Je ne sais pas laquelle de ces deux formules de notre métaphorique populaire convient le mieux à la situation que je vais évoquer dans ce post. A vous de juger !
Dieu sait pourtant que nos experts en communication avaient mitonné leur coup de main de maître. Il ne s'agissait pas, en pareille période, de récupérer n'importe où et n'importe comment nos deux précieux otages qui en tant que journalistes de profession sont à la fois le sel de la terre de l'information et la source inépuisable de l’inspiration médiatique.
A « NOTRE », journal de France2, comme s’obstine à le dire sottement car c’est le sien hélas et non le nôtre, Madame Lucet qui, je crois, est la « productrice » de l’émission de télé qui avait envoyé les deux loustics sur le terrain pour je ne sais quel magazine d'information, était à ce dernier titre sous les projecteurs et rayonnait par tous les pores. Elle avait même été sur le terrain à Villacoublay et, de ce fait, elle pouvait enfin, pour une fois, faire la nique à Jean-Pierre Pernaut, resté à la maison à se coltiner ses paysans.
Tout avait été réglé de main de maître ; l’après-midi du mercredi avait été à dessein choisi puisque c'est le moment de la télé à l'assemblée nationale ; de ce fait, on allait pouvoir faire l'annonce de la libération, non seulement devant la représentation nationale, où même la gauche allait devoir se lever, bon gré mal gré, pour applaudir, mais aussi devant toute la France des seniors qui, en cet après-midi du mercredi, somnole devant sa télé et qu'on allait réveiller par cette annonce tonitruante. De ce côté-là, tout avait été prévu et tout a marché comme sur des roulettes (ou plutôt des chaises roulantes).
On a même dû faire une standing ovation bis puisque, ce jour-là était aussi celui où Christine Lagarde faisait ses adieux à l'assemblée nationale, en feignant d'écraser une larme furtive et modeste. Du grand art. Idem pour la communication officielle sur l’arrivée et le couple présidentiel, comble de l'astuce, nous l’a jouée discrète voire absente.
Dans les médias, nous avons donc eu droit (et hélas ce n'est pas fini, mais fort heureusement nos deux rouletabilles ont des familles nombreuses, riches terroirs pour de multiples « scoops » et « exclus ») à tous les couplets habituels sur la grandeur, voire l'héroïsme du métier de journaliste, dont la déontologie est si grande qu'elle pousse parfois ces modernes héros à sacrifier leur vie sur l'autel de l’information.
Si les services de la communication ont été parfaits et à la hauteur de leur tâche en la circonstance, on ne peut en dire autant du renseignement et de la réflexion préalables et circumvoisins . On aurait en effet dû songer que si le mercredi est le jour de la séance télévisée à l'assemblée nationale, c’est aussi hélas celui où paraît le Canard enchaîné. Cette concomitance permet même aux représentants du peuple une saine et opportune lecture quand, une fois réveillés, ils sont, par bonheur, hors du champ des caméras de France3.
Or ce sinistre volatile a eu la mauvaise idée (peut-être même perfide), ce mercredi-là, de publier un article sur le réseau d'influence (pour ne pas dire de collusion) que Ben Ali avait mis en place auprès de la presse française, pour la gagner à sa cause par ces petits cadeaux qui entretiennent l'amitié quand ils ne sont pas propres à la faire naître.
Ben Ali avait même créé, à cette fin précise, une « agence tunisienne de communication extérieure » à laquelle il versait 200 000 € par an pour payer, sous des formes diverses, à la presse française (surtout de droite il est vrai) la publicité rédactionnelle en faveur de l'éloge permanent de son pays et surtout de son régime.
Je ne vous ferai pas ici la liste de tous les bénéficiaires de ces largesses ben-aliennes, personnelles mais souvent familiales, puisque vous pouvez la trouver aisément dans le Canard enchaîné, s'il en reste encore en kiosque car les intéressés ont dû le faire rafler dans les boutiques quand ils le pouvaient mais aussi dans les sites Internet dont en particulier Rue 89 qui a vendu la mèche et repris l’article de l'hebdomadaire satirique.
Sachez seulement que cela va du Figaro (largement représentés) à BFM-TV en passant par M6, le Parisien ; la vertueuse Françoise Laborde a même eu la chance en passant de France2 au CSA de remettre le compteur à zéro et de doubler la mise avec des conditions qui étaient plus dignes de sa nouvelle fonction.
Vous comprendrez aisément qu'avec de telles révélations en ce jour de gloire et d’apologie de notre presse, la morale professionnelle, la dignité et, en un mot, la dé-on-to-lo-gie de la fonction journalistique française en prennent un sérieux coup, du moins aux yeux de ceux qui étaient encore assez naïfs et mal informés pour croire les discours qu'on ne cesse de nous tenir à ce propos alors que les faits ne cessent de les démentir.
Alors « os dans le fromage » ou « caillou dans le yaourt » ?
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