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mercredi 9 mars 2011

Les conseils et les exemples.

Le grand et perspicace La Rochefoucauld disait : « Les vieillards aiment à donner de bons conseils pour se consoler de ne plus pouvoir donner de mauvais exemples ».

En matière d'économie comme de politique, nous-autres Français, qui sommes, vous le savez comme moi, les meilleurs, nous nous entendons à donner à la fois de bons conseils et de mauvais exemples, ce qui montre notre immense supériorité sur les vieillards qu'évoquait La Rochefoucauld.

Il faut dire qu'on nous confie parfois des rôles, dans l’UE, au G8 ou au G20, qui nous encouragent dans cette voie et nous amènent à nous ériger en exemples dans des domaines où nous devrions, au contraire, chercher un trou de souris pour tenter de nous y cacher.

Ainsi sommes-nous amenés à nous citer en exemples en matière d'économie et j'entendais Mme Christine Lagarde le faire encore, sans rire, tout récemment en face de journalistes dont on ne sait pas s’ils sont ignorants ou complices, à moins qu’ils ne soient les deux.

Le problème est que la comparaison qu'elle établissait alors ne se faisait pas avec la Grèce ou l'Irlande, États auprès desquels nous pouvons faire encore, en apparence du moins, assez bonne figure, mais avec l'Allemagne qui est, en matière industrielle et économique, le must. Que ce soit pour le chômage (qui a baissé de 2 % en RFA, alors qu'il a plutôt augmenté chez nous), pour le commerce et l'industrie (l'excédent commercial allemand est colossal alors que notre déficit est gigantesque) ou encore pour les salaires. Sur ce dernier point, on constate en Allemagne une augmentation par des primes, de 3000 à 6000 euros dans l’automobile, alors que le docte JC Trichet affirme publiquement qu’augmenter les salaires serait « la pire des choses ». Ce propos va sans doute apporter soulagement et consolation aux smicards français ; Môssieu Trichet, directeur de la BCE, lui, est un exemple, pour eux comme pour nous. Est-ce qu’il se plaint lui avec ses pauvres 350.000 euros annuels auxquels s'ajoutent , à vrai dire et fort heureusement, des indemnités de logement et de représentation?

Tenter, comme notre Madame Lagarde, d'établir une comparaison entre la France et l'Allemagne est une démarche assurément hardie mais fondamentalement absurde, si elle n’est pas fallacieuse.

Mais laissons l'économie sur laquelle chacun d'entre nous sait que les gouvernements ne peuvent pas grand-chose, puisqu'ils ont les mains liées tant par les banques que par la spéculation. En revanche, pour la politique et tout particulièrement pour la morale politique, nous pensons être incontestablement les meilleurs du monde, au moins sur le plan des conseils à défaut de l'être sur celui des exemples, car notre démocratie apparaît de plus en plus branlante à bien des égards, le plus grand scandale étant celui de la liberté d’expression qui fut longtemps un privilège français.

Je ne reviendrai pas sur les événements du Maghreb qui sont très loin d'être achevés, on le voit chaque jour, et dont je ne suis pas sûr que nos politiques aient véritablement déterminé la nature (plusieurs ne la soupçonnaient guère au moment de leurs vacances d'hiver) et, moins encore, l'évolution ultérieure.

Au milieu du concert unanime d'applaudissements pour la marche de ces Etats vers la démocratie, aucun des experts qui entourent nos dirigeants ne semble avoir pressenti un instant que les Tunisiens, par exemple, au lieu de songer à se complaire enfin dans cette démocratie en marche, s'embarqueraient en masse dans des raffiots pour gagner Lampedusa, Vintimille et au-delà la France, sans songer un instant à jouir de la démocratie enfin instaurée sous leurs palmiers.

De la même façon, nous nous manquons pas de dénoncer dans la justice mexicaine des comportements scandaleux qui tiennent surtout à la condamnation d’une Française dont on déplore avec la plus grande vigueur le sort incontestablement malheureux, sans avoir pourtant la moindre certitude réelle en ce qui concerne son innocence. La justice mexicaine, selon nous, a le tort majeur de condamner à 60 ans de prison une innocente ! Que ne suit-elle notre bel exemple français, nous qui nous employons actuellement, dans un procès passablement ridicule qui occupe tous nos médias, à faire considérer comme « PRESUME innocent » un accusé qui, lui-même, a déjà, de toute évidence et publiquement, reconnu sa culpabilité, en acceptant de compenser ou de faire compenser les dommages subis du fait de ses agissements illégaux !

Les grands Etats comme la France peuvent donc, à la différence des vieillards de la Rochefoucauld, délivrer de bons conseils tout en donnant de mauvais exemples.

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