J'ai déjà souvent abordé le problème de l'aide au développement, généralement dans une perspective critique, pour y avoir été maintes fois confronté sur le terrain.
J'ai écrit, il y a quelques années, un texte que j'avais intitulé, d'une façon pas forcément très claire "Des éléphants blancs aux éléphants roses". Par ce rapprochement singulier entre divers genres de proboscidés, je voulais faire allusion à certains projets de développement ; les uns sont, par l'étrangeté et l’inadaptation de l'idée sur laquelle ils reposent dans les contextes où on les met en place, ce que l'on appelle « des éléphants blancs ». Je rangerai par exemple dans cette catégorie un projet de développement d'implantation d'élevage industriel de porcs en Israël ou, mieux encore, en Arabie Saoudite. Quant aux éléphants roses, ce sont des rêves si étranges qu'on ne peut guère les comparer qu'à ces créatures roses qui, dit-on, hantent l'imagination des malades atteints de delirium tremens.
Quelques textes que j'ai rédigés depuis le séisme survenu en Haïti le 12 janvier 2010 traitent de ce problème. On n'y a, là bas, que l'embarras du choix puisque, paraît-il, il y aurait un bon millier d'ONG qui y interviennent. De ce fait, il doit y avoir, par la force des choses, un certain nombre d'éléphants blancs et sans doute aussi quelques éléphants roses. Entre, à mon sens, dans cette catégorie, l'idée (française) d'y faire intervenir pour traiter les Haïtiens traumatisés par la catastrophe, des psychologues français, espèce surabondante dans un pays qui forme, chaque année à lui seul, autant de psychologues que les 26 autres pays de la communauté européenne. Cette circonstance explique que, désormais, le moindre incident survenu en France suscite illico la mise en place d'une "cellule psychologique", ce qui ne suffit apparemment pas toutefois à donner de l'emploi aux hordes de psychologues dont nous disposons. C'est sans doute ce qui a conduit, un moment, à imaginer d'en envoyer quelques dizaines en Haïti, sans évidemment prendre conscience que ces spécialistes francophones (mais Haïti n'est-il pas aussi un pays "francophone" ?) seraient dans l'impossibilité de communiquer avec leurs patients haïtiens qui, dans leur totalité, sont exclusivement créolophones et monolingues.
Ce problème de l'aide au développement est revenu brutalement dans l'actualité, l'affaire DSK commençant à perdre de son intérêt avant que, ce matin même, les propos inattendus de Mme Diallo ne la relance. Le sujet du jour était la famine dans la Corne de l'Afrique qui avait suscité, pour ce lundi 25 juillet, une réunion exceptionnelle de la FAO (« Food and Alimentation Organisation ») à Rome puisque c'est dans cette ville que siège cette honorable institution de l’ONU. On a donc réuni, dans la ville éternelle, une cohorte de ce que Graham Hancock appelle si heureusement "The Lords of Poverty".
Face à ce genre et à ce thème de réunion, je suis toujours stupéfait de voir que nul participant ou commentateur n'ait jamais eu l'idée, pourtant bien simple, dans la réflexion sur une catastrophe de cette ampleur et de cette nature, de suggérer que les participants à une telle réunion internationale renoncent, pour une fois, à titre symbolique, aux per diem et aux indemnités reçus pour y prendre part. Les sommes perçues, en la circonstance par chaque participant pour un jour équivalent en effet à des DECENNIES du revenu des malheureux dont les participants sont censés s'occuper. Vu le train de vie de ces institutions et le coût de telles réunions, cela ne réglerait sans doute pas le problème de la famine en Somalie, mais cela constituerait un petit point de départ, hautement symbolique, pour les centaines de millions qu'on aura sans doute à y investir. Cela démontrerait surtout que ces fonctionnaires ou "experts" internationaux peuvent, pour une fois, faire un petit geste en direction des causes qu'ils prétendent défendre et qui les font vivre sur un si grand pied.
Je suis trop long. La suite demain.
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