Depuis huit jours au moins Jean-Jacques Bourdin sur RMC nous bassine avec l'interview qu'il va faire, ce jeudi 8 mars 2012, de Nicolas Sarkozy, candidat à la présidence de la République. Hier encore, il nous faisait espérer un entretien musclé (autre chose que ce qu'on a sur les divers médias si complaisants) avec des questions qui ne permettraient pas à l'interviewer de se dérober, comme le font la plupart des autres journalistes. Bref comme, on allait voir ce qu'on allait voir!
Bernique ! En fait, on n'a rien vu du tout. Le candidat nous a resservi les mêmes plats réchauffés, ressortant les fiches qu'il lit à chacune de ses interviews et qu'il avait servies déjà sur France2, en particulier à François Lenglet et à Laurent Fabius, avec les mêmes chiffres qu'il tirait de son escarcelle après avoir asséné avec force que tout ce qu'on lui présentait était faux. Jean-Jacques Bourdin est pourtant un collègue et un grand ami de François Lenglet avec lequel il travaille à B.F. M.TV/RMC, où les bruits sarkoziens d'augmentation de la fiscalité des entreprises, si flous qu'ils soient, ont semé ce désordre dans le landerneau du grand capital. François Lenglet, taxé d'"imposteur" par Sarkozy à France2, aurait pu briefer un peu son ami, l'intrépide Bourdin, puisque les chiffres du candidat-président étaient exactement les mêmes que le mardi, aussi bien sur le chômage que sur la croissance du pouvoir d'achat. Les uns et des autres démontrent que, comme tout le monde le constate chaque jour en France, le pouvoir d'achat ne cesse de croître tandis que le chômage diminue !
Le moment le plus drôle de cet interview a été celui où Nicolas Sarkozy, essayant de solliciter l'approbation de Jean-Jacques Bourdin, a provoqué chez ce dernier une retraite paniquée ; elle s'est exprimée en une plainte déchirante, aussi douloureuse que déontologique : « Ne me prenez pas à témoin !". Voilà ce que manifestait Bourdin dans la terreur de devoir approuver ou désapprouver une déclaration de celui qu'il avait pourtant annoncé comme devant être la victime de ses assauts sans concession. Tu parles!
L'avantage de ce type d'entretien est, en principe qu'on peut prétendre posées par les auditeurs les questions qu'on hésite à formuler soi-même. C'est ainsi que RMC a bénéficié d'un scoop, refroidi depuis des semaines, le candidat à sa propre succession ayant déclaré son abandon de la politique en cas d'échec. "Pays de merde!" comme disait l'autre!
La grande question du jour dans toute notre presse nationale, en cette "Journée de la femme" où l'on constate aussi une baisse du nombre des accidents de la route en février, est, dans cette habile combinaison des thématiques qui est désormais le must du journalisme, celle de savoir si les femmes conduisent mieux ou plus mal que les hommes.
Vaste question et qui mérite tout l'intérêt de la France alors que, en ce même jour, se joue une autre partie dont, en revanche, personne ne parle. Il s'agit pourtant du sort de la Grèce et sans doute, au-delà, celui de l'Europe puisque c'est aujourd'hui même que les choses doivent être tranchées.
Tonneau des Danaïdes ou rocher de Sisyphe ?
La Grèce en qui l'on voit, sans grande raison au fond, la mère de la démocratie (car l'Athènes du Vè siècle était une drôle de démocratie!) est plutôt celle de mythes qui sont autant de métaphores.
C'est en effet aujourd'hui que doivent être prises par ses créanciers des décisions définitives sur la dette de cet Etat clairement insolvable. Je n'ai pas le talent de Gaël Giraud, mais on peut se reporter à mes précédents blogs où j'ai longuement cité ses lumineuses explications! En gros et avec mes mots, la question majeure est de savoir si les créanciers voudront bien sacrifier sur l'autel grec une grande partie de leurs créances actuelles. Il leur faut en effet aujourd'hui renoncer à une partie de ces créances sur la Grèce, sans que soit exactement fixé le montant de ce sacrifice qui devrait se situer autour de 70 %. En d'autres termes, si la Grèce vous doit 100 €, en cas d'accord pour 90% de l'ensemble de la dette grecque, elle ne vous en devra plus que 30 euros, étant entendu que seront réaménagés aussi les taux d'intérêt et les délais de remboursement.
Le problème est qu'il faut que les créanciers se manifestent en quasi-totalité et donnent leur accord. La tentation est donc grande donc pour certains d'entre eux de ne pas se manifester et de laisser les autres déchirer leurs créances, tandis qu'eux-mêmes garderaient les leurs. Comme écrivait le sage César (il ne s'agit plus de l'Antiquité gréco-romaine mais de Pagnol et de Marius) , quand son fils Marius était occupé à des recherches océanographiques qu'il jugeait dangereuses : « Quand ce sera trop profond, laisse un peu mesurer les autres ! » Le tout avec l'accent marseillais bien sûr.
L'heure est grave et décisive puisque si l'on arrive pas à un très fort pourcentage (90% je crois) de créanciers qui acceptent de leur plein gré (avec le bras un peu tordu toutefois) la réduction de leurs créances, la Grèce sera en défaut de paiement c'est-à-dire en faillite avec les conséquences que cela peut avoir à la fois sur la Grèce (ce qui ne préoccupe guère beaucoup de gens), mais aussi sur l'euro et l'Europe puisque le fameux "plan de sauvetage" tomberait, si je puis dire, à l'eau!
Si la Grèce est mise en défaut de paiement, donc en faillite, ceux qui en ont feront alors jouer les fameux CDs dont Gaël Giraud nous a récemment expliqué les subtils mécanismes et Jean rira tandis que Jean pleure! La presse française s'en fout clairement et n'est même pas au courant, on l'a vu, mais que se passe-t-il dans les salles de marché et dans les hautes sphères de la finance? A-t-on mis le champagne au frais ou prépare-t-on les mouchoirs ?
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