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jeudi 6 mars 2014

« Ce qui va sans dire encore mieux en le disant !»


Cette formule qu'on prête, comme tant d’autres, à Talleyrand (qui se disait « de Périgord », alors que cette peste de Cambacérès disait qu’au fond il ne se trompait que d’une lettre puisqu’il était bien « du » Périgord) est toujours d'actualité et il est  hélas très souvent nécessaire d'y recourir.

Dans le billet que j'ai publié dans le titre, franco-québécois, était, je crois, à peu près  : « Ça va faire une maudite poutine !», je faisais part de mon scepticisme à propos de la crise russo-ukrainienne et de mon impression (j'ai failli dire de ma certitude) que toute l'affaire de l'Ukraine était largement, du côté russe surtout,  un jeu  de poker menteur fondé sur les rodomontades et les gesticulations des uns et des autres, dans lesquelles l'Europe n'était ,comme toujours, que la figurante, en attendant qu’elle mette la main à la poche. Face aux pauvres 900 millions, dont on parlait à Bruxelles, Poutine avait sorti ses 13 milliards ou plutôt, sans les sortir et les mettre sur la table, les avait évoqués pour faire monter les enchères de notre côté. Cela n'a pas tardé et voilà que, dès le lendemain, nous faisons un tapis de 13 milliards face aux mythiques 13 milliards de Monsieur Poutine et aux grotesques défilés de pseudo-bidasses cagoulés organisés en Crimée, pour le Mardi-Gras, nul n’ayant d'ailleurs  rendu hommage à l'humour de Poutine dans le choix de cette date !

Tout cela était écrit dans le ciel ; la partie était inégale entre un expert en la matière et l'Europe qui, au poker, à l'expérience et le métier d‘un enfant de six ans.

Manque de chance, les feuilletons journalistiques ne se suivent pas vraiment mais plutôt se chevauchent, ce qui rend leur péremption encore plus rapide ! L’affaire Patrick Buisson est une autre occasion dans laquelle s'étale la naïveté du public quand elle n'est pas aussi celle des politiques.
Fort heureusement pour moi, j'ai fort peu fréquenté les sombnres corridors du pouvoir, mais les quelques brèves incursions que j'y ai faites m’ont toujours convaincu que les « fuites », en particulier en direction du Canard enchaîné, le seul vecteur médiatique possible, sont TOUJOURS organisées, non par les ennemis de ceux qui en sont victimes (comme le croient les ignorants et les imbéciles), mais par leurs amis. J’ai, en  mémoire, une scène de ce genre dans le bureau d’un ministre à propos d’une « fuite » de ce genre ; plus récemment les affaires horlogères de Julien Dray et l’affaire (initialement conjugale) de Cahuzac ont eu la même histoire.

Voilà qu'on découvre soudain la perfidie de P. Buisson qui a, en outre, le physique de l’emploi ! Pas besoin d'être grand clerc pour percevoir la fourberie et la dangerosité du bonhomme vu sa carrière et sa mine. La vraie leçon de toute cette histoire est ailleurs. Seule, l'ambition frénétique et le penchant à la trahison d'un homme (notre ancien président de la République en la circonstance) ont été susceptibles de l'aveugler à ce point sur un Buisson !

Que Patrick Buisson trahisse Sarkozy (ce dernier étant tout aussi propre et prête à l’inverse !) n'a évidemment rien d'étonnant ; il a même sans doute eu l'intention de le faire dès le départ, puisque tout indique que, dès qu'il est entré dans l'entourage du Président, il a commencé les enregistrements qui n'étaient évidemment pas destinés à l'écriture d'un livre, mais à une utilisation éventuelle soit contre le président lui-même (« le nain » comme il le nommait lui-même paraît-il dans ces cassettes, ce qui montre bien évidemment l'affection qu’il lui portait), soit plus vraisemblablement contre tel ou tel autre membre de son entourage et, comme on dit « à toutes fins utiles ».

C’est là ce que P. Buisson aurait répondu à son fils unique, avec lequel il est brouillé et qui pourrait bien être serait le serpent que PB aurait réchauffé dans son sein selon le schéma classique ; peu importe, il est évident que le traître est vraisemblablement un proche comme toujours et que ce n'est pas la sympathie qu'inspirent, de façon naturelle, la binette et les pratiques de Monsieur Patrick Buisson qui ont pu l'arrêter. Cet aspect est d'ailleurs le moins intéressant, car je ne connais guère de plus sûr moyen de se gagner la haine de quiconque que de l'obliger et de lui rendre service ! Je suis confus d’en être réduit à écrire de telles platitudes .
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Cela dit, Monsieur Patrick Buisson ne manque pas de fers au feu et il est certain qu’il peut faire un carton éditorial et financier en publiant, aussi rapidement possible, le verbatim de ses précieux et truculents enregistrements ; en tout cas, ce n'est pas la gauche et Monsieur Jacques Attali qui pourront le lui reprocher.

Cela dit, j'ai entendu, à plusieurs reprises, de vertueux UMP ou assimilés (style Raffarin dont j’espère qu’il ne s’est pas fait trop de mal en tombant de sa chaise !) évoquer le caractère inouï de tels procédés. La chose n'a rien d'étonnant chez les politiques français qui, comme tous leurs compatriotes, ignorent aussi bien l'histoire que la géographie. Jacques Foccart en effet fut accusé, dans une affaire autrement grave, par le Canard Enchaîné (déjà et toujours lui !) d’avoir fait espionner le Général de Gaulle, grâce à la fameuse « commode » de l’Elysée, découverte durant l’interim d’A. Poher.

Pour l’édification de Monsieur Raffarin et de quelques autres, voici, d'après Wikipedia, le résumé de la procédure engagée par J. Foccart lui-même : « En première page du Canard enchaîné du 4 juin 1969, on peut lire en surbandeau l’Histoire de la commode à Foccart qui renvoie en page 2, où il est question de la découverte de la dite commode. Le journal ajoute : Cette découverte a eu l'avantage de mettre en évidence un petit fait qui en dit long : les propos tenus dans les propres bureaux de De Gaulle étaient écoutés et enregistrés par Foccart. Foccart porte plainte contre le journal relevant entre autres les insinuations malveillantes lancées contre lui de manière épisodique, le présentant comme le chef d'une police parallèle, ou l'Éminence grise du chef de l'État…. Durant dix semaines, le Canard instruira à l'avance le procès de M. Foccart, avec une page d'enquête et d'échos chaque semaine. Fin janvier 1970, le tribunal de grande instance de Paris se déclara incompétent et condamne Foccart aux dépens, au motif que le Canard avait attaqué Foccart homme public, dans sa fonction et que c'était Foccart privé qui s'estimait diffamé. Le 4 novembre 1970, la cour d'appel déboute Foccart. ».

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