Comme je le disais dans mon commentaire de son billet sur "l'hilarité obligatoire" dans Mediapart, Vingtras m'a coupé l'herbe sous le pied ; je dis le pied et non pas les pieds, car mes pieds sont fort grands et son billet assez court. Je méditais depuis longtemps un post sur ce sujet auquel j'avais déjà fait allusion et le billet qu'il a publié me donne l'occasion de m'y attaquer enfin.
Je ne crois guère ni à son explication sociologique sur le rire obligatoire comme remède à la morosité endémique ni à sa vue, optimiste aussi, selon laquelle les médias ont l'obligation de détendre l'atmosphère. Je les crois exclusivement préoccupés de faire monter par là leur audience et les prétendues nouveautés de la rentrée audiovisuelle actuelle ne me donnent assurément pas tort. Radios et Télés se livrent une lutte farouche et dérisoire à la fois, non dans des intentions si nobles, mais tout simplement pour augmenter leurs tarifs de publicité, donc leurs recettes et les salaires de leurs "employés" que je ne sais trop comment qualifier.
Je n'en veux pour preuve que la concurrence, férocement sordide, que se font les radios bignoles que j'écoute distraitement, en fonds sonore, le matin (Luxembourg, Europe et RMC). Leur concurrence est d'autant plus ridicule que ce qui s'y passe est strictement identique pour ces trois stations. Il s'agit de prétendre donner la parole à des auditeurs lointains, qu'on a fait droguer au standard en leur imposant, en retour de l'honneur qui leur est fait de "causer dans le poste", de faire l'éloge de la station et de ses glorieux "animateurs" qui sont eux-mêmes parfaitement interchangeables. On feint de s'intéresser aux propos de ces naïfs pedzouilles, qu'on appelle par leur prénom, dont on s'est préalablement enquis, en citant le nom de leur bled, avant de leur couper sans vergogne la parole pour "faire" un auditeur de plus. Bourdin, Truchot, Machin ou Chose, c'est du pareil au même, mais il leur faut faire du chiffre pour garder leurs 15.000 euros mensuels, tout en ayant la larme à l'oeil dès qu'un smicard apparaît dans le paysage.
L'ambiance est nécessairement joyeuse et le rire obligatoire. La pire figurante de toutes est, sur Europe, le matin, une certaine J. (65 balais au compteur) dont la fonction essentielle est de rire en permanence à gorge déployée et à tout propos. Je n'ai d'ailleurs jamais pas compris pourquoi on ne la remplace pas tout simplement par des enregistrements qu'on déclencherait ad nutum ; ce serait naturel et même humain car, à son âge et après tant d'heures passées à rire, on sent chez elle une certaine fatigue des zygomatiques. A RMC, dans une émission dite "les grandes gueules", on a eu la chance de recruter récemment un prétendu sociologue que son rire, agricole et tonitruant pour le coup, fait plutôt imaginer au cul des vaches que dans une chaire universitaire ! M'enfin !
Le pire, je crois est une émission (mais je vous entends déjà murmurer perfidement "Pourquoi diable l'écoute-t-il ?) qui passe l'après-midi, de 16 à 18 heures, sur Europe et dont le titre faubourien doit être « On va s'gêner !» et qui est produite par Laurent Ruquier. En fait je l'écoute assez souvent non par goût et perversité mais parce que, étant en voiture à ce moment-là, je n'ai guère le choix qu'entre les insupportables pédanteries de France Culture à ces heures creuses, les niaiseries de Luis qui, à ce moment-là, sur RMC, "attaque la planète foot" (< "Luis attaque < "Louise attaque : merci pour eux de bien vouloir rire !) dont l'accent lyonnais (ou plus précisément des Minguettes), est exaspérant de vulgarité, son propos lui-même étant en général d'une rhétorique incertaine mais toujours fondée sur le rythme ternaire gaullien, qui ne fait qu'accroître la longueur du discours sans en augmenter l'intérêt et Ruquier lui même que j'ai connu meilleur, à ses débuts, autrefois.
C'est, en fait, lui qui fait l'essentiel du travail dans cette affaire et il consiste à faire causer ses « chroniqueurs », de pitoyables has beens, dont j'ai appris qu'ils sont fort bien payés pour de lamentables prestations. Comme disait le Jugnot du "Bébète Show" d'autrefois "Et dire qu'on les paye pour faire ça!").
L'ornement principal de l'équipe est Claude, qui doit aller sur ses 90 ans si elle ne les a pas déjà dépassés et dont la lubricité sénile s'accorde assez bien avec le propos général de l'émission où la grivoiserie voire l'obcénité sont de règle avec, en tête de gondole, l'ex-giton de Laurent Ruquier dont il a fait la carrière par reconnaissance de je ne sais quoi ! Il s'agit d'une ex-vedette de je ne sais quel téléréalité dont le QI est, de toute évidence négatif et dont l'ignorance abyssale peut toujours être sollicitée, en cas de disette de rire, car la connerie monumentale est garantie pour toute sollicitation à son endroit (si j'ose dire !).
S'ajoutent à ce duo une sinistre ex-institutrice en rupture de ban, preuve vivante que le niveau du recrutement éducatif a plutôt monté car on se demande comment elle a pu réussir le concours d'une école normale et l'ex-adjoint de l'adjoint de l'adjoint du rédacteur en chef du Nouvel Observateur Pierrot le baveur, surnom qui se passe de commentaire quand on l'a examiné de près, ne serait-ce qu'une fois.
Tous ces gens-là s'efforcent d'être plaisants, laborieusement il faut en convenir mais sans jamais y parvenir naturellement. Cela ne les empêche nullement de rire, entre eux bien sûr, des plates sottises qu'ils peuvent parvenir à éructer ! On prétend que le rire est communicatif, principe dont ils démontrent chaque jour à quel point il est faux. Je ne connais en effet rien de plus triste qu'un amateur de facéties qui est le seul à rire de ses propres blagues. C'est la règle dans cette émission de Ruquier qui essaye, lui-même, de sauver les meubles à coups de "vannes", comme on dit si improprement aujourd'hui dans ce milieu, soigneusement préparées à la lumière du cheminement de l'émission qu'il a lui même défini mais qui, comme disaient les Grecs, "sentent l'huile". Le tout est fort heureusement agrémenté de musiques et surtout de "pauses" (car on n'ose pas, ici comme ailleurs, prononcer le mot tabou "publicité"), qui permettent de suspendre, au moins pour un moment, les rires forcés et stupides de cette fine équipe.
Une question que je me suis souvent posée est la suivante : comment arrive-t-on à faire rire l'auditoire (car il semble y en avoir un) avec des propos si insipides et des plaisanteries si consternantes ? Mais pourquoi avoir un public (d'autant que l'émission n'est pas en direct et qu'on la rediffuse indéfiniment!), alors qu'il serait tellement plus simple d'avoir un technicien préposé à cette tâche et des enregistrements de rires, comme cela se fait couramment dans les télévisions nord-américaines.
J'en suis venu donc à penser que l'on doit diffuser, subrepticement dans les studios de radio et de télévision où sont enregistrées de telles émissions, un gaz hilarant. Cette méthode aurait toutefois un avantage, si l'on parvenait, en se glissant dans l'un ou l'autre de ces studios, à substituer au gaz hilarant qu'on utilise du gaz sarin qu' on pourrait désormais se procurer, à bon compte et en quantité, auprès d'un honnête commerçant moyen oriental, Monsieur Bachar al Assad qui dispose de stocks devenus inutiles ou, en tout cas, excessifs et serait sans doute de ce fait disposé à faire des prix sur ce produit. Cette méthode aurait l'avantage de débarrasser d'un seul coup à la fois d'un public imbécile mais, aussi et surtout, de ces sinistres chroniqueurs à visée prétendument drolatiques.
Je ne vous servirai pas, car Vingtras l'a déjà fait, le fameux propos de Molière selon lequel "C'est une étrange entreprise que celle de faire rire les honnêtes gens " ; je m'en garderai d'autant plus que, moins optimiste que lui, je doute fort qu'il y ait beaucoup d'"honnêtes gens" qui suivent de telles émissions et la seule mention d'Eric et Ramzy m'a permis d'éviter la rencontre fâcheuse du "Platane" dont Canal Plus a jugé bon d'orner la route de sa rentrée.
Post Scriptum : Dois-je préciser que je plaisante MOI !
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