La cuisine et la gastronomie française ont été récemment inscrites au patrimoine immatériel de l'Unesco ; reste désormais à y inscrire la cuisine électorale présidentielle dont la technique nouvelle est en train de s'élaborer sous nos yeux. Sous nos yeux mais à vrai dire aussi sous les yeux des autres puisque le Wall Street Journal se paye apparemment notre tête en intitulant son dernier article consacré à cette question : « Nicolas Le Pen ».
La formule ne manque pas de pertinence, puisque désormais la stratégie du candidat sortant consiste, semble-t-il, non plus à lancer des idées pour voir d'où souffle le vent (la technique du "doigt mouillé" déjà décrite) mais plutôt à faire son marché dans les idées et les propositions des autres candidats. Cette stratégie, "à sauts et gambades" comme disait Montaigne, conduit à une variété surprenante des discours et des orientations, faisant sauter du mariage gay à l'euthanasie en passant par la viande halal et conduisant même à se lancer soudain dans des diatribes contre des accords européens dont on avait affirmé la nécessité voire l'excellence avec force des années durant.
La cuisine électorale devient ainsi des plus éclectiques et il faut reconnaître que le cheminement des "idées" n'est pas simple à suivre.
Si l'on ajoute à cela les annonces contradictoires des instituts de sondages, l'électeur est complètement perdu.
En effet, à la différence des candidats qui reprennent les idées des autres pour les faire leurs, les sondeurs ont des stratégies inverses. A peine l'un d'entre eux a placé en tête le candidat sortant pour la première fois, en parvenant à réaliser, avec adresse et fort opportunément, « le croisement des courbes", comme on dit dans ce milieu (Sarkozy y est désormais un point et demi avant Hollande), que le même jour un sondeur concurrent place le premier quatre points derrière le second et détruit instantanément par là les espoirs que commençait à faire naître le premier sondage.
De toute façon, comme l'empan statistique prévisionnel (la formule est mienne!), selon les modes de calcul des instituts de sondage, est de QUATRE points (2 + 2), on ne risque rien, au point de vue scientifique et déontologique, en jonglant, à sa guise et/ou sur commande, au sein de cet empan!
Les "Guignols de l'Info" sur Canal+ ont réalisé, hier, pour la première fois depuis longtemps, un très joli numéro de parodie à la suite du premier sondage qui, pour la première fois, avait placé en tête Nicolas Sarkozy devant François Hollande. On y voyait réunies trois marionnettes censées représenter l'institut en cause et préparant les résultats du dit sondage. Je n'ai pas identifié la troisième marionnette mais la première était Laurence Parisot, la patronne du MEDEF (organisme du patronat pour les nobles lecteurs étrangers!), vice-présidente de l'institut en cause et Jean-Pierre Elkabbach qui dans son enthousiasme pro-gouvernemental entendait attribuer au candidat président sortant un score tel que Laurence Parisot était obligée de le modérer en lui promettant de faire mieux la fois suivante. Le troisième personnage était probablement l'un des dirigeants de cet institut, lui-même désigné, selon Wikipédia, par Laurence Parisot elle-même.
Autant dire que tous ces résultats et toute la cuisine elle-même sont, en fait,sans mystère!
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