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mercredi 23 février 2011

Boillon de cultures


Boris Boillon. Voilà un homme qui a su, pour partie involontairement sans doute, faire le buzz.

Comme Cronin dans Les clés du royaume, que j’ai lu quand j’étais petit, j’aborderai le sujet par « Le commencement de la fin ».

Sans que j’ai bien su si c’était par « Facebook » ou par « Copains d’avant », notre héros, Boris Boillon (BB2 pour faire plus court mais le situer par rapport à la première), a conquis, en un instant ou presque, la gloire médiatique grâce à une photo de lui placée dans l’un ou l’autre de ces réseaux. Je dois à la vérité de dire que, peu familier de tels lieux de la toile, je n’ai pas eu le courage d’aller vérifier ce détail, me satisfaisant d’abord, dans un premier temps, avant investigation plus précise, de la photo de BB2 brandie avec indignation par Marine Le Pen, qui la jugeait attentatoire à la dignité du corps diplomatique français, pourtant ainsi mis en valeur.

Il est vrai qu’après examen, plus approfondi mais facile, car tous les sites de videos l’ont reproduite à l’envi, je dois dire que la photo de son Excellence Boris Boillon n’est pas piquée des vers ni même des hannetons. Je pense qu’elle a été faite, par ses soins, pour participer au concours de la meilleure photo de couverture pour le magazine Têtu ! Elle a sans doute été jugée trop peu originale, car on en avait déjà vu une bonne douzaine du genre, même si les modèles, dans ces cas, n’étaient pas des ambassadeurs de France. Peut-être ce cliché aurait-il été plus apprécié si son Excellence y avait été saisi dans cet appareil à un moment spécifique de sa vie professionnelle, une remise de lettres de créance par exemple. En revanche, cette photo le montre en maillot de bain moulant (style Jean-Marie Bigard ou, mieux encore, Franck Dubost), le torse épilé et huilé mettant en valeur des abdominaux, soigneusement travaillés avant et en vue de la prise de vue.





En tout cas, après avoir posé quasi nu, voilà BB2 « habillé pour l’hiver » ; les émissions satiriques, des « Guignols de l’info » (en baisse ! Au secours Gaccio !) au « Petit Journal » de Yann Barthès (en hausse) vont s’en donner à coeur joie durant une bonne quinzaine (et plus si affinités !).

« Tout le monde n'a pas eu la chance d'avoir des parents communistes » était le titre d’un film de Josiane Balasko. Boris Boillon l’a eue, lui, cette chance ; il en a hérité un prénom russe et une initiation à l’arabe qui a été à l’origine de sa fortune diplomatique. En effet, ses parents (des enseignants « pieds rouges ») sont partis en Algérie pour aider à la décolonisation du nouvel Etat. BB2 y a donc, été, inévitablement et sans mérite particulier, initié à cette langue jusqu’à son retour en France.

Etudes parisiennes modestes (IEP et INALCO) ; n’étant pas énarque, il ne pouvait guère espérer mieux qu’un poste de consul en fin de carrière. En fait, il sera nommé ambassadeur à 40 ans après de fructueux passages dans la mouvance de Nicolas Sarkozy, au ministère de l’intérieur d’abord, puis à l’Elysée. C’est sa connaissance de l’arabe qui est à la base de ses promotions. Cette circonstance amène d’ailleurs à s’interroger sur l’usage, plus intelligent, que pourrait faire la France, dans sa politique extérieure, des Français issus de l’immigration dont les savoirs culturels et linguistiques seraient sans doute utiles dans divers lieux du monde.

« Le commencement de la fin ». J’ai vu BB2 pour la première fois, comme tout le monde, chez Denisot, à un « Grand journal » de Canal +, fin novembre 2010. Il y a fait un numéro assez insupportable de suffisance et de satisfaction de soi, agrémenté de rodomontades ridicules sur ce qu’on allait voir, grâce à lui, en Irak, pays qu’il a quitté quelques semaines plus tard ! Il a parlé, en particulier lors de cette émission, de son amitié avec Kadhafi, faisant un éloge ému de ce dernier et confiant, non sans satisfaction, que Mouammar l’appelle « son fils ». J’ai appris, dans la suite, que sa fortune auprès du président de la république tient au rôle, obscur mais majeur, que BB2 a joué dans la libération des infirmières bulgares, dont le succès a été attribué, ensuite, urbi et orbi, à Cécilia, pour les raisons que l’on sait !

Passons sur les détails. Vu cette première prestation à Canal +, la suite ne m’a guère étonné et en particulier son comportement, inouï de morgue, d’arrogance et surtout de sottise, à l’égard de la journaliste tunisienne (une femme donc !) qui interviewait le tout nouvel ambassadeur de France, à peine débarqué. Sans vouloit tirer sur une ambulance, deux remarques pour conclure sur le personnage. Obligé de faire amende honorable, il l’a fait en arabe, en ânonnant laborieusement un texte qu’il lisait manifestement mot à mot. D’autre part et surtout, un ambassadeur de France, qui a dû aller un peu à l’école, devrait savoir qu’on « présente des excuses » et qu’on ne « s’excuse pas », car si l’on peut « s’excuser » soi-même, à quoi bon faire une telle démarche ?

5 commentaires:

j.michel a dit…

s’excusez ou présenter ses excuses, je ne polémiquerait pas avec vous sur ce point, simplement la langue peut évoluer quand plus de 50% de la population croient bien parler la France en disant je m’excuse.

Le reste : malheureusement beaucoup sur un ambassadeur en maillot de bain comme s’il n’avait pas le droit d’être beau gosse et peu sur cette émission où il causait Irak. Or s’il était bushien en Irak, cela semble plus important que le fait que son artillerie tenait ou ne tenait pas dans le vêtement Eminence.

Autre chose sur la terminologie : qu’appelez-vous pieds rouges , car il semble que cela ait un sens bien différent en Algérie et en Afrique noire.

j.michel a dit…

Imaginez que l'ambassadeur soit une ambassadrice avec une pose en string. Quelle révolution en pays musulman !

Anonyme a dit…

Cher j.michel,
Le problème n'est pas ici celui d'une réelle évolution de la langue mais du fait que si l'on "s'excuse" soi-même, point n'est besoin de demander à celui qui a été offensé (ou autre chose) de le faire!

Pour l'interview en cause, la point de vue de BB2 étant la simple redite (d'ailleurs obligée dans sa position) de la politique officielle de la France, tant en Lybie qu'en Irak, il n'y avait rien à en dire.Le pittoresque n'était que dans le personnage et la suite l'a bien montré!
Est-il tellement "bogosse"? Je ne sais car je le trouve un peu gringalet, mais je ne suis pas spécialiste ; il faudrait consulter les experts du Quai!
Quant aux "pieds rouges"(terme formé sur l'anti-modèle "pieds noirs") ce sont les militants de gauche qui sont partis après 62 pour aider l'Algérie à se décoloniser. Pas très réussi au demeurant!

j.michel a dit…

Le Petit Robert, un peu contradictoire à vrai dire :
II¨ (XVIe « refuser, se dispenser ») S'EXCUSER v. pron.
(…)
2¨ (1690, répandu XIXe) Présenter ses excuses, exprimer ses regrets (de qqch.) (cf. Demander pardon*). « Je m'excuserais d'abord d'écrire cette préface, si déjà je n'écrivais cette préface pour m'excuser d'avoir écrit la pièce » (A. Gide). S'excuser de qqch. « Il s'était excusé de son mouvement d'humeur » (Camus). — Je m'excuse, s'emploie incorrectement pour excusez-moi.


J’ai un copain fils de coloniaux qui se dit pied rouge : pour lui cela vient du sol en latérite de Madagascar, ce fut d’abord les colons de Madagascar puis étendu aux colons d’Afrique noire.
Qui croire ?

Anonyme a dit…

Cher Jmichel,
Liquidons d'abord les "pieds rouges" , je connais assez bien Madagascar et je n'ai jamais entendu, même si la présence de la latérite est incontestable, parler de "pieds rouges". En revanche, un moment (il y a longtemps) les Malgaches nommaient les Européens, en malgache "mena sofima" (= oreilles rouges): ce pourrait même être l'origine de l'appellation "zoreille" des Européens en créole réunionnais. Pour "excuser" il est légitime de "s'excuser" (de ne pouvoir venir par exemple) tandis qu'on "présente des excuses" pour une faute ou un impair. le sens n'est pas le même .