La
dernière grand messe sur les langues et le multilinguisme en Europe à laquelle
j'ai pris part était les "Etats généraux du multilinguisme", qui se
sont tenus à Paris, dans le grand amphithéâtre de la Sorbonne, le 26 septembre
2008. Il n'y manquait naturellement pas la fameuse Tour de Babel de Brueghel !
On
se souvient, en effet, que le multilinguisme serait né de la volonté de Dieu de
diviser les hommes qui parlaient auparavant une seule et même langue et qui
avaient entamé une construction qui devait monter jusqu’au ciel, cette fameuse
tour de Babel. Dans sa crainte de les voir unis pour contrecarrer ses propres
desseins, Dieu leur imposa des langues différentes : «Confondons leur langage
pour qu'ils ne s'entendent plus les uns les autres » (Genèse XI, 1-9).
L’amusant de la chose (ce Dieu , quoique par principe omniscient, est décidément bien imprévoyant) tient à ce que, dans la suite, un autre miracle lui fut nécessaire pour que la diversité des langues, que Dieu avait pourtant voulue, n’empêchât pas la diffusion du message divin par les apôtres. Comme Dieu n’en est pas à un miracle près, ce fut la Pentecôte ! Les apôtres « furent tous remplis du St Esprit et se mirent à parler des langues étrangères selon que l’Esprit leur donnait de s’exprimer »(AC ; 2,1).
Dieu ne s’intéressant pas spécialement à l’Union Européenne et son représentant personnel, notre Président, étant à cette époque très occupé par la crise financière américaine, on n’a pas jugé nécessaire de faire descendre les indispensables flammes sur la tête de chacun des 495 millions d’Européens; force nous fut donc, en la circonstance, de faire de notre mieux avec le multilinguisme et de nous en accommoder tant bien que mal.
L’amusant de la chose (ce Dieu , quoique par principe omniscient, est décidément bien imprévoyant) tient à ce que, dans la suite, un autre miracle lui fut nécessaire pour que la diversité des langues, que Dieu avait pourtant voulue, n’empêchât pas la diffusion du message divin par les apôtres. Comme Dieu n’en est pas à un miracle près, ce fut la Pentecôte ! Les apôtres « furent tous remplis du St Esprit et se mirent à parler des langues étrangères selon que l’Esprit leur donnait de s’exprimer »(AC ; 2,1).
Dieu ne s’intéressant pas spécialement à l’Union Européenne et son représentant personnel, notre Président, étant à cette époque très occupé par la crise financière américaine, on n’a pas jugé nécessaire de faire descendre les indispensables flammes sur la tête de chacun des 495 millions d’Européens; force nous fut donc, en la circonstance, de faire de notre mieux avec le multilinguisme et de nous en accommoder tant bien que mal.
Le
choix du terme « multilinguisme » est lui-même une prudence, sans doute
involontaire, car on use aussi mais à tort comme synonyme, du terme «
plurilinguisme », qui est plus inquiétant, puisque « plures » est, en latin, le comparatif de supériorité de « multi ». « Plures » veut donc dire « plus nombreux » et non pas « plusieurs »,
comme le croient les mauvais latinistes !
Cela
dit, au sein même de l’Union Européenne, certains esprits pervers ne verraient
pas d’un mauvais œil qu’on passât du « multilinguisme » au « plurilinguisme »,
puisque, durant ces Etats généraux, Monsieur Michel Angel Martinez Martinez,
Vice-Président du Parlement européen, mentionnait que l’UE, qui a déjà à faire
avec ses 23 langues « officielles » de l'époque (puisque chaque citoyen
européen doit avoir accès à tous les documents officiels dans sa langue),
pourrait se retrouver avec 62 langues, si l’on ajoute les langues «
co-officielles » en faveur de la reconnaissance desquelles existe une
revendication. On ne sait guère d’ailleurs où s’arrêterait ce mouvement,
puisque, si les Catalans peuvent faire valoir qu’il y a, en tout cas, selon
leurs propres chiffres, autant de catalanophones que de néerlandophones, on est
plus embarrassé lorsqu’il s’agit de l’auvergnat ou du savoyard !
Un
mot au passage sur la fameuse "Charte européenne des langues régionales ou
minoritaires" de 1992 ; elle est, à l'origine une initiative du Conseil;
de l'Europe et même, pour être plus précis et selon les meilleures sources, du
"lobby austro-hongrois", ce que confirme d'ailleurs certains de ses
articles.
Les
langues concernées par cette convention sont les langues traditionnellement
employées par les ressortissants des groupes ethniques d'une partie d'un État
européen. Elle s'applique donc essentiellement aux langues parlées par une
minorité linguistique de l'Etat en cause: Les langues "régionales" sont
parlées dans des zones déterminées de cet Etat, comme le corse en Corse, tandis
que les langues "minoritaires" sont utilisées, sans territorialisation
précise, par des minorités linguistiques importantes implantées dans l'Etat, ce
qui est le cas, par exemple, de l'allemand au Danemark. En revanche, les
langues des immigrants récents venus d'États non européens (comme l'arabe ou le
turc), ainsi que les "dialectes" locaux ou "patois" sont
exclus.
De telles dispositions confirment le rôle du "lobby austro-hongrois" dans un tel texte, qui pose par ailleurs des problèmes socio-démographiques mais surtout linguistiques. en effet, sur ce dernier plan, rien ne distingue une "langue minoritaire" d'un dialecte ou d'un patois et on connaît la formule si pertinente selon laquelle un patois ou un dialecte avec une armée et une marine!
Tout cela est naturellement assez discutable, comme l’a montré la suite de l’affaire, en France en particulier. Lionel Jospin a été tenté un moment de la signer en choisissant les 39 articles indispensables parmi les 98 qu'elle offre. Toutefois si la France a donné un accord théorique préalable à ce choix en mai 1999, depuis cette date, elle n'a pas ratifié la Charte ; elle ne s'est donc pas engagée à appliquer ces dispositions et ne figure pas parmi les Etats signataires.
Certains
politiques et même des institutions ont cru ingénieux de tenter d’ébranler par
là le vieux concept d’Etat-Nation (jugé antagonique de certaines conceptions de
l’Europe) et de favoriser l’émergence d’une « citoyenneté européenne », en
jouant les langues régionales contre les langues nationales ou, si l’on
préfère, les langues « co-officielles » » contre les langues officielles.
Ces Etats généraux de septembre 2008 ont été surtout marqués par deux ou trois tendances lourdes ou faits majeurs qui, sans avoir été voulus, ont illustré quelques aspects majeurs des problèmes linguistiques européens.
D’abord, la volonté pour ne pas dire l’exigence, que les intervenants s’expriment dans leur langue, a fait que qu'un très performant (et sans doute très coûteux) système de traductions simultanées en huit langues a dû être mis en place. En dehors des langues de l’Europe de l’Ouest, les seules langues de traduction étaient le polonais et le roumain. Cinq langues romanes contre trois langues germaniques ou slaves, les PECO et le "lobby austro-hongrois" auraient eu là quelques raisons de se plaindre !
Rares exceptions au principe qui voulait qu’on parlât dans la langue du pays qu’on représentait. La plus heureuse fut le brillant ministre de la culture du Portugal, José Antonio Pinto Ribeiro. Ce dernier s’est plaint que, contrairement à la présentation idyllique du multilinguisme européen, il lui était souvent impossible de s’exprimer en portugais. Il a d’ailleurs, en la circonstance, parlé en français, puisque, comme il l’a confié en commençant, sa langue première, est curieusement, l’allemand. Bel exemple de cette « citoyenneté européenne » dont on rêve. Autre exception moins notable, Catherine Velissaris, qui avait parlé en français et non en grec, sans toutefois juger utile de préciser qu’elle est elle-même d’origine française !
L’absence quasi totale de l’anglais, dont chacun sait qu’il domine largement dans les institutions européennes, a été le trait le plus marquant de cette manifestation ; les seuls intervenants à user de cette langue étant, pour des raisons différentes mais sans intérêt ici, des Allemands ! Un seul intervenant anglophone, de langue première anglaise, sur une trentaine d’orateurs prévus, cela sentait fort l’ostracisme larvé et me rappelait ces clubs de tennis du Sud, où parmi les membres, tous blancs, on note toujours un noir, pour prévenir toute suspicion de racisme !
Le plus comique a été la sempiternelle question du coût du « multilinguisme institutionnel » européen. Il a été traité par Michel Angel Martinez Martinez, Vice-Président du Parlement européen, et donc bien placé, en principe, pour connaître la vérité des chiffres qui ne sont pas toujours faciles à se procurer et même à établir, surtout quand on veut avoir des précisions sur les modes de calcul. Pour lui, les choses sont simples. L’interprétation et la traduction coûtent à l’UE 100 millions d’euros par an. Il a même précisé, pour être concret, 2,2 euros par citoyen de l’Europe, soit à peine plus que le prix d’un café en Espagne !
Ce chiffre a été repris dans la suite sans que nul ne semble s’en étonner et moins encore le contester. Deux constats pour conclure.
Ces Etats généraux de septembre 2008 ont été surtout marqués par deux ou trois tendances lourdes ou faits majeurs qui, sans avoir été voulus, ont illustré quelques aspects majeurs des problèmes linguistiques européens.
D’abord, la volonté pour ne pas dire l’exigence, que les intervenants s’expriment dans leur langue, a fait que qu'un très performant (et sans doute très coûteux) système de traductions simultanées en huit langues a dû être mis en place. En dehors des langues de l’Europe de l’Ouest, les seules langues de traduction étaient le polonais et le roumain. Cinq langues romanes contre trois langues germaniques ou slaves, les PECO et le "lobby austro-hongrois" auraient eu là quelques raisons de se plaindre !
Rares exceptions au principe qui voulait qu’on parlât dans la langue du pays qu’on représentait. La plus heureuse fut le brillant ministre de la culture du Portugal, José Antonio Pinto Ribeiro. Ce dernier s’est plaint que, contrairement à la présentation idyllique du multilinguisme européen, il lui était souvent impossible de s’exprimer en portugais. Il a d’ailleurs, en la circonstance, parlé en français, puisque, comme il l’a confié en commençant, sa langue première, est curieusement, l’allemand. Bel exemple de cette « citoyenneté européenne » dont on rêve. Autre exception moins notable, Catherine Velissaris, qui avait parlé en français et non en grec, sans toutefois juger utile de préciser qu’elle est elle-même d’origine française !
L’absence quasi totale de l’anglais, dont chacun sait qu’il domine largement dans les institutions européennes, a été le trait le plus marquant de cette manifestation ; les seuls intervenants à user de cette langue étant, pour des raisons différentes mais sans intérêt ici, des Allemands ! Un seul intervenant anglophone, de langue première anglaise, sur une trentaine d’orateurs prévus, cela sentait fort l’ostracisme larvé et me rappelait ces clubs de tennis du Sud, où parmi les membres, tous blancs, on note toujours un noir, pour prévenir toute suspicion de racisme !
Le plus comique a été la sempiternelle question du coût du « multilinguisme institutionnel » européen. Il a été traité par Michel Angel Martinez Martinez, Vice-Président du Parlement européen, et donc bien placé, en principe, pour connaître la vérité des chiffres qui ne sont pas toujours faciles à se procurer et même à établir, surtout quand on veut avoir des précisions sur les modes de calcul. Pour lui, les choses sont simples. L’interprétation et la traduction coûtent à l’UE 100 millions d’euros par an. Il a même précisé, pour être concret, 2,2 euros par citoyen de l’Europe, soit à peine plus que le prix d’un café en Espagne !
Ce chiffre a été repris dans la suite sans que nul ne semble s’en étonner et moins encore le contester. Deux constats pour conclure.
Le bistrot
espagnol où Monsieur Michel Angel Martinez Martinez, Vice-Président du
Parlement européen, va boire son petit noir doit connaître le nom et la
situation de son client pour le lui faire payer 2,2 euros, quand le prix
courant est de 1,5 euro!
Passons
sur ce détail! On a pu constater toutefois à écouter ce même Monsieur Michel
Angel Martinez Martinez, Vice-Président du Parlement européen, qu’à l’heure de
la calculatrice électronique, plus personne ne sait compter mentalement. En
effet, si l’on admet, et comment faire autrement, que la population européenne
est d’environ 500 millions (très précisément mais ce chiffre, est sans doute
dépassé, 494.296.878 habitants), à raison de 2,2 euros par habitant, le coût
est non pas de CENT millions comme il le croit, mais de MILLE millions d’euros,
c’est-à-dire un MILLIARD d’euros!
N’est-il pas un peu imprudent pour l’Europe de confier des fonctions si éminentes à des gens qui ne savent même pas faire une multiplication si élémentaire ? Plus grave encore, comment une assemblée, si distinguée et en un lieu si illustre, a-t-elle pu entendre, sans réagir et sans que nul n’intervienne, pareille incongruité ?
N’est-il pas un peu imprudent pour l’Europe de confier des fonctions si éminentes à des gens qui ne savent même pas faire une multiplication si élémentaire ? Plus grave encore, comment une assemblée, si distinguée et en un lieu si illustre, a-t-elle pu entendre, sans réagir et sans que nul n’intervienne, pareille incongruité ?
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