Messages les plus consultés

vendredi 24 février 2012

Le "classico" raté de la présidentielle.

L'actualité me contraint à remettre à demain la suite du roman des CDS. Sans trop tomber dans le franco-français, comment ne pas dire quelques mots de l'émission de France2, intitulée, je crois, "Des paroles et des actes" et dont l'invitée était hier Marine Le Pen.

Le pauvre Pujadas, qui ne cesse de se mettre sur la pointe des pieds pour essayer de lutter "avec ses petits bras musclés" contre Laurence Ferrari, a évidemment essayé de refaire le coup de Paul Amar qui, faisant se rencontrer Jean-Marie Le Pen et Bernard Tapie, avait mis des gants de boxe sur la table. Cette facétie lui avait d'ailleurs, Dieu sait pourquoi, coûté sa place, ce qui n'est pas très grave, puisque nos journalistes sont si talentueux que, lorsqu'ils perdent une place (voir ce bon Monsieur Lenglet ou Madame Chabot), ils en ont une autre aussitôt, quand ils n'en n'ont pas déjà, auparavant, trois ou quatre en même temps. Ces situations entraînent beaucoup de frais de transport d'où leur régime fiscal très exceptionnel dont les bruits de suppression causèrent en 1997 la perte d'A. Juppé face à l'universelle hostilité de la presse à toute réforme de ce régime si avantageux!

L'affrontement Mélenchon-Le Pen devait être, pour Pujadas, le clou de la soirée (une sorte d'OM-PSG, un "classico" sans ballon et en plus saignant), voire celui de la campagne, même si Marine Le Pen avait refusé tout net d'être confrontée à Jean-Luc Mélenchon. France2 aurait beaucoup mieux fait de filmer les discussions entre Pujadas et Marine Le Pen plutôt que l'absence de débat entre Mélenchon et cette dernière qui, sans décliner l'invitation, s'est refusée obstinément à répondre aux questions de Mélenchon et à dialoguer avec lui.

Elle a eu bien tort vu la nullité des questions ! Mélenchon, que j'ai connu bien mieux inspiré, s'est en effet couvert de ridicule dans cette affaire. Il faut dire que les cadreurs (peut-être du FN ou sur l'ordre de Pujadas pour garder les téléspectateurs venus pour le pugilat et qui pouvaient craindre l'absence de Mélenchon) nous ont montré, une ou deux fois pendant les autres interventions, ce dernier, visiblement "épanoui, ravi", renversé sur son siège, manipulant ses lunettes et tendant vers l'objectif un menton vengeur, machoires serrées, l'air de nous dire qu'on allait voir ce qu'on allait voir. Cette attitude n'annonçait rien de bon pour la suite et cela n'a pas manqué. Heureusement pour lui, d'une certaine façon, Marine Le Pen s'est obstinée dans son refus de lui parler, alors qu'elle aurait pu, très facilement, le mettre dans les cordes, voire au tapis.

Dans un moment d'égarement sans doute et croyant sottement se gagner les électrices, Mélenchon a en effet attaqué Marine Le Pen sur le problème global de la parité hommes-femmes.

C'est pour le moins inattendu de la part d'un candidat mâle qui s'est imposé dans son mouvement face à des FEMMES qui auraient pu, plus légitimement que lui, prétendre à cet emploi de candidat, à commencer par Mme Buffet par exemple. Il aurait donc été facile à Marine Le Pen de le mettre face à une si énorme et flagrante contradiction et de souligner qu'à commencer par elle-même, la représentation féminine est bien meilleure au sein du Front National qu'au NPA. À croire que ses succès médiatiques récents commencent à tourner la tête à Mélenchon qui avait pourtant fait un début de campagne brillant.

Il aurait pu en être de même lorsque Mélenchon a ironisé sur le pourcentage des intentions de vote en faveur de Marine Le Pen (à la louche entre 16 et 20 %) ! Pour quelqu'un qui rame comme un malade pour atteindre les 8 %, il faut avouer que les choix tactiques mélenchoniens n'étaient pas très habiles et qu'elle aurait pu là aussi l'envoyer au tapis sans trop de problèmes.

Idem pour le couplet sur Brasillach ! Qui connaît Brasillach ?  En plus pas très habile d'évoquer Vichy  pour qui fut ministre aux ordres d'un président de la République décoré par Pétain de l'Ordre de la Francisque, grand ami du sinistre Bousquet (pourvoyeur des camps de la mort ; autre chose que le pauvre Brasillach qui lui a eu douze balles dans la peau) et, en plus, cerise sur le gâteau, le vrai père politique du Front National lui-même! Là encore Mélenchon pouvait en prendre plein la tronche! 

Mélenchon, en plus, a attaqué d'emblée Marine Le Pen sur le problème de l'avortement qui est effectivement tout à fait central et proritaire, vu la situation économique et sociale de notre pauvre pays. Mme Le Pen, dans le programme du Front National que je ne connais pas, proposerait que la sécurité sociale ne rembourse plus les IVG dites "de confort". Je n'ai pas de sentiment particulier sur cette question mais cette mesure n'est peut-être pas si absurde que ça, comme on va le voir, pour une raison purement statistique.

Ce qui est en revanche absurde est la démonstration (si on peut appeler ça une démonstration tant le raisonnement est aberrant) de Mélenchon qui prétend qu'elle voudrait par là réserver l'avortement à celles qui pourraient se le payer et donc d'exclure du bénéfice de son remboursement les pauvres filles qui n'ont pas les moyens de se l'offrir à leurs frais.

Pour ce qui me concerne et pour avoir vu tout récemment le nombre effarant d'IVG en France, je suis absolument stupéfait de constater qu'en dépit du développement extraordinaire et de la multiplication des moyens de contraception, il y a de plus en plus d'avortements de France : 210.000 en 2009 contre 200.000 dix ans avant ! Il semble pourtant moins traumatisant, plus raisonnable, plus normal et, disons le mot, plus économique d'essayer de ne pas faire d'enfants plutôt que d'être obligé de les supprimer, par une IVG, une fois conçus.

Il y a véritablement une énigme socio-psychologique dont je vois mal les causes et qui tient sans doute à l'absence quasi totale de précautions contraceptives alors que tous les moyens existent. En somme, on se fout d'une grossesse inopportune puisqu'il y a l'IVG gratuite (des amies de mes filles ont avorté quatre ou cinq fois avant 25 ans!). Si un sociologue du CNRS peut me donner la clé de ce mystère, je lui en serai très reconnaissant.

Le second problème et la seconde question que souhaitait poser Jean-Luc Mélenchon touchait aux votes de la droite au Parlement européen, mouvement européen auquel est rattaché le Front National. On s'y oppose, dit-il, systématiquement à des mesures en faveur de l'égalité entre les hommes et femmes. Jean-Luc Mélenchon avait-il un peu perdu pied devant l'attitude de son interlocutrice qui rangeait ses papiers et lisait son journal tandis qu'il vociférait devant un Pujadas dépassé, toujours est-il que sa question elle-même était parfaitement confuse et incompréhensible, indépendamment du fait que tout le monde se fout complètement du Parlement européen. Il ne sert à peu près à rien, sinon à entretenir grassement (sur un fastueux et  mirifique pied d'égalité) des hommes (comme Mélenchon) et des femmes (comme M. Le Pen) qui y font de temps en temps des apparitions et qu'on a désignés dans des élections fantoches, qui ne servent guère, en général, qu'à recaser les copains battus dans d'autres élections plus sérieuses et plus disputées (style le prétendu Harlem Désir).

Bref le match Mélenchon-Le Pen sur lequel comptait en ce pauvre Pujadas, tout à fait inconsistant voire débordé comme "animateur", pour exploser TF1, n'a pas eu lieu et le reste ne valait guère mieux. Il faut dire que Mme Le Pen est sortie facilement gagnante vu la piètre qualité de ses interlocuteurs et son habileté dialectique face à des interlocuteurs qui songeaient surtout à parler eux-mêmes et d'eux-mêmes.

Je ne parle même pas des deux prétendus journalistes qui eux aussi croyaient sortir vainqueurs sans problème de cette confrontation et qui s'en sont trouvés assez piteux, Namias (fils) un peu moins que sa consoeur pour avoir été plus prudent dans ses questions et ses interventions. Si j'avais à donner un conseil à ce grand professionnel de Pujadas (1,20 mètre au garrot!), je lui dirais de supprimer les interventions des journalistes, car elles sont sans le moindre intérêt et rendent cette émission d'une insupportable longueur. Je serais curieux de savoir la chute de l'audience entre le début et la fin, par ennui, endormissement ou fuite.

La partie économique était assurée, comme elle l'est bientôt partout dans les médias, par le dénommé François Lenglet dont la carrière est elle-même tout un programme. Ce grand "expert" économiste est, en effet, en tout et pour tout, titulaire d'une maîtrise de lettres modernes (fichtre!) ce que dissimule naturellement toutes ses "biographies" ;  son parcours professionnel est aussi étrange que sinueux. Marine Le Pen, qui avait préparé l'émission par des lectures de textes du dit François Lenglet, n'a pas eu de mal à le mettre en contradiction avec lui-même et ainsi, non sans adresse, à le faire parler à sa place, ce qu'il adore manifestement . Là encore le paradoxe du journalisme français fait que cet "expert" est, plus ou moins, désormais directeur de la rédaction de RMC-BFM-TV (la chaîne du grand capital et de Radio-Monte Carlo, la radio des bignoles) ce qui est pour le moins stupéfiant dans sa position. Une seule chose est sûre : on ne peut pas le soupçonner d'avoir bénéficié d'une "promotion canapé".

Le passage le plus intéressant de cette émission (pour ne pas dire le seul) a été la confrontation avec Henri Guaino qui, en revanche, en prévision des foucades de Mélenchon, a été des plus courtoises. Là encore, je trouve que Mme Le Pen qui, par ailleurs se sort assez bien des débats et des affrontements eux-mêmes (souvent, ce qui est assez adroit et inverse le débat, à partir des textes ou de propos de ses interlocuteurs), est meilleure sur le plan tactique que stratégique. Elle a en tout cas complètement loupé la conclusion de sa confrontation avec le conseiller spécial du Président de la République alors qu'à partir de ses propres textes et de ses réponses et prises de position curieusement sincères, elle avait réussi à lui faire dire, en gros, qu'il est à peu près en total désaccord sur tout avec Nicolas Sarkozy.

Comme elle avait la parole en fin de confrontation (Guaino ayant commencé l'entretien), elle a totalement loupé la conclusion, pourtant évidente, qu'elle aurait pu tirer, en soulignant combien il devait souffrir, dans sa position, en étant obligé de mettre en oeuvre et de soutenir une politique qu'il désapprouve fondamentalement dans ses grandes lignes, ou bien (au choix) qu'il est un conseiller tout à fait "spécial" mais surtout en ce sens que les conseils qu'il doit vraisemblablement donner, vu son honnêteté intellectuelle, ne sont jamais suivis ni même écoutés par celui qu'il est chargé de conseiller !

Elle a loupé là un superbe numéro... à faire pleurer un seau à charbon, comme disait ma bonne grand mère!

Aucun commentaire: