vendredi 2 décembre 2011
Chancelière ?
Je devrais désormais éviter tout blog qui comporte des observations lexicographiques puisque je suis mis en examen pour avoir tenté d'expliquer à l’un des notables majeurs de notre régime quel était le véritable sens du mot « errement » pour lequel il avait, en revanche, un goût particulier. La chose a déplu et me voilà mis en examen pour diffamation.
Je suis toutefois un peu agacé par l'emploi qui est fait, depuis quelque temps, du mot « chancelière ». Je sais bien que les Québécois, sous la pression de leurs féministes, ont tenté de nous entraîner à la féminisation systématique des noms de métier ou de fonctions. Nul n'ose plus dire désormais (pas même celles qui, dans ces fonctions, étaient favorables à une telle solution) « Madame le ministre » ou « Madame le recteur » ! Dans le second cas, il est facile et inodore de féminiser le mot « recteur » par la simple adjonction d'un e final muet ; dans le cas du terme « ministre », les choses sont plus délicates ; je ne sais pas quel choix officiel a été fait et si l'on est allé jusqu'à la « ministresse » que je n’ai pas entendu à ce jour. Je ne sais pas davantage comment les choses se sont réglées « officiellement » entre nos cousins québécois et l'Académie française qui au départ était tout à fait réticente devant les réformes proposées par les enfants de nos anciens « arpents de neige ».
Je trouve, en revanche, tout à fait étonnant l'emploi actuel qui est fait du terme « chancelière » par la presse audiovisuelle française qui, de toute évidence, ne connaît pas le sens, ni même l’existence d’un mot « chancelière » en français. Ne consultez surtout pas sur ce mot Google qui n’en sait pas davantage. De toute évidence, comme le grand personnage que j'évoquais en commençant, on ne connaît pas l’existence du vrai terme « chancelière » que je me permets de rappeler ici à partir de ma source permanente et unique, le Trésor de la langue française :
« Chancelière : subst. fém..AMEUBL. Coussin ou, parfois, boîte, garnie intérieurement de fourrure et dont l'ouverture d'un seul côté permet de glisser les pieds pour les tenir au chaud. Devant elle, était une sorte de chancelière où l'autre pied restait douillettement enfoui (GIDE, Si le grain ne meurt, 1924, p. 529).
Prononc. et Orth. : [ ]. Pour [ ] cf. chancelier. Ds Ac. 1798-1932. Étymol. et Hist. 1762 (Ac.). Peut-être issu de chancelier* pour des raisons inconnues, cf. les emplois techn. de chambrière*, servante*. Fréq. abs. littér. : 19. »
Je pense que l'on croit, en la circonstance, s'autoriser de l'exemple allemand ou le mot « chancelier » ( Bundeskanzier) a effectivement une forme féminine « Bundeskanzierin » sans toutefois que cette forme, qui est, semble-t-il, utilisée par Angela Merkel elle-même, figure dans la constitution allemande. Comme je ne connais pas l'équivalent allemand du TLF s'il y en a un, je m’abstiendrai d'aller plus loin sur ce terrain. J’espère toutefois que Madame la chancelier ne me fera pas un procès en diffamation pour l’avoir implicitement comparée à un meuble !
Est-ce pour se mettre les pieds au chaud, afin de se prémunir contre les probables froidures d'une campagne électorale hivernale, que notre président a envoyé le texte de son discours à Madame Merkel avant de le prononcer à Toulon ? Ce n'était en tout cas pas très habile et ses adversaires ne se font déjà pas faute de lui reprocher d’être allé ainsi non pas à Canossa (on connaissait leurs différends sur nombre de points car ils n’en faisaient guère mystère !) mais à Berlin !
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