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lundi 27 février 2012

Le ticket de métro et le rite halal

Toute la presse française fait des gorges chaudes sur le fait que Nicolas Poincaré, sur Europe1, utilisant un truc vieux comme la soupe à l'oignon, a collé la ministre les transports, Nathalie Kosciusko Morizet, comme bien d'autres ministres avant elle, en lui demandant, tout à trac, le prix d'un ticket de métro.

La pauvre, peu familière avec ce mode de transport et plus encore avec l'acquisition payante d'un tel ticket puisque, comme ministre, elle ne paye pas les transports en commun, a bredouillé au hasard : « Quatre euros et quelque chose ». Elle répondait évidemment au pifomètre, mais c'est là le pire. Elle aurait assurément mieux fait de confesser son ignorance, car, en avançant un prix qui est, en gros, trois fois supérieur au prix réel moyen courant, elle a montré, non seulement qu'elle ne devait pas en acheter très souvent, mais surtout, et c'est là le plus grave, qu'elle n'avait qu'une idée très lointaine des réalités quotidiennes de l'existence de la plupart des Français et de l'échelle même des prix de la vie courante.

Vous vous souvenez qu'on avait déjà fait le même coup à Balladur quand il était Premier Ministre mais que lui avait eu, si je me souviens bien, la naïve sagesse de confesser son ignorance plutôt que d'avancer un chiffre abracadabrant !

Cette méthode d'interrogation est des plus faciles mais, en fait, au-delà
du succès aisé, purement anecdotique, elle n'a pas un très grand intérêt. D'abord car demander le prix d'un ticket de métro n'a pas en fait  une signification précise. Si vous consultez le site de la RATP, comme celui de la Régie des transports de Marseille ou de l'OTL de Lyon, vous constaterez qu'il y a un maquis de prix et de modalités pour les tickets de métro d'une invraisemblable complexité. NKM aurait donc pu, si elle avait connu un tant soit peu le dossier, répondre tout simplement, ne serait-ce que pour gagner du temps et noyer le poisson, en demandant à Poincaré, à son tour, de quel type de ticket il parlait. Je ne veux pas entrer dans le détail et il est sans intérêt. Suivant que vous achetez le ticket pour une journée et pour une semaine, à l'unité ou par dix, avec ou sans RER, etc., les prix sont tous et sans cesse différents. Elle aurait pu noyer son ignorance dans un verbiage qui aurait facilement pu avoir raison de l'insistance de son interlocuteur qui, le matin, a toujours l'oeil sur la pendule.

Les journalistes aiment aussi à faire le coup avec la "baguette"! Comme s'il y avait un prix de la baguette et ils ne doivent pas plus fréquenter les boulangeries que NKM le métro ! Il n'y a pas un prix, mais une foule de prix de la baguette, Messieurs, et Paris n'est pas la France ! Donc le journaliste qui pose une telle question montre par là même qu'il n'est pas très familier avec le commerce de la boulangerie. Non seulement les baguettes ont des prix très différents (cela va facilement du simple au double selon les régions et les établissements!) et, d'autre part, dans la même boulangerie, le prix varie aussi selon le type de baguette (farinées ou non, à l'ancienne, de marque, etc. ). Moi, je connais la question !

Cela rappelle la fameuse blague de l'oral inepte de l'ENA où un candidat, se voyant interrogé sur la profondeur du Danube sous le grand pont de Budapest, avait eu l'esprit de répondre, en interrogeant à son tour le membre du jury « Sous quelle arche ? ».

La ministre des transports aurait donc pu répondre à son intervieweur de quel type de billet il voulait exactement parler, ce qui aurait sans doute embarrassé à ce moment et à son tour  ce brave M. Poincaré qui doit être aussi peu familier du transport en métro que des subtilités multiples la tarification des billets. Il aurait sans doute dit : "Le ticket simple à l'unité", s'attirant une réponse commode "Mais, cher Monsieur Poincaré, vous devriez le savoir : personne n'achète jamais les tickets de métro à plein tarif et à l'unité!".

Le vrai problème est que lorsque l'on veut ennuyer un politique sur un problème précis, il faut soi-même le connaître assez bien. J'entendais, ce matin encore, Jean-Jacques Bourdin interviewer le ministre de l'agriculture et essayer de le titiller sur le pourcentage REEL de viande halal dans le commerce français de la boucherie. Il est clair que le journaliste n'en savait rien et que le ministre, s'il en savait quelque chose, a refusé l'idée que toute la viande préparée en Ile-de-France soit halal (comme on l'a dit), sans être capable de donner lui-même un chiffre! Si je ne craignais une plainte de la LICRA, je dirais volontiers, comme autrefois, que c'était vraiment là "un combat de nègres dans un tunnel" ; à partir de là, en effet, on s'est donc enfoncé, d'un commun accord, dans un marécage de bavardages fumeux d'où il n'est rien sorti.

Comme j'ai eu l'occasion de dire dans un blog précédent qui, lui-même, était quelque peu en contradiction avec un autre qui avait précédé de peu, je n'aurais aucun scrupule et pas la moindre hésitation à consommer de la viande halal, si l'on pouvait m'assurer qu'elle présente les mêmes garanties légales d'hygiène que celle qui ne l'est pas ; or, ce n'est assurément pas le cas vu le mode d'abattage halal (je vous renvoie sur ce point pour l'explication à mon blog sur la question). Le ministre, qui ne voulait pas être soupçonné de racisme ou même simplement de communautarisme, s'est abstenu soigneusement de parler de la question de l'hygiène elle-même, qui est pourtant essentielle, pour se concentrer sur celle de "l'étourdissement" des bêtes, entrant alors dans le détail (suivi sur ce terrain par Bourdin) de la différence entre le rite halal (qui s'accommoderait éventuellement de l'étourdissement de l'animal) et le rite kasher (qui n'accepterait pas cette entorse au rituel hébraïque traditionnel).

Je ne vois personnellement aucun inconvénient à ce que, dans l'un ou l'autre de ces rites, on impose quelques contraintes que ce soient (orientation vers la Mecque ou Jérusalem, enturbannage du sacrificateur, ou autres fariboles de la même farine), mais j'entends bien, en revanche et de façon formelle, qu'on ne m'oblige pas à manger, fût-elle halal ou kasher, une viande souillée par les excréments et les déjections animales qui sont évidemment impossibles à nettoyer.

La seule solution serait donc d'ouvrir des abattoirs spéciaux dans les mosquées ou les synagogues où les fidèles abattraient, débiteraient, voire consommeraient les animaux à leur guise, allant même jusqu'à les manger tout crus voire vivants si ça leur chante. Le problème étant que, n'étant ni musulman ni juif et souhaitant consommer une viande traitée selon toutes les règles d'hygiène moderne, je n'ai aucun envie de me prêter à des rites alimentaires qui ne me concernent en rien, sans prétendre pour autant empêcher quiconque de les exercer, à ses propres risques. N'est-ce pas une exigence normale de la laïcité, de la démocratie et même de la gastronomie?

1 commentaire:

Anonyme a dit…

bonjour
je ne suis pas d'accord pour une sécurité alimentaire à deux vitesses et abandonner la dite sécurité sur le registre "as you want"
l'affaire des moutons égorgés dans les baignoires tournait surtout autour de l'insalubrité des abattages sauvages, dans des coins de marchés et pas seulement dans les baignoires
la sécurité sanitaire est pour tous d'autant que 25% des boeufs abbatus kascher ou halal investissent le réseau "normal", le rabbin et l'imam en décidant
une file active d'enfants musulmans aux urgences avec un E coli vénéneux ne tente personne et j'imagine le tintoin si on en arrivait là en laissant faire
mais ça va arriver!on noiera le poisson probablement
au fait, et le poisson?
bientôt les crickets surgiront les pattes en l'air sur nos tables, là diversité alimentaire gagnera le combat!