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jeudi 18 juillet 2013

Commission Cahuzac : le spectacle est permanent mais aucune sortie n'est définitive


Le fonctionnement de la commission parlementaire consacrée à l'affaire Cahuzac est tout différent de celui des bons vieux cinémas permanents d'autrefois, où l'on précisait, à l'entrée, que si le spectacle était permanent, toute sortie était définitive.
Rien de tel ici, ce qui est quelque peu étonnant voire contradictoire, car, alors que les invités à témoigner dans cette commission le font sous serment, ils peuvent être sollicités pour une nouvelle audition, ce qui semble avoir pour but de les amener à modifier ou à corriger leurs premières déclarations.

Le point le plus remarquable dans le fonctionnement de cette commission est que son rapporteur et son président, issus de deux bords politiques différents, commencent à se prendre publiquement aux cheveux, alors qu'ils avaient semblé, jusqu'à présent, travailler dans la plus parfaite harmonie. La dernière déclaration du président De Courson montre qu'il est persuadé que François Hollande était au courant depuis le mois de décembre 2012, alors que son rapporteur Alain Claeys (faut-il préciser qu'il appartient au parti socialiste) est d'un avis contraire. Si ces deux autorités se crèpent le chignon ainsi et pour ça, il est à craindre que le bel ordonnancement de la chevelure de Monsieur de Courson s'en trouve fâcheusement bouleversé. Rassurez-vous les maquilleuses de France Télévision y mettront en bon ordre avant le début des séances.

Il faut dire que ce sont là les deux principaux héros des écrans (avec la personnalité interrogée par la commission), au cours de chacune des séances, car les plans larges y sont interdits dans la mesure où les membres de cette commission ne font pas preuve d'un zèle excessif dans la participation et qu'on n'y compte le plus souvent qu'un maigre tiers des quarante élus qui la composent. Les prises de vue qu'on y réalise rappellent beaucoup celles de l'Assemblée nationale, où le mercredi, quand à la télévision est la, les rares députés en séance se rassemblent frileusement autour de l'orateur du moment pour être saisis par les objectifs des caméras. Il en est de même à la commission Cahuzac et l'on évite ainsi le spectacle, un peu affligeant pour notre démocratie, qu'on avait donné dans les premières séances, où les quelques élus présents étaient clairsemés dans la salle et, pour la plupart, occupés à faire leur courrier ou à envoyer textos et SMS. Informés qu'ils sont désormais du programme établi par le président et son rapporteur, seuls ceux qui figurent effectivement sur l'agenda présidentiel prennent la peine de se rendre à la séance où ils auront à poser une question et donc à avoir les honneurs du petit écran.

Il faut bien dire d'ailleurs qu'on perd désormais très souvent de vue l'affaire elle-même et que, du côté de la droite surtout, évidemment, l'enquête elle-même disparaît au profit de la mise en cause de tel ou tel aspect de la politique du gouvernement qui n'a rien à voir avec elle.

Il est heureux que cette commission avance dans ses travaux à un train de sénateur (ce qui est bien normal !) car quoiqu'on y dépose sous serment, en évitant au mieux les questions gênantes, certains seront amenés à y revenir pour y faire de nouvelles déclarations qui, elles-mêmes, pourraient conduire à reconvoquer à nouveau tel ou tel témoin dont les précédentes déclarations auraient amené la réapparition de personnes déjà interrogées. On risque fort de n'en pas sortir, mais peut-être est-ce préférable ainsi ?

Sans rappeler les faits, disons que l'affaire Cahuzac s'est située, en gros, dans le premier trimestre de l'année 2013, entre le premier article de Mediapart qui en a marqué le début, le 4 décembre 2012, et les aveux inattendus de Jérôme Cahuzac le 2 avril 2013 ; il avait fort heureusement évité de les faire la veille car on n'aurait pas manqué alors de les prendre pour un poisson d'avril !

La question, qui fait débat désormais, n'est pas celle de savoir exactement quand le Président de la République et le Premier Ministre ont été informés et surtout y ont cru ; ils sont les seuls à le savoir vraiment et on ne peut guère imaginer que l'article de Mediapart du début décembre 2012 n'ait pas retenu l'attention des plus hautes autorités de l'État, même s'ils n'étaient pas en mesure de juger réellement de sa pertinence. On sait toutefois aussi, maintenant que les langues se sont déliées, que beaucoup de gens, au PS, étaient au courant des activités hautement rémunératrices du docteur Cahuzac. Elles n'étaient nullement dans les implants capillaires et les moumoutes mais, à une toute autre échelle, dans les ventes illicites et les pots de vin liés aux permis pour les scanners et les IRM

La question actuelle est de savoir si Cahuzac a été mis au courant de la procédure d'enquête lancée à son endroit début janvier 2013. Or, la déclaration de Moscovici a été sur ce point sans ambiguïté ; Cahuzac était, avec Moscovici lui-même, le Président de la République et le Premier Ministre le 16 janvier 2013 à la sortie du conseil des ministres et il a été informé, à ce moment-là, de la procédure engagée auprès de la Suisse, alors qu'il a prétendu, devant la commission, ne jamais avoir été mis au courant.

Comme cette information lui a été donnée à la sortie du conseil des ministres, on peut aisément deviner qu'il plaidera l'omission par malentendu et prétendra qu'il ne s'agissait pas d'une réunion mais simplement d'une conversation entre deux portes, après le conseil des ministres. Je veux bien confirmer par écrit cette hypothèse ; il est donc un peu inutile de réentendre à nouveau Jérôme Cahuzac sur ce point puisque je fournis ici l'explication qu'il avancera.

Si, au contraire on poursuit la procédure, ne faudra-t-il pas alors convoquer à nouveau devant la commission le ministre Moscovici, pour qu'il précise exactement le lieu et les conditions dans lesquelles cette information a été communiquée à Jérôme Cahuzac et ainsi de suite.

Tout cela coûte, Monsieur de Courson, contentez-vous de ma lettre et de mon hypothèse.

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