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lundi 31 janvier 2011

Orange passe au rouge (première partie)

Comme je prévois que ce post dépassera sans doute largement les limites que je me donne habituellement pour ce genre d’écrit, je préfère, d'emblée, le couper en deux, la première partie est, en quelque sorte, un historique qui, d’une certaine façon, éclaire la suivante et, par là, forme un préalable au second post sur le même sujet, mais de nature très différente, que je ne mettrai en ligne que demain.

Je suis, en effet, et probablement avec beaucoup d'autres, une victime d'Orange ; il est nécessaire, je pense, pour comprendre les présents comportements de cette société, d’en retracer brièvement l’historique.

Le "père" d'Orange est Michel Bon (si mal nommé !), dont il faut bien dire quelques mots, car il illustre parfaitement à la fois l'incompétence de nos grands capitaines d'industrie, dont les mirobolants salaires et le firmament des carrières font rêver tout un chacun, alors qu’éclate au grand jour la nullité de leur action et de leur gestion, puisque, dans la plupart des cas, ils conduisent au désastre des sociétés dont ils ont la charge.

Ne vous inquiétez pas trop toutefois pour eux, car, vous le verrez, ils ne sont nullement mis à la rue par leurs insuccès voire leurs condamnations ; ces désastres et parfois leurs malhonnêtetés devraient les conduire, au mieux, au chômage et, au pire, à la misère sociale, comme cela se produit souvent aux Etats Unis ou au Japon. En France, bien au contraire, on leur fait aussitôt assumer de nouvelles hautes fonctions, tout aussi gratifiantes et rémunératrices que les précédentes. Mieux encore, on les voit même parfois promus au rang de conseillers ou d’experts dans ces mêmes domaines où ils se sont montrés si lamentables.

Ce cas est admirablement illustré par J-M. Messier, mais mieux encore par Alain Minc, dont j'ai déjà parlé à quelques reprises et qui est même désormais le conseiller de notre président dans la gestion de la France, cette circonstance nous conduit à craindre le pire, dans l’hypothèse où nous ne l’aurions pas déjà atteint.

Michel Bon (on ne sait pas trop à quoi !), 69 ans aux cerises, est ESSEC et naturellement ENA. Comme beaucoup de ses semblables, n’étant propre à rien, il est, et c’est le cas de le dire pour lui, sinon bon, du moins prêt à tout.

Sa carrière le montre d’ailleurs ; il a fait ses premières armes dans la banque pendant une dizaine d'années ; avant de passer, sans coup férir, chez Carrefour. Voilà qui le destinait de façon évidente, en 1995, à être mis, par Alain Juppé, à la présidence de France-Telecom, fonction à laquelle ses emplois précédents le conduisaient manifestement, comme la suite l’a bien montré. Ce n'est pas là seulement, comme parfois, une affaire politique, puisque, deux ans plus tard, DSK, devenu ministre,le confirmait dans ses hautes fonctions.

Le grand coup de Michel Bon a été, en 2000, l'acquisition de la société Orange qui avait été créée en 1994 par le conglomérat Hong-Kong-Hutchinson puis revendue, dès 1999, à Mannesmann. Peu importe les détails, de toute façon incompréhensibles car tout cela ne relève que de manoeuvres purement spéculatives. Seul compte le fait qu’Orange a été acheté pour une cinquantaine de milliards d’euros par Michel Bon !Cet achat fou s'accompagnera, en outre, d'investissements colossaux, tout aussi absurdes, dans le secteur des télécommunications européen (Mobilcom, Equant, etc.). Là encore, le détail est sans importance.

Tous ces choix « stratégiques », dans lesquels Michel Bon (une sorte de Super Jérôme Kerviel qui, avec ses pauvres 5 milliards d’euros perdus, fait figure de nain pitoyable) ne fait rien d'autre que jouer, assez mal, au monopoly industriel avec l'argent de l'État français, c'est-à-dire le vôtre et le mien, se révèleront naturellement désastreux. Pour le seul exercice 2001, France-Télécom compte près de 9 milliards d'euros de pertes, bilan épouvantable qui n’arrête en rien les rodomontades de Michel Bon qui assure, une fois de plus, car cela ne mange pas de pain (du moins pas le sien) : « La stratégie c'est moi qui l’assume ». Tu parles ! Ce n'est pas grave, puisque c'est nous qui payons et que la tutelle de l’Etat est plus que lointaine.

Il faut attendre octobre 2002 pour que Michel Bon soit enfin remplacé à la tête de France-Telecom par Thierry Breton dont les exploits sont bien connus aussi, mais seront, on le sait, d'une autre nature.

Ne croyez pas toutefois que Michel Bon s’en est tiré comme ça. Six ans plus tard (il faut le temps de la réflexion), « pour sa gestion trop opaque du groupe » (Jolie périphrase , non ?), il a été en effet lourdement condamné par la Cour de discipline budgétaire et financière, en juillet 2008 ; l'amende est colossale : 10.000 € ....pour les 20 milliards de pertes qu'il avait fait subir à l'entreprise qu'il dirigeait. Au terme de son exercice du pouvoir à France-Telecom, cette entreprise, outre ses 20 milliards de pertes, avait 80 milliards de dettes ! Naturellement les médias qui, des années durant, avaient encensé Michel Bon et célébré, avec leur intuition habituelle, son extraordinaire génie des affaires, ont été alors très discrets. Tout cela a été à peine mentionné, d'autant que plus de cinq ans avaient passé et que, comme disait le Général, « les Français ont la mémoire courte ».

Le plus comique reste toutefois à venir.

A peine Michel Bon était-il sorti, par la petit porte, des décombres financiers de France-Telecom qu’on le nommait, dès 2002, Président...(je vous le donne en mille !) de l’INSTITUT DE L’ENTREPRISE ! Il est encore aujourd’hui « advisor » ou "conseiller" de divers organismes, président du conseil de surveillance d’un groupe de conseil et de surveillance en informatique (sans que je sois persuadé qu’il sache faire la différence entre un ordinateur et une machine à café) et membre de nombreux conseil d’admistration.

Cela dit, tout le monde reconnaît que ses conseils sont très précieux et surtout infaillibles. Quand il y a un choix stratégique à faire, il suffit en effet de faire l’inverse de ce qu’il propose.

dimanche 30 janvier 2011

Démocratie et conflits d'intérêts. D'Haïti à l’Egypte

Au moment où, dans le débat public national, « démocratie » (pour le Sud) et « conflits d'intérêts » (en France) sont les maîtres-mots de l'information comme toutes les discussions, personne ne semble se poser la question des rapports qui peuvent s'établir entre ces termes et les notions qu’ils portent.

Commençons donc par Haïti puisqu'en ce dimanche 30 janvier 2011, Hillary Clinton, dans quelques heures (il est 9 heures en France et le décalage horaire est de moins 6 heures) va débarquer de son jet privé sur l'aéroport de Port-au-Prince, où l'on aura assurément fait de la place pour elle au parking.

Elle estime, sans le moindre doute, apporter en Haïti les valeurs de l'humanisme et de la démocratie ; elle vient en effet, plus précisément, faire pression sur le président René Préval comme sur les candidats au second tour de la présidentielle pour permettre un déroulement rapide d'un scrutin, en panne depuis le 28 novembre 2010, jour du premier tour dont les résultats n'ont toujours pas été officiellement proclamés, comme on a pu le lire dans mes précédents posts sur Haïti.

La date de cette proclamation a été sans cesse remise et elle est actuellement annoncée pour le 2 février 2011. Le second tour aurait lieu le 20 mars avec des résultats donnés le 16 avril 2011. René Préval, dont le mandat se termine le 7 février et avait été prolongé (mais avec contestation sur ce point), resterait donc en place jusqu’au 14 mai au moins, comme il le souhaitait lui-même, bien entendu, mais comme la pression internationale le lui refusait.

Naturellement comme on cachait à notre pauvre Président ce qui se passait en Tunisie, on ne dit pas tout sur la situation et l’opinion haïtiennes à Madame Clinton !

La pauvre Hillary ne sait sans doute pas (on se garde bien de le lui dire) que le bruit court là-bas que le couple Clinton tirerait des profits (cachés mais considérables) de l'assistance internationale et humaine au désastre haïtien. Dans la « Clinton Global Initiative » qui « coordonne » tout cela, Bill ne tirerait pas que le dollar, symbolique et annuel, qui lui est attribué comme unique rémunération.

Le couple Clinton lui-même fait aussi un peu problème et il est « improbable », comme dirait notre « Fredo », dans la mesure où on sait pas, au juste, où en sont leurs relations personnelles (hors des images pieuses destinées à la presse people).

On ne sait pas davantage si Hillary s'est enfin convertie au système d'humidification de ses cigares qu'affectionne tant ce cher Bill.

Bien des gens, sans doute mal intentionnés, se demandent donc si l'intérêt d'Hillary Clinton dans cette affaire ne tient qu'au seul bonheur du peuple haïtien. Le plus grave est que les actions qu’elle conduit dans ce cadre, quels qu’en soient les vrais motifs, sont pour partie contre-productifs et constituent, dans les faits, autant de « boomerangs » ou de « pavés de l'ours » (à vous de choisir la métaphore qui vous conviendra le mieux).

De l’autre côté de l’Atlantique, « nan Ginen » comme on dit en créole haïtien, l'intérêt américano-français porté au processus électoral ivoirien fait l'objet d'analyses du même genre et la propagande très intense de Laurent Gbagbo ne se prive naturellement pas d’exploiter, à tort ou à raison, cet argumentaire comme je l’ai montré dans un précédent post. Naturellement les photos du mariage de Alassane (Dramane, ce second prénom étant amovible en fonction des circonstances et des visées) Ouattara avec la blonde Dominique Novion , célébré à Neuily par Nicolas Sarkozy, sont partout ; on ne manque pas de rappeler aussi que cette femme d’affaires fut la gestionnaire des biens d’Houphouët-Boigny et d’Omar Bongo (une sorte de Patrick de Maistre en tailleur Channel en somme). Comme on ne la voit guère voilée, on ne sait pas si elle s’est convertie à l’islam pour épouser Alassane Dramane (ce qui est une obligation pour tout bon musulman), mais il est clair que tout cela fait parfaitement les affaires de Laurent Gbagbo, sans pour autant militer vraiment en faveur de la démocratie.

Mais revenons à Haïti et à Hillary Clinton, nul doute que le président Préval sera tout sourire pour l’accueillir à sa descente d'avion ; il écoutera assurément avec la même courtoise aménité et sans doute en hochant du chef, ses fermes et pressants conseils en faveur de la reprise du processus électoral et donc de l’éviction définitive de son propre candidat, Jude Célestin. Ce dernier, quoique son retrait ait été annoncé par son parti INITE, ne l’a pas confirmé, jusqu'à présent et, dit-on, à l’instigation de Préval (qui veut faire durer les choses) alors que cette démarche personnnelle, selon la loi haïtienne, est absolument indispensable pour que ce retrait soit effectif.

À n'en pas douter, Hillary reprendra donc, dans quelques heures, son avion avec la conviction qu'elle a une fois de plus rempli sa mission et triomphé de ces maudits blacks qui, non contents de l'avoir odieusement écartée de la présidence des États-Unis, lui mettent maintenant des bâtons dans les roues dans le cadre de ses actuelles activités.

Nul doute non plus qu'aussitôt Hillary envolée, René Préval dénoncera, plus ou moins discrètement et/ou par séides interposés, les insupportables manoeuvres américaines et internationales, qui visent, une fois de plus, à imposer au peuple haïtien des choix qui ne sont pas les siens. Ce genre de numéro marche toujours en Haïti où le nationalisme reste très présent, puisque, ne l'oublions pas et chacun se fait fort de nous le rappeler à tout moment, Haïti, première république noire, a été aussi la première colonie a secouer victorieusement le joug du colonialiste.

Et la Tunisie me direz-vous ? Et l'Égypte, poursuivrez-vous, non sans raison ?

Au moment où la France découvre, après deux siècles de cette situation, que la démocratie et les conflits d'intérêts font tout à fait bon ménage, tant dans la politique que dans l'économie, ne devrait-elle pas s'interroger aussi sur ces mêmes rapports dans les pays du Sud ou le Nord se livre à tant de déclarations enflammées en faveur de cette même démocratie, sans jamais faire mention de ses intérêts?

Certes, à l'aune de nos moeurs et de nos habitudes de pensée, la liberté d'expression est une valeur que nous ne cessons de mettre en avant pour contester les régimes policiers instaurés dans nombre de pays du Sud, avec lesquels nous avons par ailleurs les meilleurs rapports et où nous aimons tant à passer nos vacances.

Sommes-nous cependant tout à fait sûrs que le fait de pouvoir acheter en Tunisie « Le monde » ou « Libération » (à un prix quotidien, que, comme l’accès internet, ne peuvent guère se permettre les marchands de légumes tunisiens, fussent-ils titulaires d'une maîtrise de sociologie) va changer de façon définitive leur mode de vie et leurs conditions d'existence ?

Ne devrait en pas se demander, plus sérieusement et pour un instant, ce que signifie d'ailleurs la liberté d'expression dans un Etat comme l'Italie où la plupart des médias sont aux mains ou aux ordres d'un Silvio Berlusconi, sans parler de la France de Hersant et désormais de Lagardère ? Moi-même victime naguère, dans mes blogs, de la censure du Nouvel Obs puis de TF1, ne suis-je pas bien placé pour en parler et en juger ?

En France même personne ne semble faire le lien entre le cumul des mandats électoraux et/ou des fonctions ministérielles et les fameux conflits d'intérêts dont on vient soudain de découvrir, avec stupeur, l'existence. Personne n'avait donc jamais remarqué que les fonctions électorales (maires de grandes villes ou présidents de conseil régional ou général) permettent, d'abord et surtout, de détourner au profit de ces mêmes zones et de leurs électeurs (villes, départements ou régions) une bonne partie des crédits de l'État (quand il s'agit d'installer de nouveaux services ou équipements) ou, au contraire, de protéger ces mêmes zones quand elles sont menacées de restrictions dans ces mêmes matières !

Les hommes politiques du Sud ne sont pas forcément tous des imbéciles. Préval ou Gbagbo actuellement et peut-être bientôt Moubarak (moins exposé car regardé comme très utile à nos intérêts stratégiques au Moyen Orient) sauront, de toute évidence, faire apparaître ou donner à soupçonner, sous les revendications du Nord en faveur de la démocratie, le jeu des intérêts de ces mêmes Etats, grands donneurs de leçons de démocratie.

En fait, Hillary Clinton ou Nicolas Sarkozy font le jeu, sur le plan interne, de ceux dont ils pensent cnaïvement contester la position. On le voit depuis deux mois en Côte d'Ivoire ; on risque de le voir en Haïti mais, dans ces deux cas, les choses sont, somme toute et comme en Tunisie, moins graves qu'en Égypte où la chute de Moubarak risque d'avoir des conséquences catastrophiques, dont ne semblent réellement conscients pour le moment, à en juger par leurs réactions, qu’Israël, la Cisjordanie et la Jordanie qui sont naturellement en première ligne.

Quant à savoir quel profit réel tireront les fellahs égyptiens de la présence, dans les kiosques cairotes, du « Monde » et de « Libération » (dans l'hypothèse où ces journaux auraient été interdits comme en Tunisie) j'avoue ne pas trop savoir à quoi m'en tenir sur ce point.

vendredi 28 janvier 2011

La monnaie de...

Je ne sais quel critique littéraire de la fin du XVIIIe siècle ou du début du XIXe, voulant définir les auteurs de comédies du XVIIIe siècle, comme Regnard et quelques autres, les a qualifiés, par une heureuse expression, de « monnaie de Molière ». J'ai même réussi à coller Google sur ce point et n'y ai pas trouvé le nom de l'auteur de cette formule. Je reviens donc à mon vieux truc de concours entre mes lecteurs ; celle ou celui qui résoudra cette énigme gagnera, comme toujours et en hommage à Coluche, une tringle à rideaux.

Je ne sais pas si l'auteur de cette expression s'est inspiré de l'image populaire qui veut que, lorsqu'un homme, l'âge avançant, délaisse sa femme, du même âge que lui, pour en prendre une ou plusieurs autres plus jeunes, on dit parfois qu'il « fait la monnaie ». Là encore, je laisse cette interrogation à la sagacité de mon lectorat.

Les hommes politiques, plus fins connaisseurs de la psychologie humaine que de la bonne gouvernance des Etats, se sont, depuis longtemps, inspirés de cette démarche dans la conduite de leurs affaires. Ainsi a-t-on, depuis longtemps, « fait la monnaie » des ministères en créant des secrétariats d'État, voir ses sous-secrétariat d’Etat. Les Québécois vont plus loin que nous encore dans cette pratique puisque non contents d’avoir, aux côtés des ministres, des « sous-ministres », ils ont aussi des « sous-ministres adjoints » ! On ne saurait guère raisonnablement pousser plus loin la politique de découpage du maroquin (Je prie humblement la LICRA et le CRAN de consulter leur dictionnaire français avant de me traîner en justice pour incitation à la haine raciale, j'ai écrit "maroquin" et non "Marocain").

Cette pratique permet, selon les cas, de récompenser ou d’appâter d'autres politiques sans avoir à créer de pesants et coûteux ministères. Depuis quelques décennies, bien que l'on constate en général que les gouvernements comportent des ministères toujours aussi voire plus nombreux, la mode est, sur le plan des principes au moins, à la réduction du nombre des ministres. Le secrétariat d'État reste donc un moyen commode de satisfaire sa clientèle. En outre, et on le constatera sans doute bientôt, l’approche d’une élection présidentielle est toujours une période très favorable à l'apparition de la monnaie des maroquins.

Souhaitant sans doute, au moins sur le papier, respecter les consignes de limitation de la taille des gouvernements et en vue de réaliser des économies budgétaires, le régime actuel fait, en quelque sorte, la "monnaie de la monnaie" grâce à un large usage des missions. Je n'entreprendrai pas ici de les dénombrer toutes, car, comme je le dis parfois et comme certains se plaisent à me le rappeler, le blog doit rester un genre court et ces "missions" sont devenues si nombreuses que leur simple inventaire en dépasserait largement les limites.

Je me bornerai donc aux plus notables, aux plus pittoresques et aux plus récentes, comme celle de Mme Boutin, dont le contenu et la rémunération furent jugés si scandaleux qu'elle dut y renoncer (on aurait pu lui proposer, les soldes venues, les maisons closes qui ne font toujours pas l’objet d’une mission). La mission Boutin était toutefois moins pittoresque que celle de Michel Rocard (sur les pôles) ou de Jack Lang sur la piraterie (après Fidel Castro !).

La plus récente, dont j'ai appris vendredi 28 janvier 2011 la création et qui m'a inspiré ce post est celle, sur le suicide des jeunes, que l'on vient de confier à Boris Cyrulnik, à peine revenu d'une mission sur les viols au Congo. Je ne sais pas trop ce qu'il pourra apporter en la matière et les solutions qu'il pourra proposer, cette mission est en tout cas une jolie illustration de la « résilience », tant de Cyrulnik lui-même que du gouvernement qui a imaginé de lui confier cette tâche.

Il est clair que les raisons qui conduisent, tant à imaginer de telles missions qu'à déterminer le nom de ceux à qui elles seront confiées sont diverses et multiples. Un problème surgit-il dans notre société, qu'il s'agisse du ramassage des sacs en plastique ou du « speen » des éleveurs de porcs bretons, à défaut de proposer des solutions, on créé une « mission ». Ce choix lexical montre, en tout cas, un sens de l'économie de moyens de la part de nos gouvernants par rapport à l'époque de Clémenceau, dont on connait la formule selon laquelle » En France, pour enterrer un problème, on crée une commission ! ». La mission succédant à la commission, si le résultat est le même, on a, en tout cas, économisé une syllabe !

Voilà pour la thématique et la finalité de ces missions, reste le problème du « missionnaire » ou du « missionné ». Je ne sais pas trop quel est, en pareil cas, le meilleur terme, l'un et l'autre se prêtant à des jeux de mots douteux qu’on ne peut pas toujours éviter (pour la mission africaine sur le viol, certains n’hésiteront pas devant « Cyrul-nique » !). Comme l'objectif majeur est de faire causer dans le poste, le mieux est toujours de choisir une personnalité médiatique que non seulement radios et télévisions se disputeront, mais qui sera en mesure de faire une prestation audiovisuelle de qualité. Le reste importe peu au fond et on ne voit pas plus le rapport entre Michel Rocard et les pôles qu'entre Jack Lang et les pirates mais on peut toujours faire confiance aux vieux profesionnels pour qui, d'abord et surtout, « the show [pour Rocard, "the chauve"] must go on ».

jeudi 27 janvier 2011

Axel Kahn, la loi LRU et la recherche

Dans ce même blog, je disais hier que je pourrais éventuellement revenir sur la question de la loi LRU que j'envisageais alors sous un angle très particulier, celui de la façon dont Valérie Pécresse avait su, avec adresse, mettre dans son jeu les présidents d'université pour faire passer sa loi.

Le hasard est toujours malicieux et, en la circonstance, il l'a même été triplement. Hier, je disais pouvoir revenir sur cette question de la loi LRU, mais je n'avais alors aucune intention de le faire, n’ayant pas grand-chose de nouveau à en dire depuis 2007. En effet, ce hasard farceur s'est employé à me fournir l'occasion de ne pas m’en tenir à ce choix. En effet cette nuit, vers 3:00 du matin, victime comme souvent d'une insomnie, j'ai utilisé le remède que j'emploie habituellement en pareil cas. Il consiste à écouter, un peu au hasard, la radio pour me détourner de mes préoccupations. Je suis tombé en zappant sur BFM qui, quoique aux mains « du grand capital » est, tout de même, une des chaînes radiophoniques les moins débiles de notre paysage audiovisuel.

Premier hasard donc. Le journaliste de service (rassurez-vous, l'émission originale était diurne et, la nuit, on ne fait que repasser les émissions de la journée) interrogeait Axel Kahn président de l'université Paris V qu'on a baptisée, dès la loi Edgar Faure, « René Descartes », ce qui est tout de même mieux même si l’on ne voit guère les raisons d’un tel choix pour une université essentiellement médicale.

Deuxième hasard, la présence d’un président d’université vantant les charmes de la loi LRU alors que je venais de montrer par quelles voies Valérie Pécresse s'était acquis les faveurs des présidents d'université en leur donnant tous les pouvoirs et les privilèges dont ils rêvaient.

Le troisième hasard était Axel Kahn lui-même parlant précisément de la loi LRU, dont il se faisait naturellement le chantre, sans être en mesure d'expliquer en quoi elle pouvait réellement justifier un tel enthousiasme.

Un mot sur Axel Kahn, frère cadet de Jean-François, aussi bavard que ce dernier et quelquefois pas plus convaincant que lui. C'était le cas cette nuit et son argumentaire, dont je ne reprendrai ici qu'un ou deux éléments, étaient des plus faibles.

Je n'ai d’ailleurs jamais bien compris pourquoi Axel Kahn après avoir fait une carrière, sans éclat particulier mais très honorable, à l'INSERM et à l'Institut Cochin, s'est laissé entraîner à accepter de venir à Paris V, essentiellement, pour présider cette université. Certes le bureau présidentiel y est fort agréable et la vue qu'il a sur la place de l’Odéon est très charmante. C'est toutefois un peu court et pour un homme, qui s’est voulu et se veut encore un scientifique (encore que ses principales publications soient plus de l'ordre de la vulgarisation, voire du journalisme, que la recherche elle-même) une faculté de médecine (même la plus importante de France) ne peut guère être regardée comme un temple de la recherche qui, en matière médicale, ne se fait guère dans les universités !

Pour celles et ceux qui ne connaîtraient pas la réalité de l'enseignement de la médecine, il faut ajouter ici qu'il n'a pas grand-chose à voir avec la science. Il suffit, pour s'en convaincre, de voir la nature des enseignements scientifiques et les modes de contrôle des connaissances, par exemple en première année d'études médicales. Les cours de sciences « dures » y sont assurés par des médecins qui n'ont avec la physique, la chimie et les mathématiques que des relations généralement anciennes et, de toute façon, très lointaines. Il y règne donc un bachotage absurde, avec pour contrôles des connaissances des QCM où seule la forme compte et dont la correction mécanique est plus que rapide.

Axel Kahn faisait observer hier que l'inscription en première année de médecine est peu coûteuse (autour de 180 €), mais il aurait dû ajouter que cet enseignement en amphithéâtre est tout à fait accessoire voire aboli, par rapport à l'activité des « écuries » privées et payantes, seules garantes de succès mais dix ou vingt fois plus coûteuses, où les mêmes enseignants de médecine répètent ou font répéter leur dérisoire enseignement, en doublant ou triplant leur salaire.

Sont-ce là les temples universitaires de la recherche dont parle avec tant d’émotion Axel Kahn ? De qui se moque-t-il, en évoquant, à ce propos, les facultés de médecine où, chacun le sait, la recherche est à peu près absente. Les deux seuls Prix Nobel de médecine français du dernier quart de siècle venaient de l’Institut Pasteur et de l’INSERM et non de ParisV ! Il faut reconnaître que, si comme on peut le supposer, Axel Kahn est venu à Paris V pour des motifs extra-scientifique et surtout pour en faire la promotion en même temps que la sienne propre, il réussit assez bien dans cette activité, du moins auprès d'un public qui ne connaît guère le dessous des cartes.

Tout serait donc à reprendre dans son intervention. On y observe en outre des lapsus multiples et significatifs (la chose réjouirait un psychanalyste !) ; ainsi emploie-t-il, à plusieurs reprises, les mots « euro » ou « dollar » à la place du terme « étudiant » (un exemple entre autres : 37.000 € au lieu de 37.000 étudiants). Cela ne vaut certes pas la fellation de Rachida, mais il y a néanmoins là quelques jolis lapsus dont l'interprétation est naturellement évidente.

Axel Kahn, grand amateur de présidences, envisagerait-il celle de la conférence des présidents d'université pour le prochain tour parisien ? Il a fait là, en tout cas, un numéro propre à étoffer son dossier de candidature. Il a soutenu, contre toute vraisemblance mais en argumentant bien à tort, contre les « grandes écoles », que les universités étaient les temples de la science! J'attendais qu'il nous fasse le coup des prix Nobel ou des médailles Field pour lui asséner, sur la tête, les vérités à ce sujet que j'ai déjà exposées ailleurs.

Les propos d' Axel Kahn sont à l'image de la photo qu'en toute modestie, il a donnée pour illustrer le site de Paris V. Détendu, « cool » et sans cravate, il y présente une image aussi racoleuse que les propos qu'il a tenus dans cette émission et qui avaient tout l’air d'une déclaration de candidature à la présidence de la CP U, en même temps que d'un hommage rendu à Valérie Pécresse, sans doute dans l'espoir de quelque retour d'ascenseur, immédiat ou plus tardif.

mercredi 26 janvier 2011

Education nationale : la stratégie des « petits chefs ».

La ministre de l'enseignement supérieur et de la recherche, Valérie Pécresse, a fait une importante découverte stratégique lors de l’élaboration de sa loi LRU sur la prétendue autonomisation des universités. Petit rappel du texte. Il s’agit de la loi 2007-1199 du 10 août 2007 relative aux « libertés et responsabilités des universités », initialement intitulée « loi portant organisation de la nouvelle université » et plus communément appelée « loi d'autonomie des universités » ou même « LRU ».

Je dois ici une courte explication de l’usage que j’ai fait du terme « prétendue », car les universités françaises ne pourront être réellement autonomes que le jour où elles ne dépendront plus, quasi totalement, des financements de l'État. Un tel cas est, par exemple, celui des grandes universités américaines (le « top-ten » des « ivy universities »), qui constitue également le peloton de tête mondial dans le classement de Shanghai, que les autorités universitaires françaises ont sottement pris pour référence, sans connaître grand chose aux réalités ou sans vouloir les prendre en compte.

En France, on paraît ne pas savoir, en effet, que ces universités américaines prestigieuses ont un financement largement privé (à 80%)et des modes de fonctionnement radicalement autres que les nôtres. Aux Etats-Unis, même les universités dites « d'État », ne dépendent des moyens publics que pour 30 ou 40 % de leur budget.

Réforme bidon ou pas, c'est un tout autre problème dont je veux parler aujourd’hui et je laisse donc de côté cet aspect sur lequel je pourrais, le cas échéant, revenir, car mon sentiment n'a pas changé depuis l’époque où j’ai écrit à ce même propos.

Le point important ici est la stratégie habile (une fois n'est pas coutume !), mise en oeuvre en 2007 par le MESR. Je doute, vu la subtilité de la manoeuvre, que Valérie Pécresse ait imaginé elle-même ou, en tout cas, seule, une manoeuvre si adroite. Il est vrai que, comme le sont souvent les bonnes idées, la formule est très simple.

L'astuce a en effet consisté à se gagner, pour la mise en oeuvre de la réforme, le concours et même la complicité des présidents d'universités, les « petits chefs » locaux en la circonstance. La rumeur d'une importante réforme courant ici et là, la conférence des présidents d'universités, la CPU, avait jugé bon d'exprimer officiellement sur ce point les principales revendications de ses membres dans le cas d’une réforme. Il y en avait deux, essentielles à leurs yeux : d’une part, avoir un mandat renouvelable car depuis la loi Edgar Faure, l’une des plus sages mesures prises alors était le mandat unique pour les présidents d’université (ce qui tordait le cou à la fois au clientélisme et à l’électoralisme) ; d’autre part, avoir la haute main sur les recrutements d'enseignants grâce à la mise en place, par les présidents eux-mêmes, de commissions ad hoc qui remplaceraient les commissions de spécialité élues.

Il était évident qu'en inscrivant dans la loi LRU ces deux exigences majeures de la CPU, on faisait des présidents des instruments dociles, voire empressés, de l'acceptation et de la mise en oeuvre de la loi Pécresse. Les choses se sont passées exactement comme on l'avait prévu ; la CPU qui était, auparavant, en fréquent désaccord avec le ministre, s'est aussitôt chargée de la mise en place de la volonté ministérielle et de la propagande en faveur de la loi LRU.

On a ainsi vu des présidents d'université s'employer localement, fût-ce par le recours aux forces de l'ordre (eux qui étaient naguère encore tellement attachés aux franchises universitaires) à entraver et même à briser toutes les tentatives syndicales et/ou estudiantines de contester ou d'entraver la loi LRU.

Il apparaît désormais que la rue de Grenelle (ministère de l’éducation nationale) a compris et retenu la leçon de la rue Descartes (ministère de l’enseignement supérieur et de la recherche). L. Chatel le montre bien en songeant désormais à faire des chefs d'établissement des « petits chefs » et, par là, les rouages complaisants et dociles des volontés du ministre, à la fois en accroissant leur propre pouvoir (vieille idée qui ne saurait leur déplaire et qu’on a déjà dix fois avancée sous le masque de la déconcentration), mais en alléchant en outre les plus serviles et/ou les plus cupides d’entre eux par une prime (jusqu'à 6000 € tous les trois ans). Vous aurez déjà compris que le ministre jugera naturellement, seul ou à travers ses affidés, des mérites qui seront reconnus à ceux de ces « petits chefs » qui seront les bénéficiaires de cette prime.

On a déjà préparé la chose en faisant le même coup pour les recteurs, pourtant jamais portés à contrarier les vues du ministre, mais naturellement, avec un tarif bien supérieur pour la prime. Dans ce cas, la « modulation » peut atteindre 22.000 € . A « petit chef » petite prime et, dans l’arithmétique ministérielle, un recteur comme « moyen chef » vaut quatre « petits chefs » ou plutôt douze car la prime des recteurs est annuelle!

Les premiers services attendus des recteurs sont, bien entendu, la facilitation maximale de l’ingestion par les enseignants et les syndicats de la pilule, grosse et quelque peu amère, des suppressions de postes.

Qu'il y ait lieu de récompenser le mérite dans la fonction publique, qui pourrait dire le contraire, à part peut-être quelques farouches syndicalistes ? Ces derniers ne veulent entendre parler que de l'ancienneté (qui met strictement sur le même pied tous les enseignants consciencieux ou fumistes, assidus ou absentéistes, etc.) et du principe intangible du « choix » (« grand » ou « petit » dans la terminologie officielle) que les syndicats eux-mêmes contrôlent plus ou moins au bénéfice de leurs membres ou de leurs amis.

Il est à craindre que, dans les universités comme dans les lycées, collèges ou écoles, l'érection (je pèse mes mots) des responsables locaux en « petits chefs », loin de favoriser un meilleur fonctionnement des systèmes éducatifs, ne fasse que les pervertir encore davantage par des dysfonctionnements nouveaux et supplémentaires, allant selon les lieux et les cas, mais sans aucune exclusive, du clientélisme et du simple copinage au droit de cuissage !

mardi 25 janvier 2011

Vers une solution de la crise haïtienne ?

Alors qu'en Côte d'Ivoire, où le second tour des élections présidentielles a eu lieu, comme le premier tour en Haïti, le 28 novembre 2010, la crise semble se diriger vers une solution finale radicale, peut-être militaire, alors qu’au contraire, en Haïti, la voix de la raison semble se faire entendre.

On avait pu penser que les choses allaient se régler, il y a quelques semaines, lorsque le président Préval a sollicité de l’Organisation des Etats Américains (OEA) la mise en place d'une commission internationale d’experts, chargée de vérifier les résultats du premier tour de l'élection présidentielle. Celle-ci avait, à titre provisoire, placé en tête Myrlande Manigat, précédant, avec environ 10% d’avance, Jude Célestin (deuxième), candidat d’INITE, suivi lui-même, de très près, par le populaire chanteur Michel Martelly.

Ces résultats avaient donné lieu à de très vives protestations des partisans du chanteur qui considéraient que la fraude avait fait passer devant leur favori Jude Célestin, regardé comme le candidat du président Préval. Les choses sont assez compliquées dans le cas de Jude Célestin, dont certains prétendent qu'il est le père de l'enfant qu’a eu la fille du président Préval, alors que l'intéressée nie qu'il en soit ainsi. Peu importent ces aspects familiaux ! Toujours est-il que Jude Célestin passait pour la créature de René Préval.

Il faut reconnaître que le président Préval a eu des comportements dont la logique est un peu difficile à suivre. Après avoir lui-même réclamé de l’OEA la mise en place de cette commission électorale de contrôle, pensant sans doute qu'elle allait entériner des résultats du premier tour qui semblaient convenir au gouvernement haïtien. Toutefois, avant même la publication du rapport final (dont le contenu avait toutefois circulé), René Préval en a contesté le résultat car il conduisait à faire passer Martelly en deuxième place devant Jude Célestin. La commission des experts de l’OEA avait, disait-on, constaté des fraudes et recommandé d'intervertir le classement des deuxième et troisième candidats. Michel Martelly se serait retrouvé alors en deuxième position avec 22,2%, après invalidation de 7.150 votes en sa faveur. Jude Célestin passerait donc alors de la deuxième à la troisième place, avec 21,9%, après avoir perdu 17 220 votes. Myrlande Manigat resterait toujours en tête, avec 31,6% des voix, quoique 13 830 voix lui aient été supprimées pour irrégularités.

On en était là avant le dernier week-end où les choses se sont soudain précipitées, probablement sous le double effet d'une réunion tenue en République Dominicaine et à laquelle a assisté le président Préval et surtout des pressions américaines, qui ont été si vives qu’on est allé jusqu'à prétendre que les États-Unis voulaient refuser désormais le visa d’entrée aux Etats Unis à neuf des membres de la plate-forme INITE.. Tout cela a dû assurément aider le président à changer de position !

À partir de là, les événements se sont succédé, en se précipitant.

Divers représentants de la communauté internationale se sont rendus lundi 24 janvier au siège du Conseil électoral provisoire haïtien (CEP) pour inciter cette instance à réviser les résultats contestés de l'élection présidentielle, ce qui, comme on l’a vu, conduirait à écarter du second tour le candidat du pouvoir.

Edmond Mulet, représentant du Secrétaire Général de l'ONU, a déclaré qu’un accord avait été acquis et, avec une prudence toute diplomatique, il a fait une déclaration concernant la publication des résultats revus par les experts de l’OEA et désormais acceptés par la CEP (qui, comme René Préval, les contestait jusqu'à présent sans qu'ils aient été officiellement publiés) et annoncé la publication imminente à la fois des résultats définitifs et du calendrier de la suite des opérations. Naturellement ce diplomate guatémaltèque, parfait francophone au demeurant (allez donc voir dans le Nouvelliste, sur internet, la video de sa déclaration), s'est gardé de répondre à toutes les questions qu'on a pu lui poser, tant sur les résultats eux-mêmes (mais il est clair qu'ils conduiront au déclassement de Jude Célestin) que sur la date du deuxième tour ou sur les intentions du président Préval quant à la date à laquelle il pourrait quitter ses fonctions.

On avait, en effet, l'impression nette, à tort peut-être, que René Préval cherchait à gagner du temps et à prolonger son mandat jusqu'au 7 février 2011, date à laquelle le nouveau président devait prendre ses fonctions (si le calendrier électoral initial avait été respecté), voire à effectuer un intérim jusqu'à mi-mai 2011 dans l'hypothèse où le deuxième tour des élections aurait été encore différé.

Il est très probable, dès lors, que l'effet conjoint des pressions de l’OEA et surtout des Etats-Unis, qui se sent accentuées de façon nette pendant le week-end et du caractère désormais inéluctable de la rétrogradation de Jude Célestin à la troisième place ont conduit ce dernier a choisir de retirer, de lui-même, sa candidature. Ce geste lui évite naturellement l'infamie de la reconnaissance et de l'officialisation des fraudes électorales dont il avait bénéficié.

Tout donne donc à penser que, désormais, les principaux obstacles sont levés ; le deuxième tour pourrait avoir lieu assez rapidement (sans doute, selon le calendrier secret annoncé par E. Mulet,) et le nouveau président de la république d'Haïti être élu selon ce même calendrier.

Tout donne à penser que ce président sera une présidente, en la circonstance, la juriste constitutionnaliste Myrlande Manigat, qui aura la particularité singulière d'avoir déjà été l’épouse d’un président de la République d'Haïti, Leslie Manigat, et donc la « Première Dame » de l'Etat, avant d'en occuper elle-même la fonction présidentielle. Cette circonstance fait penser à l'Argentine et au couple Kirchner, mais les choses se sont déroulées d'une façon bien différente et on espère pour Leslie Manigat que cela continuera !

Pour une Société Protectrice des Présidents.

Après la SPA, ne devrait-on pas songer à instaurer la SPP, Société Protectrice des Présidents ? À vrai dire, j’avais songé pour être plus clair d’emblée à l'appeler plutôt la Société Protectrice des Dictateurs , la SPD, mais il m’a semblé que ce sigle donnerait trop lieu à des jeux de mots faciles que ne justifient pas toujours les moeurs des intéressés.

Vous aurez donc déjà compris que ceux dont je veux parler ici sont les présidents qui ont une certaine tendance à être, aussi et souvent d’abord, des dictateurs. Ce ne sont donc pas des pauvres présidents comme le nôtre, obligé qu'il est, comme lundi 24 janvier 2011 au matin, de se taper une heure et demie de conférence de presse , de faire la danse du ventre à propos des problèmes internationaux et de devoir causer G20 et G8, alors qu'il sait mieux que quiconque, qu’il ne pèse guère au sein de ces augustes assemblées qui ne sont guère que des théâtres d’ombres. En réalité, l’un comme l’autre n'ont pas voie au chapitre de l’économie spéculative du monde, pas plus d'ailleurs que les collègues présidents de notre Nicolas, fussent-ils (comme il aime désormais à le dire, s’étant pris de passion pour le subjonctif, récemment découvert) américain ou chinois. Les vrais centres de décision sont bien entendu ailleurs et ce ne sont pas les pitoyables rodomontades de Barrack Obama ou les clignements d’yeux du Chinois de service qui pourront changer les choses.

Non, je veux parler ici des vrais présidents, à vie ou non, qui restent dix, vingt ou trente ans en fonction, peuvent transmettre à leurs enfants leurs présidences, après les avoir parfois laissé exercer par leurs femmes. Ces présidents exotiques peuvent même, pour certains d’entre eux, particulièrement loufoques, se faire empereur ou se bâtir, dans le village de leur enfance, érigé parfois en capitale nationale, une cathédrale plus grande que celle de Saint-Pierre de Rome.
Bien entendu, c'est plutôt dans le Sud qu'on trouve ce genre de présidents, mais l’espèce est loin d’être éteinte et les situations actuelles nous en montrent quelques specimens qui illustrent bien toutefois la vieille formule des Romains, selon laquelle « la Roche Tarpéienne est près du Capitole ».

Comment résister ici à l'envie de faire figurer dans ce texte la phrase que mon éditeur Dragon, dont j’use pour dicter à mon ordinateur, a écrite, en lieu et place de la formule précédente, et qui est « la roche pénienne est près du capital » ! C’est tellement vrai, dans le cas de quelques-uns de nos infortunés dictateurs, comme vous allez pouvoir le constater.

Regardez ce pauvre M. Ben Ali et voyez à quel point il illustre cette jolie et si involontaire formule de mon Dragon. Après avoir épousé sa coiffeuse (qui, vous l'aurez remarqué à la tignasse de son mari, devait être spécialisée dans les teintures), Zin instaure en Tunisie une dictature de fer, toutefois si discrète que notre cher président, que la cinquantaine a rendu presbyte, n’a pas vue, ce « pays frère » étant « trop près » comme il nous l’a annoncé hier.

La Tunisie a été mise en coupe réglée au profit de la coiffeuse et de sa famille qui sont les bénéficiaires exclusifs des magouilles, des trafics et des bakchichs qui sont les principales industries locales avec l’harissa et la boukha. La révolution du jasmin arrivant un beau matin, voilà que Leïla embarque le magot de la réserve de l’Etat (une tonne et demie d'or en lingots), sans qu'on sache si elle a véritablement l'idée de partager le butin, dans la suite, avec son dictateur de mari.

S'il y a une chose dont les dictateurs doivent se méfier (« la roche pénienne est près du capital ») ce sont bien leurs épouses, lorsqu'ils sont obligés de changer de fonction.

Regardez ce pauvre M. Duvalier, dit « Baby Doc », à peine, en 1986, avait-il filé d’Haïti avec une petite centaine de millions de dollars que sa chère épouse le plaquait, sans oublier bien sûr, de s'emparer, semble-t-il, de la plus grande partie du magot. C'est à peine s'il lui reste aujourd’hui 6 ou 7 millions de dollars. En outre, comme il a eu l'imprudence de les mettre dans des banques suisses, voilà que les perfides Helvètes, au prétexte d'aider le peuple haïtien (ils ont pris le temps de la réflexion !) lui refusent l'accès aux maigres restes de sa fortune. Par là, on l'oblige à revenir en Haïti, sans même avoir une raison de le faire autre que celle, lamentable, de prétendre venir faire don à la population du pays de cet argent qui désormais n’est plus le sien, tout en ne l’ayant, en fait, jamais été.

Le malheur de ces pauvres dictateurs me fait penser à une loi économique que, dans mon innocence, j’avais découverte à propos du maréchal Mobutu, à l'époque où il régnait encore sur le Zaïre. La fortune d'un dictateur, naturellement toujours dissimulée hors du lieu où il exerce son industrie, est, en général, égale à la dette extérieure du pays en cause. J'avais alors fait cette observation pour le Zaïre qui devait à l'époque 11 milliards de dollars, ce qui était la fortune qu'on supposait à Mobutu. J’ai pu, à diverses reprises, dans la suite, vérifier ce point pour d’autres dictateurs. Bien longtemps après, j’ai vu cette loi scientifiquement énoncée et prouvée par un économiste américain dont j’ai oublié le nom.

Certes, je reconnais que tous ces dictateurs, une fois déchus et exilés, n’inspirent guère la pitié et moins encore la sympathie. Rares sont pourtant les gens qui tombent si bas de si haut et si vite ! Regardez ce pauvre Ben Ali ! Même Fredo-la-culture, qui, trouvant la Thaïlande trop lointaine et devenue dangereuse,avait pris ses quartiers en Tunisie et à qui son ami Zin avait même accordé la nationalité tunisienne, lui fait la gueule et lui tourne le dos, du jour au lendemain, après l’avoir soutenu ! Pauvre Ben Ali ! On accueillait à bras ouverts ses « investissements », de la France au Canada, et voilà qu’on veut le spolier des quelques placements qu’il avait prévus, ici et là, pour des vieux jours qu'il pressentait incertains.

Au fait j’y pense, Idi Amine Dada, Bokassa, Duvalier, Aristide, Ben Ali, et les autres, ils n’étaient, en gros, pas trop blancs. Ne seraient-ils pas victimes de discrimination et de racisme ? La LICRA et le CRAN devraient y songer.

lundi 24 janvier 2011

Ajout involontaire au précédent!

Le hasard fait bien les choses!

Au cas où la chose vous aurait échappée, le samedi 08 juin 2010 après-midi, Françoise Tenenbaum, adjointe déléguée à la solidarité et à la santé, a procédé à la remise des médailles de la famille française salle de Flore à Dijon.

Voici le récit de la cérémonie.

"Créée en 1920 par décret, modifié le 28 octobre 1982, la médaille de la Famille française est « une distinction honorifique décernée aux personnes qui élèvent ou ont élevé dignement de nombreux enfants, afin de rendre hommage à leurs mérites et de leur témoigner la reconnaissance de la Nation ».


Samedi après-midi, Françoise Tenenbaum, adjointe déléguée à la Solidarité et à la Santé, a procédé à la remise des médailles de la Famille française, salle de Flore.

C'est donc une façon de récompenser ces mères méritantes qui, par leur dévouement et leur abnégation, ont su assumer leur rôle, même si ces mères, quant à elles, pensent qu'il n'y a là aucun mérite.

L'instruction des demandes est réalisée par l'UDAF qui diligente les enquêtes. Les médailles sont attribuées par décision du préfet, l'avis du sénateur-maire ayant été préalablement requis.

C'est ainsi que vingt et une mères, devant toutes les familles réunies, ont reçu leur médaille. Huit médailles d'argent (six ou sept enfants) : Fatiha Benhalima, Fouzia Amezane, Fatima Boularess, Aïcha Hadj-Abderrahmane, Mama Lefdou, Fatima Loubbi, Rosaria Rutigliano, Aïcha Tasry.

Treize médailles de bronze (quatre ou cinq enfants) : Saadia Ayar née Ayar, Saadia Ayar née Jabir, Medhia Bargaoui, Fatima Batta, Diane Brenot, Saâdia Brouzi, Fatima Et-Tellah, Nacéra Farsi, Fatima Haddache, Nathalie Lerbet, Zineb Oussghir, Stella-Cora Robert, Latifa Sabik.

bienpublic.com

Démographie. Promis ! On arrête le politiquement correct !

Vous aurez sans doute reconnu dans ce titre la parodie du titre de l’immortel ouvrage de Jean-François Copé paru en 2006, Promis ! J’arrête la langue de bois ! dont nous avons pu constater, à l’usage, chez son auteur, depuis bientôt un lustre, les effets stupéfiants.

Plus récemment, de la droite à la gauche, on a observé, pour une fois, une rare unité de pensée (l’usage de ce dernier terme apparaît quelque peu excessif et même tout à fait inadapté en pareil cas) devant le classement des plus flatteurs obtenu par la France dans les statistiques sur la démographie européenne. A ce que l’on nous dit, nous y occupons la deuxième place (2,01 enfants par femme), juste derrière l’Irlande (2,07 enfants en 2009). Voilà qui nous met bien loin devant la moyenne européenne (1,6 % en 2009) et nous donne d’espoir, tant pour l’avenir de notre pays que pour nos retraites, dans l’hypothèse toutefois où les bambins annoncés trouveraient un jour, devenus adultes, un emploi.

Je n'ai pas pu faire, la semaine dernière, le post sur le sujet que j'avais médité à ce propos, suite au « C dans l’air » du 19 janvier 2011 qu’Yves Calvi a consacré à ces glorieuses statistiques démographiques sous le titre « 1 Français sur 107 terriens » ; je reviens donc à ce sujet, car me semble-t-il, il en vaut la peine pour l’illustration parfaite de la « langue de bois » et du « politiquement correct » actuels.

Cette émission ne présentait d’intérêt que par la claire connivence des participants à éviter le point central du débat, pourtant évident : « Pourquoi naît-il plus d’enfants en France qu’ailleurs ? ». Serait-ce le climat ? Le modèle Bayrou ? La tradition du « french lover» ? Nul n’a osé avancer l’une ou l’autre de ces hypothèses !

Il y toutefois eu un épisode amusant, lié aux propos du seul véritable spécialiste des quatre intervenants, Gérard-François Dumont, géographe de Paris IV, membre, nous a-t-il précisé, de je ne sais quel comité Théodule chargé de ces problèmes démographiques.

Au milieu de propos lénifiants, G-F Dumont, qui arbore en permanence le sourire de celui à qui on ne l’a fait pas, a murmuré, à un moment, une phrase, à peine audible, à propos de la démographie française, en précisant que le département français qui occupait la tête du classement national pour le taux de fécondité était la Seine Saint-Denis (le 93 comme on dit désormais).

L'intérêt de la chose n'était pas tant dans l'information elle-même que dans la façon dont il l'a livrée, à peine audible et avec la claire volonté de passer le plus vite possible à autre chose. Comme aurait dit le bon Homère, « à peine ces mots avaient-ils franchi la barrière de ses dents », qu'il glissait vers un autre sujet, sans attacher la moindre importance à ce détail qu’il n’osait pas pourtant ne pas évoquer. Yves Calvi, qui, habituellement, est un peu plus vigilant sommeillait, sans doute, gagné par la torpeur qu'on prêtait aussi parfois au bon Homère.

On peut naturellement s'interroger sur ce détail et, peut-être, là aussi, aventurer quelques hypothèses. La fécondité des femmes de la Seine-Saint-Denis s'expliquerait-elle par un déterminisme géographique qui, dans ce seul département, déclencherait chez elles des processus hormonaux spécifiques engendrant une fertilité plus grande ? Le taux de chômage exceptionnellement élevé dans le 93 conduirait-il maris, amants et concubins, dans leur oisiveté, à féconder plus souvent et plus activement leurs compagnes ? Bref, on peut trouver toutes les explications qu'on veut mais j'en ai personnellement une autre.

Elle tient à ce qu'ayant vécu quelques années à Marseille, dans un quartier populaire où la langue la plus parlée n’était probablement pas le français et où les familles maghrébines, africaines ou comoriennes (Marseille est, pour la population, la deuxième ville des Comores) étaient fort nombreuses (aux deux sens du tour !), j'ai gardé quelques images qui m'inspirent ici cette hypothèse. Je revois, sur le boulevard de Paris, toutes ces mères de famille africaines ou comoriennes que j’y croisais habituellement. Souvent opulentes, dans leurs costumes bigarrés, elles avançaient sur le trottoir, entraînant dans leur sillage majestueux trois ou quatre marmots qui trottinaient derrière leur maman. Je me demande donc si cette image ne fournit pas tout bêtement d'explication que je cherche.

Comme on le dit ailleurs de façon plus sérieuse et plus austère : « Si la France est la championne européenne des naissances, elle le doit surtout à ses immigrés »

Veut-on, non des impressions mais des chiffres ? Un Rapport annuel (un peu ancien mais les choses n’ont guère changé) sur l’immigration et la présence étrangère en France, émanant de la Direction des populations et migrations, montre qu’en France, en 2004, sur 800 000 naissances, 150 000, soit 19 %, étaient d’au moins un parent étranger, contre 120 000 en 2000 (13 % des naissances de l’époque). Sans cet apport, l’indicateur de fécondité aurait été, en 2006, de 1,7 au lieu de 2 et il en est évidemment de même pour toutes les années qui suivent !

Je ne veux nullement ouvrir ici un débat sur cette question dont les données sont évidentes et tout à fait disponibles sauf pour ceux qui entendent continuer à fermer les yeux sur ces problèmes et surtout n'en point parler. Il est, à cet égard, tout à fait significatif de consulter dans l’Index mundi les données mondiales sur la croissance démographique. J’y ai découvert des choses un peu étonnantes comme le fait que le podium est occupé par les Emirats Arabes Unis (3,69 enfants par femme) et le Koweit (3,55), le Niger (3,68), que je croyais mieux placé, n’occupant que la deuxième place. Je constate sans surprise que la France peut encore nourrir des espoirs avec Mayotte, puisque notre futur département ultramarin se classe 6ème (avec 3,32 enfant par femme). On ne doit pas s’étonner outre mesure, en revanche, de voir très mal classé (avec 0 enfant par femme)... le Saint-Siège !

dimanche 23 janvier 2011

Ardisson, provocateur conformiste ou conformiste provocateur ?

Il y a bien des années, je regardais sans déplaisir les émissions d’Ardisson. Je m'en suis peu à peu lassé ; j'ai dit, dans ce blog, ou dans un précédent, tout le mal que je pensais désormais cet olibrius.

Ma détestation a atteint son comble hier, 22 janvier 2011,
où j’ai eu la faiblesse, en attendant un coup de fil, de regarder quelques passages de son émission sur Canal+ « Salut les terriens ». Cette émission est de plus en plus inepte et sans intérêt ; ma seule raison de lui porter encore attention est la présence de Stéphane Guillon, dont on se demande ce qu'il vient faire dans cette galère, sinon continuer à faire la promotion de ses spectacles à travers une ouverture dans le paysage audiovisuel français.

Il faut toutefois dire quelques mots en commençant à propos d'Ardisson lui-même car il est clair que ces aspects, souvent cachés, de l’individu apportent quelques lumières sur la nature de ses productions.

Si j'avais à définir Ardisson, je dirais volontiers que c'est le plus conformiste de ceux qui font profession de se vouloir provocateurs. La vraie provocation exige en fait un certain talent et surtout de l'imagination, caractéristiques qui font largement défaut à Thierry Ardisson qui demeure après tout que ce qu'il est, c'est-à-dire « un fils de pub » (je dis cela avec tout le mépris dont je suis capable !). Il a commencé par là et il finit par là. A 60 passés, en dépit des ravalements de façade et de l’art odontologique, on pourrait espérer de sa part une retraite rapide, même si ce n'est pas, évidemment, la caractéristique la plus répandue chez les figures les plus antiques et les plus permanentes de notre télévision.

J'ai toujours pensé le personnage totalement inculte et dépourvu de la moindre capacité d'improvisation. La preuve en est, sans cesse donnée par les fiches, dont il se sépare jamais et sur lesquelles il y a, à la fois, ce qu'il doit feindre de savoir de ses interlocuteurs mais surtout les « vannes » laborieuses qui, de toute évidence, ont été élaborées par d'obscurs tâcherons qui n'ont guère plus de talent que lui d'ailleurs. Je soupçonne que l’un de ces nègres est Laurent Baffie, aussi médiocre que son employeur, et dont on ne peut penser qu’il puisse « vivre de son art », sans le strapontin médiatique que lui conserve Ardisson.

Dans l'émission d’hier, il a réussi à donner à la fois de nouvelles preuves de sa maîtrise incertaine du français (il a ainsi qualifié, contre tout usage, de « maline » une tumeur cancéreuse – hélas « maligne »- de la fille de la mère de famille qu'il interviewait) et, par ailleurs, à propos de cette même jeune fille qui était une brillante élève, il a cru bon de préciser, s’éloignant pour son malheur de sa fiche : « Elle accumulait les prix d'excellence à chaque trimestre. » On ne peut reprocher à Ardisson pareille sottise car, dans sa scolarité secondaire, conduite chez les curés annéciens, il n’a sans doute jamais eu de tels prix et on ne peut donc lui faire grief de ne pas savoir ce que c’est. Pour la suite de ses études (s’il y en a une), il est extrêmement discret, ce qui fait même douter de leur existence car il expose, avec un extrême détail et une complaisance rare le moindre des incidents de son existence.

Le bougre a même mis en ligne un site personnel et surtout OFFICIEL, au demeurant fort bien fait au plan technique, mais qu’il a dû faire payer, en manifeste abus de biens sociaux, par l'une ou l'autre de ses sociétés. Il expose le moindre détail de sa vie privée et personnnelle, y compris les plus passionnants comme la photographie de la cravate qu'il portait le jour il a rencontré Béatrice qu'il devait épouser dans la suite et avec laquelle il a vécu 22 ans en lui faisant trois enfants. Il y a là de sa part une imprudence, car si ce provocateur affectait, jusqu'à présent, une morale familiale sourcilleuse, sa femme Béatrice a déclaré, durant l’été, qu'ils avaient engagé une procédure de divorce Thierry ayant, comme on dit, fait la monnaie. Ce n'est là qu'un détail sans grand intérêt, mais volià que ce pauvre Thierry Ardisson va devoir reprendre totalement la structure et surtout les illustrations si emouvantes de son site officiel.

On sait donc tout de la vie de Thierry Ardisson, y compris son catholicisme vigoureux (cultivé dans les écoles religieuses savoyardes) et ses convictions royalistes (Le duc d’Anjou, prétendant au trône de France, est par ailleurs parrain de l’une de ses filles ce qui rend malade Stéphane Bern), mais on apprend rien de ses études (pour la simple raison qu'il n'en a guère faites, ce qu'il empêcherait assurément pas d'en parler, si le besoin s'en faisait sentir) ni de ses multiples plagiats.

Il y a pourtant là une de ses spécialités sur laquelle de nombreuses affaires nous ont depuis longtemps éclairé et que Jean Robin a retracé dans leur tout leur sordide détail, de Pondichéry (1994) aux Confessions d'un baby-boomer ou à Louis XX. Forcé par l’évidence des rapprochements de reconnaître ses « emprunts », il est resté pourtant longtemps fidèle à cette méthode d'écriture, sans oser toutefois (mais il le pensait assurément) les justifier par son génie propre car on sait, par les témoignages de nombre de ses anciens collaborateurs (ou plutôt « employés ») dans quelle haute estime il se tient lui-même.

Son dernier livre, dont il est venu faire la pub chez Denisot, un joint au bec (sans avoir le courage d’une vraie provocation puisque ce n’était pas du « vrai » mais seul le « buzz » comptait), est écrit en collaboration (Thierry Ardisson, Cyril Drouhet, Joseph Vebret) ce qui donne à penser que les « nègres » ont fini par sortir de l’ombre !


Ardisson fait partie de ces innombrables vedettes « pipole » de notre paysage médiatique et politique qui ont le prurit de l'écriture, mais qui veulent pas se donner eux-mêmes la peine d'écrire et moins encore de faire les recherches pour des ouvrages d'information qui paraisse être l’une de leurs spécialités (suivez mon regard).Que ne font-ils dans la poésie comme Galopin ("Nascuntur poetae..."!

En ce samedi 22 janvier 2011 « Salut les terriens » était plus ridicule qu'à l'accoutumée. Habituellement, Ardisson cultive le genre polémique et cherche le « clash », espérant que ses invités vont animer par leurs querelles, leurs affrontements voire leurs injures une émission devenue singulièrement languissante.

Ce samedi Ardisson avait fait dans le soft avec Bernadette Chirac, François Baroin et un chanteur qui se bornait à rire de toutes ses dents, sans qu'on sache trop pourquoi. Il y avait là clairement chez Ardisson un renvoi de catholicisme et le rôle central était tenu par Bernadette. Fait essentiel celle-ci qui était venue sans son sac à main (pour éviter les quolibets lubriques des Guignols), nous a confié s'être séparée, pour une fois, du chapelet offert par le pape et qui ne la quitte jamais (le chapelet pas le pape !). François Baroin, fils d’un grand maître maçonnique et par là même « petit-fils de la veuve », ne me paraît pas d'un catholicisme très orthodoxe, mais, avec sa tête de premier communiant, il complétait fort bien le triptyque religieux dont l'élément central était naturellement la dame patronnesse, naguère première dame de France. On mesure par là même combien ce titre a évolué en changeant de propriétaire.

Comme toujours, l'émission n'avait pas d'autre finalité que publicitaire, mais il ne s'agissait pas là, fort heureusement, de la pub du dernier best-seller de Bernie, mais du lancement de son opération "pièces jaunes" que, notons-le au passage, l’euro a rendue bien plus rentable puisque la valeur des pièces jaunes d’antan (devenues rouges !) a été multipliée par 6,5 !

Madame Chirac n'a pas renoncé à la chose, en dépit des jugements sévères qui ont pu être portés, l'année dernière, sur la gestion de cette affaire. Thierry Ardisson, anticonformiste mais fayot au possible, n'a évidemment pas rappelé ce détail, soulignant au contraire que, cette année, la Cour des Comptes avait félicité Mme Chirac, qui, sans doute, suite aux critiques de l'an dernier, avait mis un peu d'ordre dans la comptabilité et restreint les dépenses somptuaires qui caractérisaient cette opération. Elle a aussi viré Douillet au profit de Karambeu, ce qui permet de traiter de racistes tous les critiques éventuels. La pauvre femme, peu sportive, ne sait sans doute pas que Karambeu, farouche indépendantiste canaque, non seulement ne chantait jamais la Marseillaise dans les matchs internationaux, mais affichait alors clairement sa désapprobation en faisant la gueule, ce qu’à mon avis, il sait mieux faire que jouer au football !

On aurait pu s'attendre à ce que le provocateur en chef évoquât (comme dirait notre président), outre le chapelet papal, les cornes, cadeaux multiples et successifs de de son époux, que Bernadette a longtemps et publiquement portées. Ardisson a été des plus discrets sur le sujet comme vous le devinez aisément.

Tout a donc été conduit dans le conformisme le plus total et le plus plat, ce qui est désormais la tonalité globale de cette émission, quand il n'y a pas au programme des incartades de participants, dont nous savons depuis longtemps (mais la chose a été confirmée par Laurent Gerra qui a qualifié gentiment Ardisson de « pelle à merde ») que le provocateur conformiste manie avec efficacité les ciseaux de la censure dans le montage de ses émissions. Je n’ai regardé en fait la « chose » que pour voir la tête de Bernie pendant la « semaine de Guillon » mais bien sûr Anastasie Ardisson a coupé tout cela au montage et les cadreurs avaient sans doute d'emblée, sur ce point, des consignes du boss.

Celui ou celle qui ne risque pas les foudres d’Anastasie Ardisson est assurément « l'invité de 20 heures » qui est toujours désormais une « victime » qui n’est là que pour faire sortir les mouchoirs et finir sur une note pathétique tout en permettant, à peu de frais, des accents émus au patron. Là c'était une mère de famille dont la fille adolescente avait eu un cancer. Elle succédait, dans cet emploi hebdomadaire, à une bonne demi-douzaine d'invités aussi pitoyables, en général des femmes qui avaient pour caractéristique d'avoir subi un malheur particulièrement déplorable (inceste, emprisonnement, viol, maladie gravissime... l’un n’excluant naturellement pas l’autre, bien au contraire).

C'est vous dire la nature de ce point d'orgue, désormais inévitable dans « Salut les terriens ». Vous aurez déjà deviné que cette circonstance suffit désormais à m’éloigner du lieu, sauf le jour (encore un conseil gratuit d’Usbek) où les invités d’Ardisson seront, outre Carla Bruni, Raphaël Enthoven et Bernard-Henri Lévy, avec en « invitée de 20 heures » et en figure sanctifiée ultime, cette pauvre Arielle Dombasle qui, dit-on, est larguée par BHL et qui pourrait même venir nous chanter le grand air de Tosca « Vissi d’arte » à s’en faire péter les coutures.

Là, juré, Thierry, je reviens !

jeudi 20 janvier 2011

La crise ivoirienne : Sommes-nous « chocolat » ?

La crise ivoirienne qui va bientôt fêter ses deux mois, n’occupe plus guère le devant de la scène médiatique française, éclipsée qu’elle est désormais par les événements de Tunisie, plus proches, plus importants et surtout plus riches de péripéties dramatiques et par les menus faits qui, plutôt dans le genre rocambolesque, se produisent sur la scène haïtienne, où les anciens présidents (« Baby Doc » et « Titid »), songent, avec des fortunes diverses, à reprendre du service devant l’impasse électorale qui se prolonge entre les trois candidats issus du premier tour.

La lutte Gbagbo-Ouattara n’est pas pour autant terminée et Laurent Gbagbo, qui dispose de tous les moyens d’information nationaux, paraît avoir mis sur pied une campagne de presse assez habile dans le contexte ivoirien actuel, puisqu’elle vise à associer, pour des motifs inavouables, au sein du « parti de l’étranger », (qui soutient son adversaire), la France et les Etats-Unis, tout en plaçant entre eux, non pas la traditionnelle pomme de discorde, mais la cabosse de cacao qui est la principale richesse nationale, largement contrôlée toutefois par des firmes agro-alimentaires américaines.

On a ainsi pu lire le 19 janvier 2011, dans « Abidjan.net », un très long article dont je ne reprends ici que quelques passages significatifs et dont la « source » serait un agent des services secrets français :

« Bon nombre d’Ivoiriens, qui admettent que la crise ivoirienne est fomentée par la France, continuent de s’interroger sur l’intérêt « subit » éprouvé par les Etats-Unis d’Amérique de s’associer à la France pour accomplir le coup d’Etat en Côte d’Ivoire. [...].

Plus que les Français, les Américains, à travers la CIA, ont décidé de s’emparer de la Côte d’Ivoire à partir d’un plan machiavélique conçu avant les années 1988. C’est, de nos jours, ce plan a été réactivé. La construction de la grande ambassade des Etats- Unis en Côte d’Ivoire fait partie de ce plan tout comme l’installation d’un ivoiro-burkinabè, en la personne d’Alassane Ouattara, à la tête du pays. L’objectif est la naturalisation des quatre millions de Burkinabè vivant en Côte d’Ivoire afin de garantir la production du cacao et du café dans ce pays. » [...]

Depuis octobre 2000, la CIA utilise une arme fatale : la fragilisation du régime Gbagbo pour arriver à le faire vomir par tout le peuple ivoirien afin de l’écarter facilement du pouvoir. [...]

Les Américains ont toujours agi en se cachant derrière les Français, eux-mêmes manipulés à souhait et croyant régler leur propre problème avec ce Laurent Gbagbo qui ne veut pas se faire domestiquer.[...].

Nicolas Sarkozy, agent français de la Cia, participe volontairement de cette manipulation des Américains. Ce sont ces derniers qui l’ont fait président de la France. Souvenez-vous de l’affaire Clearstream montée par les Américains pour lui permettre de devancer son adversaire du même camp : Dominique de Villepin. [...].

La raison : les Ivoiriens se détournent du cacao pour l’hévéa. Il leur faut une population acquise pour produire essentiellement le cacao. [Je passe sur de longues explications qui ne sont pas sans intérêt mais qui remontent à Houphouët-Boigny, puis à Konan Bedié, pour aller à la conclusion, forte comme on va le voir].

Pour des raisons diverses, certains hommes d’affaires français et des agents de la DGSE à leur solde veulent la tête de Gbagbo. Mais il faut savoir, avant tout, que la Côte d’Ivoire doit ses malheurs à la CIA américaine et au lobby des chocolatiers américains. Nicolas Sarkozy n’est qu’un valet de service dans cette affaire. Il est temps de le savoir ».

Le plus intéressant est sans doute le cheminement de ce texte qui, dans « Abidjan.net », annonce comme source Nouvelle Afrique, où se trouve effectivement le même récit, dans la livraison du 13 janvier 2011. Cet article de Nouvelle Afrique est lui-même repris de Notre voie, journal d’Abidjan dont la simple vue des « unes » ne laisse aucun doute sur son caractère très « pro-Gbagbo ».

Si la stratégie politique de Gbagbo et de ses partisans (indépendamment des faits et de leur analyse), est parfaitement claire, on peut se demander s’il y a un lien avec le procès entamé, depuis plus de deux ans, dans le cadre d’une opération « mains propres » au sein de la filière café-cacao, dans lequel 22 prévenus viennent d’être mis en liberté provisoire, dans l’attente du début de leur procès, le 27 janvier 2011?

Blogspot.com et Wikileaks?

Mes migrations successives dans des blogs différents m’ont conduit à me désintéresser des statistiques, sauf pour constater qu'au fil de ces déménagements, comme on peut l’imaginer, j'ai perdu beaucoup de mes anciens lecteurs, même si, par chance, un certain nombre d'entre eux et d'entre elles (les meilleur(e)s, bien entendu) me sont restés fidèles et m’ont suivi dans ces errances.

De ce fait, je ne me suis plus guère intéressé aux statistiques, sauf pour constater, par exemple, que, dans le blog du Nouvelobs.com, où je n'écris plus depuis près d’un an et où aucun de mes anciens textes n’est accessible, j'ai encore, contre toute vraisemblance, quelques milliers de visiteurs chaque mois. Nul n’est pourtant en mesure de m'expliquer ce mystère ; j’y soupçonne quelque crapulerie commerciale de la part des gestionnaires de ce blog, qui, par ce genre de manoeuvre, font grimper les tarifs d’une publicité qui est la véritable finalité de cette entreprise.

M’étant par hasard récemment risqué dans la rubrique « statistiques » de blogspot.com dont je suis loin d’avoir exploré tous les recoins, je suis resté ébahi devant les extraordinaires capacités de cet outil de recherche et d'information. Je vous en dit deux mots ici, quitte à passer pour un demeuré aux yeux de blogueurs sérieux qui pourraient me lire et qui seraient mieux informés et experts que moi en la matière, ce qui, j'en conviens volontiers, n’est pas bien difficile, comme vous allez le constater.

Non seulement les prodigieuses statistiques de blogspot.com vous informent, comme partout, du nombre de visiteurs que vous avez eu durant toutes les périodes de l'existence de votre blog (depuis sa création bien entendu, mais également durant l'année, le mois, la semaine, le jour et même l’instant de la consultation), mais ce que j’ignorais totalement, vous ouvrent des contenus et des possibilités insopçonnés de cette rubrique de statistiques. Or, on vous y indique par exemple, pour toutes les périodes précédemment citées, les pays où se se trouvent ceux qui ont visité votre blog ou même sont en train de le consulter au moment où vous faites cette interrogation.

Si je n'ai pas été trop surpris d'avoir des lecteurs francophones (en France bien sûre, mais aussi en Belgique, en Suisse, aux Antilles, à la Réunion ou au Canada), j'ai été beaucoup plus étonné de voir que certains des visiteurs se trouvent au Brésil, en Côte d'Ivoire, en Slovenie, en Lettonie, en Colombie ou au Liban. Pas de surprise, en revanche, pour ce qui concerne la Russie, puisque notre ami Expat y réside et que nous échangeons souvent des commentaires. On trouve même par cet onglet des informations beaucoup plus techniques sur les « navigateurs » ou les « systèmes d’exploitation » qui m'échappent largement et dont l'intérêt de m'apparaît pas évident.

Mon étonnement devant ces extraordinaires capacités et possibilités techniques de repérage et de localisation m'a évidemment conduit, dans le contexte actuel, à méditer sur l'affaire Wikileaks, car si blogspot.com, assurément sans intention malveillante ou inquisitrice, met en oeuvre de telles possibilités techniques pour un objet si mince, cela ouvre des abîmes de réflexion quant aux capacités d'investigation, de surveillance et, disons-le, d'espionnage que peuvent mettre en oeuvre, dans le même domaine, des services de surveillance ou d’enquête dont les moyens comme les ambitions sont évidemment bien différentes et sans aucun doute moins pures.

mardi 18 janvier 2011

Le bal des présidents.

L'Organisation Internationale de la Francophonie ne va pas tarder à devoir ouvrir une nouvelle direction chargée du suivi des élections présidentielles dans les Etats-membres de l’OIF.

La Tunisie est venue, en effet, s'ajouter à la Côte d'Ivoire et à Haïti dans la série des crises présidentielles.

Un mot cependant sur les conditions précises du départ du président Ben Ali. Il se trouve en effet que j’ai suivi, avec beaucoup de vigilance et dans leur détail, les dernières heures de Ben Ali. Trois faits se sont succédés dans les 90 minutes qui ont précédé sa décision de départ.

Vers 17:00, en effet, le président Ben Ali a annoncé le limogeage de son gouvernement et une heure après il a donné l'ordre de tirer à nouveau sur les manifestants, ce qui était pour le moins inattendu après une telle annonce. À 18:30, Ben Ali décidait de prendre la fuite. Que s'était-il donc passé ?

Mon hypothèse, qui n'a rien de très original, est que le président s'est rendu compte, après avoir donné l’ordre de tirer, que l'armée, sur laquelle il comptait en dernière analyse, ne lui obéirait pas. Comme l'avaient fait, en 1907, les hommes du 17ème régiment d'infanterie de Béziers, a qui l'on avait donné l'ordre de tirer sur les vignerons qui manifestaient, les soldats tunisiens ont « mis la crosse en l'air ». Les auteurs tunisiens, qui ne manquent pas, n’ont plus qu’à se mettre au travail, comme l'avait fait Montehus, pour écrire le texte qui deviendra le premier chant révolutionnaire du futur État démocratique tunisien. Ce sera le « Salut à vous, braves soldats de Tunis », sur le modèle classique du chant qu’ont appris, dans leur jeunesse, tous les enfants de la gauche française, à l'époque où il y en avait encore une « Salut à vous, braves soldats du 17ème... Vous auriez, en tirant sur nous, assassiné la République ».

En Côte d'Ivoire se prolonge depuis bientôt deux mois le pas de deux des présidents Gbagbo et Ouattara, sans qu’on perçoive de signe annonçant la fin de leur ballet politique. Il en est un peu de même en Haïti, même si la disposition protocolaire des candidats sur le podium tend à être modifiée par la Commission d'experts internationaux, le chanteur Martelly se voyant offrir la deuxième marche d'où l’on voudrait faire descendre le candidat du président qui, sans être son vrai gendre, serait, selon certains, le père de son petit-fils.

Il semble bien que le jeu du président René Préval soit de faire traîner les choses pour prolonger jusqu'à mi-mai 2011 le mandat qu'il exerce. Il n'en avait pas fait mystère au départ, mais l'opposition unanime à cette idée l'avait conduit à feindre d'y renoncer. Dans sa recherche de procédés dilatoires, Préval a imaginé de demander la nomination d'une commission d'experts internationaux dont il conteste désormais les résultats.

Sont-ce les figures chorégraphiques prolongées de l’élection présidentielle haïtienne qui ont conduit Jean-Claude Duvalier, « Baby Doc », a imaginer de revenir dans le pays qui l’avait chassé du pouvoir (« déchouqué ») il y a 25 ans ? Il a dû se souvenir soudain qu'après tout, il était « président à vie de la république d’Haïti » et que l'article 41 de la constitution de 1987 interdit l'exil des citoyens haïtiens. Comme nulle poursuite n'était engagée contre lui, ni au plan national et au plan international, et que maintenant, de nouveau, Air France assure un vol direct entre Paris et Port-au-Prince, il a décidé de revenir au pays, sans éclairer quiconque sur ses intentions.

Il faudrait clairement, dans tout cela, une autorité supérieure qui mette fin à
une situation qui s'apparente, à la fois, au jeu des chaises musicales et au bal
des débutantes.

Les uns, comme Gbagbo et Ouattara à Abidjan, se disputent la même chaise présidentielle ; d'autres, qui n'en sont pas encore là, faute de deuxième tour, essayent d'obtenir le ticket donnant le droit d'entrer dans la danse ; le dernier venu, Jean-Claude Duvalier, fait, pour le moment, tapisserie, en attendant son tour, mais, sans trop d'angoisse, puisque, nous dit-on, il a déjà en poche son billet de retour (j’espère qu’il a pensé aussi au visa de retour en France !).

Ne faudrait-il pas, comme l’a déjà suggéré « Usbek Consulting and Co », qu'une autorité supérieure mette un peu d'ordre dans tout cela, quelles que soient les procédures envisagées. Elles peuvent soit relever du bon sens et la raison (Ouattara qui est un économiste (distingué) et musulman (très modéré) ferait un président tout à fait convenable pour la Tunisie, de même que Gbagbo, refaisant, quelques siècles plus tard, le voyage des « bossales » guinéens pourrait être un président fort présentable pour Haïti, souvent regardé comme un morceau d'Afrique), soit faire appel au pur et simple hasard, si, comme pour l’organisation des épreuves sportives internationales, on choisit de mettre dans des boîtes différentes les noms des postes à pourvoir et ceux des candidats potentiels, en laissant le sort décider des appariements ultérieurs.

Affaire à méditer et à suivre

lundi 17 janvier 2011

OP(d)A sur la culture

Olivier Poivre (qui a fini par se dire lui aussi, Dieu seul sait pourquoi, « d'Arvor » comme son frère aîné alors qu’ils sont, je crois, de la Marne !) se définit, modestement, comme « écrivain, philosophe et diplomate ». « Que vient faire ici cet individu ? » allez- vous me demander, lectrice étonnée ou lecteur ébahi.

C'est tout simple.

Lorsque j’ai une insomnie, ce qui est, hélas, assez fréquent, pour échapper à des préoccupations, qui risqueraient de me conduire à rester éveillé jusqu'au matin (j’écris mentalement des blogs dont j’ai le plus souvent, perdu le souvenir au matin), j'écoute la radio en zappant sur différentes stations, le plus souvent sans d'ailleurs savoir lesquelles car tout cela se passe dans le noir. L'avantage est que toutes les chaînes émettent toute la nuit, sans trop de mal et de coûts d'ailleurs puisqu'elles repassent indéfiniment les programmes de la journée voire ceux des journées précédentes.

C'est ainsi que ce matin, lundi 17 janvier 2011, vers 3 heures, j'ai écouté par hasard, sur Europe1 me semble-t-il, Olivier Poivre dit d'Arvor.

Mauvaise et bonne pioche à la fois !

Mauvaise, car le personnage, comme vous avez vu l'avez déjà compris à la simple lecture de la définition qu'il donne de lui-même, est assez insupportable. Je ne dirai rien de l'écrivain faute d’avoir jamais lu une ligne de son oeuvre mais je tiens pour acquis de continuer sur cette position après l'avoir entendu. Je sais, en revanche, qu’il est « philosophe », pour avoir obtenu autrefois un DEA de philosophie. Quant à la diplomatie, il y est entré assez récemment (en 2007), au « tour extérieur » dans des conditions que nul n'a jamais bien comprises, à commencer par les diplomates eux-mêmes.

La figure de l'homme est assez curieuse car, probablement, atteint de calvitie précoce comme son frère aîné, il n'a pas jugé utile de lutter contre elle par des plantations capillaires multiples et coûteuses, mais, au contraire, il a décidé de se raser complètement le crâne pour cultiver le look cuir ou Chéri Bibi qui peut plaire et qu’il atteint avec un certain bonheur, car sa physionomie générale inspire l'inquiétude, voire la crainte. Il est d'ailleurs amusant de voir photographiés l'un à côté de l'autre les deux frères, le premier cultivant le sourire et l'aménité, le second (qui lui ressemble beaucoup) offrant la version effrayante de l'autre.

L'homme doit être, en tout cas, fort habile à surfer sur des vagues différentes, car, en dépit de la modestie de son curriculum vitae, il a fait une carrière, somme toute agréable et même brillante, en passant une bonne dizaine d'années à la tête de l’AFAA (Association française d'action artistique) puis de CulturesFrance, y cultivant des relations qui ont été sans doute, dans la suite, le fondement de toute sa carrière. On se souvient que sa modestie naturelle lui avait donné à penser que la direction de la villa Médicis lui revenait, de droit, après le départ de Frédéric Mitterrand. Ne l'ayant pas obtenue, il a fait un de ces gros et risibles caprices dont il a le secret, ce qui a finalement payé puisque il a fini, en 2009, à la tête de France-Culture.

Bonne pioche en revanche, car, ce qui est rare dans son cas, les propos de Poivre m’ont vraiment fait rigoler dans le noir.

En fait, son intervention sur Europe 1 était essentiellement destinée à faire la promotion de son dernier livre Bug made in France ou La douce guerre des cultures, dont le titre lui-même est assez ridicule et vise clairement à lui attirer le soutien des paladins de la francophonie les plus chauvins.

Sa position sur la question de la culture dans le monde est des plus simples. La France, les Français et en particulier Olivier Poivre sont les seuls légitimes propriétaires de la culture mondiale dont ils sont à d'ailleurs les uniques créateurs et détenteurs. Si Olivier Poivre se proclame lui-même « philosophe », il ne peut guère prétendre être historien car, à l’écouter, on comprend que la culture est née en France au XVIIe siècle et que ce pays en est ad vitam aeternam le dépositaire exclusif et unique. On ne saurait défendre, au nom de la culture, une position plus stupide. Elle ne vaut même pas la peine qu'on s'y attarde et je ne m'aborderai ici qu'un seul point de son propos.

Il concerne « Wikipédia » sur lequel Olivier Poivre concentre ses traits et qui ne serait, en fait, qu’un usurpateur universaliste d'inspiration américaine, « l'Encyclopédie » ayant été créée par les Français au XVIIIe siècle, ce qui leur assure la possession totale, définitive et exclusive de ce genre d’entreprise. Olivier Poivre ne connaît évidemment pas la formule célèbre de je ne sais plus quel grand seigneur de l’époque (Au secours, chère Anne !) disant à son fils : « Mon fils, tu achèteras l'Encyclopédie et tu t’assieras dessus pour lire Candide ».

Connaissant les modalités de l'action de Poivre, une décennie durant, à la tête de l’AFAA puis de CulturesFrance (pratiques exclusivement élitistes et favoritisme exclusif et systématique des copinages de toutes natures), je suis fort inquiet sur son action présente comme directeur de France-Culture, dont je ne sous-estime pas les mérites et que j'écoute d'ailleurs avec plaisir de temps à autre. Je pense toutefois qu'il conviendrait de revisiter et de dépoussiérer cette institution et surtout de lui faire perdre ces insupportables ton et parfum de parisianisme boboïste qui caractérisent encore beaucoup de ses émissions.

L'OP(d)A de Poivre sur France-Culture ne marque assurément pas le début d'une évolution d'une telle nature, quand on voit les "idées" (si on peut appeler ça des idées) présentées dans son dernier livre.

dimanche 16 janvier 2011

« Sauvez Haïti » : reconstruction et langues.

Je n’ai vu que récemment, car la chose m'avait échappé vu l’heure tardive de l'émission, le documentaire « Sauvez Haïti » que la chaîne Arte a diffusé le 12 janvier 2011, me semble-t-il.

Ce documentaire est long (76 minutes) et cette production, allemande, est remarquable d’intérêt et de qualité. Elle retrace, sur l’ensemble de l’année 2010, la reconstruction du « marché de fer » de Port-au-Prince qui, construit en 1889, était inspiré, de toute évidence, des Halles parisiennes de Baltard. Il est d'ailleurs curieux de constater que, sauf erreur de ma part, dans le commentaire français de cette émission, on ne désigne l'ancien marché de la capitale haïtienne que comme « les halles », alors que le nom local a toujours été « le marché de fer », expression qui est, à mon sens, beaucoup plus parlante et pittoresque.
Cette reconstruction a été assurée, sur ses fonds propres, par le milliardaire irlandais Dennis O’Brien, qui, ne nous le cachons pas, a fait, dans cette action généreuse et surtout efficace qu’il a conduite et surveillée d’un bout à l’autre, une large publicité de sa société Digicel, dont le nom est répété et reproduit à l'envi dans tout le documentaire, jusque sur les T-shirts des ouvriers haïtiens !

Si on laisse de côté les aspects de propagandes diverses (où Bill Clinton joue un rôle tout à fait central à travers la « Global Clinton Initiative »), il y a, dans ce documentaire, un tableau, sans doute partiellement involontaire d'ailleurs, de la vie et de la société locale et, plus précisément, de la situation administrative et politique d'Haïti après le séisme du 12 janvier 2010.

Je connais trop et depuis trop longtemps Haïti pour être, dans cette affaire, un témoin « normal » et, par là, objectif, mais je trouve qu'on a dressé dans ce film, pour partie sans vouloir sans doute, un tableau assez juste à la fois de la société haïtienne dans son fonctionnement habituel, des relations entre les affaires et le pouvoir, et enfin du rapport entre la prétendue reconstruction d'Haïti et les événements politiques, centrés en cette fin d'année 2010, sur les élections présidentielles qui demeurent d’ailleurs dans une totale impasse,en ce 16 janvier 2011. C’est, en effet, la date où devait avoir lieu le second tour d’une élection présidentielle, dont les vrais résultats de premier tour ne sont même pas encore connus, un mois et demi après ce vote.

Le post étant une forme brève, je me limiterai ici à ce qui m'a le plus intéressé dans ce documentaire : l'usage des langues par les personnes filmées (en excluant, bien entendu, celle du commentaire lui-même qui était évidemment le français).

La première remarque est que, alors que 99 % de la production linguistique quotidienne en Haïti doit s'opérer en créole haïtien, on n’a, à peu près, jamais vu personne s’exprimer dans cette langue dans ce film d'une heure et quart. Le peuple haïtien, pourtant très présent comme élément du décor ou acteur des activités, des marchands aux passants et aux ouvriers, y est muet. Je ne suis pas sûr d'avoir été parfaitement attentif, mais je n'en ai guère entendu quelques mots de créole qu'au moment où Leslie Voltaire, architecte local du projet et, pour finir, candidat malheureux à la présidence, prend la parole dans une réunion publique de sa campagne électorale. Il s'exprime alors, à la fois et alternativement, en créole et en français.

Ce même Leslie Voltaire, qui, dans sa campagne, semble vouloir mettre le vaudou de son côté, est filmé, un moment, dans la maison d'un « houngan » (prêtre vaudou) important. Il est étonnant de voir alors que le prêtre vaudou s'exprime lui-même en anglais, comme la plupart des Haïtiens qui, dans ce film, prennent la parole, des architectes au ministre du tourisme. Un seul Haïtien parle en français, à New-York, lorsque dans une réunion manifestement très chic de la « Global Clinton Initiative », et c’est, lorsque Bill Clinton lui donne la parole en public, le président René Préval qui, avant et devant Barrack Obama, hésitait sans doute à parler anglais et qui, dans un tel cadre, ne pouvait guère songer à user du créole.

Il y a bien sûr deux mondes dans ce film, outre celui que forme le petit peuple haïtien totalement muet : celui des anglophones comme O’Brien lui-même et son architecte Mac Aslan qui, logiquement, fonctionne en anglais et, par ailleurs, celui de l'élite haïtienne très présente dans ce film et que caractérisent, au-delà de la langue, ses vêtements et, pourrait-on dire, ses phénotypes. En effet, sauf quand il s'agit des ouvriers des chantiers, des passants ou des marchands des rues, on voit surtout, dans ce film, des « milat », désormais de plus en plus anglophones, et très peu de ces « nèg fèy » ou « nèg mòn » (noirs de la campagne et des « mornes ») qui sont le plus souvent du plus beau noir et créolophones unilingues.

Le français, dans cette affaire, n’a donc guère de place, (pas plus que le créole en tout cas), sauf, dans les affichages publics ou dans quelques écrits qu’on entrevoit ici ou là. Il est clair que la catastrophe de janvier 2010 aura des incidences fortes sur le plan linguistique et éducatif, en donnant encore plus de place à l’anglo-américain et en accroissant l'influence non seulement des États-Unis, mais aussi, pourrait-on dire, de toute l’Amérique du Nord, car même si l’essentiel de l'émigration haïtienne au Canada se concentre au Québec, il est clair qu'à terme, toutes les élites haïtiennes, qui se forment de plus en plus en Amérique du Nord, seront très majoritairement et de façon très dominante anglophones.

Il serait temps sans doute que la France et la Francophonie, qui se donnent pour préoccupation l’avenir de la langue française dans le monde fassent ce genre d’observation et réfléchissent à des stratégies qui permettent d’y faire face.

vendredi 14 janvier 2011

L'imposture de Denisot ou Denisot l'escroc

Vendredi 19 heures 5 ; l'imposture de Denisot avec son "Grand Journal" est démasquée.
Denisot et ses trois acolytes, en un prétendu direct, causent sur la Tunisie sans même savoir que Ben Ali a quitté le pouvoir et même la Tunisie depuis plus d'une heure. Bande d'escrocs!

Suite un peu plus tard

Michel Denisot avait déjà réussi à se faire payer une semaine de mission en Afrique, en prétendant s’y rendre pour interviewer, en parallèle, les deux présidents ivoiriens. Il n’en a, en fait, interviewé qu'un seul, Laurent Gbagbo puisque Denisot, courageux mais pas téméraire, n’a pas osé aller à l’hôtel du Golf en hélicoptère, comme l’ont pourtant fait, dans les semaines précédentes, des dizaines de journalistes.

Pour le second, Ouattara, Denisot s’est borné à un entretien depuis Paris, laissant aux techniciens de Canal plus, le risque, très minime, d’une promenade en hélico sur la lagune.

Déjà mis sur orbite journalistique, pensait-il, par sa misérable causerie avec notre président de la république (ce qui avait dû faire plaisir assurément à tous les journalistes de Canal+, je veux dire les vrais ou réputés tels), Denisot pensait préparer sa candidature au Prix Pulitzer ou, en tout cas, l’obtention laborieusee d’une carte de presse (qu'il n'a pas, je crois, comme lui manque aussi le certificat d'études primaires) avec cette mission bidon en Côte d'Ivoire digne d’un moderne Albert Londres.

L'échec a été patent sur toute la ligne et il n'a évidemment rien obtenu ni de l'un ni l'autre. En la circonstance Laurent Gbagbo a été un peu meilleur que Ouattara (carrément nul en se posant, sottement, comme soutenu par les étrangers et la finance internationale), mais sans être véritablement bon. Ainsi Laurent Gbagbo aurait-il pu envoyer dans les cordes pour le compte le sportif Michel Denisot, en lui faisant faire observer qu'à cinq minutes d'intervalle au cours de leur entretien, Denisot lui reprochait d'abord d’être un dictateur avec du sang sur les mains puis de se comporter en boulanger qui roule tout le monde dans la farine. Ces deux attitudes ne sont guère compatibles mais Gbagbo n'a pas eu l'esprit de le lui faire remarquer.

Après ce four, mauvaise journée pour Denisot que ce vendredi 14 janvier 2010 car s'est révélée, de façon éclatante, l'imposture de son "Grand Journal" qu’on présente toujours comme une émission en direct, avec, en particulier, les tours du magicien de service, les musiciens du jour « en live », les réactions "spontanées" du public et désormais les facéties québécoises de la présentatrice météo que ses pitreries laborieuses détournent même de remplir la fonction météorologique qui justifie sa présence.

En effet, ce vendredi, Michel Denisot s'était, contrairement à son habitude, privé de la présence du musculeux Joseph Macé-Scarron au profit d'une charmante journaliste tunisienne puisque la Tunisie devait être à l'ordre du jour.

Manque de pot ! À 19 heures 05, on commence, comme toujours, avec Duhamel et Barbier auxquels s'ajoute, pour une fois, la piquante rouquine tunisienne et l’on cause tranquillement de la situation en Tunisie. De toute évidence, personne ni sur le plateau ni en régie ne sait que, depuis une heure, le président Ben Ali a quitté ses fonctions et même fui la Tunisie.

Tout cela indique donc que l'émission a été réalisée, non pas en direct, comme on nous le donne toujours à penser par le comportement des participants comme de la salle, mais en un très large différé puisque la nouvelle est connue officiellement depuis dix-huit heures trente !

Le pire de tout est que, non seulement tous ces braves gens causent de la Tunisie sans connaître le fait essentiel qui rend vains tous leurs bavardages (le départ de Ben Ali) mais que, à la différence de ce qui se passerait sur n’importe quelle chaîne de télévision digne de ce nom, personne n'a songé à Canal+, nulle part, à faire passer un bandeau prévenant que cette émission réputée d'information n’est pas en direct, mais a été enregistrée, quatre heures plus tôt, à 15 heures! On ne le fera qu'à 19 heures trente-cinq, d'ailleurs sans changer quoi que ce soit, à croire qu'à Canal +, personne ne regarde Canal + !

Ce sont les inconvénients de ce genre d'imposture et surtout du faux direct que l’on veut faire passer pour du direct.

Les amis des deux otages tués au Niger ou au Mali demandent la démission du ministre de la défense, on peut espérer qu'à la suite de cette affaire, Denisot va, à son tour, présenter la sienne, mais sans la bidonner!

De la publicité et de son contrôle (redif du 2/03/10)

En cherchant un vieux post sur la pub, j’en ai trouvé un autre, que j’avais totalement oublié mais qui n’a pas pris une ride et montre, en outre, que comme naguère Julio « Je n’ai pas changé ! »

La fameuse affiche de la prétendue campagne anti-tabac, qui visait à assimiler le fait de fumer à la fellation, avec une cigarette à la bouche de deux adolescents, la clope étant censée évoquer le sexe d’un monsieur qu'on ne voyait que de trois-quarts arrière, était surtout assez nulle. Personnellement, sans le battage préalable fait autour de cette image, je n’aurais pas un instant songé à assimiler cette cigarette maigrelette à un sexe, surtout au moment où la même presse nous apprenait que, nous autres Français, avons les plus longs pénis (donc les plus beaux sexes) de toute l’Europe !

En fait, tout semble indiquer désormais que ce n'était là qu'un coup de pub à double détente (et frein dans le moyeu, comme aurait dit le bon Pierre Dac). L’association « Droits des non-fumeurs » (DNF), qui avait soi-disant fait réaliser ce projet d’affiche, qui en réalité ne consistait qu’à réaliser 15000 cartes postales avec cette image, voulait, en fait, créer le buzz autour de sa lutte anti-tabac. Elle voulait lancer par là son vrai projet qui consiste en un film d’Yvan Attal sur le thème « fumer revient à servir de décharge pour les produits toxiques les pires que sont l'acétone, l'arsenic, le DDT, l'amoniaque, le goudron, le polonium, etc". Ce film paraît en effet plus intelligent que l’affiche en cause.

Le drôle de la chose est que l’association Droits des non-fumeurs (DNF) aurait décidé de suspendre sa prétendue campagne d’affiches contre le tabagisme des jeunes à la demande de l’Autorité de régulation professionnelle de la publicité, l'ARPP.

Vous ne savez sans doute pas ce qu’est l’Autorité de régulation professionnelle de la publicité ou ARPP. Nul ne vous en tiendra rigueur, car cette ARPP est toute jeune ; c’est même un bébé, puisqu’elle est née le 25 juin 2008 et a donc moins de deux ans. C’est pour cela qu’elle ne semble pas exercer la moindre autorité et que nos médias et, en particulier, les radios et les télés sont inondées des publicités les plus scandaleuses et les plus mensongères. Je pense ici surtout à la foule des pubs sur les incessantes propositions de prêter à des populations pauvres, déjà surendettées à mort, comme à toutes les publicités sur les jeux de hasard, depuis les paris sportifs jusqu’au loto national, en passant par tous les attrape-couillons de la Française des jeux et les casinos sur internet.

Que voulez vous que fasse la pauvre petite ARPP ? Mais je dois vous en dire un peu plus, car le récit en vaut la peine.

L’idée de « contrôler » la publicité est quasi aussi vieille que la « réclame », inventée par le cher papa de Madame Badinter (philosophe de son état et actionnaire majoritaire de Publicis), Marcel Bleustein-Blanchet, qui fonde Publicis en 1926. L’« Office de Contrôle des Annonces » (OCA) est créé, probablement par lui ou à son instigation, en 1935. Ce n’est nullement, comme le nom pourrait le donner à penser, un organisme indépendant, étatique par exemple, qui "surveillerait" la publicité. L’OCA regroupe, en effet, dès cette époque, les « acteurs du secteur publicitaire » ! Comme son nom est censé l’indiquer et selon ses propres termes, cet office assurait la « sincérité » (le mot est joli !) des « réclames », renseignait sur les « annonces trompeuses » (comme s’il y en avait d’autres !) et donnait des avis sur « la moralité et la légalité des publicités » (Fichtre !). Si vous avez jamais vu quoi que ce soit de tel, vous avez, une fois encore, gagné une tringle à rideaux !

Les contrôlés étaient déjà les contrôleurs et ils le demeurent !.

En 1953, l’OCA change de nom mais non de mode de fonctionnement et devient Bureau de Vérification de la Publicité (BVP). Il reste, comme il l’a toujours été une façade, elle-même contrôlée par ceux-là même qu’elle prétend contrôler ! En 2005, comble de l’hypocrisie le BVP se dote d’une « consultation déontologique » ! Laurent, serrez ma déontologie avec mon autodiscipline !

En 2008, suite au Grenelle de l’environnement, le BVP décide de se doter d’une nouvelle organisation. Révolutionnaire ! Il se composera désormais d’un conseil paritaire de la publicité et d’un jury de « déontologie publicitaire » (quelle alliance de mots hardie ! C’est ce que la rhétorique classique appelle, en termes savants, un « par’uponoian »). Le 25 juin 2008, le BVP devient l'Autorité de Régulation Professionnelle de la Publicité, persistant dans sa constante politique d’autorégulation. La définition que se donne lui-même ce bel organisme ferait pleurer un seau à charbon (comme disait ma grand mère). Oyez bonne gens !

Cette association de type loi 1901 (comme l’amicale des boulistes de Petachat), a, en effet, pour mission de « mener une action en faveur d'une publicité loyale, véridique et saine dans l'intérêt des professionnels de la publicité, des consommateurs et du public ». On croit rêver !

Présidée par Jean-Pierre Teyssier, 70 ans aux cerises, cheval de retour du giscardisme, l’ARPP (dont le sigle ne s’interprète bien, en fait, qu’à la lueur du gâtisme et du langage bébé « Areu Pépé !) veille, avec une vigilance que nous pouvons sans cesse constater aux messages comme aux destinées de la publicité sous toutes ses formes !