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samedi 8 décembre 2012

Affaire Mittal ; "On nous ment!"


« On nous ment, on nous ment,
C’est du vent, on nous ballade
On nous vend que des salades
Y’en a marre des boniments »

 On a tant d'occasions de reprendre ce refrain des Fabulous Troubadours (je l'ai déjà fait, me semble-t-il, au cours de cette même année) qu'on pourrait le mettre en exergue de la plupart des posts que je publie dans ce blog.

 L'économie est devenue la reine des batailles journalistiques et il n'est pas de radio ni de chaîne de télé qui n'ait désormais ses économistes, chargés d'apporter la bonne parole. Il y a désormais dans les universités (parisiennes bien sûr) et dans diverses officines financières ou apparentées des gens qui sont, surtout et d'abord, "économistes à la télé". Je ne sais plus quel jour de la semaine dernière, je crois avoir vu au moins trois fois, dans des émissions différentes, Monsieur Philippe Dessertine (que j'appréciais assez, avant d'en avoir une indigestion audiovisuelle) ; je me demande un peu quand il trouve le temps de donner quelques enseignements et d'avoir quelque activité professionnelle à Paris X, quand je songe qu'il officie également Libération et à Europe1. Même remarque pour Elie Cohen qui est à la télé quand il n'est pas chez le coiffeur. Il est désormais impossible d'aborder quelque sujet que ce soit sans nous servir à l'écran deux ou trois économistes.
Ne parlons pas de France-Télévision qui a recruté, sans doute à prix d'or en dépit de sa situation financière et de la pléthore inouïe de son personnel, un prétendu économiste qu'on nous inflige désormais à chaque occasion comme une sorte de Pythie devenue chauve à force de réflexion. La cerise sur le gâteau m'a été offerte hier lorsque, regardant par hasard le "grand journal" de Denisot (qui sont de pire en pire de démagogie jeuniste, Denisot et son GJ), j'y ai vu une figure tutélaire nouvelle (pour moi du moins), un certain Nicolas Bouzou, réputé également économiste mais qui est, en fait et surtout, le patron d'un vague centre d'analyse économiste et financière, ce qui donne une coloration un peu particulière et clairement publicitaire à ses propos (« Vous êtes orfèvre Monsieur Josse ! ») ; si j'ajoute qu'il enseigne lui aussi dans la caverne de Sciences-po, je crois que la panorama est complet.

Bref les économistes commencent à me gonfler et leur aveuglement comme leurs prévisions désastreuses du passé ne semblent pas leur avoir servi de leçon et les inciter, au moins, à un peu plus de prudence et de modestie. En fait, comme on a pu le constater dans ce blog où j'ai parlé à plusieurs reprises de cet économiste, la seule personne dans ce domaine qui me paraisse offrir toutes les garanties d'honnêteté, de fiabilité et de compétence est Gaël Giraud, notre jésuite économiste, qui me paraît tenir, lui, des propos sincères et crédibles, mais qu'évidemment on ne voit jamais sur aucun de nos plateaux de télévision, comme d'ailleurs les membres du groupe des "économistes atterrés" qui n'y font que quelques rares et tardives apparitions.

Mais ce n'est pas cela que je voulais vous parler, mais plutôt de mes incertitudes et de mes doutes devant l'affaire Mittal ; l'homme nous est présenté tantôt comme un génie de l'industrie et de la finance tantôt comme un escroc patenté, ce qui dans notre société n'est souvent pas sans rapport.

Un détail mais qui me paraît à ne pas négliger. La belle-fille de Monsieur Lakshmi Mittal est une ancienne de Goldman Sachs et je crois savoir que le patriarche lui-même est membre du conseil d'administration de cette patibulaire officine. Faut-il rappeler ici qu'en 2006 déjà lors de l'OPA hostile sur Artelor, Mittal Steel avait reçu le soutien de Goldman Sachs? Suivez mon regard. C'est tout dire.

Si l'on regarde les subventions publiques qu'Arcelor-Mittal a raflées de l'État français sous diverses formes (de l'Agence de l'environnement et la maîtrise de l'énergie à la Région Lorraine), on s'interroge! Monsieur Mittal qui, ces temps-ci, se tord les mains de douleur, suite à la crise du commerce de l'acier, aurait perçu, dit-on, 900 millions d'euros à titre personnel année dernière. En 2010 (cf. le site abcbourse), les résultats du groupe étaient de 2 256 000 000 d'euros, ce qui, même s'ils sont tombés à 1 751 000 000 d'euros en 2011, laisse tout de même une marge copieuse.

On nous ment tout autant sur l'affaire du repreneur éventuel; selon diverses sources (dont Aurelie Filippetti et le Nouvel Obs), un des repreneurs potentiels éventuels était Bernard Serin qui a redressé, de manière efficace et rapide, Cokeries Maintenance & Ingénierie, moribonde en 2002 un. Cette ancienne filiale d'Arcelor a aujourd'hui 4000 salariés en Wallonie. Monsieur Bernard Serin est un aciériste spécialisé, un véritable industriel et non pas un financier comme d'autres. Il y avait aussi un autre repreneur potentiel dont je ne sais plus le nom ; lui est russe mais il est, paraît-il, un ennemi juré de Mittal et, par conséquent, il a sans doute été écarté d'emblée à l'initiative de ce dernier.

Dernier point, plus mystérieux encore que les autres, les dettes de Mittal envers l'État français. Le ministre Arnaud Montebourg avait annoncé au Sénat : « Mittal aujourd'hui est redevable aux yeux de l'administration fiscale française d'une dette fiscale que nous considérons comme astronomique ». Il n'y a pas eu de chiffre avancé, ni de suite à cette affirmation, mais différents articles de presse évoquent un redressement fiscal d'un montant de 1,3 milliards d'euros datant de septembre 2011. Certains "économistes" de la presse française, prompts à prendre la défense de Mittal, allèguent que, "normalement", une affaire fiscale de ce type est confidentielle et ne peut être divulguée. MDR/LOL ! Défense un peu pitoyable quand on voit les fuites constantes en la matière!  Quant à Arcelor-Mittal, il prétend, naturellement, n'avoir aucune dette fiscale envers la France.

On nous ment!

Que vient faire ici une nationalisation? Si la dette fiscale existe, on saisit tous les avoirs de Mittal, en France, Florange, la Lorraine et le reste, à concurrence de son montant que la France aura elle-même évalué (et pas Goldman-Sachs!) et on vend les hauts-fourneaux au Russe et/ou à Serin, et si ça déplait à Mittal tant mieux. Point barre ! Tout bénef !

« On nous ment, on nous ment,
C’est du vent, on nous ballade
On nous vend que des salades
Y’en a marre des boniments ».


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