On se souvient qu’un perfide paparazzo (ça existait déjà) ayant réussi à photographier Clemenceau en train de rire devant une tombe, ce dernier s’était vu dans la suite défini par ses ennemis comme « l’homme qui rit dans les cimetières » ! Voilà qui risque d’arriver, si normal qu’il soit, à notre président !
Comme notre diplomatie, avec ou sans grandes oreilles, avait appris qu’Obama serait accompagné de tous ses prédécesseurs encore en état de marche, la question s’est dramatiquement posée pour nous. Chirac, fatigué à tous points de vue, risquait en outre de provoquer un incident fâcheux avec une accorte pleureuse-chanteuse ; Giscard tient encore la route mais un arrêt à Bangui sur le chemin du retour, réveillerai sûrement de mauvais souvenirs et il n’y a plus guère de diamants sur le marché local. Restait Sarko qu’on se résigna à inviter et qui hélas accepta, mais refusa de voyager dans France ONE. Gros soupir de soulagement de François qui devait autant redouter la dizaine d’heures aux côtés de Sarko que la scène prévisible avec Valérie qui était du voyage !
Comme un malheur ne vient jamais seul ; le ciel, sans doute en prévision d’un arc-en-ciel ultérieur versa lui d’abondants larmes ; on ne parvint donc pas à remplir le stade de Soweto.
Ce stade avait été choisi, assez malencontreusement, à cause des fameuses émeutes de Soweto dont on a depuis longtemps oublié la cause, si on l’a toutefois jamais sue dans la presse française. Leur origine n'était en rien dans le nationalisme linguistique et en aucune façon, comme on le croit parfois, dans une exigence d'enseignement en langues africaines à l'école, Les manifestants refusaient l’afrikaan et réclamaient l'enseignement en anglais, car ils auraient été bien empêchés de s'accorder sur une seul des multiples langues africaines du pays et en particulier sur le choix entre les principales, bien entendu ennemies, le zoulou et le xhosa. Bref tout cela est oublié et il n'en reste qu'un grand stade qu'on espèrait bien remplir pour la cérémonie en honneur de Nelson Mandela, ce but n’ayant été que partiellement atteint en raison de la pluie persistante.
François Hollande s'est donc senti obligé d'inviter Nicolas Sarkozy à l'accompagner en Afrique du Sud. Erreur fatale, même s'il avait cru par là compenser sa grossièreté de mai 2012, quand il n'avait pas jugé bon d’accompagner son prédécesseur au-delà du haut du perron de l'Élysée lors de la première rencontre à la présidence de la République.
Sarkozy accepta, hélas, mais, fort heureusement, entendit voyager dans un avion différent. Sans doute heureux de s'épargner la compagnie de son prédécesseur, François le fut surtout de bénéficier de la présence de Valérie qui aurait sans doute très mal pris de se voir éloignée au profit de Sarko ! En revanche, à Soweto, notre président dut, pendant trois heures d'horloge, voisiner avec Nicolas Sarkozy, fort heureusement à sa gauche ! Comme il est difficile de faire la gueule à son voisin pendant trois heures, il dut inévitablement, à un moment ou à un autre, lui faire quelques bribes de conversation voire même plaisanter avec lui.
On se doute que ces échanges n'échappèrent pas aux photographes français ; si Clémenceau riait dans les cimetières, on ne manquera pas de dire que François Hollande blaguait avec son ennemi à l'enterrement de Nelson Mandela, ce qui n'est pas bien mieux.
Comble de malheur pour ce qu’on croyait devoir être le comble de l’adresse, la présidence de la République avait jugé adroit de faire une petite halte à Bangui sur le chemin du retour, pour saluer les troupes françaises qui venaient d'y débarquer en triomphatrice et partager ce moment de gloire. On espérait un triomph populaire comme naguère à Bamako. On croyait que c’était Grouchy et hélas ce fut Blucher !
Là aussi les choses s'arrangèrent au plus mal. Dans la nuit précédant la fiesta de Soweto, deux soldats français furent tués par un groupe de la Selaka ; ce pauvre François Hollande, qui sortait à peine des rites funéraires de l'ancien président de l'Afrique du Sud, dut ressortir son mouchoir et ranger son discours optimiste pour pleurer les deux soldats du 8e RIMA tués dans la nuit.
Autant dire que ce n'était pas joyeux, d'autant que cette expédition centrafricaine qu'on avait présentée comme la répétition de l'accueil triomphalde Bamako était en train de tourner au vinaigre, comme auraient pu le prévoir des esprits plus avertis ou mieux informés. La chose était pourtant d'autant plus prévisible qu'il est clair que les deux milliers de soldats de la « force africaine » qui sont sur place depuis un certain temps n'ont servi sans doute à rien, sinon à faire marcher quelque peu les bars et les bordels de la ville, à condition toutefois que les soldats de l'ONU aient touché effectivement une solde, ce qui est bien loin d’être sûr.
Bref nous ne sommes pas plus sortis de l'auberge centrafricaine que nous n'avons quitté la malienne.
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