Messages les plus consultés

samedi 23 juin 2012

Chroniques marseillaises : le monte-charge politique


On nous a beaucoup parlé de l'ascenseur social qui, nous dit-on, aurait largement cessé de fonctionner dans notre pays. Rassurons-nous, il est en passe d'être remplacé, pour partie au moins, par le monte-charge politique, à Marseille du moins où il s'inscrit désormais dans les curiosités locales.

À ce propos une petite remarque sur les curiosités sociales du coin . Elle concerne la dernière grève à la SNCM qui visait à faire changer les conditions d'activité dans les sociétés de transport maritime autres que la SNCM mais opérant dans la même zone ; il y a déjà sans doute là une première curiosité dans l'histoire même du syndicalisme.

Il y en a toutefois une autre, de nature différente mais tout aussi originale. J'ai entendu en effet, sur une  radio sans doute locale, que sur les 120 grévistes déclarés comme tels à la SNCM, 90 étaient en arrêt pour maladie ! Comme disait un jour, dans la salle de sports que je fréquentais, en poussant un quintal de fonte, un robuste jeune homme qu'un de ses amis croyait au travail : "Mais je suis en maladie !".

Autre trait de moeurs marseillaises, la récente nomination de Karim Zeribi, importante figure de la vie locale, comme député européen. La chose vaut son pesant d'aïoli!

Si Monsieur Zeribi illustre parfaitement le fonctionnement de l'ascenseur social, puisque passé du statut de petit enfant algérien  immigré (devenu footballeur invalide) à celui de président de la Régie des transports marseillais par la grâce initiale de Jean-Pierre Chevènement et du PS, il peut aussi illustrer désormais de façon amusante le fonctionnement, parfois inattendu, du monte-charge politique.

Je vous épargnerai le récit complet de son existence que vous trouverez facilement et dans son détail dans Wikipedia et je me bornerai à l'épisode de son entrée au Parlement européen.

Lors des dernières élections européennes, Monsieur Zeribi, figure connue du socialisme marseillais, espérait fermement une position éligible sur la liste du PS. Patatras ! Voilà que Vincent Peillon, qui pensait lui se faire élire je ne sais plus où dans le Nord-Ouest de la France, s'est trouvé écarté de cette candidature pour je ne sais quelle raison et a été parachuté, contre son gré et dans sa grande colère, à Marseille, au grand dam de Karim Zeribi qui se trouvait auparavant en position éligible sur l'un des deux postes que le parti socialiste pouvait espérer dans la région.

Gros caprice de Vincent Peillon qui tape du pied mais finit par se résigner devant la quasi-certitude de son élection. Dès lors, il en est évidemment tout autrement pour le pauvre Karim Zeribi à qui cet "estranger" souffle, sous le nez, le poste de député européen qu'il convoitait et lui semblait promis.

Légitimement courroucé de ce mauvais procédé et si j'ose dire "vert" de rage, Monsieur Zeribi quitte alors le PS local pour se mettre dans le giron d'Europe Ecologie Les Verts.

Laissons le temps au temps comme disait l'autre. En mai 2012, les événements se précipitent : élection de François Hollande et voilà que le député européen Vincent Peillon se retrouve ministre de l'éducation nationale du gouvernement Ayrault. Il doit donc démissionner et naturellement, son poste à Strasbourg revient à la liste mise en place par le parti socialiste aux précédentes européennes ; libre du fait de la démission de son titulaire, le poste tombe dans l'escarcelle de Karim Zeribi, le suivant sur la liste du PS.

Le plus drôle de la chose est que ce dernier s'est déjà engagé à ce moment-là, sous la bannière d'EELV, dans la campagne de la législative de la septième circonscription de Marseille et qu'il y milite avec ardeur pour la défense de ses chers "Quartiers Nord" auquel il est si indéfectiblement attaché! Il fera un score honorable (21,5%), même s'il ne lui permet pas de se présenter au second tour.

C'est d'ailleurs fort heureux car le paradoxe est que, dans l'hypothèse où il aurait été élu, Karim Zeribi aurait dû choisir entre un poste à l'assemblée européenne et un fauteuil à l'assemblée nationale, donc entre Strasbourg et ses chers Quartiers Nord qui ne doivent pas tenir une grande place dans les débats européens. Rassurez-vous il explique tout à fait son choix, le présentant même comme nécessaire!

Les sages Romains disaient que la Roche tarpéienne était près du Capitole mais l'inverse est également vrai et, de ce fait, le Capitole n'est pas si loin du pied de la Roche réputée fatale si l'on est assez souple pour survivre à la chute.

Aucun commentaire: