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jeudi 10 mars 2011

« Les bonnes recettes de Tatie Christine ».

Une fois de plus, ce vendredi matin 10 mars 2011, notre ministre Christine Lagarde (familièrement dite « Tatie Christine » selon l'usage de nos bons vieux livres de cuisine, depuis Tante Marie) a délaissé ses fourneaux économiques de Bercy pour nous livrer les secrets de sa cuisine d’économie d'énergie.

Elle semble pourtant avoir délaissé sa précédente recommandation de l'usage du vélocipède qu'elle conseillait naguère encore pour ménager le super et le gasoil, mais elle reprend néanmoins quelques-unes de ces bonnes vieilles recettes qui ont fait de notre cuisine la meilleure du monde comme l’UNESCO l’a enfin reconnu.

La première et la plus simple est celle de la mise en concurrence des fournisseurs de carburants. Naturellement, en ministre responsable et patriote ne saurait recommander d'aller faire le plein dans les pays étrangers limitrophes qui, Dieu seul sait comment, fournissent l'essence à de meilleurs prix. Si vous habitez Armentières, il vous est difficile de gagner l'Espagne, de même que si vous êtes à Bayonne, si avantageux que soient les tarifs du carburant en Belgique ou au Luxembourg, mieux vaut n’y pas trop songer.

En revanche dans l'espace hexagonal il faut absolument vous renseigner et ne pas acheter, aveuglément et sottement, votre essence dans les stations proches de votre domicile ; la chose est évidemment commode mais elle peut se révéler économiquement malheureuse. Fort heureusement, vous disposez désormais d'un site où le gouvernement vous donne tous les renseignements indispensables.

Il s’agit de prix-carburants.gouv.fr où, à 9 heures 30 ce jour, je suis allé, par curiosité, faire un tour pour y découvrir que son usage est fort incommode (avec des rubriques inaccessibles remplies de mentions « erreur » ou mieux encore « warning », alors que je croyais l’usage de l’anglais interdit dans les textes administratifs français).

Dès lors, et si plus malin que moi, vous arrivez à vous informer, vous pouvez envisager de vous rendre dans des stations où vous trouverez le super 95 où le gasoil à des prix inférieurs de plusieurs centimes dans certains cas. Si vous prenez en compte l'aspect touristique de votre déplacement et même éventuellement, si vous ne consommez pas trop d'essence, la possibilité de faire ce plein si économique pendant vos vacances, vous pouvez très bien aller passer vos congés tout près de cette si attrayante et économique station-service, en Charente-Maritime, où se trouve, me semble-t-il, la station de France qui vend le moins cher le super 95. Le risque est évidemment que ce plein si économique que vous aurez fait en ce lieu charentais béni soit épuisé par votre trajet de retour chez vous. Cela vous obligera donc inévitablement à faire, derechef, le parcours inverse pour refaire un plein que votre retour épuisera à nouveau, inévitablement, de la même façon. C'est là une sorte de version moderne et automobile du mythe de Sisyphe. Néanmoins vous aurez la satisfaction de vous être inscrit dans la formule favorite de Tatie Christine qui est : « Acheter le plus malin possible ! ».

Il m'a semblé déceler dans les recettes de Tatie Christine une faille épistémologique que j'hésite à qualifier de contradiction interne voire de « double bind ». Elle nous a affirmé en effet, confirmant la question de la journaliste, que le prix de l'essence est libre en France. Toutefois, dans le même mouvement, la ministre nous a précisé que des meutes de contrôleurs étaient lancées sur la piste des pompistes indélicats qui pratiquent des prix trop élevés. J'avoue ne pas bien comprendre comment on peut sanctionner des prix dans la mesure où ces prix sont réputés libres. Va comprendre Charles! Mais enfin tout s grand chef de cuisine a, comme elle, ses petits secrets qu'il se (la)garde de nous révéler.

Il y a une solution très simple et immédiate mais Tatie Lagarde l'a écartée d'emblée. Elle serait de baisser les taxes que sont la TIPP (25 milliards annuels de recette) mais aussi la TVA puisqu'elles forment de très loin, à elles deux, la majeure partie du prix de l'essence à la pompe. Je reviendrai sur cette question pour avoir entendu hier des spécialistes des questions pétrolières affirmer que l'essence devrait être en gros vendue aux alentours d'un euro le litre et non pas, comme on constate chaque jour, à 1,50 € ou davantage, alors qu’elle coûte, en gros, deux fois moins aux Etats-Unis par exemple.

Tatie Lagarde, parodiant Guillaume d’Orange après Tante Marie, nous a sorti la fameuse formule « Je maintiendrai ». Il me semblait pourtant que cette taxe est perçue sur les volumes, et non sur le prix de vente du produit. C'est le super qui supporte la TIPP la plus élevée : 0,6069 euro pour un litre de sans plomb en 2008. Or, on avait créé la TCP/IP précisément pour maintenir les prix des carburants à des niveaux raisonnables en cas d'augmentation du prix du pétrole.

Mais je m'écarte des bonnes recettes de Tatie Christine. Proche de la France d'en bas en dépit des apparences et soucieuse du moindre détail, Tatie Christine nous livre quelques recettes d'une grande simplicité et l'application facile auquel on ne songe pas nécessairement toujours. Ainsi conseille-t-elle au bon peuple des automobilistes français de gonfler davantage leurs pneus, d’éviter de conduire de « manière saccadée » (j’avoue ne pas avoir compris en quoi consiste ce mode de conduite), de rouler plus lentement (ça j’y avais pensé) et surtout de couper le moteur longtemps avant de s'arrêter ! Quoique Tatie Christine se soit limitée à ces quatre conseils, on serait tenté d'en rajouter quelques-uns, parfois un peu difficiles à mettre en oeuvre, comme, par exemple, d'installer des voiles sur le toit de sa voiture ou, plus simple et plus radical encore, de laisser sa voiture au garage et de rester chez soi.

Une piste plus intéressante et sans doute plus efficace, que Tatie Christine n’a fait qu’évoquer en conclusion et en passant (encore un des chers zeugmas). Christine Lagarde nous a appris, en effet, que le gouvernement va s'intéresser enfin à la manière dont les prix sont formés et aux marges qui sont celles de chacun des intervenants. La question est d'importance et on l’a gardée de ce fait pour la bonne bouche, car on pourrait s'étonner que Christine et notre gouvernement n'y aient pas songé plus tôt. Il est vrai que sans doute, comme pour toute question que l'on veut noyer, depuis Clémenceau, la démarche consistera à créer une commission. Or, dans les circonstances présentes, vu l'augmentation du prix de l'essence, les membres de cette commission auront la plus grande difficulté à se déplacer pour se réunir, d'autant que tous le font toujours dans de puissantes voitures, dont les pneus sont souvent mal gonflés et dont les chauffeurs, à la conduite rendue fatalement saccadée par la vitesse, ne songent guère à ralentir leurs véhicules puisqu'il leur faut bien suivre le train d’enfer des motards qui leur ouvrent la route.

On peut se référer à mon post d'hier pour voir qu’une fois encore, Tatie Christine s'est muée en fin de discours en Tatie Coué et nous a annoncé des lendemains qui chantent, même si, pour le moment, les accents du présent sont plutôt moroses.

1 commentaire:

Anonyme a dit…

L'expression comité Théodule est une authentique création gaullienne : « L'essentiel pour moi, ce n'est pas ce que peuvent penser le comité Gustave, le comité Théodule ou le comité Hippolyte, c'est ce que veut le pays. J'ai conscience de l'avoir discerné depuis vingt-cinq ans...3 CLEMENCEAU avait parlé des commissions de gaulle a préféré les comités!
olivier