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mardi 10 septembre 2013

"Qatar, perle ou perlouze d'avenir ?"


Comme je le fais souvent, avec des fortunes diverses, samedi dernier, le 7 septembre 2013 aux alentours de 16h45, j'ai zappé pour tomber, par hasard, sur France 5 où était diffusé, à 16 heures 35, un documentaire sur le Qatar au titre prometteur "Qatar, perle d'avenir".
Il m'est rapidement apparu qu'il s'agissait moins d'un véritable documentaire que d'un film publicitaire, de toute évidence financé par cet émirat qui, pour la circonstance, s'était offert les services d'un certain Pierre Brouwers que je ne connais pas par ailleurs et dont je ne sais pas si l'activité cinématographique consiste essentiellement dans ce genre de production. Ce prétendu documentaire était, en fait, sans équivoque quant à sa nature et ses fins. Je l'ai regardé jusqu'au bout à la fois pour voir le nom de son auteur et les conditions de sa production. Il m'est apparu que Monsieur Brouwers avait à peu près tout fait dans ce film ; j'espère qu'il lui a rapporté gros car il ne contribue guère à sa gloire.

Je n'ai pas tout vu puisque j'ai pris l'émission en marche, mais je dois dire qu'à la réflexion, le premier trait que j'en ai conservé en mémoire est que, dans la quarantaine de minutes que j'en ai vu (ce chef-d'œuvre dure 55 minutes), je ne crois pas avoir vu une seule femme. En cherchant ensuite les renseignements, le lendemain sur Internet, j'en ai aperçu une, sur une photo, mystérieusement et totalement voilée, mais qui apparemment n'est présente que dans la publicité et non dans la production elle-même.
Bref un univers exclusivement masculin peuplé de dishdashas, de dromadaires de faucons et de sabres ; on se demande un peu comment on peut espérer par là faire la promotion touristique de ce sinistre pays, car cela semble bien être là le but ultime d'un tel film.

Le choix du sport comme moyen majeur de faire connaître cet Etat est tout aussi insolite car, s'il est facile, on l'a constaté, d'acheter les votes des notables comme des Commissions de ceci ou de cela, faire du sport au Qatar est une toute autre affaire. On nous, a cette fin, montré par exemple une course cycliste-bidon, dont je ne sais pas où et quand elle se déroule car, dans un pays où il fait sans doute en moyenne 45° (j'allais dire à l'ombre mais il n'y en a pas !), l'activité sportive est forcément très limitée, sauf si elle se déroule en milieu marin! Je ne connais pas le Qatar, mais il m'est arrivé assez fréquemment d'aller à Djibouti et j'imagine que les conditions climatiques sont à peu près les mêmes en ces deux lieux, ce qui me laisse assez facilement imaginer les températures du premier à partir de celles du second (40° à 4 heures du matin et les oeufs cuits au soleil sur une tôle !).

En dehors de la promotion sportive (car vu leurs accoutrements habituels, les Qatari ne doivent guère s'adonner aux véritables activités sportives elles-mêmes), les seules activités sont la chasse au faucon et la course de dromadaires où le sport est fait par les animaux! Dans un cas comme dans l'autre, l'évolution de la civilisation locale (si l'on se risque à user d'un terme si clairement inapproprié) se marque par la modernisation inattendue de ces deux activités traditionnelles, qu'on verra sans doute un jour aux Jeux Olympiques du futur, si le Qatar y met le prix.

Pour les faucons, ils sont, semble-t-il, l'objet de soins beaucoup plus attentifs que les femmes ; non seulement on les soigne mais on va même jusqu'à leur remplacer les plumes, au cas ou l'une d'entre elles justifierait le recours à ce remède. Je ne sais pas s'il y a au Qatar des maternités mais il y a, en tout cas, des cliniques pour faucons. La chasse aux faucons est également modernisée puisque les faucons sont désormais équipés d'émetteurs qui permettent à leurs maîtres d'éviter de se fatiguer à rechercher le lieu où ils ont capturé leur proie ; ils peuvent les retrouver aisément grâce à cet émetteur dont l'oiseau est pourvu. En revanche si leurs plumes souffrent parfois, la vue des faucons ne semble jamais altérée, puisque on ne nous a pas montré ni de centres d'ophtalmologie pour faucons ni de faucons porteurs de lunettes !

La course traditionnelle de dromadaires, qui reste fort appréciée, a été aussi sensiblement modernisée dans la mesure où l'on a réussi à porter remède aux inégalités qu'introduisaient dans ces courses, les poids différents des enfants qui servaient de jokeys est aux dromadaires. Notons-le au passage : on a dans le recours à ces enfants jockeys, la preuve, indirecte certes mais sûre, qu'il y a bien des femmes au Qatar et qu'elles sont en mesure d'y faire, de temps en temps, des enfants. Les dromadaires de course sont désormais équipés de robots-jockeys électroniques, dont le poids est égal pour tous et qui permettent de les driver pendant la course ; ces robots sont même équipés pour donner éventuellement des coups de cravache sur l'ordre des propriétaires transmis par radio émetteur. Fascinant non ?

Mais le spectacle qui valait le plus le déplacement et vous aurait fait prendre sur le champ un billet pour Doha sur Air-Qatar était constitué par une danse qui était le bouquet final ; on voyait une bonne douzaine de Qatari, toujours en costume local, qui, munis de sabres étincelants (un chacun !), exécutaient sur place des mouvements lents à claires visées guerrières ; j'en ai vu autrefois des versions nettement plus paupérisées mais tout à fait identiques aux Comores.

Bref un spectacle global totalement désespérant et qui ne peut qu'encourager le touriste à fuir un pareil pays.

Il faut bien que je finisse par expliquer mon titre : "Le Qatar perle ou perlouze de l'avenir ?". On pardonnera à mon indignation de se montrer ici quelque peu irrespectueuse voire vulgaire en conservant en l'occurrence le mot "perle" mais en lui donnant le sens argotique et grossier qu'a son dérivé "perlouze" qu'affectionnait en particulier Jean Genet. Pour valider cette remarque et la légitimer, je vous donne, en prime, la définition du Trésor de la langue française qui reste mon recours habituel en pareille circonstance :
"Perle : REM. 1. Perlouse, perlouze, subst. fém., arg. Pet. Qui c'est qu'a lâché une perlouse? (LACASSAGNE, Arg. « milieu », 1928, p. 154). V. supra ex. de Genet."

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