Hier matin, 5
octobre 2013, sur Europe, vers 8 heures 40, j'écoutais d'une oreille distraite
la prétendue revue de presse de Natacha Polony où, celle-ci; dans un souci
légitime et méritoire, se préoccupe de raconter un peu autre chose que ce qu'on
a déjà entendu dix fois dans la journée dans tous les médias audivisuels, dont
la chaîne de radio-bignole où elle officie.
Bien entendu, il
était question de la Syrie et Natacha Polony, qui se voulut autrefois professeur
de lettres (elle passa l'agrégation de lettres modernes avant de démissionner
de ses fonctions - au terme du délai de rigueur j'espère - pour adopter une
profession plus agréable à ses yeux), y a fait un discours que j'ai jugé assez
confus (j'ai pris le train en marche) sur les Romains, qui avaient fabriqué leur
verbe "punio" (= punir) à
partir du nom de leurs ennemis jurés, les Carthaginois, dont la tradition romaine
dénonçait la "fides punica",
la (mauvaise) foi punique alors que la "fides romana" n'était sans doute pas bien meilleure.
Ce désir
d'élever le niveau culturel des auditeurs d'Europe est parfaitement légitime,
encore que la tâche soit rude, et il semble une des préoccupations majeures de
Natacha Polony. Quoique ses prestations soient sans doute parmi les meilleurs
de notre paysage audiovisuel et si ignorants que soient ses auditeurs, elle aurait
du s'informer un peu davantage et surtout mieux car, sauf erreur de ma part, le
latin figure toujours au programme de l'agrégation de lettres modernes, si
c'est souvent sous la forme d'une simple épreuve d'initiation.
L' étymologie proposée
par Natacha est jolie mais elle est malheureusement totalement fausse ; elle
aurait pu toutefois la rendre plus vraisemblable si elle avait rattaché le
verbe latin "punire" pour
son étymon à "poena" (= la
peine, le châtiment) plutôt que d'aller chercher du côté de l'adjectif "punique"
car le nom latin ancien des Carthaginois est "Poeni" (= Carthaginois/Phéniciens), ces populations étant
réputées à l'origine être des émigrants venus auparavant, selon Hérodote, de la
mer Rouge.
Les deux termes "poena" et "Poeni", en dépit des apparences,
n'ont aucun rapport, sauf peut-être si l'on remonte très au-delà de la limite
de mes propres connaissances. "Poena"
(=le châtiment) vient du grec "poinè"
( je ne sais pas comment on accède à l'alphabet grec!) qui a le même sens et
qui désigne le "prix du sang" alors que "Poenus" vient du grec "phoinix", les Carthaginois passant pour être à l'origine,
comme on l'a vu, des Phéniciens.
Cela m'amène
donc à une justification de mon titre de "Damas à Carthage" qui est,
bien entendu, un double anachronisme, puisque, évidemment, aux époques reculées
qu'on évoque ici ces deux villes n'existaient pas encore. Sur le rivage
oriental de la Méditerranée, la Syrie était toute proche de la Phénicie (en
gros le Liban actuel) et des émigrants de cette région sont venus s'installer
au Maghreb me fournissant aimablement, du même coup, le titre de ce billet.
Dès lors la
"fides punica" que
dénonçaient les Romains n'est peut-être que la mauvaise foi des Phéniciens dont
doivent être issue une partie des Syriens actuels. Cela m'amène à une dernière
réflexion que je me fais souvent et parfois avec un certain amusement quand
j'entends parler, en particulier du côté du monde arabe, des Palestiniens et
des Maghrébins, de "l'antisémitisme"dont la cible exclusive seraient
les Juifs. On oublie ou plutôt on ignore toujours que l'arabe comme l'hébreu
sont des langues sémitiques et les Palestiniens, comme les Juifs sont eux-mêmes
des Sémites.
Comme, dans le
cas des prétendues étymologies latines de Madame Polony, il serait bon, de
temps en temps, de remettre les pendules à l'heure et de dire ce qu'on cache ou
qu'on ignore (comme pour Jacques Vergès dans la série de ma dizaine de
précédents billets dans ce même blog!).
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