Rassurez-vous,
je ne vais pas vous parler mode, sujet auquel je n'entends rien (c'est toutefois
un point commun à divers sujets que j'ai le front de traiter ici) ni automobile
et carburant, sujet auquel je n'entends pas davantage et qui ne m'intéresse pas
plus. Comme toujours, le point de vue que j'exprime ici est celui d'un Huron
pourvu de ce bon sens élémentaire dont semblent dénué nombre de nos grands
capitaines d'industrie comme, hélas, la plupart de nos politiques.
La France est,
en effet, le pays du monde où l'usage du diesel (ou gaz-oil ou encore gazole) comme
carburant est le plus répandu, puisque 75 % des véhicules qui circulent dans
notre beau pays, utilisent ce type de carburant. Commençons donc par un doigt d'histoire
l'explication de ce qui est, avec les droits de l'homme et le vaudeville une des
spécificités françaises.
Le père de cette
mode est Monsieur Jacques Calvet qui, après avoir été chez Giscard et dans la
banque (j'espère qu'il y a mieux réussi), est entré chez PSA comme PDG et y
resté entre 1983 et 1997. Il y était, vous en souvenez peut-être,
somptueusement rémunéré, du fait en particulier des augmentations qu'il s'était consenties et, suite à la publication de sa feuille d'impôt par le
Canard enchaîné, il a traîné cet
hebdomadaire en justice dans un interminable procès qui a fini devant la Cour
européenne de justice avec le triomphe de notre effronté palmipède et la
défaite de la justice française.
C'est Monsieur
Calvet, en grand capitaine d'industrie qu'il était, a entraîné la
production automobile française sur la voie du diesel, ce qui était
relativement facile moins pour les avantages que fournissait ce type de
motorisation que pour des raisons économiques, puisque c'est l'État qui est, en
fait, le maître du prix des carburants par les taxes qui forment 75% des prix.
Pour imposer le diesel, on y a pratiqué une réduction des taxes afin qu'il coûte beaucoup moins cher que l'essence elle-même. CQFD!
Calvet et l'État
jouaient sur le velours dans ce domaine et on se garda de parler à la fois de la
pollution, qui est infiniment plus grande dans l'usage du diesel (même si elle
s'est un peu réduite au fil des années, pour le CO² surtout, mais par pour les
microparticules) mais surtout, et c'est beaucoup plus grave, du fait que, pour
des raisons obscures mais incontournables, la production française de diesel
est tout à fait insuffisante pour le niveau de consommation que l'on a provoqué
dans notre pays.
Durant des
décennies, on s'est naturellement abstenu de nous dire cela; on a jeté un voile,
devenu de plus en plus impudique au fil des ans, sur ces deux aspects majeurs
la pollution et la nécessité d'acquérir ce carburant à l'étranger.
Avec cette totale
et rare cécité qui est, à la fois, celle de nos grands capitaines d'industrie
comme de nos décideurs politiques majeurs, nous avons développé en France une
énorme consommation d'un carburant qui, non seulement pollue notre atmosphère mais
surtout que ne peuvent couvrir que, dans une très faible mesure, nos propres moyens
de production, alors qu'on ferme les raffineries locales ! Va comprendre Charles ! Je laisse au représentant du lobby diesel le soin de vous
expliquer pourquoi nous produisons si peu de diesel dont nous avons grand besoin depuis un quart de siècle ; cela, paraît-il coûte très
cher mais alors l'État (Monsieur Calvet s'en foutait lui !) aurait dû réfléchir
à cet aspect avant d'encourager la généralisation de l'usage de ce carburant que nous ne produisons pas.
Pour faire
court, comme toujours je reviens directement aux faits saillants et absurdes à
la fois.
Nous achetons donc
une grande partie de notre carburant diesel aux États-Unis, qui apparemment,
produisent, eux, du gazole qu'ils ne consomment pas et nous exportons, vers ces mêmes
États-Unis, de l'essence que nous produisons en grande quantité mais que nous
ne consommons pas non plus. Vive le Père Ubu!
Des norias de
tankers se croisent donc au milieu de l'Atlantique ; les uns viennent de l'Est
(de chez nous) et vont vers l'Ouest, chargés d'essence française ; les autres
vont d'Ouest en Est, chargés de gasoil américain! Ils doivent se faire coucou
au passage!
On croit rêver.
Cela me rappelle, puisque la viande est aujourd'hui à l'honneur avec
"l'effet canasson" que j'évoquais hier dans mon blog, ce que me
disait un ami qui était dans le commerce international des viandes; il m'expliquait
alors que l'on exportait des porcs bretons vers l'Europe de l'Est tandis que
l'on expédiait vers notre pays des cochons hongrois. Je lui avais suggéré, par le
simple robuste bon sens, d'installer de chaque côté un employé, munis de tampon
avec la mention "breton" d'un côté et "hongrois" de l'autre
qui aurait pu tout simplement tamponner, au départ, comme "hongrois"
les porcs bretons et comme "bretons" les cochons hongrois, en évitant,
en outre par là même, à ces pauvres animaux, un long et pénible voyage.
Tout cela est
évidemment absurde, mais l'État, bien loin de reconnaître son erreur et de
battre sa coulpe, s'emploie depuis des années, subrepticement d'abord et désormais
ouvertement, à augmenter progressivement le prix du gasoil pour l'amener à peu
près au niveau du prix de l'essence, ce qui évidemment réduira peu à peu la
consommation de diesel mais n'évitera pas, dans l'immédiat et aussi longtemps
qu'il se vend en France autant de véhicules diesel, la noria alternée des
tankers dans l'océan Atlantique. C'est aussi (mais qui le dit?) un élément de
la crise de l'industrie automobile française:
Et dire que ce
pauvre Descartes essayait de nous faire croire que "le bon sens est la chose
du monde la mieux partagée". On oublie toujours la suite de cette phrase qu'il faut
mentionner, surtout à l'intention de nos décideurs et de nos politiques : "Chacun
pense en être si bien pourvu, que même ceux qui sont les plus difficiles à
contenter en toute autre chose, n'ont point coutume d'en désirer plus qu'ils en
ont".
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