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dimanche 3 février 2013

Honni soit qui Mali pense N° 1 : "Ce chameau est le plus beau jour de ma vie!"


Ce texte n'est en rien le premier que je publie dans ce blog sous ce titre mais je n'ai ni le goût ni le courage de chercher combien j'ai pu en écrire auparavant et je considère, non sans quelque arbitraire, que le discours de François Hollande à Bamako ouvre une ère nouvelle dans les relations afro-françaises (je suis loin d'en être sûr) dont il est le premier de mes écrits.

 Brazzaville 1947 ; Bamako 2013.

Pour les historiens du futur, le parallèle sera peut-être tentant entre le discours du général De Gaulle à Brazzaville en 1947 (qui demeurera, dans la suite, une référence historique majeure jusqu'à l'indépendance de l'Algérie) et le discours de François Hollande à Bamako, le 2 février 2013, à l'occasion de la "libération" du Mali.
Je rediute toutefois que le rapprochement ne soit quelque peu hardi voire hasardeux et je crains que le second ne disparaisse beaucoup plus vite que le premier de la mémoire, pour toutes sortes de raisons.

On a sans doute jugé habile dans l'entourage militaire présidentiel de présenter l'action de la France au Mali ( une forme de « libération » du Nord-Mali de l'oppression djihadiste), comme un juste retour des choses, après le rôle que des contingents africains (sans doute, en fait, plus "soudanais" - donc plus ou moins "maliens" que sénégalais!) ont joué dans les deux grandes guerres. Jugé habile, cet argumentaire pourrait toutefois susciter de la part des Africains une forme d'étonnement, car, sur ce plan de la reconnaissance, la France aurait été mieux inspirée de céder, depuis un demi-siècle, aux légitimes revendications des anciens "tirailleurs sénégalais" qui n'ont cessé de réclamer une revalorisation de leurs pensions militaires. Il est vrai que, comme ils ont désormais sans doute tout passé l'arme à gauche (si j'ose dire), on ne risque plus grand-chose à prendre une telle position.

Lors de la soudaine décision de notre président de la République d'intervenir militairement au Mali, j'avais émis l'hypothèse, sans preuve, que la rapidité de sa décision tenait sans doute à la pression des hauts dignitaires de notre armée qui n'avaient pas dû être très satisfaits des suites de l'intervention en Côte d'Ivoire et plus généralement de la poursuite de la réduction de notre présence militaire dans cette Afrique, qui est pour eux le dernier pré carré de la France. Peut-être y avait-il de leur part (chez les "mili fana") la croyance sincère que l'intervention militaire immédiate était indispensable (on observe toutefois que les quelques centaines d'hommes prévus au départ, en appui logistique exclusif, sont devenues 3500 soldats français en intervention directe), mais on ne peut s'empêcher de penser qu'ils défendaient aussi par là à la fois le budget de l'armée (ne perdons pas de vue l'élaboration actuelle du Livre blanc de la défense qui semble impliquer la poursuite des réductions de crédits), mais aussi et peut-être surtout, des intérêts personnels, car notre présence en Afrique assure, à ceux qui y sont, de très sensibles avantages en matière de rémunération comme d'ancienneté.

Ne parlons pas de la reconnaissance de « Papa Hollande » qui a enfin connu en Afrique la chaleur extravagante d'un accueil populaire délirant et des applaudissements qu'il ne rencontre guère en France, lors de ses visites aux usines qu'on ferme ! Il a d'ailleurs lui-même choisi la ligne un peu médiane qu'il affectionne entre une sensible émotion qu'il a volontiers exprimée et une prudence dans les paroles que la situation rend indispensable. "La France restera au Mali le temps qu'il faudra". Notre Président revient là à un registre plus "normal" ; moins gaullien, il est ici plus proche de Fernand Raynaud et de son fameux "affût du canon"!

Le terme "franco-malien" qui était le mot-clé du discours des préludes de l'intervention est devenue aujourd'hui tabou comme j'ai pu le montrer dans mon post d'hier et tous les propos de François Hollande ont confirmé cette impression ; je ne l'illustrerai que par les derniers mots de son discours que je cite de mémoire ; il s'y adresse au(x) peuple(s) malien(s) (et notre belle langue orale, à la différence de quelques autres, ne permet pas de savoir s'il s'agit là d'un singulier ou d'un pluriel, ce qui ménage opportunément l'avenir) ; la péroraison est la suivante : « Vive le Mali ! Vive la France ! Vive l'amitié entre le Mali et la France!". Réféchissez-y!

J'ai déjà été long et, sur le plan général qu'il faudra bien finir par aborder, je ne mentionnerai ici que le propos d'un journaliste qui est sans doute, à mes yeux, le meilleur et le plus fin connaisseur de l'Afrique et que, de ce fait, on n'entend guère, Antoine Glaser, l'ancien rédacteur en chef de la Lettre du continent. Je l'entendais dire que la conception de François Hollande pour l'avenir des relations entre le Mali et la France évoquait une "Françafrique vertueuse". J'en suis moins sûr que lui (qui est par ailleurs très prudent) car sur le Mali comme sur bien d'autres choses, "on ne nous dit pas tout" mais en revanche nombre de sottises !  Nous y reviendrons.

En des circonstances moins dramatiques et s'agissant de personnages moins importants, j'aurais suggéré à François Hollande, suite au cadeau qui lui a été fait à Ouagadougou (plus encombrant que les diamants de Bangui!), pour parodier Joseph Prudhomme, une formule quelque peu adaptée : "Ce chameau est le plus beau jour de ma vie !".

2 commentaires:

Anonyme a dit…

Je dois une explication aux nobles étrangers qui me font l'honneur de fréquenter ce blog.Caricature du bourgeois français du XIXe siècle, créé par Henry Monnier, Monsieur Prudhomme apparaît en 1830 dans la première version des Scènes de province, puis dans la pièce Grandeur et décadence de M. Joseph Prudhomme, ensuite dans les deux volumes de dessins Mémoires de Monsieur Joseph Prudhomme (1857) et enfin dans Monsieur Prudhomme chef de brigands (1860). L'une de ses plus fameuses formules est : « Ce sabre est le plus beau jour de ma vie. ». Usbek

j.michel a dit…

Qui va payer le transport du dromadaire jusqu’aux jardins de l’Elysées ? Les avions militaires qui reviennent à vide sont-il équipés pour ce type de transport ?