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jeudi 20 juin 2013

Politique française : la méthode Coué et le croque-mitaine

Entendu successivement, hier et aujourd'hui, chacun sur leur domaine, Madame Geneviève Fioraso (ministre de l'enseignement supérieur, de la recherche et de l'espace ; je n'ai appris qu'hier qu'à ces deux domaines déjà vastes s'ajoutait l'espace qui est sans limites) et Monsieur Le Driant; ce matin même, à propos du Mali essentiellement. L'un et l'autre m'ont convaincu que, dans l'exercice gouvernemental, aux « éléments de langage », toujours présents, s'est ajoutée désormais la méthode du bon psycho-pharmacien Emile Coué.

Honneur aux dames et à la chronologie ; commençons donc par Madame Fioraso qui s'exprimait hier sur France-Info ou sur Europe (peu importe puisque, dans les deux cas, le discours est strictement identique.). Je sais bien, pour lire mediapart que l'université et la recherche ne sont pas des sujets qui intéressent beaucoup les Français. Je ne leur donnerai d'ailleurs pas tort, mais je pense que cela ne tient pas aux sujets eux-mêmes, mais bien plutôt à la façon dont on les aborde et les traite. Le blog étant un genre bref je serai court.

Madame Fioraso s'est efforcée, une fois encore, au cours de ce bref entretien, de démontrer que ce gouvernement fait davantage que le précédent pour les universités, avec la création de 1000 postes par an durant cinq ans et une augmentation d'un ou deux pour cent du budget). Soit et dont acte. Mais qu'est-ce que cela va changer aux problèmes des universités et de la recherche françaises qui sont naturellement ailleurs.

On sent, à la rhétorique de ses propos, que les interlocuteurs de Madame Fioraso (que mon Dragon s'obstine à nommer joliment "Madame Firent assaut") sont essentiellement les syndicats qui, quelle que soit la question posée, répondent, toujours et invariablement, par des demandes de postes et de moyens, sans naturellement envisager, un instant, les questions essentielles.

Je puis témoigner, par expérience de bon nombre d'universités que je connais (et mon expérience dans ce domaine est hélas longue et diverse) que les universités ne manquent, le plus souvent et surtout les plus anciennes et les plus grandes, ni de postes ni de moyens, mais essentiellement de la volonté de les répartir de façon plus judicieuse et plus efficace, en exigeant aussi, dans un certain nombre de cas, que les services pédagogiques et administratifs des personnels soient effectivement effectués.

Je puis témoigner que dans une université qui était la mienne lorsqu'est intervenue la fameuse loi des 35 heures, la panique s'est instaurée, dans les services administratifs, non parce qu'on allait devoir réduire les services mais parce qu'il aurait fallu, au contraire, les augmenter pour travailler effectivement 35 heures hebdomadaires devenues fatidiques. On se livra alors à des calculs savants, avec falsification des emplois du temps et évaluation des horaires sur l'ensemble de l'année, pour parvenir à passer, au moins en apparence, des 30 ou 32 heures effectives et réelles aux 35 heures réglementaires.

Si certaines disciplines sont effectivement surchargées en étudiants (comme ce fut le cas, un moment, de la sociologie puis de la psychologie, domaines dans lesquels nul ne se posait le problème du devenir professionnel des milliers d'étudiants qu'on y inscrivait en première année), d'autres sections ont plus de personnel que d'étudiants ou presque ; je ne citerai pas de cas précis pour ne se fâcher personne, mais chacun sait que les lettres classiques ou les langues slaves ne sont pas surchargées. Le problème est que les universités, pourtant autonomes sur ce point bien avant la loi LRU, sont en fait totalement incapables de "gérer" les postes, chacun tenant l'autre par la barbichette, et, tout bêtement, de faire passer un ou deux postes, devenus inutiles d'une discipline, dans une autre qui en aurait besoin. Tout le monde le sait évidemment, mais il n'est pas question d'évoquer, où que ce soit, cet aspect. Ne parlons pas ici de l'encadrement des étudiants dans les facultés de médecine parisiennes où, naguère encore, il était, mieux qu'au MIT, de 2,5 étudiants par enseignant !

Monsieur Le Drlant lui s'est exprimé sur le Mali, suite à l'accord conclu à Tombouctou entre Bamako et le Nord Mali qui, nous a-t-il précisé, règle parfaitement et définitivement tous les problèmes de l'Etat malien. Les troupes maliennes vont enfin pouvoir revenir à Kidal qui leur était interdit. Oublions le passé ; on met en place une commission mixte Sud-Nord qui réglera tout ; les élections auront bien lieu, en toute "transparence" et équité, le 28 juillet 2013, même s'il n'y a ni listes électorales, ni cartes d'électeurs avec ou sans photos. Bref, tout est pour le mieux dans le meilleur des Malis possibles.

Que sera, sera et l'avenir jugera ! Je ne pense pas, mais c'est un avis personnel, que, si élaborés que soient les "éléments de langage" du ministère de la défense, on règle si facilement des antagonismes millénaires. Quant au "développement" du Mali, les quelques milliards annoncés se perdront peut-être dans les sables car ce n'est pas la première fois qu'on met en place des "plans de développement du Nord" et, sauf erreur de ma part, il y en a déjà eu un au début des années 80 (entre autres) qui n'a pas eu plus de résultats que ceux qui l'avaient précédé et que ceux qui l'ont suivi).

"Éléments de langage" et "méthode Coué" d'une part, mais, d'autre part et dans un autre domaine, on agite le croque-mitaine. Le non-cumul des mandats qui était l'un des engagements les plus forts du candidat Hollande lors de l'élection présidentielle est mal barré et il faut trouver autre chose sans perdre la face.

Tout cela, comme le reste, n'est qu'une affaire de communication ; on a donc imaginé de mettre en place un commando-suicide d'élus, quelque peu disparate dans ses motivations (Laurent Wauquiez !!!!), dont la proposition centrale, pour le moins inattendue, est de supprimer la plupart des avantages attachés aux fonctions de représentation nationale, sur le plan de la retraite comme dans le domaine fiscal. La levée de boucliers immédiate conduite, une fois de plus, par le président Claude Bartolone (François doit regretter de ne pas avoir juché Ségo sur le perchoir !) n'a pas tardé et ce dernier a même amené Henri Guaino à se rallier à son panache blanc de la révolte, ce qui est tout dire !

Échaudée par cette proposition aussi téméraire que peu crédible, la majorité socialiste aura assez de bon sens pour accepter sans vergogne comme à l'accoutumée, sur le cumul des mandats et les conflits d'intérêts, une version si édulcorée qu'elle en devient "transparente" !

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