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vendredi 28 janvier 2011

La monnaie de...

Je ne sais quel critique littéraire de la fin du XVIIIe siècle ou du début du XIXe, voulant définir les auteurs de comédies du XVIIIe siècle, comme Regnard et quelques autres, les a qualifiés, par une heureuse expression, de « monnaie de Molière ». J'ai même réussi à coller Google sur ce point et n'y ai pas trouvé le nom de l'auteur de cette formule. Je reviens donc à mon vieux truc de concours entre mes lecteurs ; celle ou celui qui résoudra cette énigme gagnera, comme toujours et en hommage à Coluche, une tringle à rideaux.

Je ne sais pas si l'auteur de cette expression s'est inspiré de l'image populaire qui veut que, lorsqu'un homme, l'âge avançant, délaisse sa femme, du même âge que lui, pour en prendre une ou plusieurs autres plus jeunes, on dit parfois qu'il « fait la monnaie ». Là encore, je laisse cette interrogation à la sagacité de mon lectorat.

Les hommes politiques, plus fins connaisseurs de la psychologie humaine que de la bonne gouvernance des Etats, se sont, depuis longtemps, inspirés de cette démarche dans la conduite de leurs affaires. Ainsi a-t-on, depuis longtemps, « fait la monnaie » des ministères en créant des secrétariats d'État, voir ses sous-secrétariat d’Etat. Les Québécois vont plus loin que nous encore dans cette pratique puisque non contents d’avoir, aux côtés des ministres, des « sous-ministres », ils ont aussi des « sous-ministres adjoints » ! On ne saurait guère raisonnablement pousser plus loin la politique de découpage du maroquin (Je prie humblement la LICRA et le CRAN de consulter leur dictionnaire français avant de me traîner en justice pour incitation à la haine raciale, j'ai écrit "maroquin" et non "Marocain").

Cette pratique permet, selon les cas, de récompenser ou d’appâter d'autres politiques sans avoir à créer de pesants et coûteux ministères. Depuis quelques décennies, bien que l'on constate en général que les gouvernements comportent des ministères toujours aussi voire plus nombreux, la mode est, sur le plan des principes au moins, à la réduction du nombre des ministres. Le secrétariat d'État reste donc un moyen commode de satisfaire sa clientèle. En outre, et on le constatera sans doute bientôt, l’approche d’une élection présidentielle est toujours une période très favorable à l'apparition de la monnaie des maroquins.

Souhaitant sans doute, au moins sur le papier, respecter les consignes de limitation de la taille des gouvernements et en vue de réaliser des économies budgétaires, le régime actuel fait, en quelque sorte, la "monnaie de la monnaie" grâce à un large usage des missions. Je n'entreprendrai pas ici de les dénombrer toutes, car, comme je le dis parfois et comme certains se plaisent à me le rappeler, le blog doit rester un genre court et ces "missions" sont devenues si nombreuses que leur simple inventaire en dépasserait largement les limites.

Je me bornerai donc aux plus notables, aux plus pittoresques et aux plus récentes, comme celle de Mme Boutin, dont le contenu et la rémunération furent jugés si scandaleux qu'elle dut y renoncer (on aurait pu lui proposer, les soldes venues, les maisons closes qui ne font toujours pas l’objet d’une mission). La mission Boutin était toutefois moins pittoresque que celle de Michel Rocard (sur les pôles) ou de Jack Lang sur la piraterie (après Fidel Castro !).

La plus récente, dont j'ai appris vendredi 28 janvier 2011 la création et qui m'a inspiré ce post est celle, sur le suicide des jeunes, que l'on vient de confier à Boris Cyrulnik, à peine revenu d'une mission sur les viols au Congo. Je ne sais pas trop ce qu'il pourra apporter en la matière et les solutions qu'il pourra proposer, cette mission est en tout cas une jolie illustration de la « résilience », tant de Cyrulnik lui-même que du gouvernement qui a imaginé de lui confier cette tâche.

Il est clair que les raisons qui conduisent, tant à imaginer de telles missions qu'à déterminer le nom de ceux à qui elles seront confiées sont diverses et multiples. Un problème surgit-il dans notre société, qu'il s'agisse du ramassage des sacs en plastique ou du « speen » des éleveurs de porcs bretons, à défaut de proposer des solutions, on créé une « mission ». Ce choix lexical montre, en tout cas, un sens de l'économie de moyens de la part de nos gouvernants par rapport à l'époque de Clémenceau, dont on connait la formule selon laquelle » En France, pour enterrer un problème, on crée une commission ! ». La mission succédant à la commission, si le résultat est le même, on a, en tout cas, économisé une syllabe !

Voilà pour la thématique et la finalité de ces missions, reste le problème du « missionnaire » ou du « missionné ». Je ne sais pas trop quel est, en pareil cas, le meilleur terme, l'un et l'autre se prêtant à des jeux de mots douteux qu’on ne peut pas toujours éviter (pour la mission africaine sur le viol, certains n’hésiteront pas devant « Cyrul-nique » !). Comme l'objectif majeur est de faire causer dans le poste, le mieux est toujours de choisir une personnalité médiatique que non seulement radios et télévisions se disputeront, mais qui sera en mesure de faire une prestation audiovisuelle de qualité. Le reste importe peu au fond et on ne voit pas plus le rapport entre Michel Rocard et les pôles qu'entre Jack Lang et les pirates mais on peut toujours faire confiance aux vieux profesionnels pour qui, d'abord et surtout, « the show [pour Rocard, "the chauve"] must go on ».

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