstores vendre toutes sortes de produits "para-pharmaceutiques" (au sens étymologique), tous plus trafiqués et falsifiés les uns que les autres, dont la moindre république bananière interdirait la vente et l'usage . À côté de cela leur US Food and Drug Administration est un organisme de vérification des plus sourcilleux. Plus que notre propre Répression des fraudes puisque la FDA a examine avec tant de soin des gousses de vanille venues de France qu'elle s'est aperçue que des importateurs, évidemment français, vendaient des gousses de vanille "rechargées" à la vanilline artificielle, après en avoir extrait la vanilline pure et naturelle pour la vendre sous cette forme. Notre service compétent, lui, n'y avait évidemment vu que du feu !

Le pire est toutefois la justice américaine ; vue de loin, à la différence de la nôtre, si souvent "indulgente aux grands, dure aux petits", elle apparaît toutefois, souvent, comme totalement schizophrène, présentant à la fois une rigueur puritaine sans défaut et un laxisme qui tolère les pires des accommodements. C

Cette réflexion m'est inspirée, une fois de plus, par le cas actuel du soldat Bradley Manning. On apprend, avec beaucoup de satisfaction, que n'étant plus accusé de "collusion avec l'ennemi", il ne risque plus, de ce fait même, la prison à vie, tout en demeurant exposé, si mes oreilles ne m'ont pas trompé, à une condamnation à 162 ans de prison ! Comme je le disais en commençant, ils sont fous ces Ricains !

On le voit aussi, et peut-être surtout, dans les curieux arrangements auxquels donne lieu la justice américaine quand on a les moyens de payer les victimes, réelles ou supposées, comme dans le cas, qui défraya naguère la chronique, du joueur de football américain accusé de meurtres avec des preuves irréfutables. Plus récemment, on a découvert que tous les scandales, esquissés ou déclenchés par la pédophilie de Michael Jackson, maintenant avérée, ont trouvé leurs conclusions dans des solutions de compromis avec le paiement d'indemnités faramineuses aux parents des victimes, réelles ou supposées. Je laisse cette dernière question ouverte car ce type d'arrangements enclenche inévitablement un processus de candidatures multiples, fondées ou non, à ce genre de tractations.

On a pu en voir encore un exemple dans le déroulement grotesque du procès de DSK ; ce dernier, exhibé, dans les débuts, menotté et encadré publiquement par des policiers, a été finalement, plus ou moins blanchi, en dépit du sperme, des collants déchirés, etc., dans le jugement final, moyennant un million de dollars!
 
Il en est de même pour les mensonges publics des présidents ; on a été sans pitié pour ceux de Richard Nixon et d'une indulgence totale à l'égard de ceux de Clinton, qui est actuellement le président le plus populaire et celui dont les tarifs oratoires sont les plus élevés !
 
Va comprendre Charles !

 

mardi 30 juillet 2013

Jean-François Copé est-il un "zeru zeru" ?

Jean-François Copé est-il un "zeru zeru" ? Vous n'en savez rien et la question vous paraît de toute évidence saugrenue. Vous n'avez pas à rougir de cette ignorance car un zeru zeru est, en swahili et dans l'Afrique orientale et centrale, un "fantôme" et, plus particulièrement c'est le nom que l'on donne aux albinos, dont j'ai parlé dans un précédent billet sans m'attirer les remarques que je craignais.

Les albinos passent en effet pour jouer un rôle important dans les pratiques magiques traditionnelles ; posséder une partie du corps d'un albinos donnerait un pouvoir immense pour guérir (forniquer avec une femme albinos guérit même le sida!), acquérir la richesse ou réussir en politique. C'est ce qui explique les disparitions et les meurtres de ces pauvres albinos que l'on enlève et dépèce ensuite pour faire commerce de leurs membres et de leurs organes ; un bras d'albinos se négocie aux environs de 2000 $ en Tanzanie et la tête ou le sexe bien davantage encore, en raison des puissances magiques qu'ils recèlent.

Rassurez-vous, Jean-François Copé n'est assurément pas un albinos et il n'est pas exposé à un sort si cruel dans son séjour africain, mais ses singularités font qu'il semble en avoir les vertus magiques aux yeux de certains Africains, en raison sans doute de ses caractères exceptionnels. Ils peuvent évoquer celui des mélanodermes sans mélanine, quand on entend ce contempteur vengeur de la xylolalie pratiquer la langue de bois avec autant de constance que de talent. N'est-il pas d'ailleurs, selon Wikipédia, le fils d'un proctologue-comédien réputé, lauréat de nombreux prix pour ses films sur l'anus et par ailleurs acteur dans la série "Plus belle la vie"?

La presse française fait, en ce moment grand cas des 30 000 € (son entourage conteste le chiffre et parle d'un simple défraiement) qu'il aurait touchés pour faire une conférence à Brazzaville. La somme paraît assurément considérable pour certains, mais elle modeste pour d'autres, puisque le tarif de Nicolas Sarkozy est considérablement plus élevé, ce qui n'est sans doute pas pour plaire à Jean-François Copé,. La presse française fait ses choux gras de cette affaire, dénonçant "l'affairisme" de l'UMP, en oubliant simplement que certains dignitaires du PS en font tout autant.

Peu importe d'ailleurs, car l'intérêt de cette affaire est ailleurs et en particulier dans l'organisme qui finance toute cette opération. Cette prétendue conférence du 23 juillet 2013 à Brazzaville n'a sans doute pas été prise en charge, en dépit des apparences, par l'État congolais (il s'agit du Congo-Brazzaville qui n'est pas la RDC, le Congo dit démocratique, situé de l'autre côté du fleuve), mais par le magazine américain Forbes dont on ne connaît que le côté pipole mais qui est bien autre chose. Depuis deux ans, en effet, il tente, avec lui-même des financements plus discretssans doute, de s'installer sur le terrain africain. Il y a juste un an dans cette même ville de Brazzaville, on a lancé le magazine Forbes Afrique, à grand son de trompe, avec comme parrains françafricains Dominique de Villepin et Jean-Pierre Raffarin. L'offensive américaine double celle de la même entreprise éditoriale : Forbes Africa, lancé en 2011 à Johannesburg et reprise, il y a quelques semaines, à Libreville au Gabon, à travers le « New York Forum for Africa ». Ne comptez pas sur la presse française pour vous en parler, allez plutôt faire un tour dans le réseau Nerrati-Press !

Tout cela procède naturellement de l'offensive américaine sur l'Afrique et ces divers avatars de Forbes sont naturellement des chevaux de Troie africains des Etats-Unis qui s'efforcent, sur des terrains différents, de contrer la mainmise de plus en plus forte des Chinois sur l'Afrique. Si officiellement, le président Obama a choisi de s'opposer à la Chine essentiellement en Asie, cela n'empêche nullement de placer des pions sur le terrain africain, au Nord comme au Sud, en essayant de jouer la carte des dirigeants et des industriels sur un terrain différent de celui de la Chine. Il n'est d'ailleurs pas indifférent que les trois versions du Forbes Magazine lancent leurs offensives depuis le Gabon, la RSA et le Congo. Ce n'est évidemment pas par hasard si n'ont pas été choisis des Etats qui auraient pourtant plus besoin encore de l'aide au développement qui est la tarte à la crème de ces nouveaux forums.

Pour comprendre quelle est la finalité réelle de ces actions, il suffit de voir d'ailleurs quels en sont les invités (en dehors de Jean-François Copé lui-même qui ne fait pas mystère du fait qu'il a le soutien des principaux industriels français implantés en Afrique;  ils auraient même promis quelques millions d'euros de dons, selon une stratégie bien connue mais qui est rarement suivie d'effet). Un des principaux est l'inévitable Kofi Annan qui, avant d'être secrétaire général des Nations Unies, avait été à la tête de la "United Bank for Africa"! Tout cela n'a rien d'étonnant, quand on se souvient que le magazine Forbes, depuis sa création, a toujours été très proche du parti républicain des États-Unis, à travers les présidents Reagan et Bush et du lobby de l'immigration cubaine pré-castriste, très présente aux États-Unis. Forbes et le développement MDR ou LOL au choix !

Une des curiosités de ce forum africain est la présente de deux Français dont on ne parle guère ; le premier est Bernard Kouchner qui a curieusement fait une réapparition soudaine dans les médias et dont les honoraires étaient infiniment supérieurs à ceux de ce pauvre Jean-François Copé puisqu'on se souvient qu'il avait touché d'Omar Bongo, dit-on, 400 000 € en 2004 pour un rapport d'une vingtaine de pages, ce qui met le record du prix de la page très au-delà de celui qu'avait établi Madame Tiberi. Le second Français, ou plutôt la seconde Française (quoiqu'elle soit d'origine belge) est Christine Ockrent qui, réduite aux maigres émoluments de France-Culture, ne dédaigne pas de faire des "ménages" pour les Américains, mettant ainsi à profit ses compétences linguistiques si rares dans le milieu journalistique français. Sa présence favorisera-t-elle, selon la thématique de la réunion "l'émergence des classes moyennes en Afrique", on peut en douter. Espérons pour elle que ses honoraires seront au moins égaux à ceux de Jean-François Copé. De toute façon on ne peut que souhaiter que l'émergence des classes moyennes en Afrique affecte, de ce fait, au premier chef, le Congo Brazzaville puisque cet Etat n'est qu'à la 142e place selon l'indicateur de développement humain du PNUD.

lundi 29 juillet 2013

Affaire DSKuzac

Pauvre Jaurès ! Pauvre Mendes-France ! Pauvres socialistes qui, dans le passé (et peut-être même dans le présent), ont cru à l'idéal socialiste ! On a pu dire "Autrefois, on mourrait pour la République, aujourd'hui on en vit!". On peut désormais ajouter que non seulement on en vit (et sur un grand pied) mais qu'en outre, on la vole! Que peuvent penser ces grands républicains (d'où qu'ils pensent) devant le spectacle que donnent deux des principaux hommes politiques de cette mouvance que, curieusement, leur proximité de comportements conduit à rapprocher en un mot valise "l'affaire DSK-uzac".

Ne revenons pas sur Cahuzac ! Il est probable que le Bourbon Comedy Club nous a donné, avec la seconde audition de Cahuzac, la dernière de ces représentations devenues, au fil du temps et des invités, si réjouissantes, du moins sur le plan dramaturgique. Il faut reconnaître que les choses allaient s'améliorant après la venue des hautes personnalités comme Pierre Moscovici ou Christiane Taubira qui avaient tenu leur rôle avec beaucoup de sérieux, mais de façon conventionnelle. Les prestations plus récentes, de Stéphane Fouks d'abord, puis de Cahuzac ensuite, ont été particulièrement remarquables.

On se prenait même à rêver d'une suite plus plaisante encore puisque, lors de la dernière représentation, plusieurs membres UMP de la Commission avaient réclamé, fort légitimement dans leur position, une confrontation, de toute évidence indispensable, entre Cahuzac et Moscovici puisqu'ils étaient, l'un et l'autre sous serment, en total désaccord sur la fameuse réunion du 16 janvier 2013, dont ce pauvre Jérôme Cahuzac n'avait pas gardé le moindre souvenir, en dépit de l'importance capitale qu'elle avait pour lui, puisqu'elle l'avait mis en présence, pour la première et seule fois, avec les plus hautes autorités politiques dont dépendait son sort. Le pauvre homme !

On se pourléchait les babines d'avance de pouvoir assister à ce nouveau show, d'autant que le rapporteur (PS) Claeys, devant ces demandes convergentes et raisonnables, auxquelles ne semblaient pas s'opposer les membres socialistes de la commission vu leur mutisme, nous avait laissé espérer un moment réjouissant. Toutefois, sans vouloir, comme on aurait pu l'imaginer, prendre une décision immédiate et souveraine, (la commission étant réunie, elle pouvait donc tout à fait le faire sur le champ), le rapporteur (et non le président) nous avait annoncé solennellement qu'il allait "faire des propositions" sur cette question.

Bernique ! La rue de Solférino et Monsieur Désir en ont sans doute décidé autrement et on vérifie une fois de plus le célèbre vers de Corneille : "Et le Désir s'accroit quand l'effet se recule" (et non "quand les fesses reculent", comme me le proposait mon facétieux Dragon 12!). Hélas, nous n'aurons donc sans doute pas la suite et nous ne pouvons que le regretter, vu la qualité des précédentes représentations.

On a ici l'illustration du fonctionnement de notre justice elle-même, dont la lenteur entraîne régulièrement sa condamnation par les instances européennes ; elle tient à ce que, dans une danse sur place, sans doute pleine à la fois de majesté et de grâce, elle est parfaitement inefficace, car quand elle fait un pas en avant, elle en fait aussitôt un autre pour reculer. En la circonstance, la prétendue "proposition" du rapporteur de la commission Cahuzac visait à en rester là, en créant un sentiment général de frustration et d'insatisfaction. Tout cela donne à penser que le beau et chevelu Jérôme a gardé du biscuit de ses fréquents passages aux photocopieuses de Bercy!

Pour l'autre grand socialiste, DSK, le 28 mars 2011, le parquet de Lille avait, sur la base des informations dont il disposait depuis deux mois, ouvert une information judiciaire pour « proxénétisme en bande organisée, association de malfaiteurs et blanchiment en bande organisée ». Le champ des investigations et les griefs s'étaient encore accrus dans la suite par la mention supplémentaire de « faux et usage de faux, abus de biens sociaux et escroquerie » au préjudice des sociétés auxquelles on avait fait payer toutes sortes de prestations, depuis la rémunération des prostituées, la location des chambres d'hôtels et surtout les voyages, parfois lointains, puisqu'il s'agissait de conduire les intéressé(e)s jusqu'en Amérique.

On avait donc cru un moment que les choses suivraient leur cours, mais une proposition de non-lieu est alors faite, pourtant sur les mêmes bases naturellement, par le procureur. Il n'en a finalement rien été et elle n'a pas été suivie par les juges. Toutefois, la notion de "bande organisée", pourtant centrale et évidente, a été supprimée des chefs d'inculpation, ce qui, je crois, fait passer de la Cour d'assises à la Correctionnelle! On reconnaît ici l'allégorie commune de la Justice : la balance pour peser les deux dossiers et le glaive pour couper la poire en deux !

Le détail des éléments recueillis et en particulier les conversations téléphoniques enregistrées ne laissent pourtant aucun doute sur le caractère d'organisation dans cette affaire ; dans tous les cas, il fallait même attendre que s'expriment les désirs de DSK, aussi bien sur les dates et les lieux que sur le cheptel retenu et les exigences de services formulées, pour que soient mis en place le dispositif et la logistique de transport du matériel.

Dans ces conditions il est donc bien difficile à DSK de plaider (comme d'autres... suivez mon regard) que tout cela été fait « à l'insu de son plein gré », bien que "en y réfléchissant", il admette qu'il peut se juger "naïf"!

On comprend toutefois aisément que lui-même ait pu être abusé, étant donné son charme irrésistible et le succès permanent qu'il a auprès de toutes les dames, qu'il s'agisse de journalistes débutantes qui viennent l'interviewer, de secrétaires, de collègues du parti socialiste ou même de femmes de chambre noires d'hôtel américain. Non seulement aucune ne résiste à son embonpoint prometteur, mais toutes le poursuivent et l'assiègent sans cesse, tandis que sa complaisance est sans limite.

Le charme de DSK est si puissant et si évident qu'on ne comprend pas que son ami Stéphane Fouks n'ait pas songé à en faire le George Clooney de quelques campagnes publicitaires qui auraient pu lui procurer de substantiels revenus. Tout indique, en effet, que DSK, ainsi que d'autres grandes figures passées du parti socialiste, est, comme dit le bon peuple, « près de ses sous » ; la moindre dépense qu'il parvient à éviter, dans quelque domaine que ce soit, double le plaisir qu'il peut retirer de la chose, ce qui explique son addiction toute spéciale aux plaisirs de la chair gratuits. Le pauvre homme !

La seule question, dans toute cette affaire, tient aux vrais mobiles de l'étrange générosité de ces hommes d'affaires et de ces policiers ; les premiers se montraient d'autant plus généreux que leurs complaisances se fondaient sur l'escroquerie. Tous les frais étaient assumés, en effet, par des sociétés qu'on escroquaient à coup de fausses factures. Que des hommes d'affaires achètent, aux frais de leurs sociétés, les services de politiques n'est pas chose très nouvelle, mais ils en retirent toujours des bénéfices. Quels pouvaient-ils être ici ? On le voit assez ! On pourrait donc espérer au moins que lorsque la justice est saisie d'une affaire pareille, où l'Etat même est en cause au plus haut niveau et où les faits apparaissent avec tant d'évidence, elle se montre inflexible et n'escamote pas le mode d'organisation de ces libéralités, alors qu'il y a là un témoignage irréfutable et accablant sur le fonctionnement de notre système politique, administratif et financier.

Qu'il s'agisse de scanners et d'I.R.M. dans un cas ou de galipettes et d'inflations (comme dirait Madame Dati) tarifées-gratuites dans l'autre, c'est bien la même réalité ignoble et consternante que nous découvrons sous les oripeaux de la politique et de la franc-maçonnerie.

Tout ça ne sent pas très bon et les mots ont une fois de plus l'initiative, fût-elle dans un facteur commun scatologique ! DSK- Cahuzac ou DS - caca -Huzac ?

samedi 27 juillet 2013

La loi Fioraso et l'anglais à l'université : "Much ado about nothing"

J'étais fermement décidé à ne pas revenir sur la loi Fioraso, dans l'attente de ses premiers effets et résultats qui, dans la torpeur universitaire estivale, ne semblent pas des plus encourageants, mais voici qu'en ce samedi matin 20 juillet 2013, Monsieur Alain Finkielkraut, avec son émission "Répliques" sur France Culture, a réveillé la bête. Il avait, en effet, choisi comme thème du dialogue qu'il dirige à ce moment-là (mais peut-être était ce une "redif." vu la saison) "l'anglais à l'université". Il faut dire que la discussion a été ce qu'elle devait être, c'est-à-dire sans grand intérêt. Elle opposait un journaliste, rédacteur en chef au service France des Echos, paraît-il spécialiste de la question, et un étudiant (polytechnicien me semble-t-il) qui devait être un des anciens élèves de Finkielkraut qui officie dans cet établissement.

La discussion elle-même a été ce qu'elle devait être, Finkielkraut y jouant le rôle de pseudo arbitre et déployant, dans cet office, le nationalisme linguistique qu'on peut attendre de sa part ; le journaliste lui était chargé de la défense de l'enseignement en anglais et invoquait, sur ce point, l'exemple des grandes écoles de commerce, tout en mettant les échecs et la mauvaise santé de notre commerce extérieur sur notre ignorance généralisée de l'anglais. Son adversaire, l'ancien brillant étudiant, alléguait, en revanche, la nécessité de garder au français sa place et de résister de toutes nos forces à la perfide Albion.

Bref, rien que de très banal dans ces argumentaires.

Le seul point d'accord, un peu involontaire d'ailleurs, entre les deux parties était la reconnaissance de la mauvaise connaissance que nous-autres Français avons de l'anglais, puisqu'en Europe, nous sommes, de toute évidence, juste après les Anglais eux-mêmes qui sont totalement monolingues, les plus mauvais en matière de pratique des langues étrangères. Les statistiques du ministère de l'éducation nationale nous indiquent, semble-t-il, que le niveau d'anglais des élèves du secondaire ne cesse de baisser. Quant aux enseignements donnés en anglais par des professeurs français dans les universités, (en économie et en management surtout), ou dans les écoles d'ingénieurs, ils sont d'une si mauvaise qualité linguistique que même les élèves de ces établissements ou les étudiants s'en rendent compte et trouvent quelque peu ridicules les maîtres qui s'essayent à leur donner des enseignements dans une langue qu'ils ne maîtrisent pas eux-mêmes. A un tout autre niveau, les cours d'anglais donnés dans le primaire par des professeurs des écoles incompétents, ne conduisent qu'à donner aux enfants de mauvaises habitudes articulatoires dont, dans la suite, les vrais professeurs d'anglais ont le plus grand mal à les débarrasser.

C'est tout à fait ce que je pensais et que j'avais moi-même dit dans un blog précédent, en soutenant qu'on avait pas lieu de craindre de voir les professeurs de nos universités se mettre à enseigner en anglais pour la simple et bonne raison que, pour la plupart, ils en sont totalement incapables, ce qui n'a rien ni d'étonnant ni de scandaleux.

Toutefois, dans ce débat, sur la question des étudiants étrangers, dont on se demandait s'ils continueraient à venir en France pour y recevoir des enseignements universitaires en anglais, j'ai été stupéfait d'entendre les deux intervenants tenir des propos qui témoignaient d'une totale ignorance des réalités universitaires internationales qu'ils évoquaient. À cet égard, ils ont en effet esquissé une comparaison entre les universités françaises et américaines, en n'évoquant d'ailleurs que les plus grandes qui sont peut-être les seules dont ils connaissent les noms et en se demandant si, suite à la loi Fioraso, les étudiants étrangers ne choisiraient pas plutôt les établissements américains, quitte à y recevoir un enseignement en anglais.

L'aspect qu'ils ont totalement occulté, pourtant essentiel et premier mais dont ils n'ont pas dit un seul mot, est tout simplement le prix comparé des études universitaires d'un côté et de l'autre de l'Atlantique. Alors que les études universitaires françaises sont à peu près gratuites (y compris, dans la plupart des cas, pour les étudiants étrangers), on ne saurait s'inscrire dans une université américaine digne de ce nom (même d'Etat, si l'on est étranger à l'Etat en cause) à moins de 40.000 ou 50.000 $ par an pour les seuls droits d'inscription.

Il est donc évident que ce facteur est essentiel et totalement prohibitif, même pour bien des Américains qui souvent s'endettent pour des décennies afin d'acquitter ces droits. Il faut inévitablement en passer par là, sauf si vous lancez le poids à 22 m, sautez 2,40 m en hauteur ou nagez le 100 mètres en moins de 48 secondes.

Si l'on ajoute qu'en France, bon nombre d'étudiants (en particulier venant du Sud ou du Moyen-Orient), sont de faux étudiants qui ne s'inscrivent à l'université française que pour obtenir le titre de séjour, le risque de l'incidence de quelques enseignements en anglais (de l'ordre de 2 % environ) sur le fonctionnement universitaire français n'a pas de raison sérieuse d'être pris en considération ; si la loi Fioraso pose des problèmes dans l'avenir, ils se situeront très certainement ailleurs.

Sur ce point précis du bilan de cette loi, le Sénat a proposé l'amendement suivant sous la forme d'un article 2 bis :
"Dans un délai de trois ans à compter de la promulgation de la présente loi, le Gouvernement remet aux commissions permanentes compétentes de l’Assemblée nationale et du Sénat un rapport évaluant l’impact, dans les établissements publics et privés d’enseignement supérieur, de l’article 2 de la présente loi sur l’emploi du français, l’évolution de l’offre de formations en langues étrangères, la mise en place d’enseignements de la langue française à destination des étudiants étrangers et l’évolution de l’offre d’enseignements en langue française dans des établissements étrangers.". Wait and see !

Much ado about nothing, c'est-à-dire, pour faire plaisir à Finkielkraut, "Beaucoup de bruit pour rien!". N'était-ce pas là un leurre pour détourner l'attention de questions plus importantes ?

vendredi 26 juillet 2013

Mali pré-électoral

Si vous voulez envisager, avec sérénité voire avec allégresse, la situation du Mali préélectoral, lisez donc l'analyse ou plutôt la peinture qu'en a faite, dans le JDD, le fringant général Grégoire de Saint Quentin (avec un nom pareil, comment ne pas voir le monde sous les couleurs les plus riantes ?), tout récemment nommé responsable des Forces Spéciales Françaises (ne ménageons pas les majuscules!) au Mali.

Quelques extraits choisis : " L’armée malienne a été défaite et ses matériels ont été détruits. Il faut du temps pour reconstruire tout cela dans un pays aussi vaste. [...] Nous ne pouvons pas parler de victoire militaire au sens où vous évoqueriez celle de 1945 sur l’Allemagne. Mais nous sommes dans une dynamique de succès militaires répétés que beaucoup auraient estimés inespérés il y a six mois.
Le calendrier de retrait est fixé par le président de la République: 3.200 hommes durant la période électorale [Il ne semble pas s'agir là du "retrait" mais bien plutôt du maintien, toutefois le deuxième classe que j'ai été ne va pas chicaner pour si peu le général de Saint Quentin], puis une réduction progressive et coordonnée à partir de la rentrée [de quoi ?] pour finalement atteindre environ 1.000 hommes en fin d’année. Un arrangement technique vient d’être signé avec l’ONU. Notre liberté d’action reste entière puisque nos troupes resteront sous mandat français".

C'est SAS revu par la bibliothèque rose ! Tout va pour le mieux dans les montagnes du Hoggar, même si la belle Antinea ne s'y baigne plus et si l'on n'y bivouaque plus guère sous la lune, comme au bon temps de Frison Roche.

Les Tamasheq, les "peaux rouges" du coin comme les Maliens mélanoderrmes du Sud, sont facétieux ; les enlèvements ne sont que des blagues qui se résolvent très vite dans la bonne humeur ; quant aux disparitions, elles ne sont qu'une forme locale du jeu du loup caché, bien ancré dans la tradition nationale.

Avec Grégoire de Saint Quentin, on renoue presque avec la grande tradition du roman militaire colonial dont le valeureux spahi et l'Homme bleu sont des figures majeure ; c'est aussi, ne l'oublions pas, dans le sable chaud du désert que le légionnaire prend cette bonne odeur qu'apprécient tant les dames, au moins dans les chansons.

Je n'en dirai pas davantage sur le sujet de peur de tomber sous le coup de la diffamation qui dans la législation française, fort sourcilleuse à cet égard, est punie avec la plus extrême sévérité. Je ne me hasarderai certes pas à publier pareils propos dans Le képi blanc qui est, on le sait, l'organe de notre valeureuse Légion Etrangère (je me couvre encore par un usage immodéré des majuscules), mais le mauvais esprit des blogueurs étant bien connu, je prends néanmoins le risque de cette introduction insolente.

Délaissant les vues lénifiantes de Monsieur de Saint Quentin, je trouve, en revanche, dans la presse malienne, des propos un peu différents.

Au départ, on a beaucoup critiqué le choix, apparemment irréfléchi, de la date de la campagne électorale de l'élection présidentielle qui coïncide avec le ramadan. On peut toutefois s'interroger pour savoir si c'était là une simple ignorance de la réalité locale ou, bien au contraire, un savant calcul pour essayer d'apaiser les esprits et de limiter au maximum les troubles qui pourraient résulter de cette campagne. Le jeûne, la chaleur, la fatigue, tout cela pouvait au contraire contribuer à empêcher la campagne électorale de prendre ici ou là un cours fâcheux. Il est en effet clair que le Mali comporte beaucoup plus de Musulmans (90 % au moins) qui observent le jeûne que d'électeurs qui sans doute ne seront guère plus de 20 %, quelques soient les conditions de déroulement de ce scrutin. Beaucoup d'observateurs s'accordent à penser qu'il est, en fait, difficile de concilier campagne électorale et jeûne du ramadan et que les manifestations de rue bruyantes avec de la musique, des cortèges, etc. sont, comme on pouvait le prévoir, totalement absentes. À part les meetings d'ouverture, on n'a même guère observé de signes de campagne électorale dans les rues de Bamako. De toute façon, en ce qui concerne le Nord et la région de Kidal, très rares sont les candidats qui s'y sont risqués (trois ou quatre au maximum) ; ils se sont bornés à des voyages-éclairs, destinés surtout à rendre hommage et à faire allégeance, non sans quelque calcul, aux potentats tamasheq locaux dont ils espèrent vaguement le soutien.

Un autre aspect de la campagne, dont la presse française ne parle évidemment pas, est le rôle des marabouts et sorciers de tous poils dans ce genre d'affaire. Il en est, en effet, des campagnes électorales comme des matchs de football et les politiques africains sont souvent tout aussi soucieux de appuis surnaturels que les dirigeants des clubs de football. On a donc toujours largement recours aux secrets et aux moyens occultes pour accéder au pouvoir comme, dans la suite, pour s'y maintenir. Djenné ( La cité des marabouts selon le titre de l'ouvrage de G. Mommersteeg) est le centre et le temple de ces pratiques. On y a vu converger, depuis des semaines, dit-on, beaucoup de candidats à la présidentielle, arrivés dans de grosses voitures aux vitres teintées ; ils ne venaient assurément pas là pour la célèbre grande mosquée ni pour le patrimoine architectural que l'UNESCO a inscrit au patrimoine de l'humanité.

À en croire certaines rumeurs, il n'est même pas sûr que ne perdurent pas des pratiques rituelles dont certaines comporteraient même, dit-on, des sacrifices humains pour se procurer certaines parties des victimes indispensables dans des pratiques magiques. Comme dans nombre de pays africains, de l'Est comme de l'Ouest, les albinos sont des proies que recherchent tout particulièrement les sorciers pour leurs pratiques rituelles ; ils ont donc tout intérêt à se planquer et surtout à numéroter leurs abattis, si j'ose dire, vu le prix du moindre morceau d'albinos ! Des disparitions inexpliquées pourraient avoir de telles origines. On comprendra que tout cela reste très discret, même si la permanence et le nombre des rumeurs à ce propos encouragent à leur accorder quelque attention. De toute façon, dans le Mali actuel, une disparition de plus ou de moins n'est pas pour inquiéter qui que ce soit. Quant à la place du maraboutisme plus classique et moins secret, une simple visite au "marché des sorciers" de Cotonou, au Bénin, haut lieu de ces pratiques, suffit à convaincre de leur pérennité et de leur succès.

En tout état de cause, une chose est sûre : les conditions de déroulement du scrutin du dimanche 28 juillet 2013 (absence de listes comme de cartes électorales, etc.), tant dans l'ensemble du Nord-Mali (et en France même...) que plus particulièrement dans la région de Kidal, sont telles qu'il est fort peu probable que ses résultats puissent être entérinés ; il est plus sûr encore qu'ils seront évidemment riches de motifs de contestations par tous ceux qui sortiront de cette élection dans des positions moins bonnes que celles qu'ils avaient espérées.

jeudi 25 juillet 2013

Bourbon Comedy Club : vers une fin grotesque ou le triomphe de Jean-Marc Ayrault ?

La plupart des séances d'audition du Bourbon Comedy Club, parfois nommé Commission Cahuzac, étaient réjouissantes par le ridicule des situations et des propos. On s'achemine sans doute vers un épilogue simplement grotesque, tout finissant en queue de poisson et le vainqueur étant sans doute Cahuzac lui même, fort des dossiers photocopiés à Bercy !

Pourtant, lors de la dernière audition de Jérôme Cahuzac et compte tenu de ses propres contradictions et de celles présentait sa version de la "réunion du 16 janvier 2013 avec celle qu'avait exposée Pierre Moscovici, on s'acheminait vers une ultime audition qui, en confrontant l'un et l'autre, ferait sans doute apparaître la vérité. La version amnésique de  Jérôme Cahuzac était d'autant plus insoutenable, ne serait-ce qu'au plan psychologique, qu'il avait dû reconnaître sa visite, aussi insolite qu'inopportune, à Bruno Bézard, à Bercy. Il y avait donc toute chance que la confrontation avec Moscovici, en mettant en évidence les mensonges de Cahuzac (devant la commission, donc sous serment) ouvre un nouveau volet dans cette affaire pour faux témoignage.
Plusieurs intervenants avaient d'ailleurs suggéré la nécessité de cette confrontation et le nul ne semblait s'y opposer. Le rapporteur, le PS  André Claeys avait laissé entendre qu'il ferait des "propositions" (et probablement dans ce sens croyait-on comprendre) pour faire apparaître la vérité. Sauf oubli ou omission de ma part, il n'a pas été question de faire venir Jean-Marc Ayrault devant la commission, ce qui simplifiait beaucoup les choses, puisque Pierre Moscovici avait déjà été entendu par elle.

Par ailleurs, son témoignage était inutile puisque Jean-Marc Ayrault avait déjà fait savoir publiquement que Pierre Moscovici disait la vérité à propos de cette réunion informelle qui s'était tenue le 16 janvier en marge du conseil des ministres.

On s'attendait donc à une solution de ce type. Coup de théâtre le lendemain, lors de la nouvelle réunion de la commission sur ces questions, avec seulement 18 membres présents sur les 40 qu'elle comporte (courageux mais pas téméraires !). La commission par dix voix (socialistes sans doute) contre huit ( UMP ?) refuse l'audition de Jean-Marc Ayrault, dont il n'avait absolument pas été question dans la seconde audition de Jérôme Cahuzac.

Il était évident, depuis le début, que la plupart des membres UMP cherchaient, assez stupidement d'ailleurs, à attirer l'affaire sur le terrain politique général et que, au fond, la question de Jérôme Cahuzac, assez claire, était à leurs yeux très secondaire ; la seule chose qui avait pu préoccuper les moins sots d'entre eux étant la morgue irritante de l'ancien ministre.

Christian Jacob, président du groupe UMP à l'assemblée, en tire la conclusion que si le Premier Ministre ne vient pas devant la Commission « ça veut dire qu'il a quelque chose à cacher et on est sans doute encore sur un autre scandale derrière cette affaire Cahuzac". Cette réflexion est évidemment stupide mais la question n'est pas là.

On est simplement en présence de l'habituelle sottise de beaucoup de nos hommes politiques. Je vais donc les éclairer et  leur donner quelques conseils, gratuits comme toujours, quoique, depuis l'audition de Monsieur Stéphane Fouks et de la révélation plus ancienne de quelques salaires de conseillers dans d'autres circonstances, on sache que le tarif mensuel du conseilleur politique est au minimum de 12.000 € par mois. Je ferai donc faire de considérables économies (je ne sais pas trop à qui d'ailleurs) en leur faisant quelques suggestions de bien meilleur aloi que leurs pitoyables "éléments de langage" (expression d'ailleurs incorrecte et dépourvue de sens !).

Rien pour Monsieur Jacob qui ferait mieux de retourner à ses labours. Je crois que l'attitude des socialistes comme celle de l'UMP est stupide et ne fait que le jeu des extrêmes c'est-à-dire de Mélenchon et de Marine Le Pen comme d'habitude. Laissons donc ce truisme.

Pour l'affaire Cahuzac; il n'avait jamais été question de faire venir Jean-Marc Ayrault mais Pierre Moscovici ; il fallait s'en tenir là, ce qui était la seule solution à la fois rationnelle, efficace et surtout définitive.

Vu la panique de Claeys en fin de séance, je suppose que les membres du PS (le courageux Désir en tête) ont sauté sur la sotte proposition UMP de convoquer Jean-Marc Ayrault (rien de pire que les imbéciles qui se croient géniaux) pour ne pas reconvoquer Moscovici et se donner la possibilité de refuser la venue d'Ayrault.
S'il se montre un peu astucieux en la circonstance, le seul bénéficiaire de toutes ces sottises comme du retrait de la commission des parlementaires UMP devrait être Jean-Marc Ayrault lui-même, s'il se montre assez habile.

Il doit, de sa propre initiative et à frans son de trompes, DEMANDER à être entendu par la Commission. Résultat des courses ?

Les membres UMP seront bien obligés d'y revenir, penauds, la queue comme l'oreille basses.

Le témoignage de Moscovici, qui prouve le mensonge de Jérôme Cahuzac (sous serment devant la commission) devient inutile car il sera avéré par un nouveau témoignage ; le parjure pourra alors être traduit en justice pour ses mensonges.

Enfin et c'est le plus intéressant pour lui, Jean-Marc Ayrault, qu'on présente toujours comme un mollasson, sans énergie ni idée, apparaîtra soudain comme le grand triomphateur dans cette affaire par son courage, sa volonté d'en finir et de faire se manifester enfin la vérité.

Bravo Jean-Marc Ayrault et qu'est-ce qu'on dit au Monsieur ?

mercredi 24 juillet 2013

Bourbon Comedy Club : "Il ne faut jurer de rien"

Hier, mardi 23 juillet 2013 à 17h30, au Palais Bourbon, représentation, spéciale et unique, de la comédie Il ne faut jurer de rien, avec dans le rôle principal, Jérôme Cahuzac, égal à lui-même dans la capillarité, la morgue et l'arrogance, mais qui, dans sa composition,  a désormais remplacé le refus pur et simple de toute réponse, devenu dangereux, par l'amnésie.

Certes il n'a pas réussi à faire sortir de ses gonds l'impavide président Charles de Courson dont l'infinie patience, le calme et la sérénité sont impressionnants, mais tout de même, en revanche, il est parvenu à mettre en colère deux parlementaires (de l'opposition il est vrai) Messieurs Fenech et Houillon qui lui ont carrément dit son fait, le second refusant même de lui poser des questions pour ne pas lui permettre de poursuivre le jeu d'obstruction qu'il mène depuis le début.

Il faut bien que je l'avoue désormais, je ne suis qu'un modeste avatar de Jérôme Cahuzac ; j'avais donc prévu sans peine, de façon précise, dans un précédent blog sur le sujet, la défense qui serait la sienne lors de cette seconde audition (cette "seconde" séance devenant désormais "deuxième" puisqu'on semble en prévoir une troisième !). Je me borne donc ici à rappeler ce que j'avais prévu, sans grand mérite je vous l'accorde :

"La question actuelle est de savoir si Cahuzac a été mis au courant de la procédure d'enquête lancée à son endroit début janvier 2013. Or, la déclaration de Moscovici a été sur ce point sans ambiguïté ; Cahuzac était, avec Moscovici lui-même, le Président de la République et le Premier Ministre le 16 janvier 2013 à la sortie du conseil des ministres et il a été informé, à ce moment-là, de la procédure engagée auprès de la Suisse, alors qu'il a prétendu, devant la commission, ne jamais avoir été mis au courant.
Comme cette information lui a été donnée à la sortie du conseil des ministres, on peut aisément deviner qu'il plaidera l'omission par malentendu et prétendra qu'il ne s'agissait pas d'une réunion mais simplement d'une conversation entre deux portes, après le conseil des ministres. Je veux bien confirmer par écrit cette hypothèse ; il est donc un peu inutile de réentendre à nouveau Jérôme Cahuzac sur ce point puisque je fournis ici l'explication qu'il avancera.
Si, au contraire on poursuit la procédure, ne faudra-t-il pas alors convoquer à nouveau devant la commission le ministre Moscovici, pour qu'il précise exactement le lieu et les conditions dans lesquelles cette information a été communiquée à Jérôme Cahuzac et ainsi de suite.
Tout cela coûte, Monsieur de Courson, contentez-vous de ma lettre et de mon hypothèse."

Tout était déjà dit dans ce billet ! L'amnésie prévisible de Jérôme Cahuzac a fait tourner l'audition à la séance de dictionnaire de l'Académie française. On y a beaucoup discuté sur la définition des termes.

Le sens exact et précis du verbe "organiser" par exemple, à propos de la rencontre entre avec le journaliste de Mediapart. Était-elle "organisée" par Stéphane Fouks comme ce dernier le prétend dans l'un de ses écrits ou par Cahuzac puisque c'est lui qui a fixé l'heure et le lieu, à défaut du programme et des intervenants?

Qu'est-ce exactement qu'une "réunion" ? Est-ce le rassemblement de quatre ou cinq personnes, seules dans une pièce et en toute discrétion, pour informer l'une d'entre elles de l'évolution d'une situation grave? Sans que la chose ait été clairement dite par Jérôme Cahuzac, une "réunion", à ses yeux, doit toujours comporter une convocation en bonne et due forme, avec le jour, l'heure et le lieu ainsi qu'un ordre du jour. Faute de quoi il oublie tout, même si l'information, de la plus haute importance, lui est donnée par le Président de la République en personne! Lui qui faisait sans notes des discours si arides de technicité ! Drôle de chose que la mémoire !

Je pense que cette intéressante discussion terminologico-dictionnairique aura lieu, à nouveau, lors de l'audition où seront confrontés Jérôme Cahuzac et Pierre Moscovici. J'espère qu'on leur laissera le temps de fourbir leurs arguments linguistiques sur la question.

Il ne faut jurer de rien. Le titre de cette pièce est aussi, si je me souviens bien, la dernière réplique qu'elle comporte et on pourra sans problème la rejouer lors de la dernière audition de la Commission Cahuzac car c'est évidemment la leçon qu'il faudra en tirer, même si les faux serments qui ont fleuri ne sont pas suivis des sanctions pénales qui s'y attachent.

De façon amusante, le cours des choses a fait que Jérôme Cahuzac a dû renoncer à la stratégie qu'il avait arrêtée et dont il a finalement utilisé que le début et la fin, sans plus de succès d'ailleurs dans un cas que dans l'autre.

Il est clair que la question centrale était celle de la "réunion / rencontre" du 16 janvier 2013  entre les principaux protagonistes de l'affaire, le Président de la République, le Premier Ministre, le ministre des finances Pierre Moscovici et Jérôme Cahuzac; Dans son audition du 23 juillet, ce dernier a cru habile de jouer sur la différence entre deux versions de la rencontre de ces quatre personnages, celle du livre de Ch. Chaffanjon, journaliste du Point et celle présentée par Pierre Moscovici.

En effet, le Point a jugé habile de jouer sur cette affaire pour faire la pub du livre, Jerôme Cahuzac, les yeux dans les yeux, en publiant l'extrait de l'ouvrage qui fait allusion à cette prétendue "réunion", alors que Cahuzac, fin juin, prétendait n'avoir jamais été informé de la démarche française. En fait, la seule différence entre les versions de C. Chaffanjon et P. Moscovici tient au lieu. Elle écrit en effet : "Alors, le mercredi 16 janvier 2013, en marge du Conseil des ministres, François Hollande et Jean-Marc Ayrault convoquent Pierre Moscovici et Jérôme Cahuzac dans le bureau présidentiel [souligné par moi] . Les deux têtes de l'exécutif réclament au ministre de l'Économie et des Finances de lancer une demande d'entraide à la Suisse. "Ils ont un sentiment d'inquiétude", assure un observateur très privilégié." P. Moscovici n'a pas indiqué de lieu précis, ne mentionnant que "la sortie du Conseil des ministres". Quant à "l'observateur privilégié", ce ne peut guère être que le successeur de Mr. Zabulon.

La stratégie de Cahuzac, d'emblée, était de tenter de déconsidérer l'ensemble des faits en prétendant fausse la version Chaffanjon comme nombre de d'événements relatés par ce livre, en ne contestant en fait que le lieu même des faits, pour laisser de côté la seconde version (celle de Moscovici) et jeter le doute sur elle, tout en se gardant bien entendu de mettre en cause son auteur ; la tactique était de feindre l'amnésie de ce qui n'est pas, à ses yeux, une vraie "réunion". Tout cela sent la ruse de "communiquant" non-conseiller à plein nez !

Je trouve que le président de Courson, au lieu de pinailler à l'infini sur ce prétendu oubli, aurait dû simplement souligner la totale invraisemblance psychologique de l'oubli d'un événement capital, puisque c'était la première et la seule fois que Cahuzac se trouvait en présence des trois personnages les plus importants de son affaire et que ceux-ci en profitaient pour lui donner une information tout à fait essentielle. À force de vouloir ménager Cahuzac, Charles de Courson oublie les aspects essentiels comme la visite, si brève qu'elle soit, qui est faite auprès du fonctionnaire du ministère des finances chargé de contacter UBS, alors que Cahuzac avait lui-même posé en principe la "muraille de Chine" entre l'administration et le ministre qu'il était encore! Ce point est tout aussi invraisemblable que le précédent et il est à peu près était totalement négligé comme le premier.

Il n'y avait évidemment aucune raison sérieuse de mentionner le livre sur la question, sinon parce qu'il présentait une version légèrement différente sur un détail de lieu de celle qu'avait donnée le ministre et qui est évidemment la seule qui peut faire foi.

Conscient de ne pas avoir était très bon sur cette affaire, Cahuzac a voulu finir en beauté (comme prévu et conseillé) et tirer sur l'auteur de ce livre la flèche du Parthe. Il a pitoyablement échoué dans cette entreprise puisque ce qu'il présentait comme EXEMPLAIRE, selon ses propres termes, des erreurs factuelles de cet ouvrage s'est révélée finalement VRAI ( la date de sa rencontre, pour le moins insolite et inattendue avec le ministre Eric Woerth). Il a finalement dû reconnaître publiquement sa propre erreur, alors qu'il prétendait faire de cette rencontre un exemple des fautes historiques de l'ouvrage qu'il avait dénoncées à plusieurs reprises. Le fait lui a même arraché le seul vrai sourire de cette séance !

"Il ne faut jurer de rien" certes, mais en plus, mieux vaudrait ne rien dire du tout ; c'est moins l'amnésie que la mutité que Jérôme Cahuzac aurait dû feindre lors de cette audition et on ne peut que la lui conseiller pour la troisième (une totale extinction de voix peut-être ?).

lundi 22 juillet 2013

Fouks off ! Le Bourbon Comedy Club.


A la Commission Cahuzac, qui s'apparente, de plus en plus, au fil des auditions, à un Bourbon Comedy Club, le spectacle est permanent sans que les sorties soient définitives, comme je l'ai fait observer dans un billet récent ; à la demande et dans l'attente générales, nous aurons donc, dans la semaine, une seconde audition de la vedette du spectacle. Tout donne à penser qu'elle sera à la hauteur de la précédente. On est, en effet, bien loin de l'affaire Dreyfus où, on s'en souvient, les questions ne devaient pas être posées, ici ce seront sans doute encore une fois les réponses qui seront refusées à la commission, non sans morgue, par l'intéressé lui-même. Toutefois, comme j'ai déjà fait une hypothèse et un pronostic sur les explications que Jérôme Cahuzac donnera sur la fausse vraie réunion du 26 janvier 2013 qui a eu lieu sans avoir lieu, puisqu'elle n'était pas une "vraie" réunion, je n'y reviens pas. Il se murmure que la galerie d'humoristes interviewés au Bourbon Comedy Club pourrait s'enrichir de Monsieur Bauer qui réunit, de façon si pittoresque et si heureuse, l'allure d'Oliver Hardy et la moustache d'Adolph Hitler. 

La nouvelle vedette du Bourbon Comedy Club a été, toutefois, cette semaine, Stéphane Fouks dont il faut dire un mot liminaire car l'homme est des plus discrets et, semble-t-il, volontairement ; sa notice du Who's Who est quasiment vide (on y mentionne à peine un DESS de droit et il s'y définit comme "directeur de société") ; il échappe aux filets de Wikipedia et il fuit les médias, même s'il semble, par ailleurs, les assiéger en faveur d'autres que lui !

S. Fouks, en trois quarts d'heure, le mercredi 17 juillet 2013, a fait un passage remarqué au Bourbon Comedy Club. Rien à en dire de plus que ce que contient l'excellent article donné à mediapart le vendredi 19 juillet par Mathieu Magnaudeix et auquel je ne puis que renvoyer avec chaleur et insistance. Je me contenterai ici, à partir de ce texte, de quelques éléments d'une sémiologie rudimentaire et légère, car je n'ai pas vu la prestation de Monsieur Fouks et c'est ce seul article qui est à la fois la source et l'origine de ce billet.

La photo qui l'orne est intéressante ; moins par l'air goguenard du héros (un prince de la com' comme SF ne peut être qu'intérieurement mort de rire, à la seule idée de jurer de dire toute la vérité et rien que la vérité !) que par un modeste détail vestimentaire.

En effet, le cadrage de la photo publiée fait qu'un doigt accusateur ( qui est en fait un micro moderne, donc réduit à sa plus simple expression quasi digitale) est pointé sur le bas de la chemise de S. Fouks qu'il n'a pas pris soin de faire entrer de façon parfaite, ou en tout cas adéquate, dans son pantalon ! Ce détail incongru ne risque-t-il pas d'obérer la validité des déclarations qu'il aura pu faire dans la suite? Peut-on prêter serment en pareil équipage ? Dans ce cas douteux, on peut imaginer qu'il l'ait fait exprès, donnant ainsi un équivalent vestimentaire discret à la fameuse restriction mentale que pratiquaient autrefois, en pareils cas, les Jésuites !

En fait, même si c'était là une prudence préalable, il n'a même pas eu à se montrer avare de réponses et, moins encore, à devoir opposer le refus d'obtempérer à ses interrogateurs, si constant chez J. Cahuzac, puisque les députés ont été extraordinairement peu curieux à l'égard de ses comportements et de ses rapports avec Cahuzac, se contentant de ses réponses évasives ou dilatoires, de toute évidence peu fondés. Il est vrai que Jérôme Cahuzac avait préparé le terrain pour Monsieur Fouks en assurant aux députés qu'il n'avait pas joué le moindre rôle dans sa communication, alors que mediapart disposait de l'enregistrement, fait "le 3 décembre 2012 à 20 heures 49" d'une longue conversation de S. Fouks avec Fabrice Arfi comme le rapporte, avec tous les détails, Mathieu Magnaudeix dans son article.

À dire vrai, la seule vraie curiosité de cette conversation entre Fouks et Arfi est que Stéphane Fouks y jugeait sobrement, selon ses propres termes, que : « Tout ça est de la couille en barre », ce qui mérite, à soi seul, attention, cet objet anatomique ne se présentant que fort rarement sous pareille forme.

C'est plutôt l'analyse des propos mêmes de Stéphane Fouks qui justifie sa présence dans cette galerie d'humoristes. S. Fouks est, en effet, on l'a vu et compris d'emblée, excellent dans tous les rôles de composition, essentiels dans son métier. Ainsi, pour n'en citer qu'un, celui de la modestie voire de l'humilité , une vraie violette sous la mousse! Il réussit très bien aussi dans des formes douces du travestissement léger de la vérité (n'allons surtout pas parler de mensonge!). Ainsi, comme Monsieur Jourdain rappelait volontiers que son père n'avait jamais été marchand de tissus mais qu'il se bornait à donner des étoffes à ses amis contre de l'argent, Monsieur Fouks ne conseille pas ni J. Cahuzac, ni quiconque ; sa seule fonction est, selon ses propres termes, de dire aux intéressés ce qu'ils doivent faire et comment ils doivent se comporter, ce qui est toute autre chose, vous l'aurez compris.

Si S. Fouks rivalise parfois avec Monsieur Jourdain, c'est toutefois dans le rôle du benêt qu'il excelle et, en l'occurrence, c'est dans l'imitation de Richard Virenque que Stéphane Fox est, de très loin, le meilleur ; il affirme ainsi sans rire, dans ce registre, : « Je me suis trompé de bonne foi ». Comment a-t-il pu résister, en plein Tour de France, à ajouter à une formule si heureuse le désormais fameux « à l'insu de mon plein gré"?

Bravo l'artiste, mais à nous prendre ainsi pour des imbéciles (sans parler de l'offense à la représentation nationale), permettez-nous de vous dire "Fouks off Stéphane !".

jeudi 18 juillet 2013

Commission Cahuzac : le spectacle est permanent mais aucune sortie n'est définitive


Le fonctionnement de la commission parlementaire consacrée à l'affaire Cahuzac est tout différent de celui des bons vieux cinémas permanents d'autrefois, où l'on précisait, à l'entrée, que si le spectacle était permanent, toute sortie était définitive.
Rien de tel ici, ce qui est quelque peu étonnant voire contradictoire, car, alors que les invités à témoigner dans cette commission le font sous serment, ils peuvent être sollicités pour une nouvelle audition, ce qui semble avoir pour but de les amener à modifier ou à corriger leurs premières déclarations.

Le point le plus remarquable dans le fonctionnement de cette commission est que son rapporteur et son président, issus de deux bords politiques différents, commencent à se prendre publiquement aux cheveux, alors qu'ils avaient semblé, jusqu'à présent, travailler dans la plus parfaite harmonie. La dernière déclaration du président De Courson montre qu'il est persuadé que François Hollande était au courant depuis le mois de décembre 2012, alors que son rapporteur Alain Claeys (faut-il préciser qu'il appartient au parti socialiste) est d'un avis contraire. Si ces deux autorités se crèpent le chignon ainsi et pour ça, il est à craindre que le bel ordonnancement de la chevelure de Monsieur de Courson s'en trouve fâcheusement bouleversé. Rassurez-vous les maquilleuses de France Télévision y mettront en bon ordre avant le début des séances.

Il faut dire que ce sont là les deux principaux héros des écrans (avec la personnalité interrogée par la commission), au cours de chacune des séances, car les plans larges y sont interdits dans la mesure où les membres de cette commission ne font pas preuve d'un zèle excessif dans la participation et qu'on n'y compte le plus souvent qu'un maigre tiers des quarante élus qui la composent. Les prises de vue qu'on y réalise rappellent beaucoup celles de l'Assemblée nationale, où le mercredi, quand à la télévision est la, les rares députés en séance se rassemblent frileusement autour de l'orateur du moment pour être saisis par les objectifs des caméras. Il en est de même à la commission Cahuzac et l'on évite ainsi le spectacle, un peu affligeant pour notre démocratie, qu'on avait donné dans les premières séances, où les quelques élus présents étaient clairsemés dans la salle et, pour la plupart, occupés à faire leur courrier ou à envoyer textos et SMS. Informés qu'ils sont désormais du programme établi par le président et son rapporteur, seuls ceux qui figurent effectivement sur l'agenda présidentiel prennent la peine de se rendre à la séance où ils auront à poser une question et donc à avoir les honneurs du petit écran.

Il faut bien dire d'ailleurs qu'on perd désormais très souvent de vue l'affaire elle-même et que, du côté de la droite surtout, évidemment, l'enquête elle-même disparaît au profit de la mise en cause de tel ou tel aspect de la politique du gouvernement qui n'a rien à voir avec elle.

Il est heureux que cette commission avance dans ses travaux à un train de sénateur (ce qui est bien normal !) car quoiqu'on y dépose sous serment, en évitant au mieux les questions gênantes, certains seront amenés à y revenir pour y faire de nouvelles déclarations qui, elles-mêmes, pourraient conduire à reconvoquer à nouveau tel ou tel témoin dont les précédentes déclarations auraient amené la réapparition de personnes déjà interrogées. On risque fort de n'en pas sortir, mais peut-être est-ce préférable ainsi ?

Sans rappeler les faits, disons que l'affaire Cahuzac s'est située, en gros, dans le premier trimestre de l'année 2013, entre le premier article de Mediapart qui en a marqué le début, le 4 décembre 2012, et les aveux inattendus de Jérôme Cahuzac le 2 avril 2013 ; il avait fort heureusement évité de les faire la veille car on n'aurait pas manqué alors de les prendre pour un poisson d'avril !

La question, qui fait débat désormais, n'est pas celle de savoir exactement quand le Président de la République et le Premier Ministre ont été informés et surtout y ont cru ; ils sont les seuls à le savoir vraiment et on ne peut guère imaginer que l'article de Mediapart du début décembre 2012 n'ait pas retenu l'attention des plus hautes autorités de l'État, même s'ils n'étaient pas en mesure de juger réellement de sa pertinence. On sait toutefois aussi, maintenant que les langues se sont déliées, que beaucoup de gens, au PS, étaient au courant des activités hautement rémunératrices du docteur Cahuzac. Elles n'étaient nullement dans les implants capillaires et les moumoutes mais, à une toute autre échelle, dans les ventes illicites et les pots de vin liés aux permis pour les scanners et les IRM

La question actuelle est de savoir si Cahuzac a été mis au courant de la procédure d'enquête lancée à son endroit début janvier 2013. Or, la déclaration de Moscovici a été sur ce point sans ambiguïté ; Cahuzac était, avec Moscovici lui-même, le Président de la République et le Premier Ministre le 16 janvier 2013 à la sortie du conseil des ministres et il a été informé, à ce moment-là, de la procédure engagée auprès de la Suisse, alors qu'il a prétendu, devant la commission, ne jamais avoir été mis au courant.

Comme cette information lui a été donnée à la sortie du conseil des ministres, on peut aisément deviner qu'il plaidera l'omission par malentendu et prétendra qu'il ne s'agissait pas d'une réunion mais simplement d'une conversation entre deux portes, après le conseil des ministres. Je veux bien confirmer par écrit cette hypothèse ; il est donc un peu inutile de réentendre à nouveau Jérôme Cahuzac sur ce point puisque je fournis ici l'explication qu'il avancera.

Si, au contraire on poursuit la procédure, ne faudra-t-il pas alors convoquer à nouveau devant la commission le ministre Moscovici, pour qu'il précise exactement le lieu et les conditions dans lesquelles cette information a été communiquée à Jérôme Cahuzac et ainsi de suite.

Tout cela coûte, Monsieur de Courson, contentez-vous de ma lettre et de mon hypothèse.

mercredi 17 juillet 2013

Politique et économie françaises : eau dans le gaz et gaz dans l'eau

Les politiciens nous prennent vraiment pour des imbéciles.

Vous aurez observé que j'ai employé ici volontairement le mot "politicien", dans le vrai sens qu'il a en français et qui est, le plus souvent, péjoratif ce qu'ignorent la plupart des gens qui usent de ce terme ; si l'on vise une dénotation pure et simple, il vaut mieux dire les hommes politiques, les femmes politiques ou, plus brièvement, les politiques.

Mais là n'est pas le sujet dont je veux traiter!

La commedia dell'arte politique à laquelle nous assistons en ce moment et qui a commencé bien avant l'éviction inopinée (surtout pour elle !) de cette pauvre Delphine Batho et qui se prolonge avec l'affaire du Tricastin tient essentiellement à ce qu'en réalité, le parti socialiste et les Verts d'EELV sont des ennemis naturels, puisque leurs électorats sont partiellement communs. L'alliance, que Martine Aubry a conclue naguère avec les Verts et qui leur accordait un nombre d'élus sans le moindre rapport avec leur poids électoral réel, avait fortement déplu à François Hollande (comme sans doute à Martine Aubry elle même), mais il avait été secrètement ravi sans doute d'avoir eu la chance de ne pas être obligé de la conclure lui-même, ce qu'il aurait bien été forcé de faire s'il s'était trouvé dans la même situation à la tête du PS.

Comme dit le bon peuple, il y a donc, clairement et depuis le début, de "l'eau dans le gaz" entre les socialistes et les Verts ; on ne comprend d'ailleurs pas qu'Hollande n'ait pas fait de Placé, la grande gueule de service, un sous-secrétaire d'Etat adjoint aux anciens combattants ce qui lui aurait aussitôt fermé la dite gueule.

En tout état de cause, le PS et EELV se tiennent, les uns et les autres, par la barbichette. S'il y a trop d'eau dans le gaz ou pire encore du gaz dans l'eau et que ça pète, ils n'arriveront pas à faire listes communes pour les municipales ; les socialistes risquent alors une lourde défaite et il en est de même pour les Verts, sans compter les postes de députés, de sénateurs ou de ministres auxquels celles et ceux qui les occupent n'ont aucune envie de renoncer, tandis que les autres Verts, qui rêvent simplement d'être califes à la place des califes devront s'asseoir sur leurs ambitions. On s'en tiendra donc inévitablement à des escarmouches dont cette pauvre Delphine Batho a fait les frais et cela d'autant que si elle était elle-même, en principe, socialiste, elle s'était elle aussi brouillée avec sa bienfaitrice d'antan, l'infortunée Ségolène qui n'est pas le meilleur appui au sein du PS.

Que voulez-vous ? La politique c'est comme ça ! Comme disait l'autre : "Ces choses-là sont rudes, il faut, pour les comprendre, avoir fait des études ». Et de préférence dans la promotion Voltaire de l'ENA.

Il y a donc de "l'eau dans le gaz" entre les alliés de la coalition au pouvoir et une partie de leurs différends vient curieusement de ce qu'on craint qu'il n'y ait un jour du "gaz dans l'eau !".

Ce titre m'est venu suite à la double considération de la chose politique française et de la résurgence de plus en plus fréquente de l'affaire du gaz de schiste. Un documentaire sur le sujet, "Gazland" a même été diffusé à la télé il y a quelques jours, à une heure de grande écoute. Je pense que ce n'était pas tout à fait par hasard. Très critique, il concernait essentiellement l'exploitation du gaz de schiste aux États-Unis. On y voyait, à de nombreuses reprises, des gens mettre le feu à l'eau qui sortait de leur robinet (car il y avait dans cette eau du gaz inflammable) et tout autant de responsables politiques ou industriels qui, tout en affirmant que ladite eau était parfaitement consommable, refusaient tous obstinément d'en boire la moindre goutte (ce gag a été répété à plusieurs reprises au cours du film).

On avait appris, de sa bouche même, quoiqu'à mots couverts, mais par ailleurs fort clairement, que Delphine Batho, ministre de l'écologie, avait été virée sur intervention de lobbys industriels favorables au gaz de schiste. Détail pittoresque mais fâcheux, on a appris, en cette même circonstance, que l'épouse de Monsieur Crouzet, patron de Vallourec, grande société productrice de tuyaux dans les domaines pétrolier, gazier et nucléaire, est, en fait, contre toute attente, le mari de Madame Sylvie Hubac, directrice de cabinet de François Hollande. Cette-ci, fort opportunément, ne porte pas le nom de son mari, quoiqu'ils soient mariés depuis trente ans et que la chose ne soit guère dans les habitudes françaises, surtout dans le milieu en cause et quand on n'est ni artiste ni auteur !

Au même moment ou à peu près, Arnaud Montebourg, le rebelle de service, a remis sur le tapis médiatique l'affaire du gaz de schiste, en demandant, non sans une solide dose de bon sens, qu'on "explore" (c'est le terme dont il use) la question au lieu d'interdire purement et simplement l'exploitation du gaz de schiste, sans même savoir de quoi on parle, comme le fait la loi Jacob de 2011 que conteste actuellement, en justice, une société américaine Schuepbach qui s'était vu accorder, auparavant, un permis d'exploitation qu'on lui a ensuite retiré (l'affaire va aller devant le Conseil constitutionnel). Des esprits chagrins pourraient noter et faire valoir que Monsieur Jacob, qui s'est surtout illustré dans le débat parlementaire sur les déclarations de patrimoine des parlementaires, en défendant un amendement qui visait à supprimer la pénalisation des déclarations « sciemment » erronées, texte qu'il dut finalement retirer, semble quelque peu lui, le représentant de lobbys agro-machin, puisqu'il a fait à peu près toute sa carrière pré politique au Centre national des jeunes agriculteurs.

Le problème est que, comme toujours en France, nous ne disposons d'aucune information sérieuse sur cette affaire ; la seule émission un peu intelligente et informée que j'ai pu voir sur la question était le "C plus clair" du 12 juillet, qui ,fort heureusement, s'est tenu en l'absence d'Yves Calvi (déjà en vacances chez son pépé), ce qui nous a dispensé de l'inévitable présence à l'écran de Christophe Barbier et des diverses plumes du Figaro. On a pu enfin avoir des informations de gens qui savaient de quoi ils parlaient au lieu de se borner à écouter les platitudes éculées des journalistes ignorants qui peuplent notre PAF.

Arnaud Montebourg prend donc des positions, dont certains s'étonnent, non sans candeur, qu'elles n'entraînent pas son éviction du gouvernement ; cette crainte est évidemment totalement infondée puisqu'il est clair qu'Arnaud Montebourg, Monsieur 17% aux primaires du PS, dit des choses que n'osent et ne peuvent nous dire ni François Hollande ni Jean-Marc Ayrault! En la circonstance, elles sont d'ailleurs l'expression du simple bon sens et j'ai personnellement tenu dans mon blog des propos quasi identiques depuis longtemps, en pensant qu'avant de se prendre aux cheveux sur la question de la fracturation des schistes bitumineux, on ferait mieux d'abord de faire un inventaire géologique sérieux des richesses dont nous disposons réellement, des bénéfices que nous pourrions éventuellement en tirer, des modes d'exploitation possibles (méthane ?) comme des risques qui pourraient s'attacher à cette fracturation et qui ne sont pas seulement celui de la pollution de l'eau, mais également celui de la dispersion dans l'atmosphère de gaz qui ne serait pas retenu dans le sous-sol comme dans l'exportation pétrolière et gazière traditionnelle.

Bien entendu pour informer l'Etat et orienter ses choix stratégiques, il faut avoir des informations et des données incontestables sur ces questions. Tout cela ne peut résulter que de programmes de recherche, sérieux et porteurs (on en cherche!); c'est là ce qui doit compter dans les décisions et les choix à venir et non pas l'avis ni des représentants des lobbies céréaliers ni d'hurluberlus, si verts qu'ils soient.

Eau dans le gaz ou gaz dans l'eau ? Les deux questions sont finalement plus liées qu'on pourrait le croire.

mardi 16 juillet 2013

Ingrid Betancourt et Sarkozy : bête à Bon Dieu ou bête de scène ?

Voilà déjà cinq ans qu'Ingrid Betancourt a été libérée par les FARC et on pouvait s'en croire débarrassé à jamais. Hélas non !

Ingrid, qui a divorcé dès 2009 (sans avoir jamais reparlé à son mari après sa libération !) est désormais très mal vue en Colombie pour avoir demandé à son pays 15 milliards de pesos en dédommagement de son enlèvement, dont les circonstances demeurent contestées (notre Nanard est un enfant de choeur à côté d'Ingrid, mais elle, elle s'est fait jeter, sans arbitrage favorable elle !). Vivant désormais à Londres, pour tenter de profiter du cinquième anniversaire de sa libération et donner un coup de main à son libérateur, elle n'a pas manqué de franchir le Channel pour venir faire une tournée promotionnelle sur les scènes médiatiques françaises ; elle espère sans doute ainsi ranimer un peu l'intérêt qu'on lui porte et justifier une réévaluation des tarifs de ses prestations.

Je me souviens qu'en 2009, j'avais quelque peu déplu à certain(e)s dans le blog que je faisais déjà, en ne participant pas avec assez de chaleur et d'émotion à la célébration de la libération d'Ingrid Betancourt.

J'en avais souligné la part de mystère, car celle qu'on avait montrée, au moment même de sa libération, sous le jour le plus sinistre, malade, amaigrie et dépressive, nous était apparue soudain en pleine forme physique et morale, passant en 24 heures de son enchaînement dans la jungle aux feux des projecteurs. On n'a jamais su quand avait eu lieu l'opération cosmétique.

Sont-ce les soins attentifs de son compagnon d'infortune (l'infirmier auquel elle a rendu hommage) ou sous l'effet d'un miracle comme elle le répétait alors? A l'époque, Ingrid se signait, à tout propos, comme un footballeur sud-américain ? Le fait-elle encore, faute de l'avoir vue, je n'en sais rien. Elle voyait en Dieu le premier de ces libérateurs miraculeux, juste avant le président Sarkozy qui, désormais, a doublé Dieu lui-même et est passé en première place. Dans sa tournée médiatico-politique en France, elle ne cesse de répéter qu'il est l'homme qu'il faut à la France) et cette promotion médiatique coïncide, toujours par miracle vous l'aurez noté, avec la réapparition publique de Sarkozy ! Petit renvoi d'ascenseur, non ?

J'avais été alors tout aussi réservé sur les conditions réelles de sa libération, en espérant que nous-autres Français n'avions pas été les seuls à mettre la main à la poche (les avions spéciaux plus la rançon qu'avait seule évoquée à l'époque la vilaine presse suisse). On aurait pu, au moins, partager les frais, puisqu'il y avait, entre autres, trois otages américains dans la même fournée libératrice ; la France, quoique fauchée, est, comme toujours et partout, grande et généreuse. J'avais aussi, comme bien d'autres, considéré que l'histoire d'infiltration des FARC était une vaste blague et que la fable de "l'infiltration" visait à "couvrir" les traîtres qui, bien entendu, n'avaient agi que contre espèces sonnantes et trébuchantes.

J'avais aussi fait remarquer, avec mon mauvais goût habituel, qu'un des membres les plus présents du comité d'accueil d'Ingrid était Florence Aubenas, autre ex otage chérie des médias, dont la libération avait tenu, elle aussi, mais dans un genre tout différent, du mystère. Dans ce dernier cas, le miracle était surtout ophtalmologique, car tous les médecins spécialisés s'étaient étonnés de voir cette journaliste affronter, sans problème ni protections la lumière du soleil, après avoir passé, à l'en croire, plus de cinq mois dans l'obscurité d'une cave. Il faut dire, et le cas n'est pas isolé, que dans le journalisme moderne, être pris comme otage est devenu assurément le meilleur moyen de promotion forte et rapide.

Mais Ingrid est aussi une bête de scène ; elle trouve toujours le bon geste et la bonne parole au bon moment, même si parfois elle "charge" un peu, comme elle l'avait fait alors, en prenant par exemple par la main le petit Nicolas dans un "remake" comique de la fameuse photo de Mitterrand et de Kohl, main dans la main, comme sur le chemin de l'école. Elle a réponse à tout, refaisant sans cesse les mêmes gestes et répétant les mêmes mots, tout en assurant à chaque média que c'est là l'exclusivité ou le scoop du siècle. Une vraie pro de la com', je vous dis !

Lors de sa libération, elle faisait déjà punaise de sacristie, alternant toutefois les déclarations d'amour à Dieu et au Président Sarkozy et sautant, sans problème et à pieds joints, de l'un de l'autre. Il faut dire qu'elle espérait à l'époque le prix Nobel de la paix et qu'on en était déjà à négocier le tarif de ses prestations. Un projet de film, conçu alors a été différé sine diem (« Ingrid chez les Ch’tis » ou « Bienvenue chez les FARC » ?)

Il faut dire et c'est là l'origine même de ce billet que j'ai découvert grâce à Yann Barthès et son "Petit Journal" sur Canal+ (sans doute en redif., vu la saison, car "Summer Closed"), il y a deux ou trois jours, que tout nos conférenciers à 25.000 ou 250.000$ figurent, en fait, dans une sorte de catalogue de la Redoute des conférences de "has beens" politiques, people ou autres, avec photos, tarifs et conditions à l'appui. Je n'ai pas pu trouver la référence de cet excellent catalogue car j'aurais aimé à le feuilleter puisque, dans la brève présentation qu'en a faite Yann Barthès, on a pu voir les binettes d'Hillary Clinton et ... d'Ingrid Betancourt

Cet ouvrage est extrêmement précis et détaillé ; vous pouvez y commander une conférence de Machin ou de Truc comme une paire de godasses ou un slip kangourou aux Trois Suisses. Rien n'y est omis. On vous donne les tarifs de l'intéressé(e), les prestations qui conditionnent sa venue (y compris la classe aérienne, pas pour elle ou lui, car le jet privé est sans doute recommandé, mais pour ses accompagnateurs), l'hôtel exigé et la qualité de la suite, le nombre des accompagnants, etc. Évidemment, les tarifs de Madame Clinton (comme ceux de Monsieur Sarkozy) ne sont pas ceux de la pauvre Ingrid Betancourt. À son sujet, on ne murmure que le modeste chiffre de 25 000 $ pour une conférence ; une misère pour une sainte miraculée, avec retour garanti sur investissement car Dieu vous le rendra, comme convenu, au centuple!
Toutefois, l'autre jour, dans les "Grandes Gueules" de RMC, où elle était, Ingrid a fini par avouer qu'elle vivait et finançait ses études (un doctorat en théologie à Oxford s'il vous plait) avec le seul profit qu'elle tire de ses conférences.

La "bête à Bon Dieu" (nom populaire de la coccinelle) portera-t-elle chance à son candidat déclaré ? En tout cas, ce n'est pas, comme dans mon titre "Ingrid, bête de scène ou bête à Bon Dieu" mais plutôt, vu ses récentes prestations médiatiques, "Ingrid bête à Bon Dieu de scène" ! Qu'est-ce qu'on dit Monsieur Sarkozy ?

dimanche 14 juillet 2013

Honni soit qui Mali pense (suite)

En ce jour de 14 juillet 2013, j'ai appris, faute d'avoir regardé le spectacle lui-même, que les soixante militaires maliens invités à Paris avaient défilé, comme prévu, en tête de l'armée française sur les Champs-Élysées. Je ne doute pas que le spectacle ait été réussi, même si l'information était un peu floue, comme toujours dans nos médias. On annonçait, en effet, en tête du cortège le lieutenant Élisée Jean Dao (avait-il été choisi pour son prénom ?), affecté à Kidal, alors que l'image que j'ai pu voir, un peu par hasard dans Maliactu.net faisait apparaître, sans le moindre doute, que Monsieur Dao, à en juger par son embonpoint et ses galons (qui me paraissent être les mêmes que dans l'armée française) était colonel et non pas lieutenant. Je ne doute pas que, surtout s'ils venaient effectivement de Kidal où on ne les aime guère, ces braves militaires maliens aient apprécié leur séjour parisien ; j'espère toutefois que, compte tenu de la modestie de leur solde et des tarifs des professionnelles parisiennes, on avait prévu des "bons de saillie" payés d'avance !

Bref il était bien naturel qu'on fît défiler aux côtés des soldats français, ces militaires maliens, puisque les deux ministres français compétents et concernés (affaires étrangères et défense) avaient été décorés par leurs homologues maliens dès le samedi, à l'Hôtel Meurice s'il vous plaît, des croix de Grand Officier de l'Ordre National du Mali (une chacun !), tandis que des généraux et colonels français devaient, en ce même lieu, se contenter du grade de Chevalier ainsi qu'une piétaille de civils français dont on n'a pas jugé bon de préciser les noms. J'espère que les choses se passeront tout aussi bien le lundi15 juillet puisque notre Président de la République, et c'est bien normal, doit recevoir les insignes de Grand-Croix de l'Ordre National du Mali des mains de Monsieur Dioncounda Traoré.

J'espère toutefois qu'à Kidal, et plus généralement dans le Nord du Mali, ces échanges amicaux franco-maliens ont été appréciés à leur juste valeur et que les fourbes Tamasheq n'ont pas profité de l'absence de ces braves militaires pour causer des troubles, hélas prévisibles vu la situation générale surtout à l'approche des élections présidentielles 

J'observe à cet égard qu'en dehors de ces festivités d'avant et après 14 juillet, la presse française a fort peu évoqué les événements du Mali et les élections du 28 juillet et que le Président de la République lui-même s'est montré fort discret et des plus vagues sur le Mali dans son intervention de l'Élysée.

La chose est d'autant plus inquiétante que l'on a pu constater, durant la semaine, quesi  le gouverneur de la zone s'était bien enfin rendu à Kidal en vue de la préparation de ces élections, il ne s'y était guère attardé et que son aller-retour depuis Bamako avait été des plus rapides. Tout cela n'est pas de très bon augure et je ne partage pas l'optimisme du chef d'état-major de nos armées, l'amiral Édouard Guillaud qui voit un succès dans "la reprise en main de Kidal", ce qui me paraît une approximation, explicable mais fâcheuse, de la part d'un amiral s'exprimant sur le Nord Mali.

En fait, si l'on examine les seules sources un peu fiables où le Mali est évoqué et qui sont constituées par les rares infos de RFI, qui n'est pourtant pas aux mains du MNLA, on y fait état de nombre de tensions et d'incidents qui se cristallisent autour du camp militaire situé à l'ouest de la ville et qui se marquent aussi dans de nombreuses manifestations des divers défenseurs de l'Azawad contre la présence de l'armée malienne. On s'est obstiné, suite à l'accord de paix de Ouagadougou, laborieusement signé le 18 juin entre l'État malien et le MLNA, à maintenir, contre tout bon sens, la tenue et la date des élections le 28 juillet alors, de l'avis général, c'est évidemment impossible pour de multiples raisons dont chacune est suffisante seule.

Les choses ne se sont pas sensiblement arrangées, loin de là, depuis l'entrée du contingent malien dans la zone de Kidal le 5 juillet 2013. Le MLNA prétend d'ailleurs que les termes de l'accord de Ouagadougou ne sont pas respectés, en particulier au plan de la représentation dans les troupes maliennes de soldats originaires du Sud et du Nord et en raison de la présence de nombreux partisans du fameux colonel Gamou, suspecté d'exactions multiples contre les "peaux claires" (les Tamasheq) et récusé par les représentants du MLNA. Tout cela n'est pas très favorable à la tenue d'élections, surtout si l'on ajoute ces incidents à l'absence de listes électorales fiables comme à la question de la distribution des cartes électorales dans toute la zone.

Dans de telles conditions, la seule solution raisonnable aurait été le report de cette élection où l'on ne sait même plus le nombre de candidats (28 ou 36 ?) mais l'engagement irrévocable de Paris comme de Bamako sur cette date a été tel que ce serait perdre la face que de s'y résigner.

vendredi 12 juillet 2013

Les langues en Europe

Depuis la victoire de la gauche, le problème des langues régionales et de leur fameuse charte européenne revient régulièrement dans le Club de Mediapart, sans que l'information sur le sujet soit toujours très bonne ; d'où cette petite méditation sur le passé.

La dernière grand messe sur les langues et le multilinguisme en Europe à laquelle j'ai pris part était les "Etats généraux du multilinguisme", qui se sont tenus à Paris, dans le grand amphithéâtre de la Sorbonne, le 26 septembre 2008. Il n'y manquait naturellement pas la fameuse Tour de Babel de Brueghel !
On se souvient, en effet, que le multilinguisme serait né de la volonté de Dieu de diviser les hommes qui parlaient auparavant une seule et même langue et qui avaient entamé une construction qui devait monter jusqu’au ciel, cette fameuse tour de Babel. Dans sa crainte de les voir unis pour contrecarrer ses propres desseins, Dieu leur imposa des langues différentes : «Confondons leur langage pour qu'ils ne s'entendent plus les uns les autres » (Genèse XI, 1-9).

L’amusant de la chose (ce Dieu , quoique par principe omniscient, est décidément bien imprévoyant) tient à ce que, dans la suite, un autre miracle lui fut nécessaire pour que la diversité des langues, que Dieu avait pourtant voulue, n’empêchât pas la diffusion du message divin par les apôtres. Comme Dieu n’en est pas à un miracle près, ce fut la Pentecôte ! Les apôtres « furent tous remplis du St Esprit et se mirent à parler des langues étrangères selon que l’Esprit leur donnait de s’exprimer »(AC ; 2,1).

Dieu ne s’intéressant pas spécialement à l’Union Européenne et son représentant personnel, notre Président, étant à cette époque très occupé par la crise financière américaine, on n’a pas jugé nécessaire de faire descendre les indispensables flammes sur la tête de chacun des 495 millions d’Européens; force nous fut donc, en la circonstance, de faire de notre mieux avec le multilinguisme et de nous en accommoder tant bien que mal. 
 

Le choix du terme « multilinguisme » est lui-même une prudence, sans doute involontaire, car on use aussi mais à tort comme synonyme, du terme « plurilinguisme », qui est plus inquiétant, puisque « plures » est, en latin, le comparatif de supériorité de « multi ». « Plures » veut donc dire « plus nombreux » et non pas « plusieurs », comme le croient les mauvais latinistes !

Cela dit, au sein même de l’Union Européenne, certains esprits pervers ne verraient pas d’un mauvais œil qu’on passât du « multilinguisme » au « plurilinguisme », puisque, durant ces Etats généraux, Monsieur Michel Angel Martinez Martinez, Vice-Président du Parlement européen, mentionnait que l’UE, qui a déjà à faire avec ses 23 langues « officielles » de l'époque (puisque chaque citoyen européen doit avoir accès à tous les documents officiels dans sa langue), pourrait se retrouver avec 62 langues, si l’on ajoute les langues « co-officielles » en faveur de la reconnaissance desquelles existe une revendication. On ne sait guère d’ailleurs où s’arrêterait ce mouvement, puisque, si les Catalans peuvent faire valoir qu’il y a, en tout cas, selon leurs propres chiffres, autant de catalanophones que de néerlandophones, on est plus embarrassé lorsqu’il s’agit de l’auvergnat ou du savoyard !

Un mot au passage sur la fameuse "Charte européenne des langues régionales ou minoritaires" de 1992 ; elle est, à l'origine une initiative du Conseil; de l'Europe et même, pour être plus précis et selon les meilleures sources, du "lobby austro-hongrois", ce que confirme d'ailleurs certains de ses articles.

Les langues concernées par cette convention sont les langues traditionnellement employées par les ressortissants des groupes ethniques d'une partie d'un État européen. Elle s'applique donc essentiellement aux langues parlées par une minorité linguistique de l'Etat en cause: Les langues "régionales" sont parlées dans des zones déterminées de cet Etat, comme le corse en Corse, tandis que les langues "minoritaires" sont utilisées, sans territorialisation précise, par des minorités linguistiques importantes implantées dans l'Etat, ce qui est le cas, par exemple, de l'allemand au Danemark. En revanche, les langues des immigrants récents venus d'États non européens (comme l'arabe ou le turc), ainsi que les "dialectes" locaux ou "patois" sont exclus.

De telles dispositions confirment le rôle du "lobby austro-hongrois" dans un tel texte, qui pose par ailleurs des problèmes socio-démographiques mais surtout linguistiques. en effet, sur ce dernier plan, rien ne distingue une "langue minoritaire" d'un dialecte ou d'un patois et on connaît la formule si pertinente selon laquelle un patois ou un dialecte avec une armée et une marine!

Tout cela est naturellement assez discutable, comme l’a montré la suite de l’affaire, en France en particulier. Lionel Jospin a été tenté un moment de la signer en choisissant les 39 articles indispensables parmi les 98 qu'elle offre. Toutefois si la France a donné un accord théorique préalable à ce choix en mai 1999,
depuis cette date, elle n'a pas ratifié la Charte ; elle ne s'est donc pas engagée à appliquer ces dispositions et ne figure pas parmi les Etats signataires.

Certains politiques et même des institutions ont cru ingénieux de tenter d’ébranler par là le vieux concept d’Etat-Nation (jugé antagonique de certaines conceptions de l’Europe) et de favoriser l’émergence d’une « citoyenneté européenne », en jouant les langues régionales contre les langues nationales ou, si l’on préfère, les langues « co-officielles » » contre les langues officielles.

Ces Etats généraux de septembre 2008 ont été surtout marqués par deux ou trois tendances lourdes ou faits majeurs qui, sans avoir été voulus, ont illustré quelques aspects majeurs des problèmes linguistiques européens.

D’abord, la volonté pour ne pas dire l’exigence, que les intervenants s’expriment dans leur langue, a fait que qu'un très performant (et sans doute très coûteux) système de traductions simultanées en huit langues a dû être mis en place. En dehors des langues de l’Europe de l’Ouest, les seules langues de traduction étaient le polonais et le roumain. Cinq langues romanes contre trois langues germaniques ou slaves, les PECO et le "lobby austro-hongrois" auraient eu là quelques raisons de se plaindre !

Rares exceptions au principe qui voulait qu’on parlât dans la langue du pays qu’on représentait. La plus heureuse fut le brillant ministre de la culture du Portugal, José Antonio Pinto Ribeiro. Ce dernier s’est plaint que, contrairement à la présentation idyllique du multilinguisme européen, il lui était souvent impossible de s’exprimer en portugais. Il a d’ailleurs, en la circonstance, parlé en français, puisque, comme il l’a confié en commençant, sa langue première, est curieusement, l’allemand. Bel exemple de cette « citoyenneté européenne » dont on rêve. Autre exception moins notable, Catherine Velissaris, qui avait parlé en français et non en grec, sans toutefois juger utile de préciser qu’elle est elle-même d’origine française !

L’absence quasi totale de l’anglais, dont chacun sait qu’il domine largement dans les institutions européennes, a été le trait le plus marquant de cette manifestation ; les seuls intervenants à user de cette langue étant, pour des raisons différentes mais sans intérêt ici, des Allemands ! Un seul intervenant anglophone, de langue première anglaise, sur une trentaine d’orateurs prévus, cela sentait fort l’ostracisme larvé et me rappelait ces clubs de tennis du Sud, où parmi les membres, tous blancs, on note toujours un noir, pour prévenir toute suspicion de racisme !

Le plus comique a été la sempiternelle question du coût du « multilinguisme institutionnel » européen. Il a été traité par Michel Angel Martinez Martinez, Vice-Président du Parlement européen, et donc bien placé, en principe, pour connaître la vérité des chiffres qui ne sont pas toujours faciles à se procurer et même à établir, surtout quand on veut avoir des précisions sur les modes de calcul. Pour lui, les choses sont simples. L’interprétation et la traduction coûtent à l’UE 100 millions d’euros par an. Il a même précisé, pour être concret, 2,2 euros par citoyen de l’Europe, soit à peine plus que le prix d’un café en Espagne !

Ce chiffre a été repris dans la suite sans que nul ne semble s’en étonner et moins encore le contester. Deux constats pour conclure.

Le bistrot espagnol où Monsieur Michel Angel Martinez Martinez, Vice-Président du Parlement européen, va boire son petit noir doit connaître le nom et la situation de son client pour le lui faire payer 2,2 euros, quand le prix courant est de 1,5 euro!

Passons sur ce détail! On a pu constater toutefois à écouter ce même Monsieur Michel Angel Martinez Martinez, Vice-Président du Parlement européen, qu’à l’heure de la calculatrice électronique, plus personne ne sait compter mentalement. En effet, si l’on admet, et comment faire autrement, que la population européenne est d’environ 500 millions (très précisément mais ce chiffre, est sans doute dépassé, 494.296.878 habitants), à raison de 2,2 euros par habitant, le coût est non pas de CENT millions comme il le croit, mais de MILLE millions d’euros, c’est-à-dire un MILLIARD d’euros!

N’est-il pas un peu imprudent pour l’Europe de confier des fonctions si éminentes à des gens qui ne savent même pas faire une multiplication si élémentaire ? Plus grave encore, comment une assemblée, si distinguée et en un lieu si illustre, a-t-elle pu entendre, sans réagir et sans que nul n’intervienne, pareille incongruité ?

jeudi 11 juillet 2013

Françafrique ou AfroFrance

À lire Mediapart du 10 juillet 2013, après le jugement dans l'affaire Mediapart-Bettencourt, qui a soulevé une indignation, nationale et internationale, aussi légitime qu'unanime, on est tenté de conclure que, si la Françafrique est finie, comme on nous le répète, nous sommes désormais dans l'Afro France, car notre pays va, dans le domaine des affaires, au-delà même de ce que l'on peut observer dans les républiques bananières et les dictatures du Sud.

Deux articles en particulier m'ont amené à introduire ce concept d'Afro France qui me paraît convenable pour décrire la situation de notre pays.

C'est, d'une part, celui de Laurent Mauduit qui nous a fait un compte rendu de "Ce qu'a dit Bernard Tapie pendant sa garde à vue", à croire qu'il s'était changé en souris pour la circonstance (je parle de LM et non de BT en dépit du peu de mémoire du second). Ce qu'a dit Bernard Tapie est à lire dans cet article, toutefois ces propos sont infiniment moins importants que ce que Tapie n'a pas dit !

En effet, à toutes les questions importantes qui lui étaient posées, Nanard avait perdu jusqu'au moindre souvenir des faits sur lesquels on l'interrogeait, des rencontres qui avaient eu lieu, des réunions auxquelles il avait participé comme des déjeuners ou des dîners de travail qui l'avaient amené à rencontrer les principaux personnages de l'entourage élyséen voire même, plus étonnant encore, et à diverses reprises, l'avocat.... de la partie adverse !

Se développe désormais chez nous une culture légale du silence! Tapie n'a pas affecté, dans sa garde à vue, comme il aurait pu le faire la morgue d'un Jérôme Cahuzac qui, à chaque question ou presque, rétorquait avec arrogance qu'il ne répondrait pas à cette question. Bernard Tapie lui s'est cantonné, en quasi permanence et profil bas, dans le rôle de l'amnésique pur et simple devant toutes les questions gênantes.

Je trouve que, faute d'obtenir les réponses qu'ils souhaitaient, ses interrogateurs auraient pu, devant une si évidente et constante mauvaise volonté, certes mettre légalement fin à la garde à vue de trois jours mais boucler Nanard lui-même vu son refus obstiné de répondre à toutes les questions importantes qui lui étaient posées.
L'autre article de Mediapart qui, dans un genre différent, m'a beaucoup amusé dans le numéro du 10 juillet 2013 est celui de Michel Deléan intitulé "Quand Pierre Esnouf réclamait 18 milliards à l'État".

Cette affaire de l'arbitrage Tapie est désormais, en dépit de l'amnésie générale des intéressés, claire, dans sa conception comme dans son montage et son contenu, même si chacun se dérobe ; on se doutait depuis longtemps qu'il y avait là une embrouille politique et il fallait bien que Nicolas Sarkozy fut peu certain de sa victoire en 2007 pour s'offrir l'appui misérable de Bernard Tapie dans l'élection présidentielle ! Mais après tout il y a peut-être des choses que nous connaissons pas (Cécilia ?) et surtout finalement tout cet argent ne sortirait pas de sa poche et, par conséquent, peu lui importait le prix à payer.

En la circonstance, ce qu'il y a de plus intéressant dans l'article de Michel Deléan est un aspect annexe de la fumeuse affaire Bucioli ; elle se situe dans la période 2005 2010, donc précisément au moment du fameux arbitrage. Une des leçons de tout ça est que, dans un souci d'économies, on devrait s'abstenir de donner des retraites aux hauts magistrats qui font dans l'arbitrage, puisque, quand ils cessent leur activité, elle semble devenir alors infiniment plus rémunératrice que leur activité professionnelle passée, si l'on en juge par les émoluments de 330 000 € pour une affaire comme celle qui est en cause. Une pauvre retraite de 5000 € est véritablement inutile et même ridicule pour des gens dont les simples conseils peuvent être vendues à de tels prix et sans que l'État intervienne. Je croyais naïvement qu'une retraite de fonctionnaire ne pouvait être cumulée avec une autre activité, surtout de cette nature et de cette importance.

Coïncidence admirable : la somme que pouvait espérer Monsieur Estoup figure le texte, extrait de l'article de Michel Deléan, que je reproduis ci-dessous
"Selon la convention d’honoraires que nous publions, Pierre Estoup a reçu une provision  de 15 250 euros sur des honoraires fixes de 22 875 euros hors taxe, mais il se verrait – surtout – attribuer un « honoraire de résultats » de 10 % jusqu’à 4 milliards d’euros (soit 400 millions tout de même), et de 5 % au-delà de cette somme..."
"400 millions d'euros" ?

Ce chiffre ne vous rappelle rien ? 400 millions d'euros paraît être l'unité de compte de Monsieur Estoup, puisque c'est exactement la somme que l'arbitrage qu'il a préparé devait attribuer à Bernard Tapie. Ce magistrat en retraite se serait-il trompé dans ses écrits et aurait-il confondu les deux affaires ou réclame-t-il systématiquement 400 millions d'euros dans toutes celles dont il a à s'occuper, que ce soit pour lui ou pour un autre ?