La diffusion d'une partie des enregistrements de Mohamed Merah, dimanche soir sur TF1, a relégué au second plan la grande réunion sociale que le Président de la République et le gouvernement ont commencé à tenir ce matin même.
Pas de quoi fouetter un chat sur le principe, mais cette émission a mis en évidence et présenté des bizarreries que, curieusement, les médias ne sont ne sont guère employés à souligner et moins encore à chercher à expliquer.
J'ai entrevu hier l'émission de reportages d'abord, puis très vaguement dans la suite un extrait des entretiens de l'assassin de Toulouse avec la police. Sur le fond de ses propos, pas grand-chose à dire. Coincé dans son cagadou, il roulait des mécaniques, en clair appétit de martyre, faute d'une autre perspective. En revanche, j'ai été très étonné du ton d'une partie de cet enregistrement où il causait, sur le ton le plus amical avec un policier qu'il avait eu l'occasion de connaître déjà dans le passé ; le tout avec une grande familiarité. Voici d'ailleurs à peu près ce que lui disait à un moment le dit policier dont les propos m'ont tant frappé que je les ai retenus et notés aussitôt : "On reprend la discussion qu'on a eue en novembre, et là bon, sur de bonnes bases, quoi, avec un peu plus de sincérité. Parce que, là, bon, tu m'as bien roulé dans la farine, hein, avoue-le. T'as été bon sur ce coup-là."
Tout cela, y compris le tutoiement réciproque, me paraît tout de même un peu étonnant, même si la loi du genre est de créer un climat de confiance entre le terroriste et ceux qui sont chargés de lui faire la conversation.
De là à penser que notre Mérah était un agent double ou un illuminé qu'on essayait de manipuler à diverses fins, il n'y a pas loin. Le principe même de la conduite personnelle d'un agent double et son plus sûr moyen de survie est évidemment de tromper chacune des deux parties qui croient ou espèrent le manipuler. Qu'en est-il dans son cas, on ne le saura de toute façon jamais car, lui, il ne pourra écrire son livre et ce genre de révélation ne peut venir des services en cause.
On a beaucoup glosé sur cet entretien que j'ai personnellement trouvé sans grand intérêt, même si, comme prévu et souhaité, il a fait le buzz au-delà même du raisonnable. En revanche, j'ai été extrêmement choqué, non par les propos de Mohamed Mérah, mais par les illustrations dont on a orné ses propos car à la télévision, on ne pouvait se contenter du son et il fallait bien des images pensait-on. Or les images fournies étaient en contraste violent et même scandaleux avec les faits évoqués ; à plusieurs reprises, on y voyait Merah tout sourire, voire franchement rigolard ; il se livrait même à un moment à quelques joyeux entrechats devant la caméra. Je ne sais pas quelle étais l'intention exacte de ceux qui ont monté ce reportage, mais on peut dire qu'il y avait là véritablement, plus que dans les propos, de quoi choquer les familles des victimes.
Deux enquêtes sont, paraît-il, ouvertes car on soupçonne des fuites. Diable! Je trouve que le mot est très inadéquat car il est certain que des gens qui avaient accès à ces documents les ont purement et simplement vendus, certainement à un très un bon prix quand on voit le tarif auquel se négocient désormais deux ou trois photos merdiques prises avec un téléphone. Il est certain que ces enregistrements ont dû rapporter gros à celui qui a eu l'idée et l'occasion d'en faire ce petit commerce, peut-être avec des bénédictions venant de plus haut. Il ne devrait pas être très difficile de découvrir de qui il s'agit, même si les journalistes sont très sensibles aux problèmes de protection de leurs sources mais, en la circonstance, il ne s'agit en rien d'information mais purement et simplement d'un vol de documents.
Si les enregistrements ont pu être négociés à très bon prix, qu'en sera-t-il, dans la suite des films, que Mohamed Merah avait pris au cours des assassinats auxquels il se livrait ? Si le coup est en revanche plus politique que journalistique, l'intérêt d'une telle vente risque d'être bien moindre !
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