Pauvre monsieur de Villepin ! Voilà un homme à qui rien n’aura
été épargné ! On le compromet odieusement dans les combines de l'affaire
Clearstream, la justice mettant fort heureusement un terme heureux à ces
calomnies. Marie-Laure, son épouse depuis des décennies, le plaque pour aller
sculpter les « cocos fesses » seychellois devenus (depuis et de
ce fait ?) hors de prix ! Le parti qu'il avait créé pour conquérir la
Présidence de la République qui lui était clairement due, échoue piteusement et
ce ne sont pas les chèques du Qatar, en récompense de ses précieuses consultations,
qui vont le consoler de ce revers. Comble de malheur, voilà que la perfide Albion,
par le biais du Telegraph, l’accuse
d'avoir touché 100 000 euros du Quai d'Orsay pour une journée de travail qui d’ailleurs, s’agissant d’un tel homme n’a,
en réalité, pas de prix !
Ce ne sont que des menteries et fariboles et le Quai d'Orsay n’a
manqué de le faire savoir, de la bouche même son porte-parole, qui a précisé
que la somme était moindre et qu'en outre la procédure était parfaitement
régulière. Il faut donc apporter ici quelques précisions et corriger l'effet
pour éviter que ne soit injustement ternies les images de notre diplomatie et
de son plus pétulant représentant qui l’a si souvent incarnée, et avec tant de
talent, dans les instances internationales. Commençons par le plus simple et
nous verrons le reste ensuite.
Dominique Galouzeau de Villepin (que mon étourderie naturelle et
une pointe de sénilité m’ont souvent fait nommer, par erreur, Galopin de
Villouzeau) né en 1953, devait encore, pour atteindre le terme d’une carrière
exemplaire, une demi-douzaine d'années de travail au Quai d'Orsay, dont il est
où est censé être un fonctionnaire. Deux formules s'offraient donc à lui pour
parvenir à une retraite bien méritée, comme vous le verrez.
Première hypothèse : il pouvait, d'une part, accomplir
quelques années de service ; encore fallait-il, en pareil cas, trouver un
bureau et un travail à un homme qui fut le ministre des affaires étrangères !
Par ailleurs encore fallait-il aussi aussi qu'il désirât lui-même travailler
dans de modestes fonctions qu'il a délaissées depuis fort longtemps.
Autre hypothèse ! Bon sang mais c'est bien sûr ! Puis s'il
désirait lui-même travailler dans le privé, dans la société de consultation
qu'il a lui-même créée sous le nom flatteur et riche de promesses de Villepin International
qui a réalisé 1,7 millions d'euros de chiffre d'affaires en 2013 et 162 200 €
de bénéfices pour la même année (voilà qui inclinait évidemment à faire peu de
cas de la modeste rémunération qu'il aurait pu percevoir au Quai , même avec le
titre de « ministre plénipotentiaire hors classe), le mieux était donc de lui
ouvrir le bénéfice d'une mesure dont on a hélas peu parlé dans les médias
français, mais qui se révèle en pareil cas fort opportune. En effet, comme le
gouvernement œuvre sans cesse, modestement et dans l'ombre, au bien-être et à
l'avenir de ses plus hauts fonctionnaires un décret du 8 juin 2011 (signé par
le Premier Ministre François Fillon, Alain Juppé (Quai d'Orsay) et François
Baroin (Bercy ; mon facétieux Dragon avait suggéré ici « Merci »
au lieu de « Bercy !) a prévu un dispositif d'anticipation de la fin
d'activité qui permet aux cadres supérieurs de cette administration (Ne
mélangeons pas les torchons et les serviettes) de quitter définitivement les
cadres de l'administration entre 58 et 62 ans.
Comme le dit (assez improprement d'ailleurs, mais le Quai
d'Orsay n'est pas le ministère de la francophonie), ils peuvent le faire « en
contrepartie » d'une somme correspondant à un mois de rémunération par année
d'anticipation de leur départ à la retraite. Comment on mégote pas à ce niveau,
Monsieur de Villepin pouvait donc prétendre, au titre de l’anticipation de son
départ, au maximum de six à huit mois, à un an de salaire soit environ 70 000 €
et non pas 100 000, comme le prétendait la perfide presse anglaise, mais, comme
on dit chez nous « quand on aime on ne compte pas » !
Un esprit simple ne peut manquer, à ce stade, de faire quelques remarques et d’abord de se poser le problème
des annuités ouvrant le droit, non pas à « retraite » mais à
« pension », car dans la fonction publique française, il n'existe pas
de retraite, mais seulement des pensions, pour lesquelles est établie une
inscription sur le Grand livre de la dette publique de la France.
Par ailleurs, la carrière d’un haut fonctionnaire de ce calibre
est évidemment un mystère ; on ne peut s'empêcher de calculer que Monsieur
de Villepin, entré au Quai d'Orsay en 1980, a été mise en disponibilité dès
1993 (après avoir occupé des postes de conseillers aux États-Unis et en Inde),
la poursuite de sa brillante carrière dans la fonction publique restant quelque
peu mystérieuse. Certes, grâce à l'action et à la prévoyance conjointes de
Messieurs Fillon, Juppé et Baroin, il peut négocier un départ prématuré à la
retraite, ce qui est, en outre, une anomalie pour ce qui concerne la fonction
publique où n’existe nulle indemnité de ce type mais ne rétablit pas pour
autant les annuités manquantes.
Quant à la carrière même de Dominique de Villepin dans la
fonction publique entre 1993 et 2013, elle est assez mal connue même si l'on
découvre maintenant qu'il aurait exercé (depuis une date mal établie et pour
une durée assez mal connue également) la « présidence du conseil
d'administration de l'Office national des forêts », fonction qui paraît
assez éloignée de ses intérêts comme de ses compétences, si diverses qu’elles
soient.
Passons sur ces détails mesquins ! Non seulement Monsieur de
Villepin a bénéficié de façon assez floue du décret du 8 juin 2011, mais il a
en outre eu la chance de ne pas oublier de demander, en septembre 2013, à bénéficier
de ce régime et a reçu l'agrément de son administration, le ministre actuel
Laurent Fabius n'ayant pas eu à connaître de cette démarche demeurée purement
administrative selon le Quai. Comme ce dispositif a cessé d'être applicable au
31 décembre 2013, Dominique a dû sentir le vent du boulet de la
forclusion !
Reste la question de la journée de travail pour 70 000 € qui a
suscité des commentaires de la presse anglo-saxonne d'abord, française ensuite.
Bien entendu comme toujours cette présentation des faits est inexacte, sinon
malveillante. Il est probable que le Quai (comme disent Monsieur de Norpois et
les vrais initiés !) a fait bénéficier Monsieur de Villepin d'une mesure qui
est souvent appliquée (dans l'éducation nationale en particulier), mais tout autrement
et dans un esprit très différent, à des
fonctionnaires qui, étant arrivés au terme de leur droit à congé pour une
maladie de longue durée, passerait dans un système impliquant une forte
réduction de salaire. Dans ces cas-là, ces fonctionnaires, en reprenant leur
service normal, fût-ce pour une seule journée et de façon tout à fait théorique, se voient
ouvrir de nouveaux droits à congés pour un autre congé de longue durée.
Il en a sans doute été de même pour Monsieur de Villepin qui est
en parfaite santé et ne manque pas de ressources ! Cette prétendue journée
de travail (bien entendu factice) n'a sans doute été qu'une forme de trucage du
compteur de ses annuités de retraite, pour lui permette de valider ses longues
absences antérieures (en fait depuis 1993) et de bénéficier par anticipation de
la pension à laquelle il aspire. Il est donc tout à fait évident qu'il n'a pas
eu à passer une journée au Quai d'Orsay ou, pire, au 244 du boulevard
Saint-Germain, à faire des cocottes en papier, l'œil sur la pendule, en
attendant de pouvoir bénéficier de cette mesure !
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