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jeudi 30 juin 2011

Otages : Un caillou dans le yaourt ou un os dans le fromage ?

Je ne sais pas laquelle de ces deux formules de notre métaphorique populaire convient le mieux à la situation que je vais évoquer dans ce post. A vous de juger !

Dieu sait pourtant que nos experts en communication avaient mitonné leur coup de main de maître. Il ne s'agissait pas, en pareille période, de récupérer n'importe où et n'importe comment nos deux précieux otages qui en tant que journalistes de profession sont à la fois le sel de la terre de l'information et la source inépuisable de l’inspiration médiatique.

A « NOTRE », journal de France2, comme s’obstine à le dire sottement car c’est le sien hélas et non le nôtre, Madame Lucet qui, je crois, est la « productrice » de l’émission de télé qui avait envoyé les deux loustics sur le terrain pour je ne sais quel magazine d'information, était à ce dernier titre sous les projecteurs et rayonnait par tous les pores. Elle avait même été sur le terrain à Villacoublay et, de ce fait, elle pouvait enfin, pour une fois, faire la nique à Jean-Pierre Pernaut, resté à la maison à se coltiner ses paysans.

Tout avait été réglé de main de maître ; l’après-midi du mercredi avait été à dessein choisi puisque c'est le moment de la télé à l'assemblée nationale ; de ce fait, on allait pouvoir faire l'annonce de la libération, non seulement devant la représentation nationale, où même la gauche allait devoir se lever, bon gré mal gré, pour applaudir, mais aussi devant toute la France des seniors qui, en cet après-midi du mercredi, somnole devant sa télé et qu'on allait réveiller par cette annonce tonitruante. De ce côté-là, tout avait été prévu et tout a marché comme sur des roulettes (ou plutôt des chaises roulantes).

On a même dû faire une standing ovation bis puisque, ce jour-là était aussi celui où Christine Lagarde faisait ses adieux à l'assemblée nationale, en feignant d'écraser une larme furtive et modeste. Du grand art. Idem pour la communication officielle sur l’arrivée et le couple présidentiel, comble de l'astuce, nous l’a jouée discrète voire absente.

Dans les médias, nous avons donc eu droit (et hélas ce n'est pas fini, mais fort heureusement nos deux rouletabilles ont des familles nombreuses, riches terroirs pour de multiples « scoops » et « exclus ») à tous les couplets habituels sur la grandeur, voire l'héroïsme du métier de journaliste, dont la déontologie est si grande qu'elle pousse parfois ces modernes héros à sacrifier leur vie sur l'autel de l’information.

Si les services de la communication ont été parfaits et à la hauteur de leur tâche en la circonstance, on ne peut en dire autant du renseignement et de la réflexion préalables et circumvoisins . On aurait en effet dû songer que si le mercredi est le jour de la séance télévisée à l'assemblée nationale, c’est aussi hélas celui où paraît le Canard enchaîné. Cette concomitance permet même aux représentants du peuple une saine et opportune lecture quand, une fois réveillés, ils sont, par bonheur, hors du champ des caméras de France3.

Or ce sinistre volatile a eu la mauvaise idée (peut-être même perfide), ce mercredi-là, de publier un article sur le réseau d'influence (pour ne pas dire de collusion) que Ben Ali avait mis en place auprès de la presse française, pour la gagner à sa cause par ces petits cadeaux qui entretiennent l'amitié quand ils ne sont pas propres à la faire naître.

Ben Ali avait même créé, à cette fin précise, une « agence tunisienne de communication extérieure » à laquelle il versait 200 000 € par an pour payer, sous des formes diverses, à la presse française (surtout de droite il est vrai) la publicité rédactionnelle en faveur de l'éloge permanent de son pays et surtout de son régime.

Je ne vous ferai pas ici la liste de tous les bénéficiaires de ces largesses ben-aliennes, personnelles mais souvent familiales, puisque vous pouvez la trouver aisément dans le Canard enchaîné, s'il en reste encore en kiosque car les intéressés ont dû le faire rafler dans les boutiques quand ils le pouvaient mais aussi dans les sites Internet dont en particulier Rue 89 qui a vendu la mèche et repris l’article de l'hebdomadaire satirique.

Sachez seulement que cela va du Figaro (largement représentés) à BFM-TV en passant par M6, le Parisien ; la vertueuse Françoise Laborde a même eu la chance en passant de France2 au CSA de remettre le compteur à zéro et de doubler la mise avec des conditions qui étaient plus dignes de sa nouvelle fonction.

Vous comprendrez aisément qu'avec de telles révélations en ce jour de gloire et d’apologie de notre presse, la morale professionnelle, la dignité et, en un mot, la dé-on-to-lo-gie de la fonction journalistique française en prennent un sérieux coup, du moins aux yeux de ceux qui étaient encore assez naïfs et mal informés pour croire les discours qu'on ne cesse de nous tenir à ce propos alors que les faits ne cessent de les démentir.

Alors « os dans le fromage » ou « caillou dans le yaourt » ?

mercredi 29 juin 2011

« La cour du roi Pétaud », « L'arroseur arrosé » ou « La folle journée ? »

Les titres ne manquent pas pour désigner la journée que nous a fait vivre l'élection de Christine Lagarde à la direction générale du FMI.

« La cour du roi Pétaud » où tout le monde veut commander et parle en même temps et qui nous a donné la jolie expression de pétaudière ? « L'arroseur arrosé ? », notre président se voyant traité comme il traita souvent les autres, en d’autres temps ?
Ce pourrait être tout aussi bien « La folle journée », autre titre du Mariage de Figaro ou « La nef des fous » si l’on préfère des références picturales.

On pourrait s'interroger, en revenant sur le passé, à propos de la stratégie présidentielle en matière de propositions pour la direction du FMI.

Un président machiavélique aurait tout à fait pu pousser un futur rival (annoncé pour l'élection présidentielle) vers les rives du Potomac. Les possibilités de succès étaient multiples en effet soit que le directeur général prît goût à la chose (pas désagréable) et entreprît d’y faire un second mandat, comme nombre de ses prédécesseurs ; soit que, plus logiquement, ses pulsions, bien connues, ne le poussassent dans la voie fatale d'entreprises hardies auprès des femmes qui ne manquent pas au FMI avec les conséquences fatales qu'on pouvait aisément prévoir dans le contexte puritain des États-Unis. L'issue a été un peu différente mais, au fond, elle n’était pas si différente que ça de la seconde des hypothèses.

Reste la reine Christine qui s'en va, laissant sans doute derrière elle un prince qu’on ne sort pas vu sa parentèle des plus équivoques. Cette élection attendrira peut-être les magistrats, les détournant de sanctions dans l'affaire Tapie qui peut constituer une menace discrète à l'égard d’un Jean Louis Borloo indiscipliné qui, semble-t-il, aurait, pendant son bref passage à Bercy, mis en branle la procédure,aujourd'hui contestée, qui a fait gagner un demi-milliard à son ami Nanard.

Il fallait pour le FMI une économiste, disait-on, et l’on n'a pas manqué de reprocher à Christine Lagarde de n'avoir qu'une expérience d'avocat d'affaires. Son départ de Bercy a libéré le poste pour François Baroin qui a, de toute évidence, la formation et l'expérience de l'emploi. Pour la formation on lui connaît de courtes études à Paris2 ( DESS de défense (de rire) et DEA de géopolitique) ce qui prépare tout à fait, on l’aura compris, au ministère des finances. En revanche, il a été fait journaliste, sur le tas, par Jean-Pierre Elkabbach auquel il a préparé le café pendant près de quatre ans ! Cela vous forme un homme et vous destine aussi très directement à Bercy. François Baroin, petit-fils de la Veuve, a été surtout le fils de son père. Une fois les lunettes jetées aux orties, cela a largement suffi à assurer sa fortune politique fondée sur une voix de basse chantante dont il aime à jouer à tout propos, ce qui est bien naturel pour un porte-parole.

Pour en venir à l'arroseur arrosé, il est amusant de voir que les méthodes de François Baroin ne sont pas sans rappeler celle du jeune Nicolas Sarkozy dans ses entreprises de la conquête du pouvoir (« Si l’on ne retient pas et si l’on ne me donne pas ce que je veux, je fais un malheur ! »). Ceux qui doivent doucement se marrer au spectacle gouvernemental qui nous est actuellement donné, ce sont Messieurs Balladur et Chirac, même s'il ne leur est sans doute pas donné de partager cette commune hilarité.

Il faut que le pouvoir soit tombé bien bas pour offrir pareil spectacle de chaises musicales mâtiné de bras de fer et de coups de gueule. En tout cas, j'espère qu'on a prévu une chaise solide pour David Douillet et il a été sans doute prudent de ne pas l’installer sur celle de la frêle Valérie Pécresse !

mardi 28 juin 2011

Coluche dans la primaire socialiste

Quel homme et quelle clairvoyance ce Coluche!

"Alors la Mère De Lille arrive sur sa tornade rose en poussant son cri : "Maire De Liiiiile"!Ah non, ça c'est Gueule de Rak. J'les confonds toutes les deux, moi !".

Sera-ce la "tornade rose" ou un simple zéphyr?

Le million de votants espéré sera-t-il au rendez-vous proposé? La Maire de Lille pourra-elle dire à son Flamby de rival, modeste roseau ordinaire à côté du volumineux chêne, héritière de Gros Quinquin : "Tout vous est aquilon, tout me semble zéphyr".

Pourra-elle compter à nouveau, comme dans l'élection passée au poste de Premier Secrétaire, sur l'apport, ultime et frauduleux, des voix marseillaises qui là, ne pèseront plus très lourd ?

Le choix du numéro 2 du PS, inattendu mais sans doute justifié par de puissants motifs, si secrets qu'ils soient, sera-il-efficace? La demi-martinicitude d'Harlem Désir, si déplumé qu'il soit, suffira-t-elle à faire gagner des voix aux Antilles? Ce dernier devrait faire appel aux mânes de Tonton qui non seulement en 1998 l'a fait bénéficier de la clémence de la justice (pour l'affaire d'abus de biens sociaux, dont une partie se situait, déjà et par hasard, à LILLE), après lui avoir évité de payer, six ans auparavant, 80.000 francs d'amende de stationnements non payées! Voilà un homme que le PS a toujours cajolé, même au-delà du raisonnable, espérons qu'il lui en sera reconnaissant ?

Au fait, comment HARLEM Désir, qui se prénomme, en fait, plus banalement, Jean-Philippe, et est désormais député européen PS sous ce nom, a-t-il pu se porter officiellement candidat à une telle élection sous un état-civil qui n'est sans doute pas le sien (à moins qu'il n'ait fait officialiser administrativement un tel changement) et avec une modification de son état-civil qui n'est en rien ni banale ni innocente?

lundi 27 juin 2011

Haïti : Ecoles "borlettes" et écoles fantômes.

« Pauvre Haïti ! » comme disent les Haïtiens, qui donnent à ce pays le genre féminin (sans doute à cause de la chanson "Haïti chérie"), sans qu'on sache trop pourquoi d'ailleurs, aussi bien dans la chanson qu'ailleurs!

Haïti n'a toujours pas de gouvernement, un mois après l'élection de Michel Martelly, élection elle-même encore contestée par certains pour des détails du texte même de la constitution haïtienne sur lequel il a prêté serment lors de son entrée en fonction. "Voilà une chose qu'elle est importante!" comme aurait dit Coluche dont on a récemment célébré l'anniversaire de la mort ! Dans un pays qui se trouve encore dans l'état qui est le sien, un an et demi après le séisme de janvier 2010, la rédaction exacte du troisième paragraphe de la page 32 du texte de la Constitution est évidemment un élément capital.

Plus grave en revanche est la difficulté prévisible qu'éprouve le nouveau président à constituer son premier gouvernement dans la mesure où sa mouvance n'a que trois députés ou sénateurs, au sein de la centaine de députés et de sénateurs qui doivent approuver le choix qu'il fera dans la composition de son gouvernement et plus encore dans celui de son Premier Ministre. Comme on pouvait le craindre, le Premier Ministre qu'il avait choisi n'a pas été confirmé dans cette position par une majorité de parlementaires. On assiste donc pour le moment au retour de M. Bellerive, qui avait été le dernier Premier Ministre du président Préval. Affaire à suivre, mais on ne voit guère comment on en pourra sortir.

Toutefois, quand on constate que l'essentiel de l'aide humanitaire est géré par les O.N.G. et non par le gouvernement haïtien lui-même (en 2010-2011, il n'a contrôlé que moins de 40 % de cette aide), on se demande donc si cette absence de gouvernement est un élément décisif dans le marasme général que connaît ce malheureux pays. En effet, non seulement une bonne partie des aides annoncées voire promises n'ont jamais été réellement versées, mais, comme on vient de le voir, beaucoup de ces aides ne sont pas gérées par le gouvernement lui-même.

En tout cas, il semble que certains non seulement s'en accommodent, mais en tirent des profits qui sont fort loin d'être licites. On connaissait en Haïti les écoles "borlettes" (en Haïti "borlette" signifie "loterie"). Il s'agit là d'écoles privées payantes, plus ou moins équipées et pourvues d'enseignants aux compétences incertaines, où l'on apprend pas grand-chose mais qui permettent de pallier, surtout auprès des institutions internationales qui aiment ce genre de statistiques, l'absence d'écoles publiques et ainsi de faire monter, au moins dans les chiffres, le taux général de scolarisation, fût-ce de façon fallacieuse). Or on a découvert, dans la riche faune scolaire haïtienne, une nouvelle espèce qui est celle des "écoles fantômes".

C'est ainsi que deux de ces écoles fantômes ont bénéficié, de la part du ministère de l'éducation, de 21 millions de gourdes (la monnaie locale) de subventions au titre de la reconstruction du système scolaire haïtien qui est on le sait la priorité majeure du programme de gouvernement du nouveau président.

On a beaucoup parlé de cette "reconstruction" depuis le séisme et après avoir eu le "Plan Vallas" auquel j'ai consacré moi-même plusieurs posts, on parle désormais d'un nouveau plan qui émane de la Banque intergouvernementale de développement ( "Haiti's Reconfiguration of the Educational Sector"). Ce nouveau plan, dont le titre même est tout un programme, entre dans un détail extrême des ventilations financières et des prévisions technocratiques (on y va jusqu'à prévoir, dans le moindre détail, les fournitures qui seront accordées aux 27 500 élèves qu'il va concerner - des deux uniformes scolaires (les tailles et couleurs ne sont toutefois pas précisées) - aux quatre crayons, en passant par les cahiers et les gommes), mais, en revanche, on ne trouve pas un mot sur ce que seront les contenus des enseignements, leurs finalités et moins encore les langues qui seront utilisées dans ce système scolaire ou comment seront formés les 600 maîtres indispensables. Le Plan Vallas avait au moins le mérite, à défaut de traiter réellement et sérieusement de ces questions, de les évoquer.

De toute façon, si comme le souhaite le président Martelly, on entend désormais scolariser gratuitement la totalité des enfants haïtiens dans un système scolaire public, il y a deux ordres de questions d'importance inégale mais l'une et l'autre essentielles, qu'il conviendrait poser en préalable à tout projet.

D'une part, (sans prendre en compte l'état des choses réels après le séisme), dans un système éducatif qui compte plus de 80 % d'établissements privés (écoles "borlettes" incluses), si l'enseignement devient totalement public, que deviennent la plupart de ces établissements privés qui sont une source de revenus non négligeable pour nombre de gens en Haïti. Va-t-on, par exemple, financer les écoles borlettes ou les fermer ?

L'autre question est beaucoup plus importante et, bien entendu, de ce fait, on en parle moins encore, s'il est possible. Il ne s'agit pas en effet de replâtrer plus ou moins ("Reconfigurer" ?) un système éducatif dont on sait qu'il fonctionnait très mal. On peut dire et d'aucuns l'ont fait, en Haïti même, qu'on devrait "profiter" de l'inévitable changement imposé par le séisme de 2010 pour repenser totalement l'enseignement en Haïti, puisque la grande "réforme Bernard" des années 80 n'a fait qu'accroître l'anarchie qui régnait dans ce système. Or il est clair que nul ne pose réellement ce problème, comme le montrent les plans successifs proposés par les États-Unis, avec le Plan Vallas d'abord puis le plan actuel de "reconfiguration" du "secteur éducationnel" d'Haïti.

Peut-on espérer, non seulement en finir avec les écoles borlettes et les écoles fantômes mais voir envisagées enfin les vraies questions qui se posent pour l'école en Haïti.

samedi 25 juin 2011

Islam africain

J’ai parfois abordé, en passant, le problème de l’Islam africain, qui ne semble pas préoccuper le moins du monde nos politiques qui, comme toujours, ne découvriront l’affaire que quand elle leur explosera à la figure.

Je pose ce problème, depuis quinze ans au moins, pour avoir constaté l’évolution des choses en Afrique même, mais aussi aux Comores, où les Emirats ont essayé, depuis longtemps, de prendre pied, en particulier en offrant d’y créer, à leurs frais, une université islamique. Ce projet avait été contré par la création en 2004 d’une université comorienne mixte qui, à ce moment, accueillait 1707 étudiants dont 43% de filles ! Je ne sais pas où en sont les choses aujourd’hui.

L’islamisation radicale ou plus précisément la wahabisation du Sahel est un processus engagé, sournoisement ici, ouvertement là, depuis longtemps. Cela va du paiement des conversions à l’Islam (stratégie un moment chère à Khadafi, à une époque, avec des tarifs spéciaux pour les chefs d’Etat, comme Bongo qui en a bénéficié – un million de $- ou les Premiers ministres -500.000$ ) et du versement de sommes très modestes à des femmes africaines (au Burkina Faso par exemple), qui consentent, pour trois sous, à se voiler complètement, jusqu’au développement d’un enseignement islamique intégriste (avec, à la clé, des bourses pour les universités du Golfe). Ce nouvel enseignement est naturellement, en Afrique, un concurrent redoutable, vu les moyens, quasi-infinis, dont il dispose (argent et bourses), pour une école musulmane traditionnelle qui est quasi sans ressources,.

S’ajoutent à ces stratégies, comme au Tchad et au Niger, des projets d’enseignement prétendument bilingue (français et arabe), dans lesquels, en réalité, la moitié arabe du programme est exclusivement religieuse, l’enseignement général étant donné en français. De tels projets sont soutenus, à coups de milliards de dollars, par la Banque Islamique de Développement, ce qui est normal, mais aussi acceptés, de façon plus inattendue et inconsciente, par l’UNESCO et la Francophonie.

Ce constat m’a conduit, non seulement à tenter d’alerter sur cette situation (quoiqu’elle ne me concerne en rien de façon directe) et aussi, en raison d’une certaine expérience de ces terrains, à proposer des mesures qui pourraient être mises en oeuvre pour contrer de telles stratégies.
Cela m’a amené à des remarques et, au delà, à des suggestions. Elles ont souvent paru étranges aux hiérarques du Quai d’Orsay ou des institutions internationales, quand ils ont eu la rarissime curiosité de prendre connaissance de mes écrits sur ce point.

En effet, tout cela se passe à l’insu bien sûr, ou en tout cas, dans le silence prudent des responsables de la politique française dans ces zones. Ces derniers, en effet, sont comme les petits singes de la sagesse orientale, qui se cachent les yeux, les oreilles et la bouche pour ne rien voir, ne rien entendre et ne rien dire... du moins pendant les trois ou quatre années, confortables et fort rémunératrices, qu’ils passent en fonction diplomatique dans ces Etats.

Pour faire court, l’Afrique a pourtant trois atouts qui pourraient lui permettre de résister, si on en avait le désir. Allons, en bonne réthorique, du moins important au plus important :

1. L’école coranique traditionnelle, la « médersa » (ou les diverses variantes de ce mot, médrasa, etc.), qui perpétue la tradition séculaire d’un Islam africain ouvert et libéral. Paradoxalement, on devrait donc aider les médersas traditionnelles pour leur permettre de résister à la concurrence et à l’influence des riches et nouvelles écoles d’un Islam intégriste conquérant.
2. Les femmes. Elles sont un moyen puissant de résistance par le statut et la place qu’elles tiennent dans les sociétés sahéliennes africaines et qui n’a rien à voir avec ceux des pays de l’Islam moyen-oriental et des sociétés arabes. L’éducation des filles est donc naturellement un enjeu majeur, ce que chacun répète d’ailleurs à satiété, sans que rien ne se passe.
3. La bière. Ce dernier élément est sans doute un peu inattendu, mais c’est aussi le plus fort, car je vois mal comment un Islam même radical pourrait éradiquer des moeurs africaines cette boisson qui constitue, sans le moindre doute, le transfert de technologie européen le plus réussi.

vendredi 24 juin 2011

HALDE à la male bouffe!

Je ne reviens pas sur ce qu'a d'insolite, pour un rapport sur la restauration universitaire, le choix des duettistes Pitte et Coffe, même si l'on prend en compte qu’il fallait récompenser JR d’avoir courageusement affronté Molinié, le farouche révolutionnaire du Syndicat autonome dans les grèves du début de 2009. Pour les non-initiés, « l’Autonome » est le plus à droite de l’enseignement supérieur et le dit Molinié avait dû donner des signes de gauchisation pour se faire élire, contre Pitte, par les maîtres de conférences, les ATOS et les étudiants de Paris IV. Le choix de Coffe doit tenir, lui, à ce que cet histrion aux lunettes multicolores et aux vêtements de clown cause dans le poste et passe à la télé, en particulier chez Drucker le dimanche après-midi, dans une émission destinée à la France d'en bas, que Madame Pécresse doit regarder au lieu de faire ses devoirs de ministre.

Ce rapport n’a qu’une seule particularité notable qui est qu’il ne comporterait que huit propositions (cet honnête conditionnel tient naturellement à ce que je ne l’ai pas lu). La chose est admirable car tous les rapports comportent, en général, au moins 99 propositions (nombre fréquent), l’importance du nombre des propositions étant censé refléter l’intensité et l’ampleur de la réflexion.

Je ne m’attarderai pas sur le discours général qui comporte des vœux pieux qui s’apparentent aux écrits de ceux qui proposent toujours de construire les villes à la campagne ou de rendre riches et bien portants tous ceux qui sont pauvres et malades.

Le problème des Restaurants universitaires est pourtant d’une simplicité biblique. Les étudiants n’y vont pas ou en tout cas pas avec les taux de fréquentation qu’on pourrait imaginer vu les tarifs et la commodité. Toutefois, quand ils y vont, c’est naturellement tous aux mêmes heures, ce qui n’a rien d’étonnant puisque qu’ils s’y rendent en général pour déjeuner. Toutes les sottises accumulées dans le rapport sur l’information des étudiants (sur les produits achetés et utilisés, les menus proposés ou les recettes employées pour la préparation des mets qui ne les intéressent en rien) sont naturellement grotesques comme Coffe lui-même dont ce sont, de toute évidence, les « idées ».

Deux points sont importants mais naturellement aussi mal vus et mal traités qu’il est possible.

Le prix des repas. Le rapport propose de réformer la politique du prix des tickets en modulant les tarifs en fonction des revenus des étudiants et de leurs familles. Les boursiers pourraient ainsi continuer à payer 3€ et les autres étudiants achèteraient leurs tickets 5 €, ce qui doit correspondre, à peu près, au prix réel du repas, ce qui allègerait l’aide de l’Etat.

Cette proposition est assez logique, mais totalement irréaliste. Il faut être aussi nébuleux et ignorants des réalités de la vie que nos deux olibrius pour ne pas comprendre que se mettrait aussitôt en place un système de trafic des tickets à tarif réduit (comme sur les tickets-restaurants). Les files d’attente qu’on déplore déjà, comme on va le voir, seront d’autant allongées par la vérification du statut effectif de chaque étudiant et de la déclaration fiscale des parents. Bien sûr, on pourrait y remédier en tatouant sur le front des boursiers un gros B, mais on fait maintenant de faux tatouages lavables ou construire des « restau U » réservés aux boursiers. Bref, vous voyez le topo !

La fréquentation. Le problème est ici double.
D’une part, les étudiants fréquentent relativement peu les « restau U », alors que les CROUS doivent tendre vers un équilibre budgétaire qu’ils tentent d’atteindre par la gestion des logements universitaires plus que par la restauration.

Second problème. Quand ils fréquentent les « restau U », les étudiants y viennent tous, en gros, les mêmes jours (les jours de cours, c’est-à-dire en gros les mardis, mercredis et jeudis) et ils y arrivent tous en même temps. JR et JP, les gros malins, sont donc arrivés en vrais zorros de la restauration universitaire. Leur proposition est de réduire les files d’attente par des « négociations menées entre les universités et les CROUS, sous l’égide du Recteur-Chancelier ». Si je ne me cramponnais pas à ma chaise, j’en serais tombé une fois de plus, mort de rire. Comme si le recteur-chancelier (fonction qui est le rêve du Pittre) était en mesure d’imposer les horaires des cours et d’imposer des enseignements le lundi matin ou le samedi après-midi. Allez donc faire un tour ces jours-ci dans une université et vous aurez tout compris !

HALDE à la male bouffe !

jeudi 23 juin 2011

Pitte-oyable

Ces temps-ci, je passe mon temps à tomber de ma chaise, ce qui est assurément mauvais signe. Mais comment échapper à ce triste sort, quand on entend qu’à la demande du Ministère de l’enseignement supérieur et de la recherche, Jean -Robert Pitte, ancien président de Paris IV et…(« Je vous le donne en dix, en cent, en mille…comme disait à sa chère fille la Marquise de Sévigné) Jean-Pierre Coffe ont rédigé un rapport sur la restauration universitaire. « Improblable mission » dirait notre cher et actuel ministre de la culture et rapporteurs « plus improbables » encore !

Même si depuis Edgar Faure et sa loi de 68, il n’y a plus de Sorbonne, le nom ne demeure prestigieux qu'aux yeux du vulgum pecus et des émirs. La « monnaie universitaire », qui l’a remplacée (treize universités parisiennes ont succédé à l’antique Sorbonne), se sont disputé son nom sur son cadavre. L’université Paris IV a su, avant les autres, se baptiser elle-même Paris-Sorbonne, Paris III, arrivée trop tard, a dû se contenter de se dire « Sorbonne-Nouvelle ». Seul un ministre peu au fait des réalités universitaires peut avoir l’idée saugrenue d’associer un ancien président de Paris-Sorbonne avec un histrion de l’acabit de Jean-Pierre Coffe, réduit par son insatiable cupidité à se faire le bateleur stipendié d’une chaîne de supermarché low-cost, lui qui a bâti sa gloire audiovisuelle de fer-blanc sur des invectives permanentes et de scatologiques vociférations (notez le chiasme) contre la malbouffe dont, dans son inculture, il n’a même jamais réussi à comprendre combien elle serait plus et mieux décriée, si l’on écrivait son nom « male bouffe » comme « male peste » !

Je connais certes le bougre pour l’avoir quelquefois égratigné dans mes blogs et je sais qu’il ne recule devant rien quand il y a de l’argent en jeu. Plus étonnant est, en revanche, le choix du duettiste auquel l’a, si j’ose dire, accolé Valérie Pécresse. Un détail intéressant toutefois qui me maintient dans mon sujet et qui est sans doute un élément d’explication de cet étrange attelage. Jean-Robert Pitte, en effet, de façon tout à fait inattendue, figurait, à Paris, sur la liste UMP des régionales, en 44è position il est vrai, ce qui ne lui donnait, bien évidemment, que peu de chances d’être élu, mais constituait assurément une petite récompense pour quelques prises de positions dans les conflits universitaires qu’expliquaient d'ailleurs moins alors son amour de la ministre que l’esprit de revanche contre Georges Molinié, son vainqueur et successeur à la présidence de Paris IV.

Il faut ici dire quelques mots à la fois de Paris IV et de J.R Pitte (dont, observez-le, les initiales du prénom JR sont aussi celles du héros de Dallas qui présente quelques rapports avec lui !).

Paris IV a toujours été, parmi les universités parisiennes, avec Paris II, le bastion de la droite universitaire. Je ne reviens pas sur ce qu’ont eu de comique, à cet égard, les prises de position de cette université et de Molinié, son président, au début de 2009, car je serais bien empêché de dire, de Pitte et de Molinié, qui est le plus à droite, même si j’incline à penser que c’est plutôt le second ! Lui aussi, m’a fait alors tomber de ma chaise, en prenant la tête des manifestants. Ce comportement n’était dû en fait qu’à l’insigne maladresse de la ministre et de ses conseillers.

Mais le plus curieux de tout est J.R. Pitte lui-même, qui, il faut bien que je l’avoue, m’était totalement inconnu sur le plan universitaire. En lisant, pour rédiger ce post, son curriculum vitae, je dois dire que je serais, une fois de plus, tombé de ma chaise, si je n’avais pas été encore par terre, suite à ma précédente chute. Alors que les six ou sept présidents, qui se sont succédé à la tête de Paris IV, relevaient tous de disciplines nobles et prestigieuses (l’histoire des religions pour le premier d’entre eux, le grand Alphonse Dupront, ou plus tard, Michel Meslin, la philosophie pour Raymond Polin, les études grecques pour Jacques Bompaire, l’histoire pour Jean-Pierre Poussou, ou la littérature pour Georges Molinié), Jean-Robert Pitte est un gé-o-graphe !

Le mystère s’éclaircit soudain et tout s’explique. Je n’avais même pas imaginé qu’il pût y avoir de la géographie à Paris IV, ce sanctuaire des humanités classiques ! Imaginait-on une épreuve de géographie au concours de la rue d’Ulm, à la grande époque, aux côtés de la philosophie, de la littérature, de l’histoire et des études anciennes. Fi donc, c’était tout juste bon pour Saint-Cloud ! Vade retro Satanas !

Un géographe est capable de tout et pire encore, quand il est, comme Jean-Robert Pitte, spécialiste des paysages viticoles et, cerise sur le gâteau, auteur d’une thèse sur l'histoire des rapports entre l'homme et (je puis encore vous le donner en mille) le châtaignier. Je vous jure que c’est vrai ! Le portrait de l’homme ne sera toutefois complet que si j’ajoute que naturellement, il est le président de la Société de géographie et le co-directeur scientifique du Festival international de géographie ! Pour compléter ce tableau, j’ajouterai qu’il a naturellement déjà grenouillé du côté du ministère dans les fonctions éminentissimes de « chef de la mission de la carte universitaire et des affaires régionales »

Je vous laisse le soin de prendre connaissance du rapport de ces deux olibrius en vous rappelant toutefois, au cas où vous ne le sauriez pas ou l’auriez oublié, que, quoique le prix du repas complet soit aux environs de 3 euros (entrée + plat du jour + dessert), les restau U ne font pas recette et sont relativement peu fréquentés, tandis que les bistrots des alentours qui vendent au même prix un médiocre sandwich, font salles combles. Mais c’est là un autre problème, dont je reparlerai peut-être.

Quelques éléments de propositions de nos duettistes
« Eduquer les étudiants au bien manger », par exemple par voie d'affichage relayant des messages "positifs" et "incitatifs" [que pourrait rédiger Coffe qui a déjà enseigné, avec d’aussi médiocres compétences et un égal insuccès, la cuisine et le jardinage]. "Poursuivre l'amélioration de la qualité culinaire". Les produits frais, salades composées, poissons, soupes froides ou chaudes, fromages à la coupe, sont recommandés [se servir de préférence chez Leader Price, employeur de Coffe]
Le point qui a le plus retenu l’attention est que ces auteurs regrettent vivement que "l'offre de boissons alcoolisées ait presque totalement disparu des Crous" et plaident pour "une initiation à une consommation modérée de vin" lors de dégustations.[Pitte est spécialiste de la viticulture !].

On se souvient peut-être que Pitte s’était déjà illustré, en 2007, dans l’affaire de la création à Abu Dhabi d’une université « Paris Sorbonne University Abu Dhabi ». Un accord secret aurait même été négocié par Pitte pour écarter des émirats ses concurrents parisiens qui avaient, eux-aussi, gardé un bout de Sorbonne dans leurs dénominations officieuses (Paris I Panthéon Sorbonne et Paris III Sorbonne nouvelle). Ce qu’on sait moins, c’est que JR a négocié un accord plus secret encore, au terme duquel non seulement on servirait du vin et des alcools dans les restau U de sa fac (ce que la jeunesse dorée des émirats apprécie au plus haut point), mais que, dans le campus, seraient plantés des châtaigniers, à l’ombre desquels les étudiants du cru (si je puis dire !) viendraient à la fois cuver leur pinard et lutiner les donzelles, également importées pour « modeler » le paysage, ce qui est l’une des multiples spécialités de notre JR universitaire.

Jean-Robert Pitte ou Jean-Robert Pitre ?

mercredi 22 juin 2011

Du décolleté télévisuel

Une chansonnette d’antan affirmait :

« Pour bien réussir dans la chaussure,
Portez tout simplement
Un corsage dont l’échancrure,
Laisse voir des trésors charmants ! ».

Il en est de plus en plus de même dans notre télévision. Certaines, comme autrefois Lio ou, plus près de nous, Paris Hilton, sont allées jusqu’à montrer aux téléspectateurs leur culotte ou plutôt leur absence de culotte, mais on se borne, le plus souvent, à dévoiler des vallées et des éminences mammaires. Que Sophie Marceau et Béatrice Dalle montrent leurs seins à la télé, cela ne gêne personne et alimente à peine les zappings. Toutefois, les choses ont changé et les starlettes ne sont plus les seules spécialistes du genre.

Bien sûr, la recette est vieille comme Anne Sinclair, pour rester dans le registre des femmes respectables qui pimentent à peine par là des propos sérieux. Si c’est Madame Karembeu ou toute autre cavale-potiche, blonde ou brune, le spectacle est obligé et il n’est pas déplaisant (Hou le vilain machiste !). Ce qui est plus remarquable à mon sens est que se risquent désormais, dans ce registre, des figures nouvelles qu’on avait connues plus réservées et dont l’emploi est différent.

Prenons, sur Canal Plus, le cas d’Ariane Massenet.
A ses débuts, chez Fogiel, rien à dire. Ce dernier jouait les playboys capillairement assistés, entre sa baleine tueuse, Guy Carlier, dont les dents se sont bien vite émoussées, et sa girl friend Ariane Massenet, sympa sans doute, mais pas plus sexy que Bécassine ou, soyons aimable, une Jeannette d’autrefois (les Jeannettes étant alors des scouts en jupettes).
Passée chez Denisot, sous l’influence délétère et jeuniste de Canal Plus, la voilà qui s’émancipe, esquisse des pas de danse dans la pub (ridicule d’ailleurs, surtout du fait de Denisot qui danse comme un porte-parapluie) [les choses ont bien changé au Grand Journal où Ali s'est un peu déridé et où Afati esquisse lui-même de laborieux entrechats ; de l'utilité des redifs!] ; dès lors, elle risque quelques allusions salaces et surtout commence à jouer du nibard qu’elle avait jusque-là discret et présumé menu, offrant des décolletés de plus en plus profonds, avec ou sans soutifs de dentelle noire et fausses modesties. Foutre ! Mon sentiment personnel est qu’elle s’est fait un peu booster les avantages, mais qui ne le fait pas aujourd’hui ? Le résultat n’est pas mal, surtout que pour attiser la lubricité des téléspectateurs, elle cultive toujours son look fillette, sans se découvrir vraiment. Très étudié et assez réussi !

Où la manœuvre a tourné carrément à la cata, c’est dans quelques anciennes émissions de Ruquier. Le samedi, je crois, le patron n’étant pas là, c’était Christine Bravo qui était seule aux manettes et donc en vedette dans tous les plans. Elle avait donc sorti le grand jeu. Malgré des cadrages savants, on avait l’impression que l’émission était cornaquée par une barrique hilare, dont le cercle médian était, en fait, une ceinture, apparemment métallique (ou imitation) qui suscitait, bien entendu, ou même imposait les comparaisons avec un tonneau. La tête posée dessus était hélas toujours la même, mais en revanche, on apercevait entre le cercle de la barrique et le menton, des mamelles largement exposées, manifestement et vigoureusement remontées par un soutien-gorge renforcé béton, modèle Gargamelle DDD. Impressionnant !

La crainte que j’éprouve et elle est intense croyez-moi, est qu’en cette période où vont commencer les débats électoraux de la présidentielle, Arlette Chabot ne cède, à son tour, à cette mode de réfection mammaire. Qu’elle se soit fait rééquilibrer les yeux pour éviter le strabisme aux téléspectateurs, ce n’est que justice et cette intervention aurait même dû être pris en charge par le CSA, mais si elle se fait changer en Lolo Ferrari ou même simplement en une bimbo plus modeste et surtout, pire encore, si elle nous fait le coup du décolleté plongeant-pigeonnant, toutes les données du débat public vont s’en trouver changées et, pour le coup, le CSA ne pourra pas ne pas sévir.

mardi 21 juin 2011

Le mariage homosexuel! Nique Mamère.

Le Conseil constitutionnel a estimé en janvier 2011 que l'interdiction du mariage homosexuel est conforme à la Constitution. Noël Mamère, qui avait célébré un mariage gay dans sa mairie de Bègles en 2004, a déclaré alors ne pas être pas surpris par cette décision, et l’a jugée même "intéressante", Dieu et Noël Mamère seuls savent pourquoi ! Il a déclaré "Vous pouvez compter sur Europe Ecologie pour être en pointe sur ce sujet", ce qui n’a pas suffi, il y a quelques jours, pour entraîner un vote favorable de l’Assemblée nationale.
Comment les Béglais (et les Béglaises) osent-ils encore sortir dans la rue après avoir élu et réélu celui qui se donne pour leur député-maire ?

Non content d’avoir fait des « ménages » et des pubs, sans doute grassement payés, pour le Centre d’Etudes Atomiques, il est désormais un chantre et un héraut de l’écologie et l’ennemi juré du nucléaire qui désormais ne le paye plus. Ajoutons que ce partisan résolu du mandat unique et exclusif (on est député et seulement député, clamait-il) est aussi, depuis 2008, avocat du barreau (de Paris !).

Non content d’avoir, en son temps, figuré en bonne place sur la liste de Bernard Tapie aux Européennes (pas un mauvais coup pour lui, une fois de plus…), il est devenu le dénonciateur patenté des magouilles et l’apôtre de la moralisation de la vie politique ,
lui qui a démontré, naguère, qu’une décision DEFINITIVE de sa part ne durait que 24 heures,

Notre héroïque faucheur de maïs OGM a aussi révélé l’étendue de ses talents comme organisateur de spectacles municipaux. Le mariage gay qu’il a conçu, organisé et célébré en 2004 a été un gros coup médiatique dont il savait, le premier et mieux que quiconque, qu’il ne serait qu’un coup d’épée dans l’eau.

Cette pitoyable mascarade s’est révélée dans la suite, en outre, une sordide escroquerie. On savait déjà qu’on avait magouillé les adresses des intéressés pour leur permettre de se marier à Bègles (un maire concurrent aurait pu se mettre sur les rangs avec une offre meilleure). Voilà qu’on a découvert que la pauvre vieille, qui avait hébergé les heureux époux, s’est fait escroquer, pour de vrai, elle. On lui a soustrait des chèques, en particulier pour investir mille euros dans l’achat des deux costards de marlous qu’arboraient fièrement les heureux époux lors de la cérémonie.

On a attendu et on attend toujours, en vain, les explications du Père Noël.

lundi 20 juin 2011

Bison futé ou fut-on baisé?

En 2006, « Bison futé » a fêté ses trente ans.

Cette dénomination totémique est un peu étonnante, même si l’un des pseudonymes de Boris Vian avait été « Bison ravi ». Quiconque a jamais vu et dévisagé un vrai bison n’aurait sans doute pas l’idée saugrenue de qualifier cet animal de « futé ».

Honte aux ignorants que vous êtes ! Le père de « Bison futé » n’était pas un ingénieur de l’Equipement nostalgique de sa période scoutiste ; « Bison futé » se veut, toutefois, en fait, une dénomination « indienne », totémique en somme.

Hugh ! L’origine de cet adjectif, étrange pour un bovidé, alors que ces animaux ne passent pas pour particulièrement intelligents, tient à ce que l’arme absolue de ce programme routier était, et demeure, l’itinéraire « bis ». « Bis » > « bison »…, vous me suivez, ô visage pâle ? Nous aurions donc pu aussi bien avoir « Bisaïeul malin » (par référence à la sagesse des ancêtres), « Biscaïen subtil » (mais les réactions explosives des Basques auraient été à redouter) ou, pire encore, « Bistro accueillant » (suggérant aux automobilistes bloqués dans les bouchons d’aller oublier les encombrements dans le plus proche estaminet).

Aurions-nous eu des itinéraires « ter » que nous aurions pu avoir alors « Terre-neuve secourable » ou « Termite subtil ». Je ne suis donc pas contre la pérennisation de la figure de l’Indien symbolique (nous en sommes, dit-on, à la troisième représentation de cette icône que nul ne comprend d’ailleurs), c’est plutôt le fonctionnement même de ce système qui me pose problème. Illustrons concrètement ce point.

Petite expérience routière vécue sur l’autoroute A7 dans la région de Valence. On suggère, dans cette zone, aux automobilistes « embouchonnés » sur l’A7 de prendre « l’itinéraire-bis », signalé comme tel, par la RN86, de l’autre côté du Rhône. Quoique connaissant la région, j’ai imprudemment suivi les conseils de Bison futé et tenté l’expérience. Comme bien d’autres malheureux, embarqués dans cette galère, j’ai fait demi-tour au bout de quelques kilomètres pour rejoindre à nouveau, en ayant perdu une heure de plus, les bouchons autoroutiers.

En effet, les choses sont pires encore sur l’itinéraire-bis, la seule différence étant que les véhicules sont sur une seule file au lieu de deux ou trois ! En effet, chaque traversée de village, généralement agrémentée de feux rouges (dont on ne prend même pas la peine de changer la périodisation), entraîne aussitôt la formation de kilomètres de files de voitures. Le trajet bis est donc bien plus encombré et long que l’autoroute. Ce n’est pas « Bison futé » mais « Tortue stupide » !

N’est-on pas trompé, en réalité, par Bison futé ? « Bison futé ou Fut-on baisé ? » Telle est donc l’interrogation lancinante des automobilistes qui se sont fiés aux conseils de ce stupide animal. Bison futé, nous dit-on, « opère en temps réel » comme on dit à la DDE. Durant ma brève incursion sur l’itinéraire-bis de la RN86, j’ai constaté que deux gendarmes motocyclistes ont fait un aller-retour le long de la file de véhicules immobilisée sur la route en direction du Sud. Ce constat n’a pas conduit à supprimer les indications absurdes en faveur de cet itinéraire-bis quasi impraticable. « Bison foutu » ou « Foutu bison »?

Au-delà de cet incident, on peut s’interroger sur les problèmes plus vastes que pose la circulation automobile. Il fut un temps où les hausses du prix de l’essence mettait la France dans un état proche de l’émeute. L’essence ne serait jamais à dix balles comme on disait alors. Le super 95 est aujourd’hui à plus d’1,5 euro (soit 10 francs) sans que quiconque y trouve à redire et surtout sans que nul ne songe réellement à réduire sa vitesse ou ses parcours, en dépit de l’adjonction récente des lamentations écologiques.

Le CNRS qui consacre beaucoup de moyens à des recherches dont l’intérêt demeure incertain, sauf pour les chercheurs qui en vivent, devrait étudier sérieusement la mécanique des fluides automobiles, sur les autoroutes en particulier.

Bison futé (toujours lui) a, semble-t-il, inventé une nouvelle stratégie anti-bouchons, en limitant encore la vitesse, pourtant déjà limitée. La limitation de vitesse elle-même (de 130 à 110) est présentée comme la panacée alors que l’expérience banale de tout conducteur en fait douter.

Le fait que tout le monde roule à la même vitesse crée, me semble-t-il, à la fois un danger dans la mesure où le temps de dépassement est beaucoup augmenté (on ne peut rouler qu’entre 130 et 136,5 km/h pour dépasser un véhicule qui roule à 129km/h) et où l’homogénéisation des vitesses réunit les conditions idéales pour la formation des bouchons dans la mesure où chacun tend à rouler un tout petit peu moins vite que le véhicule qui le précède. Le grand mystère des bouchons autoroutiers est qu’ils n’ont, le plus souvent, aucune cause précise et visible, comme un obstacle, un accident ou des travaux !

Une des causes constantes de bouchons (je l’ai encore constaté à hauteur de Donzère) est un accident, mais qui a lieu sur l’autre voie de l’autoroute. Pour mieux jouir du spectacle, en effet, les conducteurs ralentissent et se produisent immanquablement un bouchon et parfois même (je l’ai vu !) un second accident quand, trop attentif à la scène du premier, un automobiliste vient emboutir le véhicule qui le précède. Il serait simple, sur les autoroutes, de disposer, dès le début d’une intervention policière, sur la séparation entre les deux voies, une bâche de vingt mètres de long sur deux mètres de haut (« Bison bâché! »), qui masquerait le spectacle et empêcherait les ralentissements sur l’autre voie en en supprimant la cause.

Chacun sait que le principal facteur « accidentogène », comme disent les penseurs de Bison futé, n’est pas la vitesse, mais la connerie. Or le système en place favorise les conduites stupides dont la plus fréquente et la plus dangereuse est le dépassement à droite qui devient une pratique des plus courantes, que ce soit sur la file centrale ou sur la file de gauche. Si l’on roule sur la file de gauche, à 130 km/h, en laissant devant son véhicule la distance de sécurité obligatoire qu’on recommande légitimement, mais que peu de conducteurs respectent, on est sûr de se faire aussitôt doubler à droite par un fêlé, qui s’intercale dans la dite distance de sécurité. Ces comportements ne sont jamais sanctionnés, alors qu’on met à l’amende et qu’on retire deux points à celui qui, un instant distrait, roule à 96 au lieu de 90 km/h. Comment ces imbéciles dangereux seraient-ils d’ailleurs verbalisés puisque, ce même jour, en dépit des rodomontades officielles, je n’ai pas l’ombre d’un képi de gendarme en cinq heures d’autoroute entre Vienne et Marseille. Il est plus facile et plus rentable de sanctionner le plus léger excès de vitesse pourtant infiniment moins dangereux.

Revenons aux stratégies de lutte anti-bouchons de notre Bison futé. Sur l’autoroute où la vitesse est limitée à 130 km/h, on commence par introduire une première limitation à 110km/h, puis, quelques kilomètres plus loin, une deuxième à 90 km/h. Le but est clairement de ralentir le flot des véhicules qui va, par l’arrière, s’ajouter au bouchon déjà constitué. La suite logique seraient des limitations successives à 70, 50, 30, 10 km/h, pour finir par un arrêt complet du trafic avec 0 km/h. Formidable, Bison futé maîtrise les bouchons ! Le BOUCHON n’est plus, comme avant, inopportun et fortuit, mais le voilà enfin conscient et organisé!

Les ingénieurs de l’Equipement ou, en tout cas, les inventeurs du système ne sont pas payés à ne rien faire ! Vive Bison futé !

dimanche 19 juin 2011

Les deux mamelles de la France (suite et fin).

On touche ici à une autre caractéristique de notre administration qui est un mélange paradoxal de prudence extraordinaire et de confondante naïveté. L’administration, si méfiante par ailleurs, admet que n’importe qui aille se faire soigner dans un hôpital avec la carte de Sécurité Sociale de n’importe qui avec parfois des coûts très élevés totalement pris en charge, sans qu’on contrôle son identité, même si cela est, en principe fait. On a pu ainsi apprendre qu’un terroriste étranger, venu en France pour organiser des attentats, avait judicieusement mis à profit son séjour chez nous pour se faire soigner avec des papiers de Sécurité Sociale empruntés! Le cas est pittoresque par l’heureuse conjonction de l’utile et de l’agréable, mais ce n’est là qu’un exemple connu parmi des milliers qui ne le sont pas.

Bonne fille puisqu’elle vous permet de vous faire soigner sans le moindre contrôle d’identité, l’administration se montre, en revanche, extraordinairement tatillonne s’il s’agit, par exemple, de vous délivrer la moindre pièce d’identité ou d’état-civil.
Perdez-vous vos papiers et en sollicitez-vous de nouveaux ? Même si vous avez des preuves de votre identité, parfois même multiples (votre livret de famille par exemple, un vieux passeport annulé, une carte d'identité périmée), on vous demande un acte de naissance. Si vous êtes né à la Réunion ou à Tahiti (ne parlons même pas de l’étranger !) et que vous êtes pressé, c’est commode. Bonne fille l’administration peut se contenter, en pareil cas, du livret de famille de vos parents! Si vous ne disposez pas d’archives familiales remontant trois générations en arrière et comme plusieurs frères et sœurs ont en commun le livret unique de leurs parents, vous n’avez qu’à vous en prendre à vous même!

La fiche d’état-civil qu’on a plus ou moins supprimée, nous dit-on, était une belle institution. Vous deviez vous présenter à la mairie, muni de votre livret de famille. Remarquez au passage que toutes ces mœurs administratives, qui datent plus ou moins de Napoléon, sont arriérées par définition même. D’abord, elles témoignent, comme notre beau « droit du sol », d’une époque où les citoyens restaient à peu près toute leur vie dans leur lieu d’origine. Ensuite, elles ne tirent aucune conséquence de changements techniques qu’elles mettent pourtant quotidiennement en œuvre.

Observons l’employée de mairie naguère saisie d’une demande de fiche d’état-civil. Elle recopie sur une feuille prévue à cet effet, d'une belle écriture certes, mais sans les pleins et les déliés d’autrefois que permettait seule la plume sergent-major, les éléments de l’identité qui figurent sur le livret présenté par le demandeur, elle date et appose un cachet. Si vous voulez deux ou plusieurs fiches, elle photocopie la première avant d’y apposer signature et cachet. Pourquoi ne photocopie-t-elle pas tout de suite le livret de famille ? Mystère. Ce luxe de précautions est évidemment absurde. On pourrait tout aussi bien permettre à l’intéressé de faire lui-même une simple photocopie des pages de livret de famille qui le concerne sans passer par la mairie, la date, le cachet et la signature.

Aberration supplémentaire, cette fiche a une durée de validité limitée et une date de péremption comme les yaourts! Précaution indispensable, des fois que le citoyen en cause changerait, au cours de ces trois mois, de père ou de lieu de naissance.

L’administration oblige à faire certifier conformes des photocopies! Des fois que la photocopieuse se tromperait ! La garantie de validité que sont censés apporter la signature de l’employé et le cachet est évidemment totalement vaine. L’administration est tellement stupide qu’elle ne parvient même pas à imaginer qu’on puisse falsifier un document après l’avoir fait certifier conforme! On vantait autrefois les mérites de l’inventeur du bouton à cinq trous ; on ne dit pas assez ceux de l’administration française qui a inventé la certification conforme des photocopies.

Une réforme audacieuse a supprimé les fiches d’état-civil ; comme pour les feuilles de soins, le remède est pire que le mal. Si grotesque que fût la procédure d’établissement des fiches d’état-civil (car j’ai omis de le préciser, il y en avait deux, l’une individuelle, l’autre familiale, la seconde offrant tous les éléments de la première et la rendant, de ce fait, inutile). Ces fiches avaient au moins l’avantage de pouvoir être établies rapidement, à la mairie du domicile. Désormais, dans divers cas, la fiche d’état-civil est remplacée par l’acte de naissance qui ne peut être délivré que par la mairie de naissance. Bonjour les dégâts si vous êtes né(e) au Moule, à Tamatave, Ouagadougou ou Trois Bassins !

samedi 18 juin 2011

Les deux mamelles de la France.1

La France n’a, au fond, que deux vraies spécialités qui ne sont plus celles dont parlait Sully :
l’une universellement reconnue, sa gastronomie, l’autre, totalement méconnue, son administration ; la première s’incarne dans Paul Bocuse de Collonges-sur-Saône ; la seconde dans le Père Soupe de Messieurs les ronds de cuir.

Le monde devrait nous envier l’une et l’autre, mais nous n’exportons que la première, gardant jalousement la seconde pour notre consommation personnelle exclusive.

Autrefois, par amitié pour des peuples de nos anciennes colonies qui accédaient à l’indépendance, nous avons accepté de les aider à s’ouvrir aux mystères et aux beautés de notre administration. C’est ainsi que, même s’ils sont dans la misère la plus noire, si l’on peut dire, quelques heureux Etats du Tiers-Monde peuvent aujourd’hui s’enorgueillir de posséder, comme nous, un CNRS (Centre National de la Recherche Scientifique), voire pour les plus chanceux, une Ecole Nationale d’Administration (institutions dont nombre d’entre nous aspirent, en secret, à débarrasser notre pays !).

Attention, l’administration française est un Janus à deux visages ; le premier, moderne et conquérant, s’incarne dans notre ENA, qui nous alimente désormais en hauts fonctionnaires mais surtout en Premiers Ministres et voire en Présidents (Présidente ?) de la République, comme, de façon plus inattendue, en PDG de haut vol, experts en stock-options et parachutes dorés. Le second visage, renfrogné et archaïque, est illustré par les figures immortelles décrites par Courteline avec leurs manches de lustrine et leurs ronds de cuir.

Même si le second est plus présent dans notre vie quotidienne que le premier, ces deux mondes sont, bien entendu, totalement étrangers l’un à l’autre.

Tous les meilleurs esprits de l’ENA n’ont d’ailleurs qu’une hâte : quitter ce service public proprement dit pour lesquels on les a formés à prix d’or et dans lequel ils ne se sont, en fait, engagés que pour accéder au pouvoir politique ou “ pantoufler ” dans le privé avec des salaires royaux qu’ignore évidemment l’administration.

Dans un cas comme dans l’autre, la condition de fonctionnaire reste un parachute, précieux quoique non doré, qui, dans les pires des cas, permettra d’achever une carrière dans la confortable semi-activité (ou semi-retraite longtemps anticipée) de la Cour des Comptes ou du Conseil d’Etat et de bénéficier de retraites d’organismes où l’on n’a jamais mis des pieds. Tous ceux qui, au sein de l’administration, devraient être une force de changement et de progrès, ont donc pour unique stratégie, non de la rendre mieux adaptée et plus efficace, mais de la fuir pour faire ailleurs une carrière plus éclatante ou plus rémunératrice.

Le gros des troupes de l’administration est donc, bien entendu, totalement étranger à ce monde, même si, pour les postes de décision subalternes, on a créé, à l’ENA, un concours « interne » ; cette sous-ENA permet à n’importe quel sous-chef de bureau de se rêver en Préfet de région, même si le concours interne ne permet évidemment pas d’accéder aux carrières les plus juteuses. Néanmoins, il faut bien rêver et l’ENA est le bâton de maréchal que tout petit fonctionnaire croit avoir dans sa giberne.

L’adaptation et la modernisation de l’administration figurent pourtant parmi les préoccupations les plus constantes et les plus proclamées de tous nos gouvernements depuis que nous en avons. On pourrait croire un instant qu’elles sont en cours en constatant que, dans les bureaux, les plumes sergent-major ont été remplacées par des ordinateurs et les ronds de cuir par des sièges design. Hélas! Ce qui ne change pas c’est l’esprit ou plutôt l’absence d’esprit et cette prétendue modernité n’est qu’une simple façade.

Allez donc dans un commissariat déclarer le vol d’un auto-radio ! Que l’agent de service tape à un doigt avec deux carbones sur une antique machine à écrire digne du musée de la dactylographie ou qu’il use, avec une technique digitale inchangée, d’un ordinateur dernier cri, il va quand même vous demander et enregistrer gravement le nom de jeune fille de votre mère et sa date de naissance, même si vous avez soixante-dix ans et que vous n’êtes plus, depuis longtemps hélas, sous la garde vigilante de votre chère maman. On comprend facilement l’importance essentielle de ce genre de détail pour une enquête qui, de toute façon, n‘aura jamais lieu. Comment la police pourrait-elle raisonnablement espérer retrouver le voleur de votre auto-radio sans connaître le nom de jeune fille et la date de naissance de madame votre mère?

Une des seules grandes réformes structurelles de l’administration française au cours des cinquante dernières années, a concerné la fameuse feuille de soins de la Sécurité Sociale dite, dans le peuple, feuille de maladie. Elle vaut la peine d’être narrée en détail. Pendant trente ans, l’administration a demandé à l’assuré de porter sur ladite feuille sa date et son lieu de naissance. Ce n’est qu’après avoir traité des dizaines, voire des centaines de millions de ces “ feuilles de maladie ” que le Moloch administratif s’est soudain frappé le front, ayant confusément perçu qu’il n’était peut-être pas absolument indispensable de demander ces informations qui figurent déjà, pour partie, dans le numéro d’immatriculation que porte chacune de ces feuilles de soins.

Patatras! A peine cette réforme majeure était-elle acquise que la Sécurité sociale a constaté que les treize chiffres du numéro d’immatriculation ne permettent pas d’identifier le pékin de base. On a donc dû, discrètement, rétablir la date de naissance sur les feuilles de soins!

Paradoxe mathématique apparent. La situation est d’autant plus ubuesque que 13 chiffres permettent (vous pouvez vérifier !) neuf mille neuf cent quatre-vingt dix neuf, neuf cent quatre-vingt dix neuf millions, neuf cent quatre-vingt dix neuf mille neuf cent quatre-vingt dix neuf combinaisons de chiffres différentes. On peut donc, par la combinaison de ces 13 chiffres, immatriculer dix mille milliards d’individus (moins un), soit à peu près deux mille fois la population actuelle du globe, alors que, nous autres, nous ne parvenons pas à immatriculer une soixantaine de millions de Français. C’est assez dire le génie de ceux qui ont choisi le système adopté! Il a donc fallu réintroduire sur les feuilles de soin la date de naissance qu’on avait si triomphalement supprimée. Comme disait ma chère bonne grand-mère : « Faire et défaire, c’est toujours travailler ! ».

Cet exemple de la feuille de soins donne d’autres éléments de méditation. On sait depuis toujours que n’importe qui peut se faire soigner avec la carte de Sécurité Sociale d’autrui, pour peu qu’il y ait quelque vague compatibilité de sexe et d’âge entre le prêteur et l’emprunteur de carte. Il ne faut pas évidemment qu’un octogénaire passe sa carte à une adolescente et inversement ; à ce détail près, il n’y a aucun problème. Mieux, j’ai entendu citer, à la télévision, le cas de quatre accouchements faits en un seul mois sous le même numéro de sécurité sociale. Ne sommes-nous pas en tête, en Europe, pour le taux de natalité?

La suite demain.

vendredi 17 juin 2011

La vie des dames galantes

Pierre de Bourdeille, dit Brantôme, dans ses Vies des dames galantes, écrivait : « Si tous les cocus et leurs femmes qui les font se tenoyent tous par la main et qu'il s'en pust faire un cerne, je croy qu'il seroit assez bastant pour entourer et circuire la moitié de la terre ».

L’histoire de notre République ne confirme que partiellement ce principe.

Un petit rappel historique.
« La femme de César ne doit pas être soupçonnée ». Cette formule, de César lui-même dit-on, selon les témoignages, convergents mais repris les uns des autres, par Cicéron, Plutarque et Dion Cassius, s’applique inégalement selon les épouses de nos présidents.

Madame Coty et Madame de Gaulle (dite Tante Yvonne) ne prêtaient guère le flanc (ni le reste) à ce genre de critiques !

Les choses se gâtèrent avec Madame Claude Pompidou, à qui l’on a prêté, tour à tour et sans preuves, des moeurs saphiques et/ou légères ; ces goûts ne sont nullement contradictoires, comme le croient quelques sots innocents. Ce fut la fameuse affaire Marcovic (le garde du corps des Delon qui, vu les conditions de sa réapparition, ne put guère témoigner dans cette affaire) ou Marcantoni, réputé au service de quelques hauts personnages proches du Général et qui voulaient, par ces rumeurs agrémentées de quelques photos plus ou moins bricolées, écarter Georges Pompidou de la succession. Une des dernières volontés du Général, d’ailleurs respectée, fut d'interdire que Pompidou vînt lui rendre hommage sur son lit de mort. Devenu Président, Pompidou, qui prétendait tout connaître des dessous de l’affaire, s’appliqua à écarter les présumés coupables des cercles du pouvoir et en particulier du SDECE.

Anne-Aymone ne se fit guère remarquer, sauf en étant la seule épouse de président à présenter ses voeux aux Français, ce qui, vous me l’accorderez est une forme de séduction bien innocente. Si la femme de Giscard ne fut jamais soupçonnée, il en, fut bien autrement de Valéry, avant même ses tardives et récentes confidences libertines. Il fut grand amateur d’une actrice, qui ne s’était pas encore consacrée à la littérature enfantine. On pourrait reprendre à propos de cette dame ce que La Rochefoucauld disait des vieillards qui « donnent de bons conseils pour se consoler de ne plus pouvoir donner de mauvais exemples ». Celles qui ont le plus rôti le balai font souvent, dans la suite, les meilleures dames patronnesses !

Tatie Danielle annonçait-elle la couleur en nommant sa fondation « France-Libertés » ? Tonton ne se privait guère de son côté, finissant même par s’afficher avec Madame Pingeot, la mère de Mazarine, elle-même gardée en permanence par une douzaine de gendarmes, tandis que Tatie Danielle ne faisait guère mystère de son sportif Helvète ! La femme de César n’avait pas à être soupçonnée puisqu’elle faisait elle-même étalage des écarts de sa situation conjugale, sans que la presse en soufflât mot.

Chirac, souvent défini publiquement comme « Cinq minutes, douche comprise», ne courait guère de risque du côté de Bernie, plus occupée de pièces jaunes que de galipettes ; « Toute belle femme s'estant une fois essayée au jeu d'amour ne le désapprend jamais ». écrivait encore ce même Brantôme dans Les vies des dames galantes ).

Les rumeurs à propos de notre président actuel furent d’abord discrètes avant que tout soit mis sur la place publique, la presse anglaise ayant comme toujours étalé, la première, ce qui ailleurs restait dans une relative discrétion. On a ressorti, dès lors, les épisodes du roman Nicolas-Cécilia, le texto et la fameuse visite de Richard Attias et Cécilia dans une grande surface d’électro-ménager (on espère que ce n’était pas chez Darty !), comme les déclarations de Carla sur l’ennui que suscite chez elle la monogamie. On ne prête qu’aux riches, dit-on, mais Carla, en artiste qu’elle est, a porté ses choix dans le milieu de la musique ; après avoir longtemps renoncé à y faire son marché, elle avait semblé y revenir, lassée sans doute des rollers comme du registre des Atrides où elle avait fait un enfant qui est, en quelque sorte, métaphoriquement, le frère de son père !

Aurait-ce été là les débuts d’une stratégie de communication des gourous de l’Elysée qui préfèrent, à tout prendre, les couvertures de Gala ou de Voici à des titres alarmistes des Echos ou des feuillets saumon du Figaro ?

jeudi 16 juin 2011

Enseigner un métier ? (2)

Chère lectrice, cher lecteur,

« Mise en place des diplômes nationaux de master ouverts aux étudiants se destinant aux métiers de l'enseignement - rentrée universitaire 2010 »
Je vois d’ici votre œil concupiscent s’allumer de convoitise à la simple lecture du titre si prometteur de la circulaire n° 2009-1037 de la DGESIP A3 en date du 23-12-2009.

Ne comptez toutefois pas sur moi pour vous en livrer l’intégralité ni même le résumé (des textes de cette densité ne se peuvent résumer), bien que, dans mon louable désir de comprendre enfin quelque chose à la « mastérisation » ambiante et aux mystérieuses intentions de la Rue de Grenelle, j’aie fait l’immense et vain effort d’en parcourir les indigestes pages. Je ne me livrerai donc ici qu’à une approche par quelques remarques de simple bon sens et que m’ont inspiré d’ailleurs plutôt la forme que le fond de ce document.

Ma première remarque touche à la date même de ce texte qui a dû entrer en application à la rentrée de septembre 2010 (au moment même où prenait fin le détachement de Luc Ferry, cette remarque n’impliquant pas de rapport précis entre ces deux événements également considérables) et qui pourtant n’a été publié que le 23 décembre 2009. Autant dire qu’il est arrivé dans la hotte du Père Noël ! Cette date m’avait paru bien tardive, puisque désormais nos universités, dans un louable souci d’efficacité et dans la recherche désespérée de semestres de plus de trois mois, rouvrent désormais leurs portes début septembre. Comme une rentrée ne s’improvise pas totalement, il faut que les services des enseignants et les emplois du temps soient prêts, au plus tard, fin juin, on voit qu’il n’est resté guère que moins de six mois pour bâtir ces nouvelles formations qui visaient à révolutionner un système vieux de plus d’un siècle !

Un autre point majeur qui frappe, dès le titre de cette circulaire, est l’usage qui y est fait du terme « métiers de l’enseignement ».

La formule est doublement remarquable ; d’une part, en raison du pluriel du mot « métiers ». Il y aurait donc, dans l’enseignement, d’autres métiers que celui de « professeur » ? La chose est d’autant plus étonnante que la plus grande réforme de l’éducation nationale, au cours du dernier demi-siècle, a été de changer le vieux et noble nom d’« instituteur » en celui de « professeur des écoles » ! Je sais bien qu’il y a des « documentalistes» et des « conseillers principaux d'éducation « (les anciens surveillants généraux, les « surgé » de mon enfance) qui, comme les « chefs d’établissements », qu’on s’étonne d’ailleurs, de ne pas voir mentionnés dans ce texte (n’auraient-ils pas de « métier » les pauvres ?), sont, à peu près tous, d’anciens professeurs, pour la plupart las d’enseigner et pour certains, aspirant à bénéficier d’un logement de fonction et/ou de quelques primes spécifiques liées à ces « métiers » particuliers.

Plus important toutefois, dans ce texte fondateur, me paraît l’usage du mot « métier » lui-même qui, naguère encore, aurait pu être jugé inconvenant dans un tel contexte. Vaste et importante question, qui, souvent, dans le passé, a été réglée par la négative, ce terme lui-même étant jugé, le plus souvent, incongru voire sacrilège. Fi donc ! Enseigner ne saurait être un « vulgaire » métier ; c’est une vocation, un sacerdoce, voire désormais dans nos classes un apostolat et même parfois, dans certaines conditions et pour quelques-uns, un martyre !

« L’université doit-elle préparer à l’exercice d’un métier ? ». Plusieurs formules ont été imaginées pour contourner cette douloureuse interrogation, à défaut d’y répondre vraiment, tant par la création d’universités plus ou moins dérogatoires (comme Dauphine ou Compiègne) ou de filières courtes comme les IUT, ou longues mais « professionnalisantes » voire même « professionnelles ».

L’enseignement, qui demeure pourtant le débouché professionnel majeur des étudiants des filières universitaires de lettres et de sciences dures, est toujours resté hors des perspectives d’emploi, même si la préparation des concours de recrutement restait l’apanage des universités, les agrégés demeurant, naturellement, libres de devenir, à défaut d’enseignants, président de la République (au singulier), Premiers ministres (au pluriel), PDG de Paribas ou, gloire suprême, président-fondateur du MoDem !

Je n’ai guère traité que des deux lignes du titre ! Faute de mieux et par manque d’espace, je saute directement à la signature de la circulaire. « Le directeur général pour l'enseignement supérieur et l'insertion professionnelle. Patrick Hetzel ». In cauda venenum car là se trouvent l’innovation majeure et la clé du mystère. Patrick Hetzel est en effet un professeur de GESTION de l’université de Paris 2 (Panthéon-Assas), établissement bien connu pour ne pas abriter de révolutionnaires et dont les activités majeures sont assurément fort éloignées des « métiers de l'enseignement ».

mercredi 15 juin 2011

Enseigner, un métier ? (1)

A l’heure où les syndicats d’enseignants organisent des manifs contre les suppressions de postes et de classes et où une grande campagne de publicité gouvernementale, rappelant celles de l ‘armée, propose 17.000 emplois d’enseignants, comment ne pas s’interroger sur « le plus noble des affreux métiers » .

J’ai sous les yeux un article paru il y a quelques années (avant la fin des IUFM et la « mastérisation ») dans un magazine professionnel, sans doute à l’usage exclusif des pédagos ; il a pour titre « Formation des enseignants : mise au point » et il est illustré d’une photo qui surmonte son intitulé. On y voit douze personnages vociférant devant une pancarte émanant d’un ou plusieurs IUFM (Institut de formation des maîtres pour les non-initiés, s’il y en a encore) puisque cet acronyme encadre le slogan suivant, en capitales pour la première ligne « ENSEIGNER, UN METIER QUI S’APPREND » et, pour la seconde, en écriture anglaise malhabile « Pour un service public de la formation ». Je ne sais pas trop si l’on a voulu reproduire la graphie maladroite d’un élève de CM1 ou s’il s’agit de l’écriture normale des étudiants de Master 2, puisque nos enseignants du futur seront recrutés à ce niveau académique. Je penche plutôt vers la seconde hypothèse pour avoir vu, très récemment encore, des copies d’étudiants de lettres modernes de ce niveau.

Premier constat, et non le moindre, sur les douze personnages de la photo, les deux tiers (8 car, à la différence de nos ministres successifs de l’éducation national je sais calculer un pourcentage et faire une règle de trois) sont des filles, ce qui est un indicateur fort sur l’évolution de la profession, surtout dans le primaire et le secondaire, la vague de féminisation atteignant désormais l’université. Cette évolution a un certain nombre de conséquences importantes, d’ordres divers, dans le détail desquels je ne puis entrer ici.

Seconde remarque. Les IUFM étaient des innovations relativement récentes ( 1989). Ces temples de la pédagogie ont duré une vingtaine d’année et ont déjà disparu ; c’est fort peu pour une réforme présentée comme très importante et même comme révolutionnaire puisqu’elle concernait à la fois le primaire et le secondaire. Auparavant, la formation des instituteurs se faisait dans les écoles normales et les professeurs du secondaire, certifiés ou agrégés, n’avaient aucune formation réelle, les « Centres Pédagogiques Régionaux » n’étant qu’une vaste farce sur laquelle je vais revenir.

Cette création des IUFM s’est inscrite, en fait, dans l’apparition progressive dans notre pays des « sciences de l’éducation » qui nous sont venues d’Amérique du Nord. On a d’ailleurs retenu le terme de « licence de sciences de l’éducation », dénomination québécoise, jugée plus noble que « licence de pédagogie » qui avait pourtant alors les faveurs du ministère. Cette nouvelle filière universitaire instituée, il a bien fallu ouvrir des activités et des emplois pour ces licenciés (et bientôt docteurs) en sciences de l’éducation.

L’exemple, funestement prototypique de cette évolution, est Philippe Meirieu. Ancien instituteur, il a, non sans adresse, surfé sur cette vague politico-pédagogique. En 1983, il soutient un doctorat d’Etat avec le sujet suivant « Apprendre à apprendre », sur lequel il est toutefois inexplicablement discret, peut-être parce qu’il en déclinera inlassablement, dans la suite, le titre : « Apprendre à apprendre », « Apprendre à apprendre à apprendre», « Apprendre à apprendre à apprendre…etc. ». Il est l’un des artisans majeurs de la loi d’orientation de L. Jospin qui, en 1989, crée les IUFM, et devient, une dizaine d’années durant, le gourou de la rue de Grenelle. Il a fini sa carrière comme directeur de l’IUFM de Lyon, avant de se replier sur l’université de Lyon 2 pour jeter enfin le masque de la pédagogie afin d’entrer ouvertement en politique sous l’étiquette Europe-Ecologie) en 2009.

Dans ce contexte, à la fin des années 80, la pédagogie, même si on lui a préféré « sciences de l’éducation », devient le maître-mot des filières universitaires ainsi dénommées comme des IUFM eux-mêmes qui en sont la résultante avant qu’on passe aux « mastaires ». On avait là enfin l’application ouverte du vieux principe « Ce qu’on sait faire on le fait, ce qu’on ne sait pas faire, on l’enseigne ! »

Pour éclairer ce point, sans raconter ma vie (vous m’accorderez que je ne donne guère dans ce travers, pourtant assez courant dans certains blogs), je voudrais illustrer cette question de la fameuse formation des maîtres par mon cas personnel. J’ai autrefois passé successivement les deux concours de recrutement d’enseignants ouverts dans mon domaine (« les lettres classiques »), le CAPES d’abord, l’agrégation ensuite.

Le CAPES comportait alors une épreuve dite « théorique » (après la licence donc à bac + 3 mais en fait à bac+4 car il fallait une année pour préparer ce concours). Si l’on y était admis, ce CAPES théorique faisait de vous un « professeur stagiaire » rémunéré et affecté à ce titre à un Centre Pédagogique Régional, un CPR, institution parfaitement utopique (au sens propre) et mythique comme on va le voir. La « formation » ne comportait, en effet, aucun enseignement et consistait exclusivement en des heures de stage. Il s’agissait d’assister, chaque semaine, à quelques heures d’enseignement d’un prétendu « maître de stage », qui se bornait à faire, devant deux ou trois stagiaires planqués au fond de sa classe, son cours normal. Le drôle de la chose, dans mon cas, est que le premier semestre de mon stage s’est déroulé dans un lycée de garçons qui était, par hasard, celui-là même où j’avais fait mes études ; j’y avais donc déjà fait, comme élève, sept années de stage à temps plein et je n’avais donc plus grand chose à apprendre de mes anciens maîtres! En fin d’année de CPR, on faisait une heure de classe devant un inspecteur général, la chose étant censée être l’épreuve « pratique » du CAPES. Une fois définitivement reçu (je n’ai jamais vu quiconque échouer à cette épreuve pratique), on était nommé dans un établissement et, pour quarante ans, vogue la galère pédagogique !

Les choses étaient encore pires, si l’on peut dire pour l’agrégation, où elles prenaient vraiment l’allure d’une farce. En d’autres termes, à cette époque, pour le secondaire, s’il y avait, pour les deux concours de recrutement, des épreuves théoriques difficiles (par exemple pour l’agrégation, moins de 10% des candidats étaient reçus pour un concours à bac + 5 (au moins) : licence en trois ans + diplôme d’études supérieures (DES qui deviendra ensuite la maîtrise) et en outre, en général, une voire deux années de préparation spécifique fort sérieuse du concours. En revanche, la formation professionnelle, une fois les concours passés, était rigoureusement NULLE et se ramenait à une quinzaine de jours de stage dont on dispensait même ceux qui, comme moi, avaient déjà le CAPES

Pour en finir avec mon cas qui n’est, en rien particulier, je ne veux en retenir que trois conclusions.
1 . Pour ce qui me concerne du moins, les heures de stage ne m’ont rigoureusement rien appris. Cette année de stage fut pour moi une année de vacances payées qui m’ont permis de préparer le DES que je n’avais pas encore et qu’il me fallait posséder pour me présenter à l’agrégation. Mes « maîtres de stage », charmants et excellents enseignants eux-mêmes, ne m’ont en rien conseillé, puisque ces stages consistaient pour eux à faire devant des stagiaires leurs cours habituels et qu’ils ne nous ont vu enseigner, au mieux, qu’une heure ou deux.

2. Ma seule formation pédagogique est celle que j’ai reçue (et qu’ils ne cherchaient nullement à me donner) de deux de mes maîtres, Pierre Savinel et Jean Pouilloux, dont je garde toujours le souvenir, aussi vivace et présent, le premier, professeur de lettres classiques en première au lycée, le second, professeur de grec à l’université.

3. A mes yeux, l’enseignement, comme la médecine, est d’abord un art, mais, dans les deux cas, il est indispensable, pour les exercer, de maîtriser, aussi complètement que possible, les savoirs qu’implique et met en œuvre l’exercice de ces arts.

Les professeurs de l’époque, « non formés », étaient-ils moins bons que ceux des vingt dernières années qui ont tâté des fameux IUFM et de la « pédagogie/sciences de l’éducation » ou des futurs « mastérisés »? Je n’en suis pas certain (litote pour dire que je suis à peu près sûr du contraire !).

mardi 14 juin 2011

Sénilité, machiavélisme ou humour corrézien ?

La déclaration de Jacques Chirac à la pittoresque inauguration de son musée à Sarran, le 11 juin, a suscité une infinité de commentaires et on ne va pas manquer de gloser à l'infini à son sujet, en particulier en la rapprochant du deuxième tome de ses mémoires et des propos qu'il y tient sur François Hollande et Nicolas Sarkozy. Peut-être au fond, chez l'ancien président de la république, l'auteur l’a-t-il un moment emporté et veut-il simplement parla assurer la promotion de son livre et en booster les ventes pour égaler les tirages de Maman. Sur ce point l'opération est assez réussie, après le coup de la concurrence des bonnes feuilles entre le Nouvel Obs et le Point.

Chirac a en effet lâché, tout à trac, quand nul ne lui demandait rien et que sa position au Conseil constitutionnel lui interdit en principe de telles déclarations, surtout à un an du scrutin, qu'il voterait pour François Hollande, si Juppé n'était pas candidat.

Le paradoxe est que c'est la première partie de la phrase qui a retenu toute l'attention, alors qu’il me paraît totalement évident que c'est la seconde qui est essentielle. L'idée que Chirac puisse voter pour Flamby ne doit pas avoir la moindre l'importance aux yeux de Nicolas Sarkozy qui va sans doute, comme aux Guignols, baptiser Chirac "Papy Zinzin". S'il veut reprendre une de ses formules, il peut même dire que ça lui en touche une, sans faire bouger l'autre.

En revanche, la petite phrase, pleine de fiel et de regrets sur le fait que le président regrette que Juppé ne soit pas candidat est tout à fait susceptible (et c'est précisément à cette fin qu'elle a été prononcée) de donner à penser à Alain Juppé (il y a sans doute très longtemps qu'il y a lui-même songé et sans avoir besoin de Chirac) comme à bon nombre d'UMP gaullo-chiraquiens qui ruent dans les brancards de la sarkozie et vont y trouver encouragement et espoir.

La formule (mais c'est le but recherché) vise à inspirer au maire de Bordeaux (qu'on ne doit plus guère voir là-bas) quelques regrets d'avoir déclaré qu'il ne serait candidat que si Sarkozy lui-même ne l'était pas (hypothèse hautement invraisemblable, sauf accident ou décès prématuré). Il est vrai que ce propos lui a permis de devenir ministre des affaires étrangères et que c'est là une distinction à laquelle il n'est assurément pas insensible.

On peut d'ailleurs se demander si les petites affaires électorales corréziennes actuelles ne sont pas pour quelque chose dans le propos de Jacquou. En effet, le rapporteur du tribunal administratif de Limoges a demandé jeudi 9 juin 2011 (donc deux jours avant la manifestation du musée Chirac) à cette juridiction d'annuler l'élection de Bernadette Chirac à Corrèze (Corrèze) lors des dernières élections cantonales, pour un vice de forme. La demande se fonde sur la découverte, dans le bureau de vote de Meyrignac-L'Eglise, de 49 bulletins de vote alors que la liste d'émargement des ne comprend que 48 noms. Or si Mme Chirac avait été élue au premier tour, le 20 mars dernier, elle n’avait qu’une seule voix d'avance.

Le tribunal rendra son jugement dans deux semaines, mais Flamby, comme président du conseil général, pourrait être dans une telle affaire un appui précieux ; il n’est donc pas mauvais de l’amadouer, surtout si cela ne mange pas de pain !

Chirac, peut-être titillé par les frasques américaines de DSK, a, en présence de Bernadette, refait son numéro de charme sénile, un peu ridicule, avec une affriolante blonde, Sophie Dessus, sémillante vice-présidente du conseil général de Corrèze. Du plus haut comique et Yann Barthès et son Petit Journal ne l’ont naturellement pas loupé.

Je me demande comment Jacquou et Maman se sont causé de retour à la maison. L'a-t-elle félicité pour avoir, d'ores et déjà, mis Flamby dans sa poche ou lui a-t-elle tiré ses grandes oreilles, en lui reprochant à la fois son numéro grotesque avec la pulpeuse blonde et des propos, tout à fait inconsidérés dans le contexte actuel et qui pourraient être mal pris par Nicolas Sarkozy avec lequel elle est, en principe, dans les meilleurs termes ?

Jacques Chirac fait-il déjà campagne ou se borne-t-il à la battre ?

Note lexicographique de la rédaction : "battre la campagne : déraisonner, délirer, divaguer".

lundi 13 juin 2011

De la schizophrénie publicitaire

Les nouvelles publicités pour les organismes de paris qui ont envahi, à toute vitesse et en masse (et on le sait désormais avec le concours, peut-être inconscient, de Mamie Zinzin!), nos médias audiovisuels illustrent, une fois de plus, l’hypocritissime modèle dominant.

On vous presse désormais de toutes parts de venir tenter votre chance sur les paris en ligne , avec les mêmes slogans, alléchants et surtout mensongers qui devraient être totalement interdits (« On parie que vous allez gagner » vous susurre-t-on !), mais on y ajoute aussitôt, mezza voce, que le jeu est dangereux et, en gros, que mieux vaudrait s’en abstenir ! Comment pousser jusqu’à un tel point la malhonnêteté, sinon avec la complicité active d’un Etat, qui se fait, en la circonstance, clairement proxénète ! Notre fameux "Bureau de vérification de la publicité" aurait-il été supprimé?

Certes on ne fait là que reprendre le modèle désormais dominant partout qui tolère ou même, il faut bien le dire, encourage les publicités pour le tabac (tout en précisant que le tabac tue !), pour l’alcool (dont la consommation excessive est dangereuse et dont il faut user "avec modération") ou tous les produits qui engendrent l’obésité, contre laquelle on prétend pourtant lutter et les maladies cardio-vasculaires, qu’on feint par ailleurs de déplorer (tout en vous recommandant de consommer moins de ces graisses et de ce sucre qu’on vous vend et de faire de l’exercice !). Cela dit (mais chut!) ça fait toujours autant de retraites en moins à payer!

Que les producteurs et les marchands de ces produits reconnus funestes veuillent continuer leur coupable industrie et leur commerce funeste, fût-ce au détriment de la santé globale de la population, je le comprends tout à fait. Ce qui est, en revanche, totalement immoral, inadmissible et même totalement stupide tient à la tolérance et même l’encouragement systématiques de cette schizophrénie communicationnelle qu’on trouve désormais partout, c’est le jeu de l’Etat lui même.

Certes par la fiscalité (TVA + impôts sur les sociétés, patentes, etc. ) et par les profits directs (avec les sociétés d’Etat pour le tabac et les jeux, sans parler même des copinages politiques), l’Etat engrange, à très court terme, des ressources directes mais au prix, chacun le sait, dans tous les domaines concernés, de coûts individuels et collectifs, matériels, sanitaires, moraux et sociaux qui sont gigantesques et absolument sans commune mesure avec les bénéfices immédiats qu’il en retire.

Il y a sans doute aussi pour nos politiques des profits moins directs et moins visibles. On n’en prend conscience que quand, pour revenir à l’exemple des autorisations de paris en ligne, on regarde d’un peu près quels sont les promoteurs et, par là même, les grands bénéficiaires de ces opérations ou quand on songe aussi aux immenses profits que tirent de tout cela les officines de publicité et de marketing qui, le moment venus, en période électorale, seront sans doute tout à fait disposées à renvoyer les ascenseurs aux politiques !

Bref, tout vous invite à fumer deux paquets de clopes par jour et à vous saoûler la gueule en vous vautrant toute la journée sur votre canapé pour vous y gaver de charcuterie arrosée de coca-cola, avec des paquets de sucreries à portée de la main tout en pariant à la télé sur un match de foot et le tour de France ou, à défaut, en faisant un petit poker avec Patrick Bruel. Si vous êtes trop fauché, pas de problème ! Les pubs des organismes de prêts sont aussi sur le petit écran et dans toute la presse populaire. mais attention, LE TOUT AVEC MODERATION !

dimanche 12 juin 2011

La route de l’aspirine est coupée

Effrayante émission « C dans l'air » d'Yves Calvi sur France5, ce vendredi 10 juin 2011, consacrée aux médicaments. Le sujet était apparemment assez anodin, en tout cas pour quelqu'un d'aussi mal informé que moi sur cette question. En revanche excellent plateau d’invités, une fois n’est pas coutume, avec Philippe Even, Marc Girard et François Chast ; Calvi y avait adjoint une dame qui devait passer dans le couloir en cherchant son chemin car on n'a jamais bien su ce qu'elle venait faire là et surtout qui elle était car son nom ne figure même pas dans la liste des invités que j'ai pris la peine de rechercher sur Internet. Un ami m'informe que la dame en cause était de l'Agence française du médicament. Tout s'explique et en particulier son silence gêné!

Je dois dire que cela nous change un peu des sempiternelles émissions politiques sur les candidats à la présidentielle dont Calvi nous réserve à peu près 300 resucées d’ici l'élection proprement dite, avec les éternels Christophe Barbier, Roland Cayrol et Pascal Perrineau. Leur absence, à elle seule, créait chez le téléspectateur des dispositions favorables à l'écoute car, pour une fois, on avait affaire à des gens qui de toute évidence savaient de quoi ils parlaient et, d'autre part, n'avaient pas totalement leur langue dans leur poche.

Je vous la fais courte comme toujours, le bilan est effrayant. Je savais, comme tout le monde, que nous ne fabriquons à peu près plus rien, des téléviseurs au presse-purées en passant par les jouets et les autos, mais je croyais au moins que nous fabriquions encore nos médicaments et les principes actifs qui entrent dans leur composition. Eh bien non ! Tout nous vient désormais de Chine comme les ordinateurs et les tee-shirts. La chose est un peu effrayante au plan industriel mais elle l'est plus encore au plan pharmacologique et même médical.

En effet non contents de produire leurs principes actifs (ceux des médocs, pas des Asiates qui certes n’en manquent pas !), les Chinois fabriquent aussi les médicaments eux-mêmes et cela dans des conditions qui ne sont pas tout à fait les nôtres puisque leurs normes de sécurité et de contrôle de ces fabrications ne sont pas du tout celles de l'Europe. Autant dire qu'une partie, mal appréciable mais certaine, des médicaments que nous consommons n'est pas en conformité avec les règles de composition et de fabrication qui devraient être en vigueur.

Si j'ai bien suivi, le plus bel exemple de la chose est l'héparine. Un simple coup d’œil dans Wikipédia me permet de faire le savant ce qui est, un instant, nécessaire. L’héparine est une substance ayant des propriétés anticoagulantes extrêmement puissantes, ce qui la fait utiliser contre la thrombose. Elle est administrée par voie intraveineuse ou sous-cutanée, selon la dose à administrer. Elle active une protéine plasmatique : l'antithrombine. « L'héparine est extraite industriellement d'intestin de porc (Europe) ou de poumon de bœuf. Les abats d'autres mammifères d'élevage peuvent être utilisés comme sources secondaires ».

Cet article est assez inexact, dans sa partie finale du moins car, à en croire les spécialistes présents, ce médicament doit être désormais fabriqué exclusivement à partir du porc et c’est là tout le problème. Pour vous résumer les choses, pour faire une dose d'héparine injectable, il faut un cochon. Comme le faisait remarquer avec humour l’un des participants « dans le cochon tout est bon » surtout et avant tout pour l'héparine ! Je me demande, en passant, mais en passant seulement, si l'héparine est utilisée dans les pays musulmans. Peut-être est-ce compatible avec les exigences du Coran dans la mesure où ceux qui reçoivent ce traitement ne savent pas qu'on leur injecte du porc ! Pour en revenir à l'héparine et aux cochons, la Chine élève à environ 1 milliard de porcs ; toutefois, il peut arriver que les énormes besoins en héparine et en cochons fassent que l'on n’ait pas assez de cochons pour fabriquer les quantités nécessaires de ce médicament. Les industriels, chinois et peu scrupuleux, usent alors d'os d'autres animaux, comme les moutons ou les vaches qui contiennent un principe dont la formule chimique est très voisine de celle de l'héparine, ce qui fait qu'à l'analyse on ne peut pas aisément faire la différence.

Le drame potentiel est qu’on sait désormais (et Wikipédia est fautif sur ce point précis et essentiel) que l'héparine doit être fabriquée exclusivement à partir de porcs car si on la fabrique à partir d'autres animaux, comme le mouton ou la vache, on peut transmettre des maladies (tremblade du mouton ou vache folle) qui risquent de donner, à terme, à ceux qui reçoivent le traitement, la maladie de Kreutzfeld Jacob. Le problème est qu'on ne le saura que dans de nombreuses années et que ces industriels criminels peuvent, en attendant, continuer leur coupable industrie qui fait peser des menaces fatales sur une foule de malades.

Ce cas est certes un peu limite, mais rien ne prouve que les médicaments que nous achetons ont été préparés selon les règles et qu'un pourcentage d'entre eux, si faible soit-il, n'a peut-être pas l'efficacité qu'on leur suppose, sans parler de risques éventuels liés à ces défauts de fabrication.

Le pire de tous et que si la fabrication en Chine des chemises et des T-shirts a sans doute contribué, au moins dans certains circuits « low cost », à faire baisser le prix de ces articles, il n'en est rien pour les médicaments et l'exportation de la fabrication des médicaments en Chine n'a en rien entraîné la baisse de leurs prix. J'espère que vous est bien installé pour entendre la suite. Selon l'avis unanime des experts présents dans l'émission, en France le prix de vente d'un médicament fabriqué en Chine dans les conditions décrites ci-dessus est, par rapport à son coût de fabrication, dans un rapport qui va de 10 ou 20 à 100 voire, pour certains d'entre eux, à 500. Autant dire que l'industrie pharmaceutique peut vivre sur le grand pied que nous constatons chaque jour. Je laisse de côté le problème du coût de la recherche pour la mise au point de ces médicaments. Selon un propos que Philip Even répète souvent, d’une part la France, depuis 10 ou 15 ans, ne fait plus de recherche sur la mise au point de médicaments nouveaux, se contentant de ceux qui existent déjà ou de médicaments de seconde zone qui ne nécessitent pas d'études approfondies. Quant aux tests et aux expériences, on va les faire en général, à moindres coûts et sans grands risques, en Europe centrale ou de l'Est ou en Afrique. Quant à la mise au point et à la recherche sur les médicaments nouveaux, elle est infiniment moins coûteuse que l’industrie pharmaceutique veut nous le faire croire ; on parle volontiers en centaines de millions de dollars alors qu'il ne s'agit, dans la plupart des cas, que de dizaines !

Le problème est que, dans le système social qui est le nôtre, les gigantesques profits de l'industrie pharmaceutique (je devrais plutôt dire le COMMERCE industriel pharmaceutique puisque cette prétendue industrie ne fabrique plus rien en réalité) qui, après tout, pourraient être regardés comme faisant marcher un commerce privé, sont en réalité des IMPOTS puisque une partie très importante des médicaments achetés est remboursée par la sécurité sociale, donc payée, en fait, par l’Etat et donc par nos contributions. Nous n’enrichissons donc par là que ce commerce pseudo-industriel pharmaceutique qui, en plus, est souvent suisse ou allemand !

Au sortir d'une telle émission, on est un peu partagé, pour ce qui me concerne du moins. Certes l’heure passée avec ces spécialistes est moralement un peu éprouvante mais, d'un autre côté, on a échappé, un moment, à la logorrhée insipide et répétitive sur les futures élections présidentielles car nous n’aurons sans doute pas la chance d'avoir, tous les mois, une affaire Strauss-Kahn pour mettre un peu de piment dans la sauce politique.

La route de l’aspirine est coupée puisque nous n’en fabriquons plus un seul cachet en Europe et que les Chinois peuvent donc nous condamner, du jour au lendemain, au mal de tête. En revanche, la route vers les comptes en banque des commerçants industriels pharmaceutiques est largement ouverte et des plus fréquentées !

samedi 11 juin 2011

DSK. Justice des USA 2

J’ai reproduit hier l’intéressant article de John R. Macarthur sur la justice américaine, paru le 6 juin 2011 dans le Devoir de Montréal sous le titre "Des Français désenchantés", en renvoyant à aujourd’hui, faute d’espace, mes remarques sur le sujet.

J.R. Macarthur note que « le principe selon lequel un accusé est [présumé] innocent jusqu’à ce qu’il soit reconnu coupable « au-delà du doute raisonnable » fait partie du tissu social, voire de l’amour propre, d’une Amérique pieuse lorsqu’elle vante la supériorité de son système judiciaire et de sa Constitution » ; il observe aussitôt combien cette présomption d’innocence est difficile à maintenir, surtout dans un cas comme celui de DSK qu’on présente comme « le Perv » français et dont on ne cesse de rappeler l’inclination quasi pathologique pour les femmes, qu’on illustre de plus en plus, de jour en jour, par des exemples voire des témoignages, comme celui de la blonde Kristin Davis, la « Madam » de Manhattan.

Quelles que soient les précautions prises pour favoriser la présomption d’innocence, déambuler entre deux policiers (avec ou sans menottes) ne plaide nulle part en faveur de l’innocence de l’intéressé. On se souvient du fâcheux lapsus de Nicolas Sarkozy sur le « présumé coupable » qu’on lui a tant reproché, mais, à tout prendre, ce serait peut-être une formule préférable a l’autre car, si elle marque la possibilité de l’innocence de l’intéressé puisque sa culpabilité n’est que « présumée», elle plaide aussi, par ailleurs, en faveur du sérieux de la justice qui ne devrait pas être mise en oeuvre sans de bonnes raisons, ce dont quelques récentes mascarades judiciaires conduisent à douter.

Dans un premier temps, les Français, volontiers frondeurs, ont été, secrètement ou ouvertement, assez satisfaits de voir un puissant, le riche directeur général du FMI, dans lequel beaucoup voyaient déjà le futur président de la République française, menotté entre deux policiers comme un vulgaire voleur de poules. C’est notre côté Figaro, lui qui, dans le Mariage, lance au Comte Almaviva sa définition de la justice devenue célèbre « Indulgente aux grands, dure aux petits ! ».

C’est sur ce point que je me sépare de J.R. Macarthur quand il observe : « Les pires clichés sur la culture française sont répandus au nom du droit prétendument égalitaire de la République américaine. D’après ce stéréotype, la France est un pays ultra-tolérant, débordant de libertins jouissant des moeurs corrompues, dissolues et relâchées. L’élite française se croit au-dessus des lois faites pour les petites gens, et les beaux mots de Liberté, Égalité, Fraternité ne sont que des prétentions ».

Je ne suis pas assez bon connaisseur de l’histoire des Etats-Unis pour savoir si l’on y trouve, comme dans la nôtre, dans le dernier siècle et demi, les mêmes figures officielles un peu douteuses. Sous la Troisième République, un président de la République, Jules Grévy, dont le gendre avait ouvert à l’Elysée un petit commerce de légions d’honneur ; Félix Faure, un autre président de la même république, qui, douze ans plus tard, ne survécut pas à l’une des visites de sa maîtresse dans son bureau présidentiel ; à la fin des années 50, le Président du Sénat (socialiste déjà !), deuxième personnage de l’Etat, organisateur de soirées pédophiles, les fameux « ballets roses », dans un pavillon officiel de la République (quoiqu’ayant tout nié avec la dernière énergie, il sera pour finir condamné à un an de prison - avec sursis fort heureusement !) ; dans un genre différent, un autre président, socialiste également, entretiendra et fera garder aux frais de l’Etat, deux mandats durant, l’une de ses maîtresses et leur fille, sans que nul n’y trouve à redire ni même n’en parle !

Quant à la France, « patrie des droits de l’homme », si l’on convoque tant soit peu l’histoire, force est d’admettre que les idées des Lumières et, par là, celles de notre Révolution sont plutôt nées en Angleterre où d’ailleurs nombre de nos « philosophes » ont, à un moment ou un autre, trouvé refuge et inspiration. Ce n’est donc pas par hasard, si les démocraties actuelles de Grande-Bretagne (en dépit de l’état monarchique) et des Etats-Unis sont, à bien des égards, plus authentiques que la nôtre.

L’image flatteuse que les Français, bien conscients au départ que tout se serait passé autrement si DSK avait logé dans un palace parisien et non new-yorkais, n’a toutefois pas tardé à changer et à se dégrader au fil des jours. L'arrivée d’Anne Sinclair en jet privé, la caution faramineuse payée sans sourciller pour éviter la prison à son mari, la location d’un gîte à 50 000 $ par mois, tout cela a ouvert les yeux du public français, moins sur la justice américaine que sur la fortune des époux DSK et, par là, du candidat socialiste, favori du bon peuple pour la prochaine présidentielle.

On avait cru constater que la justice des États-Unis, à la différence de celle de Figaro traitait de la même façon les grands et les petits. On a vite compris qu’il n’en était rien. Divers signes l‘ont montré, sans parler de ceux que nous n'avons pas pu voir. Je ne doute pas, en effet, que dans son indulgence et sa longanimité, Anne Sinclair n’ait fait un saut chez Tiffany pour offrir à son Dominique un bracelet électronique serti de diamants. Les paparazzi ont certes réussi une image de sa cheville, quand il montait en voiture, mais hélas le fil d'Écosse de la chaussette n'a pas permis un constat plus précis sur ce point.

À la différence de John R. Macarthur, je ne crois pas vraiment que « les droits de l'État accusateur privent les droits de l'accusé » par le biais des « fuites dans la presse ».L’injustice est moins, quand l’accusé dispose de millions de dollars, dans la possibilité de recruter des avocats talentueux que dans la capacité de payer des détectives et éventuellement surtout , dans la suite, d’acheter des témoins, voire des membres du futur jury (puisque l’unanimité des jurés est requise). On le savait certes tout cela depuis longtemps, au simple souvenir des affaires O.J. Simpson et Michael Jackson !

Que Cyrus Vance Jr. essaye d'utiliser cette affaire, surtout après son récent échec, pour exercer son ambition n'est pas chose nouvelle aux États-Unis, mais il est clair que les immenses moyens du couple Strauss-Kahn leur donneront les moyens de rivaliser, sans trop de problèmes, avec le procureur de New York.

« Indulgente aux grands, dure aux petits », la justice l’est aux Etats-Unis comme dans tous les Etats du monde. En France, chacun sait qu'il vaut mieux être défendu, à défaut d'une vedette du barreau, par un avocat sérieux qui étudiera sérieusement votre dossier pour vous défendre, que par un avocat commis d'office et qu’il vaut mieux avoir à faire à un adversaire obscur qu’à un adversaire proche du pouvoir. Il en est de même aux États-Unis, mais la grande différence entre les deux systèmes tient aux possibilités de négociations sur la reconnaissance ou le refus de la culpabilité ; elles amènent à ce que la plus grande partie des affaires (entre 90 et 95 % semble-t-il) n'arrivent pas jusqu'au procès, mais s'achèvent dans une négociation qui peut conduire à la réduction des peines voire à leur absence totale.

De ce fait, je pense que la conclusion de John R. Macarthur est un peu discutable (l’avenir jugera !) quand il écrit : « A mon avis, Vance s'est trop investi dans la poursuite de DSK pour négocier quoi que ce soit ; il lui faut une condamnation et une punition. Bientôt la cour criminelle de Manhattan ressemblera à une arène romaine où le sang va couler. Pourvu que les Français profitent de ce combat pour abandonner leur rêve américain ».

Je ne suis pas aussi sûr que lui que les choses se passent ainsi, car si le procureur est sans doute peu disposé à mettre les pouces et à voir cette affaire, sur le retentissement de laquelle il compte pour lancer sa carrière future, s'achever dans une négociation, on peut tout à fait imaginer que quelques millions de dollars soient en mesure de convaincre Mme Diallo que tout ce qu’elle a raconté ne s'est passé que dans son imagination et que, en réalité, c'est elle qui, voyant sortir de DSK de sa salle de bains dans le plus simple appareil, n'a pas pu résister à l’appel de la chair et l'irrésistible attraction de la bedaine de Dominique.