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vendredi 21 mars 2014

Le Fregoli de la Cinquième
Les « bâtards de Bordeaux » ne sont pas si méchants que ça avec notre ancien et aspirant futur-président ; lors du fameux non-lieu Bettencourt, comme je l'ai rappelé, on a fort opportunément oublié et sans que ce détail attire la moindre attention, que N. Sarkozy avait clairement affirmé, à je ne sais quel moment de l'affaire, qu'il n’était allé qu’une seule fois rendre visite à Mamie Zinzin, contre les témoignages des domestiques  que confirmaient des photos le faisant apparaître, en cette circonstance, dans différents costumes. C’est ce qui m'avait conduit à le baptiser, de façon sans doute un peu étrange pour bon nombre de lecteurs, le Fregoli de l’Oréal. Pour mettre un terme à l'incompréhension qui semblait s'être attachée à cette métaphore, je signale aux honorables lecteurs de ce blog que Leopoldo Fregoli, né le 2 juillet 1867 à Rome et mort le 26 novembre 1936 à Viareggio, est un acteur italien, ventriloque et musicien, réputé surtout pour ses multiples changements de costumes très rapides, qui ont d'ailleurs conduit son patronyme à devenir, pour certains dont je suis, un nom commun soulignant ce talent particulier.
Nicolas Sarkozy restera peut-être dans l'histoire de France comme le Fregoli de la Cinquième (c’est de la République, évidemment que je parle) et cela d’autant qu’au transformisme illustré lors de sa visite à Madame Bettencourt (loin de moi l’idée impie de contester une décision de justice), il a ajouté à sa panoplie fregolienne quelques transformations plus ou moins réussies .
Ainsi, celle de sportif accompli sur son vélo ou en jogging (fût-ce au prix d'un malaise vagal bien explicable, quand on est plus habitué aux places arrière des berlines de luxe qu’aux parcours sportifs) sans compter celle, plus hardie et risquée encore (quand on fait un mètre soixante sans les talons) de rouleur de mécaniques en  invitant « à descendre » s’ils l’osent, un musculeux ouvrier ou un robuste pêcheur au verbe un peu décapant tenus à bonne distance par le service d’ordre !
Cet épisode héroïco-comique m’a fait pensé d’emblée et souvent dans la suite a l’altercation entre Voltaire et le Chevalier de Rohan qui valut au premier un séjour à la Bastille (Monsieur Nicolas s’est montré plus magnanime) et une rossée dont Voltaire a laissé une brève, mais savoureuse évocation : « Je fus assassiné par le brave chevalier de Rohan assisté de six coupe-jarrets derrière lesquels il était hardiment posté ». Notre Président,  qui avait au moins le double ou le triple de gardes du corps, risquait encore moins à que Monsieur de Rohan à fanfaronner ainsi!
Délaissant, le rôle de Calimero qu'il avait tenu jusqu'à présent, face au complot quasi universel des socialistes et des magistrats (nos services spéciaux ont fort opportunément, dit-on, empêché Khadafi de se joindre aux comploteurs avec quelques biscuits à l’appui !), voilà notre Nicolas qui manie désormais le fouet de la satire et se prend pour l’Horace de Neuilly et le Juvénal du Cap Nègre réunis (vous avez de très peu échappé à Archiloque, mais à l’UMP on aurait cru à une injure) !). Peu habitué à ces tâches obscures de plumitifs , notre héros a, de toute évidence, eu recours à quelques nègres pour rédiger sa « riposte », parue dans le Figaro, provoquant sans doute, une fois de plus, quelques soubresauts du pauvre barbier de Séville qui ne pouvait guère prévoir dans quel caniveau éditorial sa si belle définition de la censure finirait un jour ! Sans grand mérite, je crois reconnaître, dans l'allusion au film « La vie des autres », la plume, pas toujours heureuse (cf. le discours de Dakar) de son nègre d’antan car, même s'il a quelque peu évolué et même lu (paraît-il) depuis son mariage avec Carla, Nicolas a plutôt tendance, comme l'autre, à sortir son revolver quand il entend le mot « culture » (on se souvient de l’affaire de la Princesse de Clèves !).
Monsieur Guaino  était d'ailleurs, en première ligne ce matin, et l'identité totale de sa défense, y compris l’allusion au film (qui a tout de même près de dix ans et n’a pas eu le succès des « Ch’tis »), avec le texte de l'ex-président confirme cette hypothèse.
Le fonds ne valait pas mieux que la forme. L'accumulation des accusations est donnée comme une preuve irréfutable de leur inanité comme du complot, alors qu'on oublie simplement de dire que si ces affaires se sont accumulées ainsi, des années durant, c'est moins par la malignité des magistrats que par l’impossibilité d'agir plus tôt, le personnage central et commun de toutes les affaires étant protégé par son statut présidentiel.
Voir Nicolas Sarkozy et ses partisans présenter sans rire le précédent gouvernement comme s'étant abstenu, avec la plus grande rigueur et un farouche républicanisme, de toute intervention dans les milieux de la justice, a quelque chose de comique, quand on sait, comme tout le monde, que tous les régimes, de droite comme de gauche, ont, tous et toujours, pratiqué l’interventionnisme.
Toutefois, dans le cas de Sarkozy, ce discours  a quelque chose de profondément hilarant, quand on se souvient des propos tenus par Messieurs Buisson et Goudart, enregistrés en douce par Buisson lui-même au retour d’un repas pris avec e couple présidentiel à la Lanterne, ce qui empêche d'imaginer un subterfuge. Ils ont tressé là une corde pour les pendre ! On se souvient que le Garde des sceaux de l'époque, Michel Mercier qui n'était pas un interlocuteur assez docile et un empêcheur assez fort d'absoudre en rond a fait les frais de conversation, parfaitement claire. P. Buisson regrettait de ne pas avoir eu la tête de Mercier et l’échange était le suivant sur les raisons de l’exclure du gouvernement : -- M. Goudart : « Parce qu'il est trop gentil avec les magistrats ? ».  -- M. Buisson : « Non, mais il est totalement calamiteux ». 

En faut-il davantage ?

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