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lundi 30 janvier 2012

A front renversé ?

« à front renversé : (Militaire) En ayant le territoire ennemi derrière soi, en parlant de combattre. « Les Français qui étaient sortis de l’Argonne, avaient occupé la colline de Valmy d’où ils canonnèrent les Prussiens. Brunswick dut livrer contre eux une bataille à front renversé ; il fut surpris par l’allant des Français et la vigueur de leur canonnade ». (Guy Cabourdin, Yves Burnand, Encyclopédie illustrée de la Lorraine : Histoire de la Lorraine, volume 2, 1992, page 30) ».
Rassurez-vous, chère lectrice, cher lecteur, je n'entends pas ouvrir désormais, dans ce blog, une rubrique du type « Enrichissez votre vocabulaire », même si mon couplet sur les « scies » dans un précédent blog a pu vous en donner l'idée.
L'usage de cette expression militaire m’a été toutefois inspiré par l'émission que toutes les chaînes de télévision françaises ont consacrée hier soir à l'intervention de notre président de la République. On peut dire, en effet, qu'aussi bien lui-même que les deux journalistes chargés de l’interviewer , en dix minutes sur les 70 de l'émission, (je ne parle pas ici des représentants de TF1 et de France2 chargés seulement d’« animer » le débat) ont tous joué « à front renversé ».
Je n'insisterai pas sur le discours de notre président dont on pouvait penser, à l'entendre, qu'il était candidat à la succession d'un président de la République autre que lui qui avait mené, cinq années durant, une politique qu'il désapprouvait totalement et sur tous les plans, depuis la fiscalité du travail jusqu'à l'endettement global, en passant par la formation professionnelle, les coûts de revient de la production industrielle française (qui ont conduit à sa délocalisation) jusqu'à l’absence de production nationale et donc, par là-même, au chômage et à la stagnation du pouvoir d'achat. J'en suis venu à me demander, un moment, si Nicolas Sarkozy, vu ses louanges apputées de Schroeder n'avait pas, en douce, adhéré au parti socialiste, hypothèse que ne contredisaient, en rien, ses pointes contre François Hollande, ce comportement étant coutumier entre « camarades » au PS.  Assistions-nous là, en fait, à un troisième tour des primaires du PS ?
Tout cela donne à penser que la fonction présidentielle tend à oblitérer le jugement et qu'il serait donc souhaitable de raccourcir, à six mois par exemple, la durée du mandat présidentiel de façon à ce que son prolongement excessif n'entraîne pas sans cesse  l'aggravation de la situation du pays.
Toutefois mon propos est plutôt sur les journalistes.
Il n'y a pas grand-chose à dire sur ces interventions de Mme Chazal et de M. Delahousse puisque l'un et l'autre sont restés dans leur rôle et se sont, en gros, bornés à passer les plats avec, de temps en temps, de façon à prévenir le reproche de complaisance excessive, une pointe que le président de la République a écartée d'un revers de main, comme des vols d'insectes intempestifs.  
Mme Chazal s'est ainsi bornée à faire remarquer que deux des propositions présidentielles se trouvaient également dans le programme socialiste ce qui a entraîné de la part de notre président des froncements de sourcil qui ont suffi à la calmer dans la suite par la suggestion qu’elle avait appris par cœur le programme de F. Hollande. Quant à Laurent Delahousse, promu contre toute attente à la fonction majeure de minutage du débat, les deux ou trois épines qu’il a pensé avoir glissées sous les fleurs n'ont assurément pas entamé l'épiderme présidentiel.
Je me suis amusé beaucoup plus des interventions des deux journalistes économiques, François Lenglet et Jean-Marc Sylvestre qui passent l'un de l'autre, vu leur passé et leur position (BFM-TV pour le premier, TF1 et i-Télé pour le second), pour des suppôts du grand capital. Or, contre toute attente, de même que les déclarations liminaires du président de la République avaient des allures de forte contestation de la politique menée depuis une dizaine d'années, ces deux journalistes se sont montrés plutôt plus critiques et en tout cas, ont posé de vraies questions.
Il faut dire que, dans toute cette affaire, le rôle essentiel est tenu, non par les journalistes eux-mêmes, dont les questions sont tout à fait anodines pour les deux premiers et demeurent, pour la plupart, éludées et/ou sans réponse pour les deux autres, mais par les « metteurs en images ». Leur rôle est ici essentiel car il s'agit, en la circonstance, surtout de ne pas faire apparaître à l'écran les réactions de François Lenglet ou de Jean-Marc Sylvestre, lorsque les questions qu'ils posent restent sans réponse ou que les chiffres qu'ils avançent pour leur domaine de spécialité sont contestés ou même niés par l'interviwé. Ce dernier cas a été celui de François Lenglet, dont le président de la République a tout simplement annoncé que ses chiffres étaient faux, sans que Lenglet puisse faire autre chose que de murmurer dans sa barbe que c'était là ceux de l’OCDE, phrase que le metteur en images n'a pas été assez vigilant pour l’empêcher de passer à l'antenne. Dans le cas de Jean-Marc Sylvestre, sa désapprobation devant l'absence de réponse aux questions posées, s'est manifestée non dans des paroles mais par des moues et des grimaces dont malheureusement nous n'avons pu voir qu'un ou deux exemples furtifs.
Mme Chazal et M. Delahousse sont très vite revenus, pour dix minutes en supplément de l’heure prévue, après les deux trublions, pour la « séquence émotion », naturellement finale, avec une confession quasi douloureuse ("erreurs", "authenticité", "sincérité", etc.), dans le style people et sans autre intérêt que de faire penser, irrésistiblement, à la confession télévisée de DSK, dans un registre un peu analogue quoique différent.
L’amusant de la chose (toujours le facétieux hasard !) est que j'ai entendu, ce matin, François Lenglet intervenir, entre 8:00 et 8:30, sur France-Culture et dire, au micro de cette chaîne et en studio, bien des choses qu’on aurait aimé entendre de sa bouche lors de l'intervention télévisée !


1 commentaire:

Expat a dit…

Il aurait été en fin de second mandat, il aurait pu virer ceux qui posaient des questions inopportunes,comme le fit Mitterrand avec les deux journalistes belges qui osèrent lui poser une question sur les supposées écoutes de l'Elysée. Car l'exercice de style peut avoir des variantes. Mais dans tous les cas, ça reste un exercice de style qui a cessé d'être amusant depuis le départ de de Gaulle qui, lui au moins, savait amuser son public par son sens de la répartie.