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dimanche 2 juin 2013

Des morts opportunes


En commentaire de mon post récent "Affaire Tapie : encore une coïncidence", Schoum1 écrivait :

"Toujours avis perso,

 Je trouve que dans toutes ces affaires politico financières, il y a toujours des hommes, qui se suicident, ou meurent de crise cardiaque ou autres 

 Depuis 3 mois que sortent toutes les affaires, financement politique, train de vie de l’état, certaines vente du patrimoine français,(Chantilly et j’en passe), Bettencourt et campagne électorale de Sarkozy et son financement, Karachi, etc.,etc., etc.,et j’en passe, la crise cardiaque de Philippe Seguin, président de la Cour des comptes, arrivait à point."

Cette remarque m'a remis en mémoire ces morts si opportunes, comme celles de François de Grossouvre ou de Roger-Patrice Pelat . Par hasard, le jour même où revenait dans l'actualité le si peu crédible suicide de Robert Boulin, je conseillais dans un post, ici même, de toujours mettre dans toute magouille politique, un octogénaire, de préférence malade, tout désigné pour porter le chapeau en cas de problèmes. Je me suis souvenu avoir écrit, à l'époque et publié le 7 janvier 2010 sous mon pseudo d'alors (Usbek) dans Nouvelobs.com., un post intitulé "Mais qui a tué Philippe Seguin ?". Je le reprends donc ici :

"Cette parodie d’un célèbre titre de film de Hitchcock va au-delà de la simple plaisanterie. Il y a moins d’une semaine, j’ai publié un post dont je rappelle ici à la fois le titre et une partie du contenu, pertinente en la circonstance !

Ce post s’intitulait :« Le « Musée Sarko » sur l’Ile Seguin ou Sarko épinglé dans le Musée de Seguin ». Fort heureusement, dans la rubrique « les titres auxquels vous avez échappé", j’avais finalement renoncé à « Seguin sarkophage ? » qui m’avait pourtant beaucoup tenté, vu le contenu de mon post dont je rappelle ci-dessous quelques fragments.

« Entre la chèvre de ce brave Monsieur Seguin dont le Président de la Cour des comptes, accablé des allusions qu’on faisait à sa barbe, a fini par en faire le sacrifice (de la barbe, pas de la chèvre ) et l’Ile Seguin, où Nicolas Sarkozy veut construire son Musée national de l’histoire de France, à défaut de pouvoir en faire l’Ile du Diable pour y loger son ex-ami Philippe du même nom, la matière à plaisanteries ne manque pas. Notre Président n’a toutefois pas été jusqu’à confier au Président de la Cour des comptes une mission sur la destination de l’île parisienne qui porte son nom. Il s’est contenté, naguère, de charger ce Tunisois de naissance, de la réflexion sur l’Union de la Méditerranée qui d’ailleurs, on le verra dans la suite, ne comprenait pas l’organisation des festivités parisiennes liée à la mise en place de ce bazar d’Euromed, auquel le Président de la Cour des comptes n’a pas ménagé ses critiques. »

[…]

Il est évidemment absurde de songer, ne fût-ce qu’un instant, que Philippe Seguin puisse être candidat contre Sarkozy, ce que donnent pourtant à penser certains de ses comportements. En 2012, il frôlera les 70 ans et il sera déjà en retraite, même s’il va jusqu’au terme ultime que la loi fixe à l’âge de la retraite de ses fonctionnaires (68 ans !). En revanche, il trouve, de toute évidence, un malin plaisir et parfois même une joie sardonique à utiliser à plein les ressources médiatiques que lui donne sa position actuelle.

Cela ne va toutefois pas beaucoup plus loin. Le Premier Président de la Cour des comptes (Philippe Seguin en la circonstance) est pourtant aussi, et en même temps, président de la Cour de discipline budgétaire et financière (CDBF), ce qui est tout autre chose.

La Cour des comptes, en effet, ne sert rigoureusement à rien dans son exercice courant. Elle fait des rapports, dont le seul intérêt, mais il n’est pas sans importance, est de fournir la matière plaisante d’articles savoureux et/ou d’émissions pittoresques à la presse écrite et audio-visuelle française qui a souvent la goutte à l'imaginative. Ces rapports, qui n’entraînent pas de sanctions, fournissent mille anecdotes, propres à susciter, selon les cas, le rire ou l’indignation, en particulier sur des dépenses, aussi pharaoniques qu'incongrues ou même absurdes, de l’Etat ou de ses institutions. Pour rester dans le récent, cela va de l’installation d’une douche, jamais utilisée, pour 235.000 euros, à des repas commandés à un traiteur parisien pour plus de 5.000 euros par couvert.

En revanche, certains dossiers peuvent être transmis par la Cour des Comptes à la Cour de discipline budgétaire et financière qui a été créée par la loi du 25 septembre 1948 et qui a, elle, à la différence de la Cour des comptes, a le pouvoir de sanctionner les actes des agents publics constituant des fautes lourdes ou constituant des irrégularités dans la gestion des finances publiques. On comprend par là que, sur les centaines de facéties ou d’aberrations financières que relèvent, chaque année, les rapports de la première, seuls de très rares dossiers sont transmis à la seconde ! Il faut, en général, pour que cela se fasse, qu’on ait un peu trop tripatouillé les chiffres ou déplacé les virgules dans les opérations comptables! Ainsi, dans les faits que j’évoquais ci-dessus, même si Philippe Seguin a souligné des manques, par exemple, dans les procédures réglementaires d’appel d’offres (« vu l’urgence… ») et estimé, à la louche, que les dépenses ont été trop élevées du tiers au moins, la Cour de discipline budgétaire n’a pas eu à être  tirée de son sommeil pour autant ! Il est vrai que, faisant se succéder la carotte et le bâton, Philippe Seguin a estimé que la présidence sarkozienne de l’Europe (en 2009) avait coûté huit fois moins cher (plus de 200 millions d’euros tout de même) que celle de la Gauche en 2000 !

Tout cela est du domaine de l’anecdote, mais certaines critiques de fond sont plus graves, même si la presse en fait un peu moins ses choux gras. Ainsi les coûts exorbitants des grandes réunions politiques internationales à Paris sont-ils la conséquence directe de certaines braderies immobilières, qui bouchent des trous, minimes à court terme, mais coûtent des fortunes pour finir. C’est le cas de la vente du Centre international de conférences de l’avenue Kléber, qui oblige désormais à louer et à équiper à grands frais (douche à 235.000 euros !), par exemple, le Grand Palais, beaucoup moins adapté, en outre, à ce genre de manifestations.

« Fecit cui prodest » dit l’adage latin, que nous traduisons par « A qui profite le crime ? ». Peut-être, comme dans « Mais qui a tué Harry ? », la victime est-elle finalement morte de mort naturelle, il n’empêche qu’au-delà des rituelles déplorations qui font que tout défunt se voit unanimement paré, à sa mort, de qualités et de vertus qu’on ne lui reconnaissait guère de son vivant, cette mort arrange bien des gens, même s’ils n’osent pas s’en réjouir.

D’abord Nicolas Sarkozy lui même qui certes ne redoutait guère la concurrence de Philippe Seguin pour 2012, mais qui a toutes chances d’avoir en son successeur à la Première Présidence de la Cour des comptes un censeur moins acerbe, mais surtout moins écouté et médiatisé
Ensuite les chiraquiens et plus globalement les archéo-gaullistes qui certes pouvaient apprécier ses prises de positions à l’égard de Nicolas Sarkozy, mais connaissaient trop, d’expérience, son esprit d’indépendance pour espérer le tenir en bride. Jacques Chirac n’est sans doute pas de ceux qui pleureront beaucoup le défunt, vu la nature de leurs relations passées, surtout lors de la mutation du RPR en UMP ( Seguin passait même pour l’une des rares personnes dont Chirac avait peur, vu la violence et l’imprévisibilité des ses réactions).

On ne doit pas non plus trop pleurer le défunt chez les Tiberi au souvenir de la réforme des listes électorales que Seguin voulait opérer et dont ne voulait pas, fort logiquement, le clan Tiberi. Ne parlons pas non plus des anciens proches de Seguin comme François Fillon ou Henri Guaino… Bref, il y aura assurément du beau monde aux funérailles de Philippe Seguin, dont bon nombre de crocodiles à en juger par la nature de leurs larmes.".

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