Effrayante émission « C dans l'air » d'Yves Calvi sur France5, ce vendredi 10 juin 2011, consacrée aux médicaments. Le sujet était apparemment assez anodin, en tout cas pour quelqu'un d'aussi mal informé que moi sur cette question. En revanche excellent plateau d’invités, une fois n’est pas coutume, avec Philippe Even, Marc Girard et François Chast ; Calvi y avait adjoint une dame qui devait passer dans le couloir en cherchant son chemin car on n'a jamais bien su ce qu'elle venait faire là et surtout qui elle était car son nom ne figure même pas dans la liste des invités que j'ai pris la peine de rechercher sur Internet. Un ami m'informe que la dame en cause était de l'Agence française du médicament. Tout s'explique et en particulier son silence gêné!
Je dois dire que cela nous change un peu des sempiternelles émissions politiques sur les candidats à la présidentielle dont Calvi nous réserve à peu près 300 resucées d’ici l'élection proprement dite, avec les éternels Christophe Barbier, Roland Cayrol et Pascal Perrineau. Leur absence, à elle seule, créait chez le téléspectateur des dispositions favorables à l'écoute car, pour une fois, on avait affaire à des gens qui de toute évidence savaient de quoi ils parlaient et, d'autre part, n'avaient pas totalement leur langue dans leur poche.
Je vous la fais courte comme toujours, le bilan est effrayant. Je savais, comme tout le monde, que nous ne fabriquons à peu près plus rien, des téléviseurs au presse-purées en passant par les jouets et les autos, mais je croyais au moins que nous fabriquions encore nos médicaments et les principes actifs qui entrent dans leur composition. Eh bien non ! Tout nous vient désormais de Chine comme les ordinateurs et les tee-shirts. La chose est un peu effrayante au plan industriel mais elle l'est plus encore au plan pharmacologique et même médical.
En effet non contents de produire leurs principes actifs (ceux des médocs, pas des Asiates qui certes n’en manquent pas !), les Chinois fabriquent aussi les médicaments eux-mêmes et cela dans des conditions qui ne sont pas tout à fait les nôtres puisque leurs normes de sécurité et de contrôle de ces fabrications ne sont pas du tout celles de l'Europe. Autant dire qu'une partie, mal appréciable mais certaine, des médicaments que nous consommons n'est pas en conformité avec les règles de composition et de fabrication qui devraient être en vigueur.
Si j'ai bien suivi, le plus bel exemple de la chose est l'héparine. Un simple coup d’œil dans Wikipédia me permet de faire le savant ce qui est, un instant, nécessaire. L’héparine est une substance ayant des propriétés anticoagulantes extrêmement puissantes, ce qui la fait utiliser contre la thrombose. Elle est administrée par voie intraveineuse ou sous-cutanée, selon la dose à administrer. Elle active une protéine plasmatique : l'antithrombine. « L'héparine est extraite industriellement d'intestin de porc (Europe) ou de poumon de bœuf. Les abats d'autres mammifères d'élevage peuvent être utilisés comme sources secondaires ».
Cet article est assez inexact, dans sa partie finale du moins car, à en croire les spécialistes présents, ce médicament doit être désormais fabriqué exclusivement à partir du porc et c’est là tout le problème. Pour vous résumer les choses, pour faire une dose d'héparine injectable, il faut un cochon. Comme le faisait remarquer avec humour l’un des participants « dans le cochon tout est bon » surtout et avant tout pour l'héparine ! Je me demande, en passant, mais en passant seulement, si l'héparine est utilisée dans les pays musulmans. Peut-être est-ce compatible avec les exigences du Coran dans la mesure où ceux qui reçoivent ce traitement ne savent pas qu'on leur injecte du porc ! Pour en revenir à l'héparine et aux cochons, la Chine élève à environ 1 milliard de porcs ; toutefois, il peut arriver que les énormes besoins en héparine et en cochons fassent que l'on n’ait pas assez de cochons pour fabriquer les quantités nécessaires de ce médicament. Les industriels, chinois et peu scrupuleux, usent alors d'os d'autres animaux, comme les moutons ou les vaches qui contiennent un principe dont la formule chimique est très voisine de celle de l'héparine, ce qui fait qu'à l'analyse on ne peut pas aisément faire la différence.
Le drame potentiel est qu’on sait désormais (et Wikipédia est fautif sur ce point précis et essentiel) que l'héparine doit être fabriquée exclusivement à partir de porcs car si on la fabrique à partir d'autres animaux, comme le mouton ou la vache, on peut transmettre des maladies (tremblade du mouton ou vache folle) qui risquent de donner, à terme, à ceux qui reçoivent le traitement, la maladie de Kreutzfeld Jacob. Le problème est qu'on ne le saura que dans de nombreuses années et que ces industriels criminels peuvent, en attendant, continuer leur coupable industrie qui fait peser des menaces fatales sur une foule de malades.
Ce cas est certes un peu limite, mais rien ne prouve que les médicaments que nous achetons ont été préparés selon les règles et qu'un pourcentage d'entre eux, si faible soit-il, n'a peut-être pas l'efficacité qu'on leur suppose, sans parler de risques éventuels liés à ces défauts de fabrication.
Le pire de tous et que si la fabrication en Chine des chemises et des T-shirts a sans doute contribué, au moins dans certains circuits « low cost », à faire baisser le prix de ces articles, il n'en est rien pour les médicaments et l'exportation de la fabrication des médicaments en Chine n'a en rien entraîné la baisse de leurs prix. J'espère que vous est bien installé pour entendre la suite. Selon l'avis unanime des experts présents dans l'émission, en France le prix de vente d'un médicament fabriqué en Chine dans les conditions décrites ci-dessus est, par rapport à son coût de fabrication, dans un rapport qui va de 10 ou 20 à 100 voire, pour certains d'entre eux, à 500. Autant dire que l'industrie pharmaceutique peut vivre sur le grand pied que nous constatons chaque jour. Je laisse de côté le problème du coût de la recherche pour la mise au point de ces médicaments. Selon un propos que Philip Even répète souvent, d’une part la France, depuis 10 ou 15 ans, ne fait plus de recherche sur la mise au point de médicaments nouveaux, se contentant de ceux qui existent déjà ou de médicaments de seconde zone qui ne nécessitent pas d'études approfondies. Quant aux tests et aux expériences, on va les faire en général, à moindres coûts et sans grands risques, en Europe centrale ou de l'Est ou en Afrique. Quant à la mise au point et à la recherche sur les médicaments nouveaux, elle est infiniment moins coûteuse que l’industrie pharmaceutique veut nous le faire croire ; on parle volontiers en centaines de millions de dollars alors qu'il ne s'agit, dans la plupart des cas, que de dizaines !
Le problème est que, dans le système social qui est le nôtre, les gigantesques profits de l'industrie pharmaceutique (je devrais plutôt dire le COMMERCE industriel pharmaceutique puisque cette prétendue industrie ne fabrique plus rien en réalité) qui, après tout, pourraient être regardés comme faisant marcher un commerce privé, sont en réalité des IMPOTS puisque une partie très importante des médicaments achetés est remboursée par la sécurité sociale, donc payée, en fait, par l’Etat et donc par nos contributions. Nous n’enrichissons donc par là que ce commerce pseudo-industriel pharmaceutique qui, en plus, est souvent suisse ou allemand !
Au sortir d'une telle émission, on est un peu partagé, pour ce qui me concerne du moins. Certes l’heure passée avec ces spécialistes est moralement un peu éprouvante mais, d'un autre côté, on a échappé, un moment, à la logorrhée insipide et répétitive sur les futures élections présidentielles car nous n’aurons sans doute pas la chance d'avoir, tous les mois, une affaire Strauss-Kahn pour mettre un peu de piment dans la sauce politique.
La route de l’aspirine est coupée puisque nous n’en fabriquons plus un seul cachet en Europe et que les Chinois peuvent donc nous condamner, du jour au lendemain, au mal de tête. En revanche, la route vers les comptes en banque des commerçants industriels pharmaceutiques est largement ouverte et des plus fréquentées !
dimanche 12 juin 2011
La route de l’aspirine est coupée
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1 commentaire:
UBU est roi, dés les années 90 nous avons commencé à vivre sous le joug qualitatif et sécuritaire
L'hotellerie, la Santé, la production dans son ensemble avec des lois drastiques ont tissé les mailles de l'excellence
Que croyez vous? tout ce petit monde est allé délocaliser dans l'émergence tout les composants technologiques jusqu'à devenir dépendant d'une émergence en apprentissage niveau maternelle de la sécurité
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