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mardi 24 septembre 2013

De Marcel Proust à Tony Parker.

Mon billet d'avant-hier « Marcel Proust, le cannibale drôle » m'a ramené au temps de ma jeunesse et, hier, dimanche 22 septembre 2013, la finale du championnat d'Europe de basket également puisque ma jeunesse a été occupée, pour l'essentiel, par les études et le sport. Il y a donc moins loin qu'on pourrait le croire, pour moi du moins, de Marcel Proust à Tony Parker.

En dépit du maintien obstiné de l'article de J. Dubois en première page de MDP, je maintiens ce que j'ai dit de la relation établie entre Marcel Proust et Jean Cocteau, avec, tout de même, la satisfaction d'avoir informé la critique "littéraire" de MDP qu'en dépit de ce qu'en pensent Messieurs Dubois et Arnaud, le faux bourdon, auquel ils assimilent ce pauvre Cocteau, ne fait pas de miel et n'a pas de dard.

Pour en venir maintenant au basket et à Tony Parker, dit "Tipi", basketteur aussi talentueux qu'homme d'affaires avisé, j'avoue être confondu par l'indigence des commentaires de journalistes sportifs à qui un chauvinisme aveugle et forcené tient lieu de compétence. Mais, après tout, ils ne sont pas plus nuls que nos journalistes politiques et certains, et non des moindres, sont même passés du premier emploi au second, l'inverse étant plus rare !

Le match de finale, programmé au tout dernier moment, car tout le monde avait prévu une neuvième défaite de la France contre l'Espagne, a été retransmis sur Canal+, ce qui a été pour cette chaîne un choix inattendu, car toute la semaine, on avait fait la publicité du "classico" français entre l'émir qatari et le milliardaire russe qui se réalise, au plan sportif, dans l'affrontement entre le PSG et Monaco. Choix cornélien pour Canal+, puisque les deux rencontres se déroulaient en même temps et qu'il a fallu les retransmettre l'une et l'autre sur deux chaînes de Canal, différentes fort heureusement.

Sur Canal+, J. Monclar ayant claqué la porte pour l'or moyen oriental, le spécialiste de renfort était George Eddy, qui hante les couloirs de cette chaîne pour y commenter les matchs de la NBA depuis je ne sais combien de décennies et qui cache sa calvitie et abrite son accent américain sous une casquette ornée d'un écusson tricolore. Il est ce qu'il est, mais il connaît assurément mieux le basket que le "journaliste-sic" qu'il était chargé d'assister et qui est mériterait de se nommer Monsieur Causette, car cette orthographe correspond très exactement à la nature même et à la portée de ses propos.
Il ignore tout de ce sport et l'a démontré durant la quinzaine qu'a duré ce championnat d'Europe que la France a gagné contre toute attente. Elle avait déjà perdu, au stade des poules contre la Lettonie et surtout elle n'aurait jamais dû gagner la demi-finale contre l'Espagne. Les Espagnols, qui dominent le basket européen, ont fait preuve, à l'occasion de ce match, d'une grande arrogance, laissant sur la touche et même dans les tribunes, leur meilleur pivot, Pau Gasol, des Lakers de L-A et habitué du All Stars Game, le réservant pour la finale, en pensant sans doute ne faire qu'une bouchée de l'équipe française.

L'équipe espagnole a perdu de justesse la demi-finale, après prolongation, car non seulement elle s'était sottement privée de Pau Gasol, mais, comme la plupart des autres équipes, elle n'a pas su résoudre le problème que pose Tony Parker.

Tony Parker, qui paraît un garçon fort intelligent, joue aussi en NBA (aux Spurs) et il y tient une place très éminente dans une compétition qui n'a pas grand-chose à voir avec notre championnat français. J'incline à croire que Tony Parker envisage de revenir en France prendre sa retraite et comme il a investi dans le basket français (il est actionnaire de l'ASVEL qui en fut longtemps le fief essentiel de ce sport), il s'intéresse de près au basket national et est l'élément majeur de l'équipe de France depuis plusieurs années.

C'est assurément un excellent joueur, un remarquable passeur mais qui a un style un peu monocorde toujours fondé sur le dribble et les pénétrations, ce qui devrait inciter les coaches des équipes qui affrontent l'équipe de France à réfléchir un peu plus à la stratégie qui permettrait le contrer. Ce brave Monsieur Causette, dans sa nullité sportive, s'étonnait dimanche, au début du dernier quart-temps, de constater que plusieurs joueurs de l'équipe de France avaient marqué chacun, contre toutes leurs habitudes, une douzaine de points, alors que Tony Parker n'en avait marqué que quatre ou six je ne sais plus et cela n'a pas d'importance. Le pauvre Monsieur Causette ne comprenait pas, de toute évidence, que si ces trois ou quatre joueurs avaient marqué autant, c'est précisément parce que Tony Parker, assez malheureux et maladroit dans le début du match, avait passé une bonne partie des trois premiers quarts-temps sur le banc de touche, ce qui avait évité à ses coéquipiers de se borner à le regarder jouer et marquer.

André Buffière, qui fut mon maître à penser et à jouer en la matière, disait toujours, que dans une équipe, il vaut mieux avoir dix joueurs qui marquaient chacun sept ou huit. points qu'un seul joueur, excellent et très adroit, qui en marque à lui seul quarante ou cinquante, car le jour où ce dernier est soit maladroit, soit fatigué, soit efficacement marqué ou contré par les adversaires, le match est à tout coup perdu. L'équipe de France a donc fait, en finale, son meilleur match dans ce tournoi, précisément parce que tout le monde a joué, pour une fois, au lieu que seul Tony Parker tienne la vedette, si brillant qu'il soit.

Cela dit, la Lithuanie n'est plus ce qu'elle était, même si elle demeure la patrie du fameux Arvydas Sabonis qui fut un des meilleurs joueurs de l'histoire de ce sport. Avec (ou en dépit de ses 2,20 mètres), il était d'une adresse étonnante, un passeur remarquable et-plus surprenant encore un dribbleur fort adroit. Contre la France, le coach lithuanien a adopté une stratégie assez mauvaise et surtout étonnante, en voulant absolument jouer avec des attaques de près dans la "raquette", où les doubles mètres français, qui sont par ailleurs des malabars, attendaient les attaquants et les balançaient dans les balustrades d'une façon inévitablement fautive, sans que l'arbitrage sanctionne ces agressions. C'est d'ailleurs là un petit reproche qu'on peut faire à Tony Parker, qui use et abuse de sa réputation mondiale, pour influencer les arbitres, alors que beaucoup des pénétrations qu'il fait lui-même dans la "raquette" (et non dans la "peinture" comme se mettent à le dire les commentateurs français, à la sotte imitation des Américains) sont très souvent des passages en force qui mériteraient d'être sanctionnés. "Tipi", comme on l'appelle, avec son air candide et son auréole, influence à tout coup les arbitres en faveur de son équipe ! Le nombre d'attaques où ces joueurs ne parvenaient pas à marquer, alors qu'ils étaient, vu leur taille et leur adresse, tout à fait en mesure de le faire a été considérable et les défenseurs français n'ont pourtant été que rarement sanctionnés.

Devant cette situation, un coach un peu raisonnable aurait abandonné cette stratégie et placé à mi-distance ses redoutables tireurs à trois points qui peuvent être d'une adresse diabolique ; la situation aurait pu alors évoluer de façon très différente, en particulier pour la récupération des rebonds qui a été, de ce fait, quasi exclusivement française. Mais ne nous en plaignons pas de cette erreur !

François Hollande va pouvoir serrer sur son cœur (ou presque) le petit Tony Parker (1 mètre 88) et il ne lui tiendra pas rigueur, quoique étant lui-même le père du mariage gay, d'avoir dit, après le match, que, dans le premier quart-temps, lui et ses camarades français avaient joué comme des tapettes !

lundi 23 septembre 2013

Honni soit qui Mali pense (N° x + 1)


Je résiste, depuis des jours et des jours devant le discours euphorique sur me Mali  tenu par les autorités et la presse françaises sur Mali, couronné "in fine" comme on dit désormais à tout propos, par le triomphe proconsulaire de F. Hollande, à l'envie tenace de reprendre la série des billets que j'avais consacrés au Mali sous le titre « Honni soit qui Mali pense ». Faute d'avoir le courage de la rechercher les références, j'ai usé ici d'un commode et paresseux N° x + 1 !

Je ne voulais surtout pas le faire pour me flatter d'avoir prévu le cours ultérieur des événements maliens, tant il était évident, quand on connaît, tant soit peu et même de loin, l'histoire des peuples que la colonisation a bizarrement réunis dans cet Etat, comme celle des relations qui ont été les leurs au cours de l'histoire antérieure et aussi celle de la politique qui y a été menée depuis l'indépendance.

François Hollande, dans sa dernière et encore largement triomphale, visite dans ce pays a été bien inspiré de se rendre à Bamako plutôt qu'à Kidal ; s'il a été accueilli dans la capitale du Mali par une foule enthousiaste, à laquelle on avait pris soin de distribuer des drapeaux tricolores et des T-shirts à l'effigie présidentielle de rigueur et s'il a pu enfin, après des jours d'épreuves et de déconvenues syriennes, faire un discours triomphaliste, il en était tout autrement, au même moment, à Kidal où sa visite dans la capitale n'a pas été du tout saluée dans les mêmes termes et avec le même enthousiasme.

On pouvait aisément le prévoir, vu que le climat politique malien n'a cessé de se détériorer depuis l'élection d'IBK, conduisant même à des affrontements violents dont on a donné diverses explications, mais dont l'important est surtout qu'ils aient pu avoir lieu. Quand on voit en outre le patronyme même de celui qui a été chargé de la réconciliation entre le Nord et Sud, de façon spécifique et ciblée, on constate qu'il n'est en rien tamashek, ce qui aurait été sage (il s'appelle Maïga !) et je n'ai pas vu, autour d'IBK, beaucoup de personnalités porteurs de la coiffure traditionnelle du Nord dont étaient, en revanche, pourvus, pour le grand plaisir des photographes, les représentants du Nord lors de la conférence de Ouagadougou. Le pittoresque de la tenue des hommes bleus fait toujours recette dans la presse comme au cinéma.

Il est intéressant de voir que dans les projets immédiats, Ibrahim Boubacar Keita, on distingue deux volets majeurs fort différents : l'un consiste dans la formation de 500 imams en coopération avec le Maroc ; l'autre le sempiternel et mythique développement du Nord qui, depuis un demi-siècle a des allures de déjà vu. "L'urgence absolue dans le Nord, c'est le désenclavement." tonitrue IBK ! Un de ses proches précise  "Signer un accord de paix sans permettre au Nord d'être relié au Sud ne servirait à rien. Pour deux raisons : le développement économique ne sera pas possible sans ces routes, et c'est le seul moyen de mettre fin aux trafics entre Kidal, Gao et l'Algérie".

Ce dernier argument est quelque peu fallacieux pour deux raisons au moins ; d'une part cette route pourrait aussi bien, au contraire, les favoriser ; d'autre part, une partie de ce trafic (pour la drogue surtout) se fait par voie aérienne comme l'a naguère montré l'affaire du boeing dans le désert ! Le désenclavement du Nord est toutefois une nécessité reconnue par l'Union européenne (UE) et surtout financée en partie par elle ; l'UE veut relancer la construction d'un autre tronçon stratégique Niono-Tombouctou (500 kilomètres !). Les 160 millions d'euros octroyés par l'UE ont permis le démarrage du projet en janvier 2012, mais la guerre l'a interrompu aussitôt.

Attendons de voir si ces projets routiers ne seront pas, comme souvent un peu partout en Afrique confiés aux "moins disants" chinois, ce qui obligera à  refaire ces routes dans cinq ou dix ans au plus, durée de vie maximale des routes construites en Afrique par les Chinois, alors que les routes "normales" peuvent durer, en moyenne, une cinquantaine d'années.

On nous ressort, une fois de plus, la vieille tarte à la crème du développement du Nord-Mali : "Demain, on développera gratis!". On l'a entendu cent fois depuis une bonne trentaine d'années avec les résultats qu'on peut y constater. Je ne rappellerai ici qu'un des plus beaux éléphants blancs de cette politique qui a consisté dans un effort, certes louable, de créer, au Nord, des centres de protection maternelle et infantile et des dispensaires, mais en y envoyant des infirmiers du Sud qui ne parlaient naturellement que le bambara (pardon le bamanankan!), alors que les femmes qui venaient y conduire leurs enfants et s'y faire soigner ne parlaient évidemment que le tamashek et repartaient aussitôt car, en outre, leur culture les empêchait de se faire soigner par des hommes! Dois-je préciser que tous ces constats ont été faits après coup naturellement !

Il est évident que l'opposition entre le Nord et Sud c'est-à-dire entre les "peaux rouges" du Nord et "noires" du Sud ne sera pas levé par quelques déclarations ou aménagements ethno-politiques ; elle demeurera, dans la mesure où elle dure depuis des millénaires et où la haine entre ces deux peuples est quasiment inscrite dans les gênes ; les populations du Nord, qui venaient autrefois razzier leurs esclaves dans le Sud, se sentent désormais spoliés, en tout, par les populations noires méridionales.

Loin de moi l'idée de dire, en aucune façon, que les choses sont simples et faciles à régler ; bien au contraire, je juge la situation ingérable sauf à évoluer vers une forme de fédéralisme dont ne veulent, pour des raisons différente ni Bamako ni Paris. Il n'empêche que, même si la France ne pouvait guère échapper à une intervention sollicitée, elle aurait dû la rendre aussi brève et aussi limitée que possible, alors qu'on n'a cessé d'intervenir et qu'on a commence déjà à dire qu'on ne laissera pas seulement au Mali le millier de soldats qu'on avait annoncé, tandis que, tant du côté de la Libye que du Niger, les djihadistes se réservent toutes les possibilités d'intervenir dès qu'une partie de nos troupes aura tourné les talons, les forces de l'ONU étant là plus pour la décoration (quand ce n'est pas pour le pillage) que pour un véritable maintien de l'ordre.

Comme je l'ai dit et répété sans grand mérite, la France est très loin d'être sortie de l'auberge sahélienne en dépit des rodomontades de nos ministres qui feraient bien de se montrer plus discrets dans l'avenir, quelles que soient leurs intentions.

samedi 21 septembre 2013

La littérature dans Mediapart : "Marcel Proust le cannibale drôle "


Il est rare que MDP fasse une place à la littérature ; à la rigueur, trouve-t-on, ici ou là, un billet dans le Club, mais il est très rare qu'il figure en première page et plus rarement encore, en haut de la première page du Journal comme c'est le cas aujourd'hui, 20 septembre 2013, pour un billet de Jacques Dubois sur un ouvrage de Claude Arnaud qu'il juge "remarquable" et qui s'intitule Proust contre Cocteau.

J'avoue tout ignorer des travaux de Claude Arnaud (que J. Dubois pourvoit, en finale, tantôt d'un "t", tantôt d'un "d", ce qui, pour un patronyme si commun, a singulièrement compliqué mes recherches sur ce modeste auteur). Pour ce qui le concerne, il me semble plutôt s'intéresser à Cocteau qu'alors que j'ai personnellement une position tout à fait inverse. Quant à l'intérêt de Jacques Dubois, il s'explique sans doute par l'une de ses publications Pour Albertine. Proust et le sens du social (Paris, Seuil, 1997 et 2011).

J'ai eu autrefois Proust au programme d'agrégation et j'avoue avoir pris goût à cet auteur que j'ai lu et relu tout au long de ma vie ; il m'est si familier que, lorsque je le reprends, je pratique ce que les Latins auraient appelé, à de toutes autres fins, des "sortes Prousti", ouvrant la Recherche au hasard, non pour y trouver quelque indice sur ma future destinée, mais parce que je suis sûr de m'y retrouver très vite dans un univers familier et que j'apprécie toujours. Pour ce qui concerne les aspects biographiques de cet auteur, j'en suis resté à Georges Painter dont la copieuse et magnifique biographie de Proust me paraît incomparable et me suffit largement.

Je suis un peu étonné de voir Jacques Dubois, un professeur belge très honorablement connu dans divers domaines (dont la sociocritique) et notable pour son livre sur Proust que j'ai évoqué, se risquer dans cette affaire sous de tels titres et plus encore de voir le livre de C. Arnaud/t jouir de la faveur de MDP, car il faut bien en convenir, le sujet est léger et on peut discuter certaines des positions qui sont exposées dans cet ouvrage, du moins à en croire Jacques Dubois, car je n'ai pas eu la curiosité d'aller voir l'ouvrage en cause lui même, faisant toute confiance à ce collègue d'Outre Quiévrain, en dépit de sa légère réserve finale sur l'ouvrage en cause.

On nous y apprend d'emblée que ces deux auteurs, proches "homosexuellement, sans pour autant être amants" le furent plus encore par la littérature, "échangeant leurs œuvres respectives pendant qu'elles s'écrivaient". Je ne veux pas discuter ni les faits ni les dates, connaissant trop mal le sujet, mais, en me référant aux seules données exposées par Jacques Dubois d'après C. Arnaut, on constate un problème. Si, comme le disent ces auteurs, l'amitié entre Cocteau et Proust "est née en 1910", Proust avait déjà pas mal écrit à cette date, en l'absence manifeste des judicieux conseils de Cocteau. Non seulement, il a déjà écrit divers textes dont Jean Santeuil, mais il a même largement entamé la rédaction de la Recherche qu'il commence à écrire, si mes souvenirs sont bons, en 1907. L'amitié de Cocteau n'est donc sans doute  pas pour grand chose dans toute cette affaire.

Je ne sais pas ce que sont les relations entre Jacques Dubois et Claude Arnaud mais je trouve le premier (qui semble apprécier fort le second) quelque peu excessif envers Cocteau mais surtout dur à l'égard de Marcel Proust dont il déclare qu'il sera "l'auteur d'une seule [inexact bien sûr, mais surtout quelle oeuvre !] œuvre laborieusement [ces termes sont soulignés par moi] produite et qui mettra un certain temps à rayonner du vivant de l'auteur, malgré le prix Goncourt de 1917".

Ce condescendant "laborieusement" me chiffonne quelque peu et d'une certaine façon aussi le désobligeant "un certain temps" . Proust commence la Recherche en 1907 et sa publication, en dépit de l'importance du texte, qui devait quelque peu effrayer les éditeurs, débute en 1913, l'amenant à recevoir le prix Goncourt en 1917. Après tout, il n'y pas tant d'auteurs qui ont une carrière littéraire si rapide et si brillante. On se le dispute d'ailleurs et, en 1914, la NRF, comme Jacques Dubois a l'honnêteté de le souligner, "reprend à Grasset Du côté de chez Swann" alors qu'elle "refuse de publier des poèmes de Cocteau".

Mauvaise langue pour mauvaise langue, je dirais volontiers de Cocteau ce que disait Musset de Lamartine "Il y a du génie, du talent, de la facilité..." !

Je ne suis donc pas sûr du tout que l'influence de Cocteau sur Proust l'ait poussé « à se surpasser dans son mimétisme prédateur ». C'est bien entendu une opinion purement personnelle, mais je connais peu d'auteurs que je jugerai, d'emblée et à l'emporte-pièce, plus différents l'un de l'autre que Cocteau et Proust.

Jacques Dubois ajoute à l'appui de son point de vue : « Cocteau fut l'un des innombrables modèles qui poussèrent Proust à se surpasser, dans son mimétisme prédateur [d'où le titre insolite du billet de Jacques Dubois "Marcel Proust cannibale"]. Son style fut l'un des pollens dans lesquels ce faux bourdon planta son dard ; on en trouve parfois trace dans l'épaisseur de son miel composite » (page 102).
Ces traces ont toute chances d'être des plus rares ; Claude Arnaud est assurément un grand amateur de Cocteau et comme le dit J. Dubois, en prélude à la citation de cette métaphore : "sa manière est volontiers fleurie". Le problème est qu'elle est aussi loufoque et incohérente. C. Arnaud/t aurait dû également lire, outre Cocteau, Fabre ou Maeterlinck et s'informer mieux sur la vie des abeilles. En effet les faux bourdons, les abeilles mâles, ne produisent pas de miel et n'ont donc pas à butiner ; ils risquent moins encore de "planter leur dard dans les pollens" puisqu'ils sont dépourvus de dard ! Les abeilles elles même butinent avec la langue et non avec le dard qui ne leur sert qu'à se défendre, en général au péril de leur propre vie.

Une remarque en revanche, qui m'a beaucoup intéressé, est celle qui est faite à propos de l'amitié de ces deux êtres « qui adoraient rire ensemble. ». La gaieté de Proust est, en effet, un trait quelque peu inattendu pour certains lecteurs qui connaissent peu ou mal cet auteur.

Divers témoignages confirment cette gaité de Proust dont celui d'Anna de Noailles (un peu suspecte de complaisance ) mais surtout celui de Léon Daudet, polémiste truculent, qui n'est guère tendre en général et qui nous dit « Marcel Proust pouvait être plus gai que personne ». Ces témoignages sur la gaieté de Proust dans la vie courante seraient sans grande importance, s'ils ne confirmaient pas un trait majeur de son œuvre qui, pourtant, a été peu remarqué et moins encore étudié, et qui est constitué par diverses formes de son comique ou mieux de sa drôlerie. Aurais-je eu à faire une troisième thèse que je l'aurais sans doute faite sur "l'humour et le comique dans la Recherche" et le sujet me paraît toujours disponible. Avis aux amateurs!

Je signale que, voulant vérifier si ce sujet avait été étudié dans une période plus récente, je n'ai guère trouvé qu'un article de F. Karimian (2005) sur "l'humour proustien", mais surtout un intéressant site d'André Vincens que vous trouverez aisément sous < Proust-personnages.fr> et qui contient différentes citations dont celle que j'avais projet de proposer pour conclure ce billet dont je ne veux pas rendre la longueur excessive.

Un des traits, qui me fait revenir assez souvent la lecture de Proust, et un peu au hasard car il s'y trouve partout, est en effet que sa drôlerie prend parfois des aspects linguistiques, lorsque Proust, excellent observateur des détails comme on le sait, s'amuse à relever les prononciations étranges où les expressions bizarres de certains de ses personnages, avec toujours des notations d'une extrême finesse et d'une grande précision.

Il y aussi un passage que je m'amuse souvent à citer en demandant de deviner le nom de l'auteur sans avoir jamais trouvé quiconque capable de l'identifier. Vous aurez assurément aucun mal à le faire ici.

"Que vous alliez faire pipi chez la comtesse Caca, ou caca chez la baronne Pipi, c’est la même chose, vous aurez compromis votre réputation et pris un torchon breneux comme papier hygiénique. Ce qui est malpropre. ». Ce propos est de Charlus ; il est adressé à Morel et Proust ajoute : "Morel avait recueilli pieusement cette leçon d’histoire, peut-être un peu sommaire".

vendredi 20 septembre 2013

Pléthore et gabegie administratives françaises.

On ne cesse, sempiternellement, de débattre et de s'interroger sur les coûts faramineux de la pléthorique administration française que l'on attribue à des causes diverses que, depuis quelques années, la Cour des Comptes, qui a enfin ouvert les yeux et la bouche, souligne dans la plupart de ces rapports.

J'observais encore une fois, en ce matin du 19 septembre 2013, que nos commentateurs politiques ignorent, pour une bonne partie, le fonctionnement des organismes dont ils parlent. J'entendais ainsi, je ne sais qui, affirmer qu'un rapport de la Cour des Comptes mettait en évidence des dysfonctionnements innombrables auxquelles elle ne proposait d'apporter ni sanction, ni remède. C'est malheureusement vrai mais cela correspond très exactement au curieux fonctionnement de notre Cour des Comptes, si vigilante et si clairvoyante désormais, surtout depuis la présidence de Philippe Seguin, mais qui n'a pas pour fonction de sanctionner et moins encore de réformer, mais simplement de constater.

Les sanctions, s'il y en avait, devraient être prises par la Cour de discipline budgétaire qui est certes en liaison avec la Cour des comptes, mais qui n'intervient que pour sanctionner éventuellement les coupables de dysfonctionnements frauduleux et non simplement inutiles ou stupides. La Cour des Comptes examine les comptes mais ne juge pas les coupables et se prononce moins encore sur "l'opportunité"; elle constate mais ne va en rien plus loin ; ses volumineux rapports, parfaitement informés et fort détaillés, n'ont pour seul effet que de fournir matière à la presse pour des articles dont les journalistes n'ont pas à se fatiguer à chercher eux-mêmes le sujet et la matière.
Par un juste retour des choses, la Cour des comptes, peut-être par malice, vient de calculer ce que coûte à l'État la niche fiscale des journalistes qui bénéficient d'un abattement sur le revenu de 7.650 € dont ils ne parlent guère ! Ce privilège fait perdre à l'État 60 millions par an. Quoique l'expression de niches fiscales soit particulièrement adéquate, quand il s'agit de nos journalistes qui sont les chiens fidèles et complaisants de tous les gouvernements successifs, ils deviennent féroces et des plus dangereux si l'on se risque à y toucher. A tenter de le faire, le pauvre Juppé y a laissé son poste de Premier Ministre, réalisant contre lui, pour une fois, l'union sacrée de toute la presse, de gauche comme de droite.

Il n'y a pas lieu de démontrer la pléthore et la gabegie administratives françaises. Toutes les statistiques les démontrent. On peut les illustrer avec le seul exemple de l'enseignement primaire et secondaire français. Les récentes études montrent, en effet, que si l'on compare, pour des populations d'élèves à peu près équivalentes dans les trois Etats, le coût de cet enseignement en France en Angleterre et en Allemagne, on observe que les Français dépensent 30 milliards par an de plus que les deux autres Etats évoqués pour des systèmes d'enseignement à peu près identiques et avec même, dans le cas de l'Allemagne, des rémunérations des enseignants en cause qui sont nettement supérieures. Le pire de tout est que les résultats, jugés par le niveau des élèves, sont plus mauvais en France !

Il est donc probable que le système lui-même est mauvais et que c'est l'infrastructure elle-même qui coûte très cher avec une foule d'enseignants qui n'enseignent pas (ceux qui ne sont pas "devant les élèves" comme disait Claude Allègre qui voulait, à juste titre et non sans bon sens, "dégraisser le mammouth"), soit parce qu'ils sont mis à la disposition d'une foule d'institutions extrascolaires "laïques" ou prétendument "éducative" souvent proches les Loges (Fédération des oeuvres laïques, UFOLEP, UFOVAL, FOL, MGEN, MAIF, etc.), soit parce que ils exercent des activités syndicales à temps complet ou partiel, soit pour d'autres raisons qui, hors des classes, leur fournissent des sinécures au sens étymologique du terme.

En réalité, la situation de l'éducation nationale est probablement assez spécifique mais marginale ; on sait que, surtout depuis les prétendues "décentralisations", ce sont surtout les multiplications d'emplois, doubles, triples voire quadruples, qu'entraîne notre millefeuille administratif qui sont à l'origine du personnel pléthorique et donc des coûts exorbitants du fonctionnement de notre administration. Selon les sources, le coefficient multiplicateur du nombre des fonctionnaires de l'administration territoriale varie sensiblement, mais tout le monde s'accorde à dire que, dans les deux dernières décennies, il a été très considérable, des communes aux conseils régionaux en passant par les "collectivités de communes" et les conseils généraux. Des quantités de fonctionnaires font la même chose à chacun des étages de ce building administrative ou de ce millefeuille, à votre goût, selon la métaphore choisie, Toutefois, il est un élément dont on rend pas compte suffisamment et dont on ne prend conscience que lorsqu'on est confronté à lui de façon directe.

On sait les difficultés qu'il y a en France à créer une entreprise, alors que, dans la plupart des Etats modernes (aux États-Unis comme en Allemagne), il suffit de quelques jours, voire de quelques heures pour le faire. En France, selon le récent témoignage d'un de mes amis, au bout de six mois de steeple-chase administratif, il n'a pas encore atteint la ligne d'arrivée et grande est donc la tentation de renoncer à son projet car tout indique que, même à ce terme, on est très loin d'être sorti de l'auberge administrative et fiscale.

Il m'a été donné récemment de devoir changer le siège social et le bureau d'une modeste association que je présidais. Quoique l'internet m'ait évité de devoir courir les bureaux, j'ai passé une journée entière, d'une part à recueillir les informations, d'autre part à réunir et à remplir les DIX-SEPT pages indispensables.

Je devrais dire, pour être dans le coup "à RENSEIGNER les fiches". Cet attentat à la langue française me met en rage. On renseigne une PERSONNE et non une FICHE qu'on remplit. Ne peut-on attendre, voire exiger, de l'administration française une connaissance minimale de notre langue nationale (article 2 de notre constitution !)? De même, le mot "mail" qu'on trouve dans tous les documents administratifs n'est pas français et seul le mot "courriel" (que nous ont légué nos cousins québécois) est autorisé dans le vocabulaire administratif officiel.

Revenons à notre maquis administratif ! Il faut faire DEUX dossiers car, en fait, la procédure de changement de bureau fait l'objet d'une demande spécifique ; elle n'est pas inscrite, en effet, dans le formulaire principal qui concerne tous les autres changements : le siège social, création, le changement d'intitulé ou dissolution. En outre, on vous demande un dossier extravagant avec en particulier un "historique" ; je plains les grandes et vieilles associations comme l'Alliance israélite ou même l'Alliance française qui furent créées dans les années 1880 donc bien avant la fameuse loi de 1901 et qui devraient fournir leurs premiers statuts nécessairement antérieurs à cette loi.

Pour vous la faire courte, comme toujours, je vous dirai qu'on vous demande l'original des statuts et l'original du référé récépissé de la préfecture (que vous ne pouvez manifestement fournir qu'une fois!) et deux ou trois autre pièces. Bref en tout avec l'enveloppe timbrée indispensable dix-sept feuilles !

Il est certain que cette extravagante complexification de l'administration explique le grand nombre de nos fonctionnaires qui doivent traiter ces dossiers ; on sait toutefois que, dans nombre d'administrations, le maintien d'une telle complexité et la résistance à l'usage de l'Internet ont été très fortes. La raison majeure était et demeurez, sans qu'on dise le plus souvent, la sacro-sainte préservation de l'emploi. Ce fut en particulier le cas pour les fameuses feuilles de soins de la Sécurité sociale !

Il en résulte une complication administrative et fiscale (c'est sans doute dans ce domaine qu'on atteint les records en la matière) phénoménale qui entraîne naturellement non seulement un alourdissement et un ralentissement de toutes les procédures mais justifie l'existence d'un personnel pléthorique pour traiter de tels dossiers.

Une assez longue et diverses expérience hors de France me conduit à penser que nous ne sommes dépassés dans ce domaine que par certains Etats issus de nos anciennes colonies, africaines en particulier ; ils ont réussi en effet à rendre les procédures françaises plus complexes et plus longues encore, en y ajoutant le piment de leurs cultures spécifiques. Ce fut, mais peut-être l'est-ce aussi dans d'autres pays que je ne connais pas, le cas de Madagascar où, à la pesanteur et à la complexité administratives françaises, s'est ajouté de façon savoureuse la tortueuse lenteur de l'héritage malayo-polynésien.

jeudi 19 septembre 2013

"Educateurs prioritaires" : encore l'école et toujours les mêmes sottises!


Dire que je résiste quotidiennement à la tentation d'écrire à nouveau sur l'école, alors que j'y suis sans cesse poussé, ne serait-ce que la lecture de toutes les sottises qu'on peut proférer à son sujet! J'ai écrit, depuis sept ans, tant de billets sur le sujet que j'en ai même fait un petit livre dont je ne sais pas trop ce que je ferai vu le climat général qui fait de la question du mercredi l'alpha et l'omega de toute réflexion sur notre système scolaire.

Et voilà qu'aujourd'hui, alors que je triomphais jusqu'à présent des tentations qui m'assaillent chaque jour, j'ai, pour mon malheur, lu dans le Club de Mediapart un texte qui figure sous la rubrique « Educateurs prioritaires : ZEP » et qui est publié sous la signature de Monsieur Émile Lanoë que je ne connais pas davantage et à qui je ne veux assurément aucun mal ; j'ai entendu ou lu dix fois déjà les étranges propos qu'il y tient et qui ne sont pas plus exacts que tout ce qu'on a coutume de proférer à la matière. Il est tout de même étonnant que des gens qui se piquent d'exposer leur point de vue sur l'école et ses problèmes témoignent souvent de pareilles ignorances ou d'idées si fausses sur son fonctionnement.

J'aborderai donc la critique de ce billet qui concerne l'éducation dans les zones d'éducation prioritaire (ZEP) par quelques citations du texte en cause.
L'auteur part de deux constats qui sont tout à fait incontestables et sur lequel il s'interroge d'une façon que je juge d'emblée étonnante, pour qui connaît, tant soit peu, le fonctionnement de notre éducation nationale. Il écrit ainsi et je cite avec quelques coupures ou remarques que je signale selon l'usage :
"La banlieue parisienne accueille aujourd'hui beaucoup des jeunes enseignants qui débutent [...]. Près de 50 % des nouveaux titulaires commence leur carrière en banlieue parisienne". Sans doute, comme pendant la guerre d'Algérie, on affectait là-bas les nouveaux recrutés car on y manquait d'enseignants et nul ne voulait y aller ! L'explication suit, même si M. Lanoë ne la voit pas ou, en tout cas, ne l'évoque pas.

Il poursuit tout aussi logiquement, avec pertinence : « Un professeur sur quatre quitte ainsi chaque année l'académie de Créteil et ses nombreux établissements difficiles, remplacé la plupart du temps [ il pourrait dire TOUJOURS ] par un professeur débutant, pas aidé par la suppression de la formation aux jeunes enseignants.[…; dans le 93 ou les quartiers Nord de Marseille, on, aurait dû y introduire, en revanche, en formation spécifique, le self defense ou le close combat !]. Ce ne sont pas des professeurs expérimentés qui sont nommés mais bien des professeurs stagiaires, chose impensables il y a peu [le soulignement de stupeur est de moi !] ».

Il est difficile, en si peu de lignes, d'accumuler autant d'erreurs et de naïvetés confondantes.

Je commencerai par la plus stupéfiante de toutes, que j'ai mise en gras. Chose inouïe : on nommerait dans cette région, où personne ne veut aller, des "professeurs stagiaires, chose impensable il y a peu". C'est pourtant, on la vue, une grande tradition de notre système éducatif !

Un mot d'explication sur ce que je croyais connu de tous. Tout d'abord, dans la plupart des catégories d'enseignants, une fois reçu au concours (je ne parle pas ici des vacataires ou assimilés, taillables et corvéables à merci), on est, la première année, "stagiaire" ; cela dit, cher Monsieur, il en a toujours été ainsi ; si vous avez, comme je le pense, passé un concours de recrutement, vous devez savoir que l'Education nationale vous nomme là où elle veut (la seule exception était autrefois celle des instituteurs que l'on ne nommait pas hors de l'académie). Vous n'avez aucun recours contre cette nomination, sauf celui de la démission. Seuls, quelques privilégiés, classés en tête de liste des concours, se voient demander aimablement, par l'inspecteur général qui préside le jury, où ils souhaiteraient être nommés. Pour tous les autres, la nomination tombe comme un couperet, toujours redouté.

C'est le seul moment dans la vie d'un enseignant où le ministère a tout pouvoir sur son affectation et bien entendu il en profite ! Ensuite, le professeur titulaire devient inamovible;  vous pensez bien que l'enseignant, qui a fait quelques années de purgatoire (on doit, en principe, rester deux ans au moins dans son premier poste), n'a aucune envie ensuite de le retrouver au hasard d'une mutation. C'est donc, en fait, tout le problème du statut même des professeurs et plus généralement des fonctionnaires qui se pose ici. Vaste programme !

La suggestion finale ("Faire venir des professeurs expérimentés qui ont exercé pendant un bon moment dans un lycée tranquille"),  si pleine de bon sens qu'elle soit, est donc totalement utopique. La seconde solution évoquée l'est tout autant : « Faire rester les jeunes professeurs dans les établissements prioritaires plutôt que de rêver [le caractère onirique de la chose est donc admis par l'auteur lui-même]  faire venir des professeurs expérimentés nécessite donc la mise en place d'un large volant de mesures incitatives dont les effets doivent donner l'envie de venir et surtout de rester le plus longtemps possible. ».
L'évocation de ces deux mesures relève évidemment de la pure fantaisie car, sauf à changer le statut de la fonction publique, pour les professeurs du moins, il est totalement impossible d'affecter de force dans le 93 un enseignant des Alpes-Maritimes ou même de la Creuse d'ailleurs. Ils « ne seront pas faciles à convaincre" reconnaissez-vous avec honnêteté et j'admire ici votre sens de la litote!

Les solutions que vous envisagez sont aussi utopiques l'une que l'autre car les jeunes professeurs nommés dans ces zones n'ont qu'une envie, c'est de les fuir le plus tôt possible, quitte à démissionner de l'éducation nationale, s'ils n'y parviennent pas (je connais des cas de ce genre) et, à la limite, on les comprend de faire ce type de choix. Quant aux "professeurs expérimentés de province qu'on voudrait faire monter dans l'académie de Créteil", ce ne sont pas les maigres primes ou les bonifications d'échelon qu'on peut leur accorder s'ils acceptent cette mutation qui, comme on l'a d'ailleurs vu, sont susceptibles de les faire changer d'avis.

Vous oubliez aussi ou plutôt surtout un détail très important. Un professeur, qui a passé une dizaine d'années dans un poste provincial, est souvent lui-même marié (souvent en outre, avec un poste "double", à une autre enseignante qui exerce au même endroit), a désormais une famille, une logement parfois et il lui est rigoureusement impossible d'envisager une mutation, quelles que soient les promesses qu'on peut lui faire.

J'ai essayé d'être aussi mesuré que possible dans mes propos, mais je dois dire que la moutarde me monte au nez très fréquemment quand j'entends les sottises qu'on lit dans les journaux ou qu'on entend dans les médias sur des questions qui sont gravissimes. Elles témoignent d'ignorances scandaleuses des réalités  et pire encore, elles détournent de ce qui serait la vraie solution à ces questions dans les ZEP surtout mais ailleurs aussi, c'est-à-dire de prendre en compte que, dans les "quartiers", comme on dit maintenant si improprement, il y a une population scolaire qui n'est plus du tout celle qu'elle était il y a quelques dizaines d'années encore et pour laquelle on a élaboré des programmes et fixé des objectifs qui sont évidemment totalement inadaptés au public qu'accueillent désormais, dans des proportions variables, nos établissements scolaires.

Un fabricant de chaussures, de conserves ou de quoi que ce soit, étudie son "marché", se préoccupe de connaître du mieux possible sa clientèle et s'efforce de concevoir et  d'adapter à cette clientèle les produits qu'il souhaite y diffuser. L'éducation nationale n'en fait manifestement rien et ses syndicats, en général, ne s'intéressent en aucune façon à ce qui se passe dans les classes, exclusivement préoccupés qu'ils sont par les questions de postes et de moyens. Je n'ai même pas pris la peine de relever dans ce billet la tarte à la crème du nombre d'élèves par classe ("réduire le nombre d'élèves par classe"), bidet de bataille syndical par excellence, alors que toutes les études sur ce point montrent que, lorsque cette diminution  n'est que faible (et comment pourrait-il être autre, quand, à effectifs scolaires égaux, primaire et secondaire confondus, nous dépensons déjà 30 milliards de plus par an que l'Allemagne ou l'Angleterre), une telle mesure n'a rigoureusement aucune incidence sur le fonctionnement pédagogique et les résultats.

"Voilà justement ce qui fait que votre fille est muette !".

mercredi 18 septembre 2013

Gaz hilarant ou gaz sarin ?

Comme je le disais dans mon commentaire de son billet sur "l'hilarité obligatoire" dans Mediapart, Vingtras m'a coupé l'herbe sous le pied ; je dis le pied et non pas les pieds, car mes pieds sont fort grands et son billet assez court. Je méditais depuis longtemps un post sur ce sujet auquel j'avais déjà fait allusion et le billet qu'il a publié me donne l'occasion de m'y attaquer enfin.

Je ne crois guère ni à son explication sociologique sur le rire obligatoire comme remède à la morosité endémique ni à sa vue, optimiste aussi, selon laquelle les médias ont l'obligation de détendre l'atmosphère. Je les crois exclusivement préoccupés de faire monter par là leur audience et les prétendues nouveautés de la rentrée audiovisuelle actuelle ne me donnent assurément pas tort. Radios et Télés se livrent une lutte farouche et dérisoire à la fois, non dans des intentions si nobles, mais tout simplement pour augmenter leurs tarifs de publicité, donc leurs recettes et les salaires de leurs "employés" que je ne sais trop comment qualifier.

Je n'en veux pour preuve que la concurrence, férocement sordide, que se font les radios bignoles que j'écoute distraitement, en fonds sonore, le matin (Luxembourg, Europe et RMC). Leur concurrence est d'autant plus ridicule que ce qui s'y passe est strictement identique pour ces trois stations. Il s'agit de prétendre donner la parole à des auditeurs lointains, qu'on a fait droguer au standard en leur imposant, en retour de l'honneur qui leur est fait de "causer dans le poste", de faire l'éloge de la station et de ses glorieux "animateurs" qui sont eux-mêmes parfaitement interchangeables. On feint de s'intéresser aux propos de ces naïfs pedzouilles, qu'on appelle par leur prénom, dont on s'est préalablement enquis, en citant le nom de leur bled, avant de leur couper sans vergogne la parole pour "faire" un auditeur de plus. Bourdin, Truchot, Machin ou Chose, c'est du pareil au même, mais il leur faut faire du chiffre pour garder leurs 15.000 euros mensuels, tout en ayant la larme à l'oeil dès qu'un smicard apparaît dans le paysage.

L'ambiance est nécessairement joyeuse et le rire obligatoire. La pire figurante de toutes est, sur Europe, le matin, une certaine J. (65 balais au compteur) dont la fonction essentielle est de rire en permanence à gorge déployée et à tout propos. Je n'ai d'ailleurs jamais pas compris pourquoi on ne la remplace pas tout simplement par des enregistrements qu'on déclencherait ad nutum ; ce serait naturel et même humain car, à son âge et après tant d'heures passées à rire, on sent chez elle une certaine fatigue des zygomatiques. A RMC, dans une émission dite "les grandes gueules", on a eu la chance de recruter récemment un prétendu sociologue que son rire, agricole et tonitruant pour le coup, fait plutôt imaginer au cul des vaches que dans une chaire universitaire ! M'enfin !

Le pire, je crois est une émission (mais je vous entends déjà murmurer perfidement "Pourquoi diable l'écoute-t-il ?) qui passe l'après-midi, de 16 à 18 heures, sur Europe et dont le titre faubourien doit être « On va s'gêner !» et qui est produite par Laurent Ruquier. En fait je l'écoute assez souvent non par goût et perversité mais parce que, étant en voiture à ce moment-là, je n'ai guère le choix qu'entre les insupportables pédanteries de France Culture à ces heures creuses, les niaiseries de Luis qui, à ce moment-là, sur RMC, "attaque la planète foot" (< "Luis attaque < "Louise attaque : merci pour eux de bien vouloir rire !) dont l'accent lyonnais (ou plus précisément des Minguettes), est exaspérant de vulgarité, son propos lui-même étant en général d'une rhétorique incertaine mais toujours fondée sur le rythme ternaire gaullien, qui ne fait qu'accroître la longueur du discours sans en augmenter l'intérêt et Ruquier lui même que j'ai connu meilleur, à ses débuts, autrefois.

C'est, en fait, lui qui fait l'essentiel du travail dans cette affaire et il consiste à faire causer ses « chroniqueurs », de pitoyables has beens, dont j'ai appris qu'ils sont fort bien payés pour de lamentables prestations. Comme disait le Jugnot du "Bébète Show" d'autrefois "Et dire qu'on les paye pour faire ça!").

L'ornement principal de l'équipe est Claude, qui doit aller sur ses 90 ans si elle ne les a pas déjà dépassés et dont la lubricité sénile s'accorde assez bien avec le propos général de l'émission où la grivoiserie voire l'obcénité sont de règle avec, en tête de gondole, l'ex-giton de Laurent Ruquier dont il a fait la carrière par reconnaissance de je ne sais quoi ! Il s'agit d'une ex-vedette de je ne sais quel téléréalité dont le QI est, de toute évidence négatif et dont l'ignorance abyssale peut toujours être sollicitée, en cas de disette de rire, car la connerie monumentale est garantie pour toute sollicitation à son endroit (si j'ose dire !).

S'ajoutent à ce duo une sinistre ex-institutrice en rupture de ban, preuve vivante que le niveau du recrutement éducatif a plutôt monté car on se demande comment elle a pu réussir le concours d'une école normale et l'ex-adjoint de l'adjoint de l'adjoint du rédacteur en chef du Nouvel Observateur Pierrot le baveur, surnom qui se passe de commentaire quand on l'a examiné de près, ne serait-ce qu'une fois.

Tous ces gens-là s'efforcent d'être plaisants, laborieusement il faut en convenir mais sans jamais y parvenir naturellement. Cela ne les empêche nullement de rire, entre eux bien sûr, des plates sottises qu'ils peuvent parvenir à éructer ! On prétend que le rire est communicatif, principe dont ils démontrent chaque jour à quel point il est faux. Je ne connais en effet rien de plus triste qu'un amateur de facéties qui est le seul à rire de ses propres blagues. C'est la règle dans cette émission de Ruquier qui essaye, lui-même, de sauver les meubles à coups de "vannes", comme on dit si improprement aujourd'hui dans ce milieu, soigneusement préparées à la lumière du cheminement de l'émission qu'il a lui même défini mais qui, comme disaient les Grecs, "sentent l'huile". Le tout est fort heureusement agrémenté de musiques et surtout de "pauses" (car on n'ose pas, ici comme ailleurs, prononcer le mot tabou "publicité"), qui permettent de suspendre, au moins pour un moment, les rires forcés et stupides de cette fine équipe.

Une question que je me suis souvent posée est la suivante : comment arrive-t-on à faire rire l'auditoire (car il semble y en avoir un) avec des propos si insipides et des plaisanteries si consternantes ? Mais pourquoi avoir un public (d'autant que l'émission n'est pas en direct et qu'on la rediffuse indéfiniment!), alors qu'il serait tellement plus simple d'avoir un technicien préposé à cette tâche et des enregistrements de rires, comme cela se fait couramment dans les télévisions nord-américaines.

J'en suis venu donc à penser que l'on doit diffuser, subrepticement dans les studios de radio et de télévision où sont enregistrées de telles émissions, un gaz hilarant. Cette méthode aurait toutefois un avantage, si l'on parvenait, en se glissant dans l'un ou l'autre de ces studios, à substituer au gaz hilarant qu'on utilise du gaz sarin qu' on pourrait désormais se procurer, à bon compte et en quantité, auprès d'un honnête commerçant moyen oriental, Monsieur Bachar al Assad qui dispose de stocks devenus inutiles ou, en tout cas, excessifs et serait sans doute de ce fait disposé à faire des prix sur ce produit. Cette méthode aurait l'avantage de débarrasser d'un seul coup à la fois d'un public imbécile mais, aussi et surtout, de ces sinistres chroniqueurs à visée prétendument drolatiques.

Je ne vous servirai pas, car Vingtras l'a déjà fait, le fameux propos de Molière selon lequel "C'est une étrange entreprise que celle de faire rire les honnêtes gens " ; je m'en garderai d'autant plus que, moins optimiste que lui, je doute fort qu'il y ait beaucoup d'"honnêtes gens" qui suivent de telles émissions et la seule mention d'Eric et Ramzy m'a permis d'éviter la rencontre fâcheuse du "Platane" dont Canal Plus a jugé bon d'orner la route de sa rentrée.

Post Scriptum : Dois-je préciser que je plaisante MOI !

mardi 17 septembre 2013

Justice et prison : le bon sens est-il de droite ou de gauche ?

Les débats actuels (malheureusement aussi incessants que consternants) dont la controverse Taubira-Valls n'est qu'un aspect médiatique, se caractérisent comme tant d'autres par une totale absence de raison comme de bon sens.

Je m'amusais ce matin, comme auparavant, durant le week-end, en écoutant notre président normal et Monsieur de Norpois-Fabius, à constater l'étonnement médiatique général devant le fait que le rapport, tellement attendu, des experts onusiens en Syrie ne mentionnait aucun responsable de l'usage du sarin, alors que, dès le début, la moindre lecture de la lettre de mission de ce comité d'experts montrait qu'il leur était, formellement est rigoureusement, interdit de se prononcer sur cette question. Leur seule et unique découverte est qu'on a utilisé du gaz sarin, ce que l'on sait depuis le début. Les causes de l'aveuglement de la presse (la paresse et l'incurie) et des politiques (omission naturellement volontaire) ne sont certes pas les mêmes mais le résultat est identique.

Depuis la controverse qui a opposé le ministre de l'Intérieur à la Garde des Sceaux, les questions de prison et de justice sont à la mode et on entend toutes sortes d'inepties sur le sujet. J'écoutais, ce matin encore, vers 8 heures 30, une émission un peu moins débile sur France Culture où s'opposaient des journalistes des criminologues et d'autres spécialistes de diverses farines.

Comme toujours chacun lisait midi à sa porte et l'on n'en venait toujours aux mêmes conclusions, il faudrait des postes et des moyens ! Ce raisonnement est malheureusement souvent celui des syndicats, en particulier dans l'éducation nationale où l'on entend sans cesse répéter qu'il faudrait moins d'élèves dans les classes, alors que toutes les études spécialisées sur cette question ont montré que l'incidence de ce facteur est extrêmement faible, voire nulle. Si l'on diminuait d'une unité le nombre des élèves de chacune des classes du système éducatif français, cela coûterait évidemment une fortune mais ne servirait rigoureusement à rien.

En matière de plaisanterie, j'ai posé dans mon blog, il y a quelque temps, un petit problème d'arithmétique que l'on pourrait faire figurer dans le futur examen d'entrée en sixième, même si je le juge sans doute trop difficile pour la majorité des élèves qui seront amenés à s'y présenter et qui pour bon nombre d'entre eux ne comprendraient même pas l'énoncé ... faute de savoir lire. Je le présente donc ici sous une autre forme, un peu plus brève. Comment faire 2.000.000 d'économies par jour dans les prisons françaises ?

Pour vous la faire courte, allons droit au but. Il y a, dans nos prisons, 10.000 étrangers (ce qui notons-le au passage correspond, très exactement, au nombre de places qui y manquent et qu'on cherche, en vain faute de moyens, à y créer) dont l'entretien et la surveillance coûte 200 € par jour. Vous me voyez sans doute venir ! 10 000 × 200 égal de 2.000.000 !

Il suffirait, donc comme cela se fait dans nombre d'autres Etats, tout aussi démocratiques et développés que le nôtre, de renvoyer ces condamnés dans leurs pays d'origine, ce qui est parfaitement légitime puisque, étant dans nos frontières (le plus souvent de façon illégale d'ailleurs), ils n'ont pas jugé bon de respecter nos lois. Certes il faudrait payer leur rapatriement, mais avec quelques charters ou autobus (pour éviter les incidents), cela peut être fait à moindres coûts, car il n'est pas question d'envisager pour eux la business class en direction de leur pays d'origine. Et qu'on ne vienne pas me parler de Sarkozy et de la double peine qui n'est qu'une ânerie plus que nous devons à ce prétendu grand homme d'État.

Dans tous ces débats, chacun lit midi à sa porte, qu'il s'agisse des criminologues, des sociologues, des gardiens de prison ou de tout autre catégorie socioprofessionnelle, sans parler des bonnes âmes toujours vigilantes.

Il est évident que la réflexion devrait d'abord s'attacher, en amont, à des problèmes comme celui je viens d'évoquer (Que faire d'un étranger qui commet un délit ou un crime sur notre sol national) ou à d'autres, tout aussi importants et plus facilement solubles, qui tiennent à une adaptation intelligente de la législation en cours lorsqu'elle est totalement inadaptée, voire stupide. Ainsi, est-il logique et raisonnable de menacer d'une peine de deux ans de prison un père qui ne paye pas la pension alimentaire à laquelle il est astreint ? L'emprisonner n'est pas-t-il pas le meilleur et le plus sûr moyen de maintenir cette situation, voire de la rendre inévitable ?

Il en est de même par exemple pour les délits routiers, même graves, où les peines d'emprisonnement sont évidemment infiniment moins efficaces que ne pourraient l'être des travaux d'intérêt particulier (et non général) qui seraient effectués, au domicile d'un accidenté ou mieux dans les centres et des hôpitaux qui accueillent les blessés de la route pour qu'ils y soient soignés ou éventuellement rééduqués. Je pense que voir, quelques semaines durant, les conséquences concrètes, dramatiques et pitoyables de leur conduite aurait plus de vertus correctives pour les chauffards que de séjourner en prison à regarder la télévision, picoler et fumer des clopes!

Pour en revenir à la question initiale que pose mon titre, le bon sens ne semble ni de droite ni de gauche mais je constate que le bon Descartes s'est largement mit le doigt dans l'œil et que le bon sens n'est en rien "la chose du monde la mieux partagée". Le problème est qu'on oublie toujours de lire la suite !

lundi 16 septembre 2013

Le bijoutier de Nice

Rassurez-vous, je ne veux pas vous en pousser une et le bijoutier de Nice n'est pas le pendant de l'artilleur de Metz encore que bijoutier flingueur soit porté sur l'artillerie !

Je ne reprendrai pas davantage le fond de l'affaire sur lequel on a dit tout et son contraire, car il est bien difficile de se prononcer, dans un cas comme dans l'autre, quand on est pas dans la peau de Monsieur Turk et qu'on n'a pas été agressé et molesté (ce dont fait foi son hospitalisation et les constats médicaux) après avoir été volé sous la menace d'une arme. Il est évident que, même dans ces conditions, la loi ne vous autorise pas à tuer l'un de ses agresseurs, même si l'on conçoit aisément qu'on puisse en concevoir une juste colère. De toute façon, ce n'est en rien la question de la qualification pénale de cet acte ni celle de son éventuelle sanction dont je voudrais parler ici.

En la circonstance, je ne fais appel ni à mon sens moral ni aux règles de la justice, mais à mon expérience, relativement brève et déjà forte ancienne, de deuxième classe de réserve, au terme d'un service militaire accompli, en revanche, dans le corps prestigieux de l'infanterie de marine, ce qui met un peu de beurre dans les épinards d'un deuxième classe.

Je ne sais pas trop de quelle arme disposait le bijoutier en cause et j'ai entendu parler de 7,65. Je ne peux donc alléguer en la circonstance que mon expérience de modeste utilisateur du MAC 50 qui équipait l'armée française à mon époque. Il s'agissait d'un pistolet automatique dont, rassurez-vous, nous ne faisions usage, durant la formation (FCB et CFCB pour causer militaire) que pour des exercices de tir, d'ailleurs relativement rares, car il fallait déjà ménager les cartouches dans une armée au budget limité.

Ce dont je me souviens en revanche très bien, c'est de la relative imprécision de nos tirs sur cible à forme humaine ; s'il n'arrivait que rarement qu'aucune des balles n'atteigne la cible, ce qu'on imputait à la mauvaise vue ou à la maladresse du tireur, il était en revanche courant que seules deux ou trois balles sur cinq soient dans la cible et elles étaient bien loin d'y atteindre la tête ou le cœur. Nous n'étions pourtant pas plus maladroits que d'autres sans être pour autant avec Clint Eastwood dans un western. Je constate d'ailleurs dans les documents, que j'ai par scrupule consultés, que le MAC 50 était généralement réputé pour sa faible portée ( 50 mètres au mieux ) et surtout son manque de précision. Je ne puis témoigner ici sur le premier point, mais suis tout à fait d'accord par expérience avec le second.

Il est donc certain que le bijoutier, volé et battu, a peut-être voulu atteindre son agresseur qui s'enfuyait sur le scooter de son acolyte et qui était donc vraisemblablement déjà à quelques dizaines de mètres de sa boutique s'il lui avait fallu le temps de prendre son arme, mais la chose était certainement impossible. Je pense en effet qu'on peut mettre au défi à peu près quiconque, même un tireur adroit, d'atteindre une cible mouvante relativement éloignée avec une arme de cette nature.
En revanche il aurait parfaitement pu louper sa cible et tuer une promeneuse ou un gamin qui jouait sur le trottoir ; ce genre d'exercice n'est donc assurément pas à recommander.

Je crois que cela ne change rien à son acte mais cela prouve surtout que ce bijoutier décidément fort malchanceux, puisque non seulement il se fait voler et rosser, mais, en plus, il a la malchance de tuer son voleur/agresseur qu'il avait une chance sur cent de l'atteindre et une sur mille de le tuer !

PS de dernière minute suite aux infos du matin : de l'Olympe (de Gouges) au Panthéon, il n'y a qu'un (grand) pas ! Tonnerre de Zeus ! Est-ce une petite blague de notre président qui se ferait helléniste ?

samedi 14 septembre 2013

Schizophrénie française.


J'ai déjà écrit sur ce thème, dans une autre perspective toutefois, un post dont je ne sais plus la référence que je n'ai pas le courage ni le goût de rechercher. J'y avais attiré l'attention sur la schizophrénie manifeste qu'engendre une foule de messages publicitaires qui nous recommandent un usage, un produit ou une attitude, tout en nous invitant, suite à une obligation légale, dans le même message, à nous en écarter de notre mieux.

Les messages de publicité pour les aliments ... gras, sucrés, salés… (rares sont ceux qui ne le sont pas et souvent ils ont même deux de ces caractères !) sont toujours immédiatement suivis d'un appendice que la loi rend obligatoire et qui nous invite à les consommer avec modération, voire à nous en abstenir. Il en est de même pour les alcools, ce qui n'empêche pas qu'on en fasse la "réclame", ce qui me semble contraire à la loi Evin (drôle nom pour cette loi !). Désormais, on peut ajouter à cette longue liste, tous les jeux et les paris dont la publicité nous accable à tout moment, surtout dans les émissions sportives et avec la complicité scandaleusement racoleuse de vedettes du sport déjà millionnaires ! Là aussi la modération nous est antagoniquement conseillée, le cas échéant par le recours à d'autres officines, probablement mises en place par ceux qui font cette publicité elle-même et qui doublent ainsi leurs profits.

La schizophrénie est également provoquée, mais, cette fois-ci de façon fortuite et plus rare, par des télescopages d'informations dont j'ai entendu de jolis exemples, ce vendredi 13 septembre 2013 au matin. Que de 13, alors que nos escrocs des jeux de hasard sont tellement le nez dans le guidon qu'ils ne semblent même pas avoir pris garde à la chose ! Je ne donne cette précision que pour vous permettre de vérifier la véracité et l'exactitude de mon propos.

Sur une des radios bignoles que j'écoute distraitement le matin, j'ai ainsi entendu une publicité en faveur de la mise en chantier de travaux de toutes sortes pour l'aménagement de nos maisons (publicité sans le moindre doute par les artisans du BTP) ; vers 9 heures, elle précédait immédiatement l'information qui nous avisait de la colère des artisans du bâtiment, tous au bord de la faillite, situation qui les amenait à faire grève dans la journée et surtout à organiser des défilés et des "opérations escargots". Ce choc de ces deux annonces m'a fait penser à cette fameuse campagne de publicité de la SNCF qui, il y a quelques années, avait été si opportunément lancée au moment même où les cheminots entamaient une grève. Cela dit les ramener sur les chantiers éviterait qu'ils ne bloquent nos routes !

Comme s'il fallait ajouter à la chose, un autre joli télescopage communicationnel s'est produit aussitôt peu après. Après le déferlement quotidien des publicités automobiles (comme chacun le sait, le parc automobile français fonctionne pour les deux tiers au diesel), on a entendu, à propos de l'abandon de l'idée de surtaxer le gaz-oil, une déclaration indignée de Cécile Duflot qui attirait notre attention sur le drame que cause la circulation des modèles diesel qui engendrent, chaque année, 46 000 décès et coûtent, de ce fait, une fortune à la Sécurité Sociale (on est tenté d'ajouter mais fait des économies sur les retraites !).

Dans une société pareille, comment ne pas devenir schizophrène quand l'omniprésente et obsédante publicité nous pousse, à chaque instant, à faire des choses ou à consommer des produits dont on nous dissuade par ailleurs, dans le même mouvement, de faire usage. Je constate d'ailleurs que cette publicité, qui nous submerge aux heures de grande écoute est de plus en plus honteuse et se dissimule tant bien que mal. Notez qu'à ces heures, sur dix minutes de temps d'antenne, la moitié est occupée par la publicité dont on n'ose même plus prononcer le nom ! On ne sait plus d'ailleurs si on a affaire à des émissions qu'on entrecoupe de messages publicitaires ou à une succession des messages publicitaires qui font place, par moments, à un discours radiophonique autre. Fait significatif, le mot "publicité" lui même est totalement proscrit dans les médias audiovisuels, radio ou télé. L'officiant, qui est au micro ou devant les caméras, prenant un air dégagé, s'arrête de parler, d'interroger ou de faire causer ses chroniqueurs (belle expression pour des gens dans le rôle le rôle se borne à glousser et à rire pour entretenir une ambiance prétendument joyeuse) et nous annonce alors, non pas les minutes interminables de pub que nous allons devoir subir, mais une COURTE PAUSE (tu parles !). Soyez sûrs que ça n'est pas pour que le principal intéressé aille aux toilettes ou pour que puissiez boire vous-même votre pastis ou votre café ; c'est toujours l'annonce , hypocrite et mensongère, d'une avalanche de messages publicitaires. Il n'y a là en rien une "pause" qui, par définition même, doit toujours être plus brève que l'activité majeure. 

Mais on ne va tout de même demander aux demeurés, qui meublent nos antennes et occupent nos écrans, d'être honnêtes et, en plus, de connaître la langue française !

mercredi 11 septembre 2013

"Journaleux" ou "journalistes-sic".


Je crains que ça ne devienne chez moi une habitude que je réprouve chez les autres, mais je vais être obligé, contre tous mes usages, d'évoquer ma vie personnelle pour expliquer le titre de ce post.

Je soupçonne mon père, qui m'avait appris à lire lui-même avant que j'aille à l'école primaire (ce qui a eu pour conséquence immédiate de me faire virer de la classe par l'institutrice au cours de ma première heure de cours préparatoire !), de l'avoir fait dans Le canard enchaîné qui a toujours été, depuis ma plus tendre enfance, une lecture familiale. J'ai donc gardé de la fréquentation de cet hebdomadaire l'expression « journaliste sic» » qu'il semble aujourd'hui avoir abandonnée ; je l'interprétais, dans un sens clairement péjoratif car elle s'appliquait à des journalistes, extérieurs au Canard, qu'il fallait bien se résigner à nommer ainsi, faute d'un autre terme ;  le "sic", adjoint au mot "journaliste", marquait une forte réserve quant à la légitimité d'une telle dénomination. C'était un peu, au fond, l'emploi de ce même [sic], tel qu'on le met, entre crochets, dans une citation pour y relever une faute d'orthographe, une erreur ou une anomalie qu'on veut souligner en tant que telles, en empêchant par là qu'elle soit portée au compte d'une étourderie au plan de la citation.

Après avoir donné ce titre à ce billet, saisi de doutes, je me suis interrogé un peu plus sur cette expression. Je suis allé la chercher dans Google et j'ai été très étonné de ne pas la trouver. Je livre donc cette question à la sagacité de qui pourrait fournir de cette expression une explication autre et éventuellement plus satisfaisante. Quelle que soit l'origine de la formule, son sens est clair et la grande majorité des journalistes français sont ce que Le canard enchaîné d'autrefois appelait des "journalistes sic" et qu'on pourrait peut-être plus clairement nommer, car le mot est dans le Trésor de la langue française, des "journaleux".

En fait, le point de départ de cette courte méditation sur le journalisme français a été de songer à ce qu'il est, dans nombre de ses figures majeures, une gérontocratie, d'autant plus notable que l'on parle, en ce moment même, de la question des retraites et, en particulier, de la prise en compte de la pénibilité.

Le nombre des septuagénaires qui hantent les rédactions, en particulier dans l'audiovisuel, est tout à fait impressionnant ; la génération des 70 à 75 ans (d'Elkabbach ou Yvan Levaï à Carreyrou en passant par Alain Duhamel, Catherine Ney, Robert Namias ou Charles Villeneuve - les "grandes voix d'Europe 1" (tu parles !) - et des dizaines d'autres – y tient une place d'autant plus grande que ces journalistes exercent un métier dont on ne sait s'il figurera parmi les travaux à pénibilité particulière, ce dont on peut douter à voir la façon dont ils exercent et cumulent leurs emplois.

La pénibilité de ce métier ne paraît pas trop grande non plus, si l'on en juge par l'atmosphère des rédactions qu'il m'a été donné de voir par le passé, par l'activité que montrent à l'antenne ceux qui y sont admis et dont le rôle se borne à lire des prompteurs où sont reproduites des dépêches d'agence ou des textes qu'ont rédigés, selon la même procédure et à partir des mêmes sources, leurs assistant(e)s (car dans ce métier, on a souvent, en outre, des assistant(e)s).

Un indice de la grande pénibilité de cette activité tient aussi au fait que, très souvent, ces "journalistes sic" fonctionnent dans plusieurs médias et passent allègrement d'une radio à une autre ou une chaîne télé à une deuxième, la mise en boite leur garantissant le don d'ubiquité, cumulant le plus souvent les emplois, surtout depuis la multiplication des chaînes et l'arrivée des chaînes d'information continue. La chose est sans inconvénient apparent, vu la nullité uniforme de la plupart de leurs interventions.
Je n'ai jamais eu la patience de chronométrer le temps de parole des multiples intervenants auxquels le journaliste-vedette d'une des grandes chaînes nationales fait appel sur tel ou tel sujet dont il nous est toujours présenté comme "le spécialiste", ce dont nous fait douter l'indigence, pour ne pas dire la trivialité, du propos.

Il faut reconnaître qu'à les entendre, on se demande souvent d'où sortent la plupart des "journalistes sic" de l'audiovisuel. Faut-il poser en principe que la place de la gérontocratie que j'évoquais précédemment, résulte du fait que les septuagénaires sont meilleurs que les nouveaux venus, même si l'on ne peut que s'étonner quand on regarde, d'un peu près l'origine des vedettes de nos écrans, et nos micros. Ce sont souvent comme l'ineffable Jean-Jacques Bourdin ou Drucker d'anciens reporters sportifs ou comme Robert Namias de vagues ex-adjoints d'enseignement De la même façon France2, au personnel déjà pléthorique, a recruté en 2012 comme rédacteur en chef du service économique, un "économiste" qui se proclame tel avec deux maîtrises...l'une de lettres modernes, l'autre de philosophie !

Toutefois, tout indique que la principale qualité que l'on exige des "journalistes sic" de l'audiovisuel n'est ni la culture, ni le savoir, ni la curiosité ni la facilité de parole, car la moindre de leurs prestations démontre qu'ils sont dépourvus de toutes ces vertus à la fois, mais la souplesse de l'échine car la servilité est, on ne sait trop pourquoi, la première qualité de ces "journaleux" français, tant devant les annonceurs (ce que l'on comprend car ils assurent leurs revenus) que devant les politiques, sans doute par habitude.

On se demande en effet la raison de tels comportements, car la plupart des hommes politiques, qui sont en recherche permanente de passages à la radio comme à la télévision, viendraient à genoux se faire interviewer, ce qui consiste désormais pour eux à débiter ce qu'on appelle désormais si improprement et si stupidement "des éléments de langage". Ils ne savent même pas, le sens d'une telle expression qui, en général, ne qualifie que de simples argumentaires.

Un exemple entre dix, au hasard, car j'évite, en général, ces consternants spectacles,. l'interview de Laurent Fabius par un certain Letellier sur France3 il y a deux ou trois jours ; la question était évidemment la responsabilité dans l'usage du sarin en Syrie. Comme d'habitude, tournant autour du pot, le journaleux n'a pas posé la seule bonne question qui est très simple : « La commission d'enquête de l'ONU est-elle chargée d'identifier les responsabilités dans cette affaire, puisque tout le monde sait qu'il s'agit de gaz sarin ? ».

Qu'attendre du rapport de cette commission sur ce point ? La réponse est évidemment " Rien !" puisque, non seulement cette commission n'est pas chargée de déterminer les responsabilités dans le gazage, mais qu'il lui est, au contraire, formellement et totalement interdit, de prendre position sur cette question.

Fabius, de toute sa hauteur de très ancien "plus jeune Premier ministre de France" nous a donc parlé de tout et de rien ; il nous a débité les "éléments de langage " du MAE en cinq points, sans répondre évidemment à une question qui ne lui avait pas été posée et en se répandant en considérations sur n'importe quoi, sans que le journaliste cherche à le faire revenir au véritable objet du débat.

Comme je l'ai déjà dit, mais comment ne pas le répéter, les journalistes sic français sont tellement aux ordres qu'il n'y a même pas besoin de leur en donner puisqu'ils les préviennent en tous points.

Bis repetita chez Bourdin qui, ce mardi 10 septembre 2013, au matin sur RMC, recevait Moscovici. Bourdin lui se flatte (il roule toujours les mécaniques... après le départ de l'interviewé) de poser les "bonnes" questions, mais se satisfait toujours aussi de l'absence de réponse, au lieu de virer immédiatement du studio l'intéressé, devant une telle attitude de sa part !

La vraie question est de savoir ce qui cause une telle servilité. Les explications qui sont avancées dans le domaine ne tiennent guère. Quand il s'agit de la presse écrite, on prétend, en effet, que cette presse, moribonde, dépend entièrement de l'État qui la fait survivre par des subventions, des publicités et des formes d'assistance plus ou moins dissimulées. Le curieux de la chose est que cette presse écrite montre plutôt plus d'esprit d'indépendance que la presse audiovisuelle qui, elle, est totalement servile. Petits mystères sur lequel j'aimerais que me donnent des éléments d'explication des gens qui sont plus perspicaces ou mieux informés que moi.

mardi 10 septembre 2013

"Qatar, perle ou perlouze d'avenir ?"


Comme je le fais souvent, avec des fortunes diverses, samedi dernier, le 7 septembre 2013 aux alentours de 16h45, j'ai zappé pour tomber, par hasard, sur France 5 où était diffusé, à 16 heures 35, un documentaire sur le Qatar au titre prometteur "Qatar, perle d'avenir".
Il m'est rapidement apparu qu'il s'agissait moins d'un véritable documentaire que d'un film publicitaire, de toute évidence financé par cet émirat qui, pour la circonstance, s'était offert les services d'un certain Pierre Brouwers que je ne connais pas par ailleurs et dont je ne sais pas si l'activité cinématographique consiste essentiellement dans ce genre de production. Ce prétendu documentaire était, en fait, sans équivoque quant à sa nature et ses fins. Je l'ai regardé jusqu'au bout à la fois pour voir le nom de son auteur et les conditions de sa production. Il m'est apparu que Monsieur Brouwers avait à peu près tout fait dans ce film ; j'espère qu'il lui a rapporté gros car il ne contribue guère à sa gloire.

Je n'ai pas tout vu puisque j'ai pris l'émission en marche, mais je dois dire qu'à la réflexion, le premier trait que j'en ai conservé en mémoire est que, dans la quarantaine de minutes que j'en ai vu (ce chef-d'œuvre dure 55 minutes), je ne crois pas avoir vu une seule femme. En cherchant ensuite les renseignements, le lendemain sur Internet, j'en ai aperçu une, sur une photo, mystérieusement et totalement voilée, mais qui apparemment n'est présente que dans la publicité et non dans la production elle-même.
Bref un univers exclusivement masculin peuplé de dishdashas, de dromadaires de faucons et de sabres ; on se demande un peu comment on peut espérer par là faire la promotion touristique de ce sinistre pays, car cela semble bien être là le but ultime d'un tel film.

Le choix du sport comme moyen majeur de faire connaître cet Etat est tout aussi insolite car, s'il est facile, on l'a constaté, d'acheter les votes des notables comme des Commissions de ceci ou de cela, faire du sport au Qatar est une toute autre affaire. On nous, a cette fin, montré par exemple une course cycliste-bidon, dont je ne sais pas où et quand elle se déroule car, dans un pays où il fait sans doute en moyenne 45° (j'allais dire à l'ombre mais il n'y en a pas !), l'activité sportive est forcément très limitée, sauf si elle se déroule en milieu marin! Je ne connais pas le Qatar, mais il m'est arrivé assez fréquemment d'aller à Djibouti et j'imagine que les conditions climatiques sont à peu près les mêmes en ces deux lieux, ce qui me laisse assez facilement imaginer les températures du premier à partir de celles du second (40° à 4 heures du matin et les oeufs cuits au soleil sur une tôle !).

En dehors de la promotion sportive (car vu leurs accoutrements habituels, les Qatari ne doivent guère s'adonner aux véritables activités sportives elles-mêmes), les seules activités sont la chasse au faucon et la course de dromadaires où le sport est fait par les animaux! Dans un cas comme dans l'autre, l'évolution de la civilisation locale (si l'on se risque à user d'un terme si clairement inapproprié) se marque par la modernisation inattendue de ces deux activités traditionnelles, qu'on verra sans doute un jour aux Jeux Olympiques du futur, si le Qatar y met le prix.

Pour les faucons, ils sont, semble-t-il, l'objet de soins beaucoup plus attentifs que les femmes ; non seulement on les soigne mais on va même jusqu'à leur remplacer les plumes, au cas ou l'une d'entre elles justifierait le recours à ce remède. Je ne sais pas s'il y a au Qatar des maternités mais il y a, en tout cas, des cliniques pour faucons. La chasse aux faucons est également modernisée puisque les faucons sont désormais équipés d'émetteurs qui permettent à leurs maîtres d'éviter de se fatiguer à rechercher le lieu où ils ont capturé leur proie ; ils peuvent les retrouver aisément grâce à cet émetteur dont l'oiseau est pourvu. En revanche si leurs plumes souffrent parfois, la vue des faucons ne semble jamais altérée, puisque on ne nous a pas montré ni de centres d'ophtalmologie pour faucons ni de faucons porteurs de lunettes !

La course traditionnelle de dromadaires, qui reste fort appréciée, a été aussi sensiblement modernisée dans la mesure où l'on a réussi à porter remède aux inégalités qu'introduisaient dans ces courses, les poids différents des enfants qui servaient de jokeys est aux dromadaires. Notons-le au passage : on a dans le recours à ces enfants jockeys, la preuve, indirecte certes mais sûre, qu'il y a bien des femmes au Qatar et qu'elles sont en mesure d'y faire, de temps en temps, des enfants. Les dromadaires de course sont désormais équipés de robots-jockeys électroniques, dont le poids est égal pour tous et qui permettent de les driver pendant la course ; ces robots sont même équipés pour donner éventuellement des coups de cravache sur l'ordre des propriétaires transmis par radio émetteur. Fascinant non ?

Mais le spectacle qui valait le plus le déplacement et vous aurait fait prendre sur le champ un billet pour Doha sur Air-Qatar était constitué par une danse qui était le bouquet final ; on voyait une bonne douzaine de Qatari, toujours en costume local, qui, munis de sabres étincelants (un chacun !), exécutaient sur place des mouvements lents à claires visées guerrières ; j'en ai vu autrefois des versions nettement plus paupérisées mais tout à fait identiques aux Comores.

Bref un spectacle global totalement désespérant et qui ne peut qu'encourager le touriste à fuir un pareil pays.

Il faut bien que je finisse par expliquer mon titre : "Le Qatar perle ou perlouze de l'avenir ?". On pardonnera à mon indignation de se montrer ici quelque peu irrespectueuse voire vulgaire en conservant en l'occurrence le mot "perle" mais en lui donnant le sens argotique et grossier qu'a son dérivé "perlouze" qu'affectionnait en particulier Jean Genet. Pour valider cette remarque et la légitimer, je vous donne, en prime, la définition du Trésor de la langue française qui reste mon recours habituel en pareille circonstance :
"Perle : REM. 1. Perlouse, perlouze, subst. fém., arg. Pet. Qui c'est qu'a lâché une perlouse? (LACASSAGNE, Arg. « milieu », 1928, p. 154). V. supra ex. de Genet."

lundi 9 septembre 2013

Much ado about nothing ou "Alors, on ne retient plus ici?"

Le titre anglais de Beaucoup de bruit pour rien joint à l'exotisme linguistique la rare capacité de pouvoir s'adapter à une foule de sujets, tant l'information dont on nous abreuve sans cesse est d'une consternante nullité quand elle n'est pas totalement fausse.

Je reproduis ci-dessous des extraits d'un article paru dans Les Echos (7/09/13) pris un peu au hasard (les articles sont tous les mêmes, issus de la même AFP) sur la question de la relation entre l'Union européenne, les États-Unis et la Syrie, sans avoir eu de raison particulière de faire ce choix. Je ne reproduirai d'ailleurs que les extraits ce texte qui me paraissent intéressant dans la perspective qui est ici la mienne, en y adjoignant, entre crochets, comme c'est la règle pour des ajouts à un texte, les numéros des notes que je propose, après avoir mis en gras (de mon fait donc) mes remarques sur chacun des points ainsi signalés. Ces notes seront numérotées de 1 à 10 pour plus de clarté :

"Les pays de l’Union européenne se sont entendus samedi sur le fait que le monde « ne peut rester les bras croisés » [ 1 ] et qu’une réaction claire et forte[ 2 ] est nécessaire pour empêcher de nouveaux bombardements[ 3 ] à l’arme chimique en Syrie, a déclaré Catherine Ashton.
Réunis à Vilnius, les ministres des Affaires étrangères des Vingt-Huit sont aussi convenus que les informations à leur disposition semblent clairement indiquer [ 4 ] que les autorités syriennes sont responsables de l’attaque chimique commise le 21 août dans les environs de Damas |...] « (Le gouvernement syrien) est le seul à posséder des armements chimiques et les moyens de les utiliser dans une quantité suffisante [ 5 ]», a-t-elle dit.
Les Vingt-Huit ne sont toutefois pas allés jusqu’à soutenir le principe d’une intervention militaire[ 6 ] contre le régime de Bachar al Assad, prônée par la France et le président américain Barack Obama. [...]
Selon Catherine Ashton, les ministres européens des Affaires étrangères se sont félicités de l’engagement de François Hollande d’attendre le rapport des experts de l’Onu avant toute initiative [ 7 ] sur la Syrie. Ce rapport est attendu aux alentours de la mi-septembre. [ 8 ]. [   ]
Pour les Etats-Unis, cependant, pas question d’attendre impérativement la publication du rapport pour frapper Damas[ 9 ], a indiqué samedi un responsable américain, en marge de la visite de John Kerry en Europe. Au cours d’une réunion avec les 28 ministres des Affaires étrangères [ 9 ] [...] le chef de la diplomatie américaine a « également dit clairement que les Etats-Unis n’avaient pas décidé d’attendre » ce rapport pour éventuellement agir [ 10 ], a précisé ce diplomate " (Extraits de Les Echos).

Note 1. "Le monde ne peut rester les bras croisés". Diable ! Fort bien, décroisons donc les bras, mais comme les choeurs d'opéra ou, dans une version plus moderne, Michaël Jackson,chantons "En avant ! Marchons !" tout en restant sur place ! J'ai, dans un billet précédent et par là même prémonitoire, attiré l'attention sur une confusion de prépositions souvent faite par nos journalistes, peu familiers apparemment avec la langue française, et qui confondent "prêt à" et "près de"! Il me semblait, en effet, que si Français et Américains se disaient "prêts à intervenir" en Syrie, ils ne me paraissaient pas en état d'être "près de le faire". Je constate que j'ai eu raison sur le plan géopolitique comme grammatical.

Note 2. Je ne sais pas si, décroiser les bras conduit toujours à croiser les jambes et s'il y a là une "réaction claire et forte"?

Note 3. "Bombardements à l'arme chimique" nous dit-on ; il est clair que le choix et l'emploi du terme "bombardements" vise, en réalité, à désigner d'avance comme l'auteur de l'utilisation de cette arme chimique Bachar el Assad, car il est évident que ses opposants ne disposant pas de forces aériennes, ils ne peuvent pas procéder à des bombardements au sens courant de ce terme. Il y a donc là une prise de position sur la responsabilité dont on aimerait avoir les preuves, puisque, selon d'autres sources, l'origine de ces armes chimiques pourrait être autre. Les terroristes japonais du métro qui utilisèrent le gaz sarin n'avaient pas d'avions ni de bombes!

Note 4. Il y a là une curiosité stylistique ; "semble clairement indiquer" est en effet une formulation contradictoire dans les termes qui se veut un compromis ou un amalgame, sémantiquement douteux, entre "semble indiquer" qui marque un doute fort qu'exprime le verbe "semble" et "indique clairement" qui traduit, en revanche, une quasi certitude. "Semble clairement indiquer" est donc évidemment impossible car illogique !

Note 5. Affirmer que le gouvernement syrien est le seul à posséder des armes chimiques est évidemment faux. Il y en a des tonnes partout dans le monde. Une information circule partout, même si la presse française, aux ordres ou ignorante, nous la cache soigneusement. L'Arabie Saoudite, qui combat le régime syrien et qui dispose de vastes stocks d'armes chimiques, en aurait donné aux rebelles qu'elle soutient ; ceux-ci soit par maladresse, soit par perversité, les auraient utilisées contre des populations. Le gaz sarin ne cible guère ses victimes ! Je note à cet égard qu'il y a, quant au nombre même des victimes, plus qu'une incertitude puisque selon les sources, il varie beaucoup ; selon la Croix-Rouge, il y en aurait eu environ 150, alors que selon les sources proches de la France et des États-Unis, il y en aurait 1500 ; cet écart de 1 à 10 semble considérable.

Note 6. L'Europe fut et demeure latine. Festina lente (= Hâte toi lentement) ; les 28 qui veulent une "réaction claire et forte" "ne sont pas allés" (jolie litote !) "jusqu'à soutenir le principe d'une intervention militaire". "Ne se sont pas résolus à se résigner à aller" eût encore mieux traduit l'enthousiasme belliqueux de l'UE ! En quoi pourrait bien consister "la réaction claire et forte" annoncée ? Cela peut aller des sourcils foncés jusqu'à la moue de réprobation !

Note 7 . François Hollande s'est engagé, après coup, à attendre le rapport des experts de l'ONU avant toute initiative ; on le croyait "près de" mais il n'est pas encore éventuellement "prêt à" (cf. supra !).

Note 8. Le rapport est attendu aux "alentours de la mi-septembre". Les experts étant revenus déjà depuis plusieurs jours et ne pouvant nous dire que ce nous savons déjà tous (l'usage du gaz), il serait bon de leur donner, de toute urgence, un secrétariat actif et dynamique, afin que ce rapport soit rédigé au plus vite. Tous ces propos font apparaître que, comme je soulignais dans un précédent blog, personne, dans la presse nationale, ne semble connaître les termes précis de la mission confiée aux experts de l'ONU. Il est clair (cette condition avait été mise à la signature de l'autorisation de l'expertise par la Syrie) qu'il leur est rigoureusement interdit de mentionner dans ce rapport quelque responsabilité de qui que ce soit dans cette affaire. De qui se moque-t-on?

Notes 9 et 10. In cauda venenum ! "Pour les Etats-Unis, cependant, pas question d’attendre impérativement la publication du rapport pour frapper Damas", [.9.] [...] Mais le chef de la diplomatie américaine a « également dit clairement que les Etats-Unis n’avaient pas décidé d’attendre » ce rapport pour éventuellement agir,[ 10] a précisé ce diplomate. Il faudrait tout de même savoir car dans de telles affaires, on ne peut dire tout et son contraire. Que faut-il comprendre : "Il n'est pas question d'attendre' ou "il n'est pas question de ne pas attendre ?

Obama me fait penser à ce personnage marseillais qui, aux prises avec un malabar à qu'il a un peu imprudemment proposé de "sortir", s'attarde sur le seuil en demandant à la cantonade : "Alors, on ne retient plus ici ?".

samedi 7 septembre 2013

G 20 : le Bonhomme Sounga de l'Élysée.

Le titre de ce billet est étrange, je le reconnais, mais j'avais, dès le départ, la ferme intention de le précéder d'une explication, car il m'a été inspiré par la vision, en direct s'il vous plait, de la conférence de presse du président François Hollande après le sommet du G20 à Saint-Pétersbourg.

Je dois dire, à ma décharge, que je n'ai pas fait exprès de me mettre devant cette émission ; je n'y suis arrivé que hasard, alors que j'espérais voir l'un des quarts de finale de l'Open de tennis américain. Faute de grives….

Cette conférence de presse où les journalistes semblaient être, pour l'essentiel, des Français, m'a confirmé dans deux opinions auxquelles je me tiens avec beaucoup de constance :

La première est que les journalistes français de l'audiovisuel sont d'une complaisance qui confine le plus souvent à la servilité. Je résumerai volontiers cela dans une formule que j'ai dû utiliser déjà quelque part : ils ne sont même pas aux ordres ... puisqu'il n'y a pas besoin de leur en donner et qu'ils les préviennent toujours et partout. J'illustrerai dans la suite ce propos par un exemple, à l'occasion même de cette conférence de presse.

La seconde opinion est que notre président François Hollande est un homme à qui il n'est pas facile de faire exprimer une opinion quelque peu tranchée. Je ne crois pas être très original en ayant fait ce constat, mais je pense que trente années de parti socialiste et la réputation qu'il s'est acquise dans les congrès par son talent reconnu pour les synthèses confirment ce trait de son caractère.

Lors de cette conférence de presse que j'ai prise en route, au moment où il parlait de l'intervention éventuelle en Syrie, il m'a fait irrésistiblement penser un personnage de la tradition populaire de l'île Maurice, que l'on nomme là-bas, en créole, le "Bonhomme Sounga". Ce "Bonhomme Sounga", est, au fond, notre "marchand de sable" .Lorsqu'on essaye d'endormir un enfant le soir et qu'il fait quelques difficultés à s'endormir, on lui annonce la venue du "Bonhomme Sounga". Au moment où il a enfin trouvé le sommeil, en fermant précautionneusement la porte de sa chambre, on annonce à la cantonade : "Bonhomme Sounga ine passé"  ; c'est-à-dire, en français, le "Bonhomme Sounga est passé", il ou elle dort !

Comme il fallait bien que j'explique ce nom assurément inconnu de tous les lecteurs peu familiers de la tradition de l'île Maurice, j'ai eu la prudence de vérifier dans Google et j'ai été ahuri d'y trouver au moins deux textes faisant référence au "Bonhomme Sounga" qui d'ailleurs donnent, l'un et l'autre, une version différente de ce que j'en sais moi-même et que j'ai souvent eu l'occasion de vérifier auprès de locuteurs mauriciens. Le "Bonhomme Sounga" apparaît dans deux livres comme un personnage menaçant alors que la nuance de menace est, en général, très discrète. L'un des textes est extrait d'un ouvrage paru sous le titre Made in Mauritius ; il est d'Amal Semtohul et j'ai eu la stupeur de constater qu'il avait été publié dans la collection "Continents noirs de la NRF chez Gallimard" (ce qui est pour le moins étrange, s'agissant de l'Ile Maurice !) et dans lequel le bonhomme Sounga n'a pas du tout la figure que je lui connais dans ce que je sais de la tradition mauricienne que j'évoque. Dans une autre référence, moins illustre, le "Bonhomme Sounga" a aussi un aspect beaucoup plus effrayant et là, curieusement, on fait venir le nom de Sounga du wolof (ce qui est une manie un peu fâcheuse dans l'étymologie mauricienne), tout en le mentionnant parmi les figures de la fête du Goon, ce qui est un peu contradictoire avec l'origine sénégalaise, puisque cette tradition est évidemment d'origine indienne. Passons sur ces détails car je me garderai d'ouvrir une controverse ici sur pareil sujet.

La puissance dormitive du "Bonhomme Sounga" de l'Élysée est assurément bien supérieure à celle de notre "marchand de sable" voire du "Bonhomme Sounga" des petits Mauriciens. Je vous résume en quelques lignes un bon quart d'heure d'argumentation de François Hollande ; il a démontré l'impérieuse nécessité d'attendre le rapport des experts de l'ONU, dont il ne doute pas un instant qu'il corrobore les conclusions des services d'information français, tout précisant au passage mais vraiment au passage (car apparemment personne n'a entendu la chose sauf moi) que le but de cette enquête, non seulement n'est pas de déterminer qui avait envoyé ce gaz sarin, mais surtout qu'on n'en parlerait pas de cette responsabilité, puisqu'il est interdit aux experts envoyés sur place d'avancer quelque hypothèse que ce soit sur ce sujet.

Je le savais personnellement depuis le début de l'affaire, mais je n'ai pratiquement jamais entendu les journalistes (et Dieu sait qu'ils ont parlé et écrit sur le sujet) faire mention de cette interdiction dont je vous livre ci-dessous le texte estrait de la "lettre de mission".
"Le mandat des inspecteurs est d'évaluer s'il y a eu utilisation d'armes chimiques ou non, mais pas de déterminer qui en est responsable."

Bien entendu la Syrie d'Assad n'a donné son accord à l'ONU pour la visite des experts, qu'après que cette condition, qui vide la mission de tout contenu et de toute portée, ait été acceptée.

J'entendais ce matin encore au journal de 9 heures sur France Culture (et non une de nos radios-bignoles) dire que l'intervention militaire n'aurait lieu que si la mission de l'ONU faisait enfin apparaître que l'envoi des gaz a bien été fait par Bachar el Assad. Quelle réponse peut-on attendre à une question qu'il est FORMELLEMENT interdit de poser ?

À moins qu'ils n'aient tous et toutes été totalement endormis, voire anesthésiés par le discours du président François Sounga, comment aucun journaliste (à chaque main levée j'attendais la question évidente) n'a songé un instant à lui poser cette question, auquel il aurait été fort embarrassé de répondre autrement que par la vérité, qu'il avait lui-même évoqué d'un mot, démontrant par là même qu'il ne s'agissait là que d'un artifice pour différer indéfiniment la réponse à la seule question essentielle qui, comme dans l'affaire Dreyfus, « ne devait pas être posée » !

vendredi 6 septembre 2013

De Damas et Carthage : de la Syrie à l'antisémitisme


Hier matin, 5 octobre 2013, sur Europe, vers 8 heures 40, j'écoutais d'une oreille distraite la prétendue revue de presse de Natacha Polony où, celle-ci; dans un souci légitime et méritoire, se préoccupe de raconter un peu autre chose que ce qu'on a déjà entendu dix fois dans la journée dans tous les médias audivisuels, dont la chaîne de radio-bignole où elle officie.

Bien entendu, il était question de la Syrie et Natacha Polony, qui se voulut autrefois professeur de lettres (elle passa l'agrégation de lettres modernes avant de démissionner de ses fonctions - au terme du délai de rigueur j'espère - pour adopter une profession plus agréable à ses yeux), y a fait un discours que j'ai jugé assez confus (j'ai pris le train en marche) sur les Romains, qui avaient fabriqué leur verbe "punio" (= punir) à partir du nom de leurs ennemis jurés, les Carthaginois, dont la tradition romaine dénonçait la "fides punica", la (mauvaise) foi punique alors que la "fides romana" n'était sans doute pas bien meilleure.

Ce désir d'élever le niveau culturel des auditeurs d'Europe est parfaitement légitime, encore que la tâche soit rude, et il semble une des préoccupations majeures de Natacha Polony. Quoique ses prestations soient sans doute parmi les meilleurs de notre paysage audiovisuel et si ignorants que soient ses auditeurs, elle aurait du s'informer un peu davantage et surtout mieux car, sauf erreur de ma part, le latin figure toujours au programme de l'agrégation de lettres modernes, si c'est souvent sous la forme d'une simple épreuve d'initiation.

L' étymologie proposée par Natacha est jolie mais elle est malheureusement totalement fausse ; elle aurait pu toutefois la rendre plus vraisemblable si elle avait rattaché le verbe latin "punire" pour son étymon à "poena" (= la peine, le châtiment) plutôt que d'aller chercher du côté de l'adjectif "punique" car le nom latin ancien des Carthaginois est "Poeni" (= Carthaginois/Phéniciens), ces populations étant réputées à l'origine être des émigrants venus auparavant, selon Hérodote, de la mer Rouge.

Les deux termes "poena" et "Poeni", en dépit des apparences, n'ont aucun rapport, sauf peut-être si l'on remonte très au-delà de la limite de mes propres connaissances. "Poena" (=le châtiment) vient du grec "poinè" ( je ne sais pas comment on accède à l'alphabet grec!) qui a le même sens et qui désigne le "prix du sang" alors que "Poenus" vient du grec "phoinix", les Carthaginois passant pour être à l'origine, comme on l'a vu, des Phéniciens.

Cela m'amène donc à une justification de mon titre de "Damas à Carthage" qui est, bien entendu, un double anachronisme, puisque, évidemment, aux époques reculées qu'on évoque ici ces deux villes n'existaient pas encore. Sur le rivage oriental de la Méditerranée, la Syrie était toute proche de la Phénicie (en gros le Liban actuel) et des émigrants de cette région sont venus s'installer au Maghreb me fournissant aimablement, du même coup, le titre de ce billet.

Dès lors la "fides punica" que dénonçaient les Romains n'est peut-être que la mauvaise foi des Phéniciens dont doivent être issue une partie des Syriens actuels. Cela m'amène à une dernière réflexion que je me fais souvent et parfois avec un certain amusement quand j'entends parler, en particulier du côté du monde arabe, des Palestiniens et des Maghrébins, de "l'antisémitisme"dont la cible exclusive seraient les Juifs. On oublie ou plutôt on ignore toujours que l'arabe comme l'hébreu sont des langues sémitiques et les Palestiniens, comme les Juifs sont eux-mêmes des Sémites.

Comme, dans le cas des prétendues étymologies latines de Madame Polony, il serait bon, de temps en temps, de remettre les pendules à l'heure et de dire ce qu'on cache ou qu'on ignore (comme pour Jacques Vergès dans la série de ma dizaine de précédents billets dans ce même blog!).