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jeudi 13 mai 2010

Francophony?

La Francophonie, comme l’Union Européenne, est obligée de ratisser de plus en plus large pour trouver de nouveaux clients ; de ce fait, ils sont de plus en plus curieux. L’Estonie, contre l’avis de la Bauque centrale européenne qui, en la circonstance ne manque pas de bon sens, devrait intégrer la zone euro dès 2011, avec la bénédiction de Bruxelles. Bonne affaire pour les Grecs qui n’auront plus la honte d’être la lanterne rouge europenne .

La Francophonie voudrait trouver de nouveaux adeptes, avec ou sans locuteurs francophones réels ; l’ennui est que les deux seuls Etats du monde qui pourraient être des recrues sérieuses en la matière, restent sur le pas de la porte pour des raisons bien différentes toutefois. Israël (avec dix pour cent de sa population réellement francophone) a déjà manifesté son désir d’appartenir à cette communauté, mais se heurte au veto d’Etats arabes, dont le plus résolu est assurément le Liban. L’Algérie, qui est sans doute l’Etat du monde qui, après la France elle-même, compte le plus grand nombre des locuteurs du français, souffle tour à tour le chaud et le froid. Favorable à la Francophonie sur le plan extérieur, comme le montre sa présence sporadique à des Sommets francophones (comme visiteur !), le Président Bouteflika se montre volontiers hostile au français sur le plan intérieur pour tenter d’amadouer les Islamistes.

Grande et bonne nouvelle toutefois avec les rumeurs autour de l’entrée à l’Organisation Internationale de la Francophonie (OIF) de la République dominicaine qu’a confirmée la fête donnée à l’Hôtel de ville de Paris pour le quarantième anniversaire de la réunion de fondation de Niamey en 1969-1970). Si l’on est assez habile pour solliciter les bons historiens (mais pas les chantres du 10 mai, journée d’abolition de la traite négrière !), on pourrait même arriver à justifier cette entrée par le fait que cet Etat (la partie orientale de l’ancienne île d’Hispaniola, dont Haïti est la partie occidentale) a été annexée durant quelques décennies au XIXème siècle, par son voisin ha£itien qui est, lui, l’un des Etats fondateurs de la Francophonie.

Les relations entre Haïti et son voisin, la République Domincaine n’ont pas toujours été des meilleures ; le premier se voulait une « République noire », tandis que la seconde se rêvait blanche ! A ce propos, il est amusant de constater qu’une conférence donnée, le 20 mars 2010, à Paris, pour la fête de la Francophonie, par Rene Erez Uerra avait pour titre « L’influence du créole haïtien et du français sur l’espagnol dominicain ». C’est oublier ou vouloir ignorer qu’ou trouve dans cette zone l’un des exemples les plus sinistres du « shibboleth ». Le shibboleth, dans le Livre des juges, est un mot que les Giléadites faisait prononcer aux Ephraïmites, pour les identifier, car, s’ils ne pouvaient prononcer ce mot comme les Giléadites, ils étaient par là-même démasqués et, comme tels, exécutés sur le champ!

En République dominicaine, dans les années trente, les Giléadites étaient les Dominiquais et les Ephraïmites les Haîtiens (venus travailler dans les plantations de canne à sucre), le shibboleth étant, en la circonstance, le nom du persil. Les Haïtiens, qui ont déjà des problèmes avec le « r » du français, ne parvenaient pas, à la différence de leurs voisins hispanophones, à prononcer correctement, le nom espagnol de cette plante « Perejil » et la « jota » qu’il comporte !. Les soldats de Santo-Domingo présentaient donc à ceux qu’ils soupçonnaient d’être Haïtiens, un brin de persil ; si le suspect ne pouvait pas prononcer le nom espagnol, on le tuait. L’affaire fit des dizaines de milliers de victimes haïtiennes.

Ironie de l’histoire encore, au moment où la République Dominicaine va faire son entrée dans la Francophonie institutionnelle (l’OIF en la circonstance), la malheureuse République d’Haïti, terriblement éprouvée par le séisme du 12 janvier 2010, voit sa francophonie historique menacée par le plan de reconstruction sur lequel les Etats-Unis ont la haute main, assez logiquement au plan géopolitique et financier.

La reconstruction du système éducatif haïtien, rendue indispensable par le séisme, devrait être l’occasion d’une véritable refondation /rénovation du système en place dont tout le monde reconnaissait l’inefficacité. Le problème majeur de ce système est que le médium éducatif y est le français que l’on ne parvient pas à enseigner à des enfants qui, pourtant, parlent un créole issu du français et qui, quoiqu’il soit une langue autonome par rapport à elle, présente avec cette langue de nombreuses analogies sur lesquelles devrait naturellement se fonder une didactique du français adaptée aux réalités linguistiques et culturelles haïtiennes.

La refondation de l’école haïtienne, pourrait pourtant être l’occasion d’une vraie rénovation de l’enseignement du français qui est la clé de la réussite des enfants. paradoxalement, elle risque de marquer, en fait, le commencement de la fin de la francophonie d’Haïti, si, faute d’une vraie initiative française et francophone en la matière et comme certains le souhaitent, aux Etats-Unis en particulier mais aussi en Haïti, on en vient à tenter de choisir comme medium éducatif l’anglais en remplacement du français, ce dernier n’étant plus qu’une langue étrangère, en option avec l’espagnol. Vu la situation d’Haïti dans l’espace économique et géopolitique américano-caribéen, une telle solution paraît assez logique, vu le rôle de ces trois langues dans cet espace.

Toutefois, le français tenant une place majeure dans le créole haïtien qui a reçu de lui 90% de son « matériau linguistique », ce que nombre d’Haïtiens ne soupçonnent même pas, car on le leur cache souvent, il y aurait là, en même temps, une rupture profonde dans l’univers culturel local et une transition éducative quasi impossible à réaliser, mais qu’il deviendra indispensable d’affronter si la France et Francophonie (le Québec devrait être encore plus préoccupé que la France par ce problème) ne sont pas en mesure de proposer une véritable refondation du système éducatif qui est (mais pour combien de temps encore ?) la seule véritable alternative.

1 commentaire:

Benoît a dit…

Pour Blandine, on avait nourri les lions avant de la leur présenter.
Comment a-t-on nourri les lions iraniens ?