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lundi 30 janvier 2012

A front renversé ?

« à front renversé : (Militaire) En ayant le territoire ennemi derrière soi, en parlant de combattre. « Les Français qui étaient sortis de l’Argonne, avaient occupé la colline de Valmy d’où ils canonnèrent les Prussiens. Brunswick dut livrer contre eux une bataille à front renversé ; il fut surpris par l’allant des Français et la vigueur de leur canonnade ». (Guy Cabourdin, Yves Burnand, Encyclopédie illustrée de la Lorraine : Histoire de la Lorraine, volume 2, 1992, page 30) ».
Rassurez-vous, chère lectrice, cher lecteur, je n'entends pas ouvrir désormais, dans ce blog, une rubrique du type « Enrichissez votre vocabulaire », même si mon couplet sur les « scies » dans un précédent blog a pu vous en donner l'idée.
L'usage de cette expression militaire m’a été toutefois inspiré par l'émission que toutes les chaînes de télévision françaises ont consacrée hier soir à l'intervention de notre président de la République. On peut dire, en effet, qu'aussi bien lui-même que les deux journalistes chargés de l’interviewer , en dix minutes sur les 70 de l'émission, (je ne parle pas ici des représentants de TF1 et de France2 chargés seulement d’« animer » le débat) ont tous joué « à front renversé ».
Je n'insisterai pas sur le discours de notre président dont on pouvait penser, à l'entendre, qu'il était candidat à la succession d'un président de la République autre que lui qui avait mené, cinq années durant, une politique qu'il désapprouvait totalement et sur tous les plans, depuis la fiscalité du travail jusqu'à l'endettement global, en passant par la formation professionnelle, les coûts de revient de la production industrielle française (qui ont conduit à sa délocalisation) jusqu'à l’absence de production nationale et donc, par là-même, au chômage et à la stagnation du pouvoir d'achat. J'en suis venu à me demander, un moment, si Nicolas Sarkozy, vu ses louanges apputées de Schroeder n'avait pas, en douce, adhéré au parti socialiste, hypothèse que ne contredisaient, en rien, ses pointes contre François Hollande, ce comportement étant coutumier entre « camarades » au PS.  Assistions-nous là, en fait, à un troisième tour des primaires du PS ?
Tout cela donne à penser que la fonction présidentielle tend à oblitérer le jugement et qu'il serait donc souhaitable de raccourcir, à six mois par exemple, la durée du mandat présidentiel de façon à ce que son prolongement excessif n'entraîne pas sans cesse  l'aggravation de la situation du pays.
Toutefois mon propos est plutôt sur les journalistes.
Il n'y a pas grand-chose à dire sur ces interventions de Mme Chazal et de M. Delahousse puisque l'un et l'autre sont restés dans leur rôle et se sont, en gros, bornés à passer les plats avec, de temps en temps, de façon à prévenir le reproche de complaisance excessive, une pointe que le président de la République a écartée d'un revers de main, comme des vols d'insectes intempestifs.  
Mme Chazal s'est ainsi bornée à faire remarquer que deux des propositions présidentielles se trouvaient également dans le programme socialiste ce qui a entraîné de la part de notre président des froncements de sourcil qui ont suffi à la calmer dans la suite par la suggestion qu’elle avait appris par cœur le programme de F. Hollande. Quant à Laurent Delahousse, promu contre toute attente à la fonction majeure de minutage du débat, les deux ou trois épines qu’il a pensé avoir glissées sous les fleurs n'ont assurément pas entamé l'épiderme présidentiel.
Je me suis amusé beaucoup plus des interventions des deux journalistes économiques, François Lenglet et Jean-Marc Sylvestre qui passent l'un de l'autre, vu leur passé et leur position (BFM-TV pour le premier, TF1 et i-Télé pour le second), pour des suppôts du grand capital. Or, contre toute attente, de même que les déclarations liminaires du président de la République avaient des allures de forte contestation de la politique menée depuis une dizaine d'années, ces deux journalistes se sont montrés plutôt plus critiques et en tout cas, ont posé de vraies questions.
Il faut dire que, dans toute cette affaire, le rôle essentiel est tenu, non par les journalistes eux-mêmes, dont les questions sont tout à fait anodines pour les deux premiers et demeurent, pour la plupart, éludées et/ou sans réponse pour les deux autres, mais par les « metteurs en images ». Leur rôle est ici essentiel car il s'agit, en la circonstance, surtout de ne pas faire apparaître à l'écran les réactions de François Lenglet ou de Jean-Marc Sylvestre, lorsque les questions qu'ils posent restent sans réponse ou que les chiffres qu'ils avançent pour leur domaine de spécialité sont contestés ou même niés par l'interviwé. Ce dernier cas a été celui de François Lenglet, dont le président de la République a tout simplement annoncé que ses chiffres étaient faux, sans que Lenglet puisse faire autre chose que de murmurer dans sa barbe que c'était là ceux de l’OCDE, phrase que le metteur en images n'a pas été assez vigilant pour l’empêcher de passer à l'antenne. Dans le cas de Jean-Marc Sylvestre, sa désapprobation devant l'absence de réponse aux questions posées, s'est manifestée non dans des paroles mais par des moues et des grimaces dont malheureusement nous n'avons pu voir qu'un ou deux exemples furtifs.
Mme Chazal et M. Delahousse sont très vite revenus, pour dix minutes en supplément de l’heure prévue, après les deux trublions, pour la « séquence émotion », naturellement finale, avec une confession quasi douloureuse ("erreurs", "authenticité", "sincérité", etc.), dans le style people et sans autre intérêt que de faire penser, irrésistiblement, à la confession télévisée de DSK, dans un registre un peu analogue quoique différent.
L’amusant de la chose (toujours le facétieux hasard !) est que j'ai entendu, ce matin, François Lenglet intervenir, entre 8:00 et 8:30, sur France-Culture et dire, au micro de cette chaîne et en studio, bien des choses qu’on aurait aimé entendre de sa bouche lors de l'intervention télévisée !


dimanche 29 janvier 2012

L'énigme du jour

Il y a à gagner une tringle à rideaux pour celle ou celui qui trouvera pourquoi cette photo ouvre ce blog.

Je ne veux pas maintenir ce suspense insupportable et moins encore le prolonger, en mettant à la suite de ce blog un autre, avec comme illustration une photo de 404. L'un ou l'une d'entre vous a brûlé en proposant "article 403" de Wikipedia. En fait c'est là "l'article 403 de ce "nouvelles persaneries", puisque, avant ce dernier, j'en avait déjà publié 402 ! J'avais fait par hasard ce constat et il m'avait inspiré cette mauvaise blague. Mille excuses ; je serai désormais plus sérieux (mais je garde ma tringle à rideaux).

samedi 28 janvier 2012

"fendre l'armure" : Hollande vs Sarkozy

L'un des traits qui m'agacent le plus dans le langage journalistique commun est ce que l'on appelait autrefois une « scie ». Un petit commentaire sur ce terme, désuet et quasi sorti de l’usage (sauf du mien), pour lequel j’aurai recours, une fois de plus au Trésor de la langue française où on lit, en fin d’article il est vrai : « Scie : Phrase souvent répétée, plus ou moins amusante ou absurde; formule fastidieuse ou exaspérante par son usage répété ». Le problème, on va le voir, est que l’exaspération que provoque la scie peut tenir, non seulement à sa répétition mais également à l’impropriété voire à l’absurdité de son usage. Je vois assez mal en effet comment, dans le présent cas, une armure pourrait bien être « fendue ». Tout cela vous explique que j’ai isolé cette expression dans mon titre par de précautionneux guillemets.

Quelques exemples de scies récentes. Nous avons eu lieu, il y a quelques années, le mot « citoyen » qu'on mettait à toutes les sauces, y compris, abusivement, sous une forme adjectivale alors que nous disposons du mot « civique » qu'on avait tendance autrefois à réserver à une instruction qui n’existe malheureusement plus. Nous avons désormais l’adjectif "régalien" que toute la presse et le monde politique affectionnent, en oubliant son étymologie qui le rend impropre à un usage républicain.

Par une curieuse régression chronologique, après avoir connu la vogue du mot « citoyen » (qui évoque irrésistiblement le langage des sans-culottes et notre chère révolution), nous avons vu s’installer celle de cet adjectif « régalien » qui rappelle les usages de notre royauté ; voici désormais que, par une remontée encore plus sensible dans le temps, nous sommes revenus au Moyen-Age avec les armures. Nos hommes politiques, les uns après les autres, (il me semble que cette scie est née avec Jospin le parpaillot apparemment coincé mais secrètement, sinon paillard du moins détendu) « bandent largueur » (Ne soyez pas étonnés ; j’ai dicté « fendent l’armure » mais j'ai été mal compris ; je laisse, pour rire un peu, ce qu'a écrit mon logiciel de dictée qui, de temps en temps, m'en sort quelques-unes qui ne sont pas tristes et sont même parfois pertinentes !).

Pour nos politiques, « fendre l’armure » si j'ai bien compris, correspond à ce qu'on appelait autrefois « se déboutonner », par une métaphore moins noble et militaire que la première, mais sans doute plus exacte à plusieurs points de vue, puisque ce déboutonnage s'opère, en général, dans des discussions « off », souvent en fin de repas, quand on est porté à la confidence voire à la gaudriole.

À entendre et à lire la majorité des médias, samedi dernier, au Bourget, François Hollande aurait « fendu l’armure ». Par là, on fait allusion sans doute aux brèves confidences qu'il a faites sur ses origines et sur sa famille, mais personnellement, pour avoir vu son intervention, je n’ai pas eu du tout cette impression et j'ai même eu un sentiment exactement inverse. J'y reviendrai.

Au même moment ou presque, si l'on néglige le décalage horaire, Nicolas Sarkozy, recevant une bonne vingtaine de journalistes, lors d’un dîner organisé à cette fin, chez le préfet de Guyane, faisait une confidence « off » qui est apparue dans toute la presse le mardi. Il confia alors que s'il était battu, il renoncerait à la carrière politique et donc que, comme il l’avait déjà annoncé auparavant, il « ferait de l'argent ». Je crois qu’il pensait là aux présidents américains ou aux hommes politiques allemands et anglais qui, au terme de leur mandat, ont coutume de monnayer leurs conférences à travers le monde. Un des aspects à prendre en compte dans cette affaire est que ce genre de conférence doit inévitablement être fait en anglais !

Dans cette affaire, François Hollande et Nicolas Sarkozy, dans des interventions quasi simultanées me font penser aux passagers de ces ascenseurs vitrés qui, dans certaines tours modernes, se croisent et se font face à mi-parcours. François Hollande, à en croire les sondages et de l'avis général, se trouve dans celui qui monte ; par là même il croise, Nicolas Sarkozy qui est dans celui qui descend !

A la différence de la plupart des commentateurs, je trouve que François Hollande, dans son ascenseur montant et au Bourget, n'a nullement « fendu l'armure » en faisant des confidences sur son passé (cela ne va durer, dans un long discours, que quelques secondes), mais il s'est, au contraire, employé, à revêtir, non pas « l'armure », mais le costume d'un président de la République. La chose lui a d'ailleurs été reprochée vivement, mardi dernier, par Alain Juppé qui, à plusieurs reprises, l’a taxé d' « arrogance », reproche qui conduisait inévitablement à observer que c'était un peu la pelle qui se moquait du fourgon.

Tout donne à penser que, dans l'ascenseur qui descend, Nicolas Sarkozy lui au contraire est en train de « fendre l'armure » du pouvoir dominateur qu'il avait revêtue et de quitter la pause présidentielle pour se faire modeste et familier. Le président, lui, va sans doute se montrer « en bourgeois », confessant ses erreurs et repentant, normal en somme, dans son intervention de dimanche. Ira-t-il jusqu’au coin du feu et à la proximité de Carla comme Giscard? Le rapprochement risquerait de ne pas être un très bon présage ! La prétendue confidence, faite à la grosse vingtaine de journalistes qui festoyaient chez le préfet de Cayenne et non dans l’ombre d’un confessionnal, est sans doute la première manifestation et l’annonce subliminale de cette nouvelle attitude.

Tout s'est passé comme prévu et il ne nous reste plus qu'à attendre dimanche pour savoir si cette interprétation et cette prévision sont les bonnes ! Si j'ai raison, je m'accorde la récompense habituelle, la traditionnelle tringle à rideaux chère à Coluche!

vendredi 27 janvier 2012

De l'école

Je n'avais en rien l'intention de revenir sur les problèmes de l'école dont j’ai souvent parlé, mais c'est l'actualité qui m'amène à le faire en me conduisant à étendre mon propos de l'école à l'université.

Mieux vaut commencer par l'université, surtout au moment où l’on voit l'équipe gouvernementale en place faire figurer, dans les réussites du quinquennat, la loi de réforme des universités (LRU) de Madame Pécresse. J'ai déjà consacré des blogs à cette question et je continue à penser que la LRU (pour faire court) n'a rigoureusement rien changé ; si elle a eu quelque action dans le domaine universitaire, c’'est plutôt pour en aggraver les défauts que pour y porter remède.

Comme je l'ai déjà dit à différentes reprises, la seule chose qu'il y a à admirer dans cette loi est l'astuce de la ministre ou, plus probablement, de l'un ou l'autre de ses conseillers, dont l'un en particulier avait été vice-président de la Conférence des présidents d'université et qui de ce fait connaissait bien la faune de la CPU. Elle a consisté à inscrire dans cette loi les deux revendications majeures des présidents d'universités eux-mêmes, de façon à se gagner par là leur faveur, leurs intérêts personnels les motivant plus que ceux de leurs établissements. Ces deux revendications concernaient en effet exclusivement, l'une et l'autre, les présidents (droit à un second mandat présidentiel et mainmise totale sur les recrutements d'enseignants, en éliminant les commissions de spécialités au profit de commissions ad hoc choisies par eux et donc à leur botte) et nullement les universités elles-mêmes. Faire figurer désormais dans le budget de l'université, la masse incompressible des salaires du personnel et la gestion des sites est naturellement illusoire. En effet, les charges d'entretien des sites sont tout aussi incompressibles, dans leur ensemble, que les salaires et cela ne conduit qu’en apparence à un accroissement du budget et des moyens. En outre où se situe l’autonomie d’établissements qui reçoivent de l’Etat 95% de leurs budgets ! Cette loi LRU est de la poudre aux yeux !

J'en viens à l'école puisqu'il paraît que M. Bayrou, dont on a pu apprécier les idées et l’efficacité dans ce domaine quand il était ministre de l'éducation nationale, a, dit-on, des idées sur l'école, dont les deux piliers sont la restauration du calcul mental et de la culture générale. Mieux vaut tard que jamais. Why not ?

Je lisais ce matin même que la culture générale était gravement atteinte dans le système éducatif par la suppression de l’épreuve de ce nom au concours de Sciences-Po Paris. En fait la culture générale, la vraie, n'a rien à craindre quand on connaît la nature de ce genre de concours qu’on trouve dans tous les établissements de cette farine ! Il s'agit en effet de questions à choix multiples (QCM) que des machines corrigent sans problèmes, surtout pour les correcteurs qui ne veulent pas se fatiguer à corriger des devoirs rédigés. Les dits QCM portent sur toutes sortes de sujets, qui vont du sport à la littérature en passant par l’économie, car à Sciences Po comme à l’ENA, on se doit d’avoir « des clartés de tout » et garder quelque chose en soi "quand on a tout oublié" (Voilà deux questions de culture générale – fournies par Usbek et gratuites comme toujours - pour les fabricants de ce genre de QCM !). Auprès de ces épreuves de culture générale, feu le jeu des mille francs apparaît comme une épreuve intellectuelle de la plus haute tenue. Ces questionnaires sont parfaitement ridicules et on devrait les présenter plutôt sous le nom d’« épreuve d'inculture générale ».

Quant à l’évaluation plus générale de nos établissements éducatifs, j'ai eu à ce sujet une discussion avec une de mes amies qui a récemment pris sa retraite de l’IUFM où elle enseignait. Vous savez feus ces Instituts universitaires de formation des maîtres, temples de la grande déesse Pédagogie, nés des sciences nord-américaines de l’Education et accouchés Rue de Grenelle par le bon docteur Meirieu, l’immortel auteur d’une thèse (d’Etat s’il vous plait) sur « Apprendre à apprendre à apprendre…. « , lui-même reconverti dans l’écologie suite à la non-reconnaissance de son génie par le PS rhodanien ?

Comme je lui faisais observer ( à cette amie et non à l’Auguste Philippe Meyrieu– petite question de grammaire française qui pourrait figurer dans un quizz de l’ENA : pourquoi cette majuscule apparemment intempestive à « Auguste » et quelle est la nature de ce mot ?), après avoir eu à connaître de quelques devoirs de lycéens, que le niveau m'en paraissait singulièrement bas, ne serait-ce que, sur le plan des savoirs, du style et de l'orthographe, elle m’a fait observer (avec, il est vrai, un esprit de contradiction qui ne la quitte guère) qu’au contraire les élèves actuels sont bien meilleurs que ceux d’autrefois.

Elle n'a pas manqué évidemment, cet égard, de faire valoir leur habileté à manipuler les ordinateurs, ce qui à vrai dire n’a pas grand-chose à voir avec le problème en cause. Il me semble, au contraire, que la pratique des jeux et du zapping qui marque de façon forte ces NTIC (nouvelles techniques d'information et de communication), la télévision et/ou l’ordinateur) est une caractéristique actuelle de la fréquentation constante de telles sources d'information, qu'on retrouve malheureusement dans les manuels scolaires que j'ai pu avoir entre les mains ces derniers temps. Je pense ici en particulier à l'histoire et au français.

On voit ainsi des élèves de cinquième devoir prendre en compte (observez que je ne dis pas « apprendre ») les noms des livres de la Bible hébraïque, quand ils sont totalement incapables d'avoir moindre idée de la chronologie générale de l'histoire de l'Antiquité. En français, de la même façon, on a traité avec mépris le Lagarde et Michard ( et autres) où histoire littéraire et textes figuraient et s’éclairaient réciproquement et on les a remplacés par des ouvrages de type nouveau où l'on procède à des regroupements, bizarroïdes et achroniques d'auteurs qui peuvent être (exemple authentique) Marot et Desnos et où figurent, à des fins manifestes de nouveauté et d'originalité, des auteurs dont nul n'a jamais entendu parler et dont les exemples textuels invoqués sont des plus médiocres pour ne pas dire nuls !

Tout cela se fait sous les auspices de la rénovation et de la pédagogie, mais aussi il faut bien le dire (même si on se garde  de le faire) d'un total mercantilisme. Il faut bien faire marcher le business monopolistique de l’édition scolaire et renouveler sans cesse des manuels que la plupart des enseignants, non sans bon sens ailleurs, se refusent à utiliser, mais dont les achats massifs, assumés désormais surtout par les mairies ou les institutions départementales et régionales, font marcher un fructueux commerce et permettent aux patrons mais même aux simples directeurs de collection et aux inspecteurs généraux de s'offrir des villas en Bretagne ou sur la Côte d'Azur.

Il y a encore beaucoup à dire mais je suis déjà bien long.

mercredi 25 janvier 2012

Saga helvetica

J'hésitais sur le contenu du blog que j’allais écrire aujourd'hui, encore que je me demande bien davantage si je ne devrais pas abandonner totalement et définitivement cette activité vu les ennuis qu’elle m’a apportés dans un pays où l’on ne peut plus rien écrire sur personne. Ayant consulté, par hasard, les statistiques de mon blog, j'ai constaté que j'avais des lecteurs en Suisse et que précisément au moment où je faisais cette consultation j'en avais deux dans cet heureux pays. J’ai vu là un clin d’œil du destin (le hasard est toujours malicieux, je ne cesse de le constater !). C'est donc à l'intention de ces lecteurs, helvétiques et inconnus, que je rédige ce texte, même s'il n'est pas sûr qu'il les concerne particulièrement.

Je pense en effet que, lors du meeting socialiste du Bourget, le chanteur qui a fait la première partie, Yannick Noah, aurait dû remplacer son tube « Saga Africa » par une version mieux adaptée à sa situation fiscale qu'il aurait pu intituler « Saga Helvetica ».

Je ne sais pas quel expert en communication a suggéré, pour le meeting socialiste du Bourget, une première partie faite par Yannick Noah, mais ce choix n'était assurément pas des meilleurs, sauf pour l'UMP.

Je ne parle pas du chanteur lui-même, encore que ne me plaise guère le look qu’il se donne, la cinquantaine passée, avec le tatouage bien visible, la casquette faubourienne et, autour du cou, le foulard noué à la façon d'un rôdeur de barrière du début du siècle (je veux parler du précédent, bien sûr). Tout cela agace un peu, surtout quand on connaît la situation matérielle de l'intéressé. C'est même précisément ce point qui fait difficulté car on sait que depuis 20 ans, il est en conflit permanent avec l'administration fiscale française. Lorsqu'il avait proclamé, urbi et orbi, en 2007 que, si Sarkozy était élu, il quitterait la France (où il n’était plus domicilié depuis 1993, date de son départ pour la Suisse). On ne savait pas trop alors s'il entendait fuir par là le futur président ou l'administration fiscale française. Il était, en effet, en conflit avec elle pour n'avoir pas passé, à l'époque, en Suisse, les six mois par an qui lui auraient permis de ne plus payer ses impôts en France.

Ce n'est d'ailleurs pas là mon propos, quoique l'affaire ne soit pas terminée, même si la note fiscale a déjà diminué de moitié, car Yannick Noah a largement les moyens de poursuivre les contestations ; au-delà de la décision de la cour d'appel administrative de Paris, il pourra toujours engager un dernier recours devant le conseil d'État.

« Saga juridica ».

Etait-ce raisonnable de faire ouvrir ce meeting par Yannick Noah (dont la place réservée est, semble-t-il, restée vide durant le discours de Hollande) dans la situation qui est la sienne, quand on savait que le candidat à l'élection présidentielle allait stigmatiser, avec la plus grande force, ce qu’on reproche précisément à Noah. « Je n’accepterai pas la délinquance financière, la fraude fiscale » clamera avec force Hollande ! Il valait donc mieux que Noah ne soit pas à ce moment assis au premier rang. L’UMP s’est naturellement régalée de la chose, mais force est de reconnaître que le PS avait donné le bâton pour se faire battre !

Je ne sais pas qui est à l’origine d’un telle bévue car, s'il est possible que François Hollande ne soit pas très exactement informé des démêlés du chanteur avec l'administration fiscale, ce ne peut être le cas des spécialistes de l'organisation du spectacle qui ont choisi Noah. Y-a-t-il un agent de l’UMP infiltré dans l’équipe de communication de François Hollande ?

Saga taupica.

Pour rire un peu, je vous dirai que j'aurais pu aussi consacrer ce blog à un scoop personnel auquel j'aurais pu donner pour titre affriolant « Ma nuit avec Yannick Noah ». À dire le vrai, comme disait autrefois la bonne Eve Ruggieri, avant de publier ce morceau de choix, j’aurais tenté de le vendre auparavant à Gala ou Closer, mais en mettant en oeuvre une procédure un peu complexe pour arnaquer ces médias qui doivent sans doute se garder d'acheter chat en poche. J'aurais donc tenté de négocier le récit de ma nuit avec Yannick Noah en enfermant le récit de cette affaire dans une enveloppe scellée que je n'aurais remise à l’acheteur qu'après en avoir reçu un chèque et en précisant qu'il ne devait, en aucun cas, ouvrir mon enveloppe avant que j’aie quitté les lieux.

En effet, il est clair que seul l'espoir d’un scoop croustillant aurait pu motiver l'achat de celle-ci, alors que s’il est vrai que j’ai passé une nuit avec Yannick Noah, il s'agit tout simplement d'une nuit passée en avion entre Saint-Denis-de-la-Réunion et Paris. Nous occupions deux sièges voisins, deux de ces sièges situés à hauteur des portes qu’Air France vend désormais à un tarif spécial (70 euros de supplément !) car ils permettent aux passagers qui les occupent de loger des jambes qu'ils ont trop longues. Comme Yannick Noah et moi avons exactement la même taille (1,93 m), nous nous sommes retrouvés voisins. Dois-je préciser que nos relations se sont limitées à essayer de dormir côte à côte !

Saga Morphica !

mardi 24 janvier 2012

Triple A et déontologie économique (suite et fin)

J’ai rappelé hier comment, dans un article du Monde de l’été dernier, Jean-Marc Daniel avait fait un excellent et éclairant historique de la création des agences de notation, article que la presse française a depuis repris et utilisé sans vergogne. Toutefois, dans son approche, il insistait surtout sur les corrélations entre ces agences d'évaluation, traitant des entreprises puis des Etats, (les deux étant désormais liés) et les situations politiques (à propos, surtout, de la Grèce des années 30) mais sans aborder les aspects déontologiques qui paraissent pourtant aussi fort importants, quoique plus souterrains et par là moins démontrables.

Comme je le rappelais hier aussi, on a tout récemment découvert en France, surtout à propos de l'affaire du Mediator (sans même parler du scandale, plus récent, des prothèses mammaires) les relations (aussi multiples et essentielles qu’anciennes) entre les laboratoires pharmaceutiques et le milieu de la recherche, tant sur les médicaments que sur les pathologies. Il est bien évident que de tels conflits ou convergences d'intérêt ne sont pas l'apanage des seuls secteurs médicaux et pharmaceutiques.

Comme le souligne un récent et très intéressant article du Courrier international (numéro 1107 de janvier 2012, qui se fonde lui-même sur des extraits du Wall Street Journal de New York) les chercheurs en économie ne sont guère disposés à se donner l'équivalent économique du serment d'Hippocrate que d'ailleurs, comme on a pu le voir, beaucoup de médecins ne respectent guère.

L'origine des financements de la recherche dans nombre de domaines est souvent dissimulée et, quand elle est avouée, elle est parfois étonnante. Ainsi, dans beaucoup d'articles et de travaux du linguiste Noam Chomsky, aujourd'hui à la pointe du combat intellectuel révolutionnaire aux États-Unis, découvre-t-on, dans des notes infra-paginales ou finales, que les travaux en cause ont, pour la plupart, été financés par l’US Army ou l’US Navy, ce qui ne laisse pas d’étonner quand on connaît, par ailleurs, les positions politiques qui étaient déjà alors celles de Chomsky. Ignorait-il que l’Ecriture enseigne que « le pain du méchant emplit la bouche de gravier » ?

Il en est de même en matière économique et beaucoup de professeurs d'économie, aux États-Unis en tout cas, sont consultants auprès d'entreprises ou de gouvernements, ce qui conduit à penser que ces relations (le plus souvent chèrement monnayées) peuvent influencer leurs travaux quand elles ne les commandent pas. Citons un court extrait de l’article évoqué : « Ces pratiques ont pu les amener [les « experts »] d'abord à ne pas déceler les signes de la crise de 2007 2008, puis à recommander des solutions qui servaient les intérêts de leurs clients au détriment de l'économie dans son ensemble. » (Courrier international, 2012, n° 1107, page 42).

À qui fera-t-on croire qu'il n'en est pas de même en France et peut-être bien davantage, encore vu les pratiques qu’on y observe sans cesse ?

Quelques économistes américains (peut-être jaloux faute de contrats ou de consultation) réclament, depuis des années, la mise en oeuvre d'un code déontologique comme il en existe dans bien d’autres professions, pourtant moins exposées. On peut citer à cet égard, par exemple, le code d'éthique de la National Society for Professional Engineers. Certains vont plus loin et réclament même la mise au point et l'adoption d’un « serment de l'économiste », de portée plus générale encore, qui imposerait aux économistes, comme un devoir, de défendre la cause des pauvres dans le monde.

L'objectif minimal le plus proche et le plus vraisemblable serait d’obliger les auteurs d'articles dans des revues académiques à révéler les sources du financement de leurs recherches et tous les liens financiers qu’ils peuvent avoir avec des groupes qui auraient en la matière « un intérêt financier idéologique ou politique » (ibidem).

Si l'on en revient aux agences de notation et il y aurait bien d'autres exemples dans les activités financières, d’audit et d’évaluation actuelles, comment ne pas imaginer que le personnel des agences de notation et/ou de contrôle et l’ensemble de tous ceux qui gravitent autour de ces agences puissent résister à la tentation, sous des formes diverses, de tirer des profits, faciles, importants et immédiats, de la connaissance qu'ils peuvent avoir, du fait même de cette activité et avant quiconque, de l'évolution de la notation et/ou de la situation de tel ou tel État ou, plus encore, de telle ou telle entreprise. Cet aspect est si évident qu'il est inutile d'insister.

Dans ces cas, il n'y a même pas l'équivalent de la Commission des Opérations de Bourse, la COB, dont on sait que la vigilance n'est pas toujours constante et dont les observations, même quand elles sont évidentes, ne sont pas toujours suivies de l’effet qu’on serait en droit d’attendre.

lundi 23 janvier 2012

Triple A et déontologie économique (1)


Triple A et déontologie économique (1)
Daniel dans la fosse aux lions.

Je vous explique d'abord le sous-titre un peu étrange de ce blog.

Il ne s'agit pas en effet du Daniel de la Bible que vous connaissez et qui, pour avoir été trop perspicace, fut placé dans la fosse aux lions .Il s’agit ici de Jean-Marc Daniel, professeur d'économie à l'Ecole Supérieure de Commerce de Paris et qui ignore, à n'en pas douter, l’intérêt que je lui porte.

Je ne le connais en fait que pour l'avoir vu quelquefois (trop peu souvent malheureusement) dans l'émission d'Yves Calvi qui passe chaque jour sur la Cinq et où l’on revoit toujours les mêmes binettes d’intervenants qui n’ont pas d’autre souci que leur promotion personnelle.

Si le Daniel de l’Ancien Testament avait dû affronter de vrais lions, Jean-Marc Daniel n'a à affronter que les coyotes de la presse française. Il a écrit, en effet, dans le Monde, me semble-t-il, mi-2011, un fort intéressant article sur les agences de notation . Il était le premier à expliquer comment on en était venu à la situation actuelle, au terme d’un processus historique aussi complexe qu’ignoré. Toute la presse française a repris cet article dans l'année qui a suivi, souvent sans en indiquer la source.

Cet article, fort intéressant, non seulement donnait les détails historiques de l’affaire, mais mettait en évidence des liens, majeurs et secrets, avec la finance, le politique et surtout des intérêts particuliers.

On a récemment découvert les liens qu'il peut y avoir entre, par exemple, l'industrie pharmaceutique et médicale et les experts et consultants de tout poil qu'elle emploie à son service, soit directement, soit indirectement. En revanche, en France du moins, on ne parle guère de ce qui se passe dans le monde de la finance, où ce type de confusion est permanent et bien pire. Les experts, les consultants, les « auditeurs » ont souvent (pour ne pas dire toujours et inévitablement) des liens directs ou indirects avec les situations qu’ils sont chargés d'analyser et de juger.

Aux Etats-Unis, en revanche, il y a enfin, après des affaires aussi retentissantes que celle qui a réuni Enron (groupe industriel) et Andersen (cabinet d’audit), un groupe d'économistes américains qui se propose, non sans mal, de poser les bornes déontologiques qu'implique ce genre de situation. Il est curieux qu’on parle d’ailleurs de conflits d'intérêts, alors qu’on pourrait tout aussi bien et de façon plus précise, parler de convergences d'intérêts. Le conflit, lui, se situe au niveau de la morale professionnelle que les intéressés ne connaissent guère et dont ils se moquent, mais la convergence est établie entre leurs intérêts et leurs profits personnels et les décisions qu’ils sont en position de prendre ou de faire prendre.

Dans l’article de Jean-Marc Daniel, un détail est tout un symbole. Il indique en effet que le créateur, si l'on peut dire, des agences de notation a été Eugène-François Vidocq, truand bien connu avant et après son séjour dans la police, qui a créé, en 1833, le « bureau de renseignements pour le commerce », une agence de détectives, qui recueillait pour les créanciers des informations sur les emprunteurs. On était plus moral qu’aujourd’hui à l'époque puisque, le comme le rappelle Jean-Marc Daniel, : « Vidocq sera jugé en 1843 pour avoir frappé un débiteur afin de lui soutirer des informations » !

Je passe plus vite encore sur les débuts, en 1909, de John Moody (maudit ?), ex-journaliste financier (Tiens ! Tiens ! It rings the bell !) qui créa, à proprement parler, le système de la notation, afin d'évaluer, d'une façon censée être rigoureuse, les risques pris par les créanciers. S&P suivit en 1916 et Fitch en 1924. Bien entendu, les crises boursières, et surtout celle de 1929, furent de grandes périodes d'activité pour ces agences qui se consacraient alors essentiellement à l’Amérique, du Nord comme du Sud.

Le point est le plus intéressant et qui pourrait nous annoncer des événements futurs, dans la mesure où le financier a les liens les plus étroits avec le politique qu’il gouverne de plus en plus, est, déjà, l'affaire de la Grèce.

La première dégradation de la Grèce, dans les années 30, fut à l'origine de la fin du gouvernement de Venizelos qui fit le lit des monarchistes qui revinrent au pouvoir en 1935 et permit ensuite l'arrivée au pouvoir du général Metaxas et le début du régime fasciste dit "des généraux" (c'était là le métier de Plastiras comme de Metaxas). La dictature grecque conduisit d’ailleurs Moody’s a exprimer ses regrets et à s'engager (serment d’ivrogne !) à ne plus noter les Etats.

Cet article de Jean-Marc Daniel est donc fort intéressant pour le détail des faits qu'il rapporte, mais surtout sans doute pour mettre en évidence les relations entre le financier et le politique et peut-être pour éclairer aussi l'avenir d'un certain nombre d'Etats européens.

(A suivre)

dimanche 22 janvier 2012

« Les Afghans sont méchants » (suite et, hélas, probablement pas fin!)

J'avais, pour aujourd'hui, un autre sujet de blog mais deux déclarations touchant à l'Afghanistan m'ont détourné de ce projet initial.

La première est celle de Mme Hillary Clinton.

Je me doutais bien que la déclaration de notre président, faite sous le coup de l'émotion générale, le jour de l'assassinat des quatre soldats français en Afghanistan, n'allait pas plaire au gouvernement américain. Il y manifestait, en effet, une velléité de retirer les troupes françaises en Afghanistan, avant le terme prévu en accord avec les Etats-Unis.

La réaction ne s'est pas faite attendre. Les déclarations présidentielles du lendemain étaient déjà beaucoup plus nuancées ; Hillary Clinton n'a pas manqué de faire entendre officiellement sa voix et de rappeler ses exigences en la matière, alors que notre président , parti en Guyane, était en train de voguer en pirogue sur le Maroni ou de visiter un bout de forêt amazonienne. Ces circonstances l'ont naturellement dispensé de répondre aux injonctions américaines.

La seconde déclaration est celle de notre ministre de la défense au cours de sa visite en Afghanistan. Il a déploré, non sans quelque naïveté, que les talibans, qui se font incorporer dans la nouvelle armée afghane, ne se déclarent pas comme tels, avec les fâcheuses conséquences qu'on a pu observer récemment. Il faut dire qu'en la circonstance, le futur assassin s'était pourtant assez nettement signalé puisque, après une première incorporation dans les nouvelles forces afghanes, il avait déserté, était parti au Pakistan et n'en était revenu que pour se faire, à nouveau, engager dans l'armée.

J'ai entendu vaguement parler de contrôle de ces engagements qui se feraient, pour les candidats à l'incorporation, à partir d'identification pupillaire. Cette forme sophistiquée d'identification par l'iris a été imaginée en 1936 par un ophtalmologue Franck Burch mais est connue surtout par les films de James Bond. Elle a fait néanmoins l'objet de brevets au milieu des années 90. Je doute toutefois un peu que ce système d'identification par l'iris soit réellement utilisé pour identifier les éventuels talibans, même si on leur fait croire qu'il y a un vrai contrôle ; ainsi, dans certains aéroports du Sud, fait-on  passer les voyageurs à embarquer devant des appareils dont les écrans de contrôle restent toujours noirs, voire, mieux encore, sous des portiques...en bois (détail authentique!).

Va savoir...le taliban, dont on a vu qu'il est fourbe, est sans doute aussi rusé et il ferme sans doute les yeux au moment d'un tel contrôle, au cas fort improbable où il serait réellement mis en oeuvre.

Assurément et en tout cas, à en croire notre ministre de la défense, il aurait dû absolument faire état de sa qualité de taliban au moment de son incorporation, comme on doit déclarer, en entrant aux USA, qu'on n'y vient pas pour y commettre un attentat ! De toute façon, vu la suite et les desseins qui étaient probablement déjà les siens, on ne pouvait guère attendre de sa part une si scrupuleuse honnêteté.

Il faut bien dire d'ailleurs dire que, quand on voit les candidats à l'engagement (on en a incorporé 180 000 !), on comprend aussitôt qu'il n'est pas très facile de distinguer, parmi ces centaines de barbus inquiétants et enturbannés, ceux qui peuvent être de vrais talibans de ceux qui en ont simplement l'apparence.

Je me demande d'ailleurs comment peut se faire cette fameuse instruction qui devrait être, logiquement aussi et peut-être d'abord, une forme d'endoctrinement, dans la mesure où les instructeurs français ne parlent évidemment pas le pachtou ou le farsi (je ne sais même pas si leur instruction ne se ferait pas, par hasard, en arabe puisqu'ils sont musulmans !). Quand aux aspirants militaires afghans (talibans ou non), ils ne parlent évidemment pas un mot de français! Cette situation de communication doit engendrer quelques problèmes ! Je ne puis donc que m'amuser, une fois de plus, quand j'entend parler, comme ce matin par notre ministre, des relations d'amitié qui se nouent entre les instructeurs français et leurs clients afghans. Peut-être au fond le massacre d'avant-hier n'est-il qu'un simple malentendu linguistique !

samedi 21 janvier 2012

Les Afghans sont méchants !

« Les Afghans sont méchants ! ». C'est la conclusion que j’ai formulée et retenue, en écoutant, hier, la brève intervention de notre ministre de la défense à propos de l'assassinat de quatre de nos soldats en Afghanistan.

Il est aujourd’hui allé sur place vérifier cette intuition.

Deux petites remarques liminaires en passant :

J'observe que nous n'avons plus, depuis 1948, de ministère de la guerre (à cette époque elle n’avait pas bonne réputation et il semblait de mauvais goût de l’afficher ainsi). Depuis cette date, selon une tradition bien établie en France, ce ministère a changé cinq fois de nom, ce qui montre à quel point, nous nous interrogeons à son propos et sur ses finalités. En 1958, le Général de Gaulle en fait (on devine pourquoi !) un ministère des armées. Michel Debré, qui devient titulaire de ce poste en 1959 en fait (et l’on voit bien pourquoi quand on connaît l’homme), un ministère de la défense nationale ; deux ans plus tard, son successeur en fait, à nouveau, (en cédant sans doute aux militaires) un ministère des armées ; en 1974, il redevient ministère de la défense avant de changer une nouvelle fois de nom, en 2010, par adjonction à la défense les anciens combattants.

L’intitulé actuel de ce ministère interpelle en la circonstance car, à ma connaissance, l'Afghanistan ne nous a jamais menacé ni attaqué et, de ce fait, je ne vois pas en quoi peut y être légitime l'intervention de notre ministère de la défense.

J'emploie ici le terme qu'on peut juger un tel impropre d' «assassinat » ; je ne le fais que parce que ces malheureux militaires français étaient, si je puis dire, en civil, occupés, semble-t-il, sans armes, à des activités sportives à l'intérieur d'un camp français. Nous sommes donc ici plus dans le domaine de l'assassinat pur et simple que dans celui de la guerre. Ces Afghans sont décidément méchants !

Cette conclusion me ramène aux propos de notre ministre. Comme je le disais, son observation majeure est que les Afghans sont méchants. Apparemment, nous ne le savions pas en nous lançant dans cette aventure. On pourrait ajouter aussi qu'ils sont fourbes puisque la plupart de nos soldats récemment tués l’ont été par des talibans déguisés en militaires afghans à qui nous avions pourtant gentiment fourni uniformes et armes. J'ajoute , faut-il le préciser, qu'ils sont aussi souvent des religieux fanatiques puisque, force est de le dire car ce détail semble ignoré,  l'Afghanistan est une république islamique depuis une vingtaine d'années et le pays a même été gouverné par les talibans des années durant jusqu'à l'intervention américano-européenne de 2001.Ces Afghans sont infréquentables et nous aurions dû le savoir!

Je pense d'ailleurs que l'Occident va entrer dans la tradition populaire afghane ; dans les siècles qui viennent, dans les montagnes d'Afghanistan, on fera des gorges chaudes de la sotte naïveté et de l’ignorance des occidentaux qui ont instruit les Afghans et les ont même équipés et armés afin de leur permettre de les tuer plus aisément et plus efficacement.

Vous aurez observé comme moi (et ce n'est pas trop difficile) que bon nombre de nos soldats sont morts tués par des Afghans que nous jugions acquis à notre cause (MDR ou LOL !), porteurs des uniformes et des armes de l'armée afghane que nous pensions constituer et dont une bonne partie déserte fort heureusement.

Comme on disait dans nos campagnes, « on n'est jamais aussi bien servi que par soi-même ». Un autre de nos proverbes ruraux est « Jamais deux sans trois ». Notre situation actuelle dans ce pays en donne une validation de plus ! Les étrangers qui se mêlent des affaires de l'Afghanistan ne s'en sont jamais très bien trouvés. Sans remonter à Alexandre le Grand on peut observer que nous serons la troisième défaite de l'Occident.

Les Britanniques, qui avaient envahi le pays, y ont subi de cuisantes défaites, surtout à Gandamak en 1842 puis à Maiwan où furent détruits des régiments britanniques qui, il faut bien le dire, comprenaient surtout des troupes indiennes ; ils se sont alors retirés l'oreille basse.

Il en a été de même pour l'URSS qui avait pourtant mis le paquet, sans lésiner ni sur les moyens, ni sur les procédés, entre 1979 et 1989, avec, il faut le dire l’appui des ennemis extérieurs des Soviétiques. On se demande d'ailleurs comment les choses se seraient terminées sans la sagesse de Gorbatchev qui a décidé de se retirer à cette époque.

Nous serons sans doute la troisième défaite et nous quitterons de façon aussi piteuse ce territoire que nous avions envahi avec l'ambition folle (peut-être pas réelle mais en tout cas affichée) de faire de cette république islamique, de tradition belliqueuse et anarchique, une démocratie laïque selon nos critères.

On devrait absolument rendre obligatoire dans les académies militaires et les ministères de la guerre (avec un examen final sévère), l'étude minutieuse de l'histoire et des mœurs des pays qu'on prétend envahir à des fins démocratiques. En dehors de la culture de l'opium, la seule spécialité réelle et traditionnelle de l'Afghanistan est la guerre tribale et, lorsqu'il parvient à avoir un gouvernement, le coup d'état militaire, la rébellion et l’assassinat des dirigeants. Ces traditions sont là-bas millénaires ou du moins assurément centenaires ; on aurait bien fait d'y penser avant de se mettre dans pareil guêpier ce qui, il est vrai, est une spécialité des États-Unis, particularité que nous avons de plus en plus une certaine tendance à partager avec eux.

vendredi 20 janvier 2012

Naufrage à l'italienne 2

Vous ne vous attendiez assurément pas, et moi encore moins, à ce que mon dernier blog « Naufrage à l’italienne » ait une suite. Une fois de plus pourtant, le flair infaillible d’Usbek l’a conduit à subodorer, puis à découvrir le pot aux roses.
Mais même avec Aldo Maccione (une fois qu’il se serait laissé pousser la barbe) dans le rôle du beau commandant Francesco Schiettino, le script du film aurait fâcheusement manqué de vedette féminine. Fort heureusement depuis hier, il y en a une et non des moindres puisque est apparue dans l’intrigue, aux dernières nouvelles, une jeune et séduisante Moldave, rôle pour lequel on verrait assez bien Sharon Stone, si le budget du film le permet.

Elle était à bord avec un statut mal défini, ce qui laisse d’autant plus de liberté au scénario.

Etait-elle passagère clandestine (elle ne figure ni sur la liste des membres d'équipage ni sur celle des passagers) ? On peut toutefois en douter vu ses relations avec la commandant. Etait-ce une invitée spéciale du commandant Schiettino, que celui-ci aurait négligé d'inscrire, comme il a obligation de le faire pour tout passager monté à bord ? Certes la compagnie affirme que les lois en vigueur et les normes de sécurité ne permettent pas l'embarquement de personnes non enregistrées, mais on peut noter que les règlements ne permettent pas davantage de dérouter un navire et ses 5000 passagers pour aller faire coucou au village natal du chef cuistot, et moins encore, ce faisant, de planter le navire sur un écueil.  Le problème de la belle Moldave reste donc posé.

Quel que soit son statut comme passagère, elle pouvait tout à fait, en tout cas, connaître le commandant puisqu'elle travaille au sein de la compagnie depuis cinq ans. Elle se trouvait au moment de cette croisière en vacances ; après tout, comme d'autres en d'autres lieux et en d'autres temps, peut-être a-t-elle été invitée, en dernière minute et à l'improviste, par le commandant qui l’aurait vue passer sur le quai de Civitavecchia, libre, oisive et sans but précis ?

Elle ne nie d'ailleurs pas avoir été à bord du navire, même si le récit qu'elle donne de sa présence est un peu rocambolesque puisqu'elle affirme que le commandant y a fait un travail extraordinaire et qu'il a « sauvé plus de 3000 personnes ». À lui tout seul c’est quand même beaucoup surtout s’il a quitté bord aussi vite qu’on peut le penser !

Il y a toutefois quelques problèmes de lieu et de temps pour ce qui concerne le commandant et la belle et blonde Moldave. On a entendu d'un côté qu'elle se trouvait, à ses côtés, à table une demi-heure avant l'accident ou qu’ils étaient, à ce moment, ensemble sur le pont. D'autres témoins affirment avoir vu la belle Moldave aux côtés du capitaine dans la salle des commandes. Y était-elle pour traduire en russe des informations fournies par les officiers dans le cadre de l'évacuation italien ou pour d'autres raisons, il est bien difficile de le savoir. Le scénariste devra se débrouiller avec tout ça !

Il semble toutefois clair, d'après les enregistrements téléphoniques faits à la Capitainerie, que le commandant a donné des versions de l'affaire qui sont quelque peu contradictoires, aussi bien entre elles que par rapport aux témoignages.

Le principal mystère est qu’il y aurait, dans l'emploi du temps du beau commandant, une plage de 53 minutes pendant laquelle on ne sait pas exactement ce qu'il a bien pu faire. À voir notre blonde Moldave, je serais assez porté à avancer une hypothèse sur l’emploi conjoint de cette petite heure, bien que je n'ai aucun moyen ni de la fonder et moins encore de la vérifier.

« Naufrage à l’italienne » va-t-il virer à « Titanic 2 » ?

mercredi 18 janvier 2012

Naufrage à l’italienne

Il est bien dommage que le cinéma italien et Cinecitta ne soient plus ce qu'ils étaient car on aurait pu, sans problème, faire, à partir de l'affaire du naufrage du Costa Concordia, en dépit de la dizaine de morts, une version nautique du fameux « Divorce à l'italienne » de 1961. Certes, on ne peut plus désormais faire appel à Marcello Mastroianni, mais vu la nature de l'intrigue, on pourrait éventuellement avoir recours, s'il est encore vivant, à Aldo Maccione dont le physique et le jeu seraient mieux adaptés au scénario.

Il semble que la cause principale du naufrage de l'immeuble flottant (toutes les fois que je m'approche de ces nouveaux paquebots qui ont moins l’allure de navires que d’immeubles, je me demande toujours comment ils peuvent affronter les mers du monde ; en Méditerranée où ils sévissent particulièrement, on comprend qu'ils n'ont pas trop de chemin à faire depuis les chantiers navals, mais quand on les voit aux Antilles, force est de se demander comment ils ont pu arriver là, car ils n'ont pas pu être construits sur place ou à proximité) soit la coutume, naturellement stupide mais bien ancrée (si j’ose dire), de venir parfois, hors de leur vraie route, à proximité d’un point de la côte pour « saluer », dans une intention ou une autre, les habitants de la zone terrestre en cause. J'ai entendu dire que, dans cette affaire, le chef des cuisiniers ou des serveurs du Concordia étant originaire de la zone où s'est produit le naufrage (près de l’île toscane du Giglio) et ayant renoncé à son congé pour être présent dans cette croisière, on avait jugé bon de lui faire faire un salut très particulier, plus proche de la côte et, de ce fait même, tellement proche que le Concordia s'y est échoué ou y a fait naufrage, on ne sait plus très bien.

Mais, et c'est là où l’on entre dans l'intrigue de la comédie italienne, le commandant du navire, même si la vérité ne semble pas totalement établie, avait d'emblée dès le début du naufrage et contre toutes les règles, quitté le navire. On a pu ainsi entendre une conversation des plus pittoresques entre la capitainerie du port voisin qui lui intimait l'ordre de regagner le bord et lui-même qui prétendait, contre toute vraisemblance puisqu'il était alors à terre, être tombé à la mer à cause de la gîte du navire qu'avait causée l'accident. Voilà un homme qui n'a pas le pied marin (ni le reste d'ailleurs) !

Je profite de l'occasion pour signaler à la plupart des commentateurs de nos médias que j'ai pu entendre à la radio que, quand il s'agit d'un navire qui, sur l'eau, s'écarte de la verticale, même l’origine est la même, le mot « gîte » est FEMININ et non pas masculin comme « gîte » dans « le gîte et le couvert ». Cela n'est qu'un exemple de plus de l'incapacité de beaucoup de nos journalistes à faire preuve d'une connaissance minimale de la langue française qui est pourtant leur outil de travail.

Je ne sais pas comment tout cela finira, la justice italienne étant encore plus inattendue que la nôtre puisque ce commandant qu'on avait traîné plus bas que terre et qui était entré dans les locaux de la police menotté entre deux carabiniers, a été, semble-t-il, peu après libéré dans la plus grande discrétion.

On sait que le commandant, dans le cas d'un incident maritime ou d'une avarie en mer, est toujours, en principe, le dernier à quitter le navire et doit rester à bord jusqu’à ce que, le cas échéant, le navire coule. A ce que je crois, ce comportement, qui est toujours jugé héroïque, est donc, en réalité, imposé par des considérations bassement matérialistes. En effet, s'il reste à bord, fût-il le dernier, il doit le faire essentiellement pour éviter que le navire, du fait de son total abandon, ne soit alors considéré comme une épave et ne devienne la propriété de qui le trouve!

mardi 17 janvier 2012

La légende dorée des autoroutes

Il existait, il y bien longtemps il est vrai, une émission qui s’intitulait, Dieu et Max Meynier seuls savent pourquoi : "Les routiers sont sympas !". Je n’ai jamais eu l’occasion d’en jugersur pièces, mais en revanche je puis témoigner qu’ils ne sont ni prudents ni respectueux du code de la route et des autres conducteurs, bien qu’ils se piquent volontiers du titre de professionnels de la route.

Ayant à faire aujourd’hui une trentaine de kilomètres sur l'autoroute qui va d'Aix-en-Provence à Montpellier, je me suis livré à une petite expérience automobile que j'envisageais depuis longtemps de faire, à force d'entendre exalter, dans les différents médias, les vertus des chauffeurs routiers.

Sur une trentaine de kilomètres, entre La Mède et Port-de-Bouc, je me suis efforcé, sur ce tronçon d’autoroute où circulent beaucoup de camions, de rouler à la vitesse constante de 100 km à l'heure, alors que la vitesse y est limitée à 110.

Attentif à maintenir une vitesse constante de 100 km à l'heure, je n'ai pas pris soin de compter les nombreux camions qui m'ont doublé durant ce trajet et moins encore d'en relever les numéros d'mmatriculation. J'ai toutefois pris soin d'observer que tous avaient à l’arrière des limitations de vitesse qui étaient, au maximum, soit de 80 km à l'heure (c'est, je crois, le cas des camions-citernes nombreux dans la zone), soit pour d’autres de 90 km à l’heure.

J'ajoute que, sur cette autoroute, à des distances régulières, figurent à peu près partout des panneaux de signalisation spécifiques qui interdisent aux camions de doubler les voitures. Je pense que ce type de panneau vous est familier et qu’il est inutile que je le décrive.

À ma vitesse constante de 100 km à l'heure, je n’ai doublé, en tout et pour tout moi-même, que deux camions qui devaient donc respecter à peu près les vitesses qui leur sont imposées.

Je vous laisse conclure vous-même sur les résultats de cette expérience.

J'ai été doublé par plusieurs dizaines de camions qui roulaient à des vitesses que j'estime aux alentours de 110 à 120 km à l’heure.

Dois-je ajouter qu'il n'y a pas, sur cette autoroute, de radars ou du moins je n'en ai pas vu, pas plus que les panneaux qui les signalent. Faut-il ajouter que, jusqu’à une date très récente encore (début 2011? ), l’immense majorité des radars routiers ne flashaient pas les camions, en raison de leurs dimensions excessives ! Dès lors pourquoi se gêner ? Certes les chauffeurs peuvent craindre les contrôles de leurs disques enregistreurs si d’aventure, ils tombent sur des policiers, mais ces derniers sont bien rares et nul n’ignore que le bricolage des disques fait partie du B A – BA du métier. Mieux vaut donc continuer à tondre ces cochons de payants d’automobilistes !

La conclusion est claire. Un automobiliste qui roule à 53 km à l'heure quand la vitesse est limitée à 50, se voit infliger une amende et retirer des points sur son permis de conduire alors que naturellement aucun chauffeur routier, dans la bonne trentaine qui ont dû me doubler durant cette expérience, ne subira la moindre sanction pour des dépassements de vitesse considérables, puisque la plupart devaient rouler à 20 ou 30 km à l'heure au-dessus de la vitesse maximale qui est tolérée pour leurs véhicules.

Je ne sais pas quelle explication M. Claude Guéant, ministre de l'intérieur, donnerait à la chose mais je serais curieux toutefois de la connaître. Peut-être est-il raisonnable en effet de ne pas placer des radars sur cette portion d’autoroute très fréquentée par les camions dans la mesure où les camions se rient du contrôle photographique qui accompagne les radars?

Je n'ai évidemment pas de solution miracle, même si je pense que la présence de la police sur ces autoroutes serait un facteur de dissuasion pour ces chauffards, fussent-ils au volant de camions. Cette observation a été faite aux alentours de 12 heures 15, mais je pense qu'il serait intéressant de procéder également à des contrôles d'alcootest après dejeûner, car, pour avoir quelquefois, dans le passé, mangé dans des restaurants de routiers, j'ai pu constater qu’on n'y suçait pas de la glace et que le pastis et le gros rouge y étaient consommés sans modération !

Il y aurait sans doute lieu également de réformer la signalisation routière. On pourrait ainsi sans inconvénient faire l'économie de ces panneaux qui interdisent aux camions de doubler les voitures, alors qu'ils le font sans le moindre scrupule, au prix d’une double infraction. On économiserait au moins le prix de cette inutile signalisation.

J'ajoute que puisque ces camions ont TOUS une limitation de vitesse à 90 km à l'heure au maximum, on pourrait aisément interdire à tous les véhicules de ce type de dépasser cette vitesse. En d'autres termes, la vitesse maximale serait de 110 km à l'heure pour les voitures et de 90 km à l'heure pour les camions ;  les choses seraient ainsi plus simples, même si je ne doute pas un instant que la limitation de vitesse ne serait, en aucune façon, respectée par les routiers qui sont tout ce qu'on veut sauf sympas !