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vendredi 10 février 2012

Le bras de fer antillais

On a déjà beaucoup épilogué et glosé sur l'affrontement à propos de « l’inégalité des civilisations » qui a eu lieu à l'Assemblée nationale entre le ministre de l'intérieur, M. Claude Guéant et Serge Letchimy.

Ce dernier est député de la Martinique et maire de Fort-de-France (comme tel, il a succédé à Aimé Césaire) mais il est aussi, depuis 2010, président du conseil régional de l’île. Le tout n'est donc pas peu de choses là-bas, puisqu'il est à la fois le successeur de deux figures majeures de l'île, Césaire d’une part (S. Letchimy préside aussi le Parti Progressistre Martiniquais fondé par Césaire), mais aussi, dans des conditions tout autres, d’Alfred Marie-Jeanne, l’homme au chapeau « bakwa », figure majeure de l’indépendantisme local.

Autant dire qu’il y a là un personnage qui compte à la Martinique. On sait ce qui s'est passé à l'assemblée nationale. Le gouvernement et l’UMP ont quitté la séance (ce qui est quasi unique et ne s’improvise sans doute pas) ; quant à la tentative de réconciliation tentée par le président Accoyer, elle n’a eu aucun résultat, les deux protagonistes ayant quitté son bureau sans avoir cédé en quoi que ce soit sur leurs positions. Accueilli à Fort-de-France par la foule de ses partisans, Serge Letchimy s’est fait applaudir en soulignant qu’il était resté « ferme » et « sans concession ».

Calcul ou coïncidence ? Un voyage de quatre jours en Martinique et en Guadeloupe du ministre de l'intérieur (qui est aussi ministre de l’outre-mer) était prévu pour samedi. S’est-on risqué à susciter cet incident en ayant connaissance de ce détail ou ce détail n'est-il apparu qu'après ? Toujours est-il que le voyage et la date ont été maintenus.

Comme on pouvait s'y attendre, les Martiniquais, qui ont la tête près du bonnet, ont fait savoir à M. Claude Guéant qu’il n'était pas le bienvenu aux Antilles. Non seulement le maire de Fort de France s‘est fait applaudir en gardant sa position, comme on pouvait s'y attendre, mais il y a été rejoint par Messieurs Lurel et Gillot, les présidents des conseils généraux de la Martinique et de la Guadeloupe. Ces derniers ont cosigné une lettre qui a été rendue publique et dans laquelle ils déclarent que, contre toutes leurs habitudes, ils ne recevront pas officiellement le ministre.

Que l’épreuve de force ait été recherchée volontairement ou qu'elle soit fortuite, les choses risquent de ne pas se passer très bien à Fort-de-France surtout, mais aussi peut-être aussi à Pointe-à-Pitre. Le « bras de fer » est donc engagé. Il est fâcheux que la grève d'Air France soit déjà terminée car il aurait été bien commode d’y trouver un prétexte pour annuler cette visite. L'affaire est donc à suivre mais le week-end risque d'être encore plus chaud dans ces îles.

3 commentaires:

Anonyme a dit…

Dernière minute : Monsieur Guéant a commencé à faire marche arrière en plaidant le fâcheux malentendu sur le sens précis du mot "civilisation".
Le remède ne serait-il pas pire que le mal et Serge Letchimy ne causerait-il que le "français banane" local ? N'est-ce pas là une version nouvelle du pavé de l'ours?

Anonyme a dit…

Le dernier communiqué de l'UMP désapprouve les propos du ministre et annonce néanmoins avec lui "une explication franche" (et "cordiale" non ? Comme on disait autrefois au Parti communiste quand il existait encore!). Attendons la suite...)

Anonyme a dit…

Les journaux français ont titré qu'en Martinique les élus avaient "boudé la visite du ministre". C'est très exagéré puisqu'il a rencontré sept élus UMP!