Messages les plus consultés

vendredi 15 février 2013

L'école 2013 (N° 2) Retour en arrière. Mon blog du 13 mars 2007. Les IUFM et les sciences d'éduc.


France Inter. 13 mars 2007. Emission du matin sur les enseignants. Collège Georges Duhamel dans le 15e. Je ne connais pas la géographie scolaire parisienne, mais je doute que Monsieur Balladur, député de cet arrondissement, ait choisi comme terrain de jeux politiques un quartier "difficile" ou même un "quartier" comme on dit désormais.
J’ai d’ailleurs entendu, au début, vers 7 heures 45, en prenant en marche l’émission de Nicolas Demorand, que les élèves, qui arrivent en classe, restent debout ou, s’ils sont déjà assis, se lèvent à l’arrivée du professeur. Deux hypothèses se sont alors, en un instant, télescopées dans ma tête. Ou bien tous mes amis enseignants, qui me racontent leur quotidien, me mentent et tous leurs élèves sont, en réalité, disciplinés, polis, etc., ou bien le Collège Georges Duhamel dans le 15e parisien, sous la double, auguste et bénéfique influence de Georges (Duhamel) et d’Edouard (Balladur), est, miraculeusement, comme la tente d’Holopherne chez Giraudoux, le seul lieu du monde exempté du péché originel et ses élèves, sont les seuls en France, à continuer à s’y comporter comme autrefois. Je ne me risquerai pas à trancher !
Revenons au sujet. N. Demorand recevait, en ce matin du 13 mars 2007, un certain Jacques Durand, président de la conférence des directeurs d’IUFM.

Pour ceux qui l’auraient oublié, les Instituts de Formation des Maîtres (IUFM) ont été créés, en 1989, par Lionel Jospin, alors ministre de l’éducation nationale, mais, en fait, surtout par celui qui était alors son conseiller spécial, pour quelque tems encore, son ami de trente ans, Claude Allègre. L’idée était de parer les anciennes écoles normales des modernes oripeaux des sciences de l’éducation, tout en y agrégeant quelques universitaires, à qui les IUFM offraient, par raccroc, des postes de maîtres de conférences ou de professeurs, dont les universités elles-mêmes ne les jugeaient le plus souvent pas dignes.

La chose était d’autant plus étrange que, comme je l’ai déjà dit et écrit souvent, C. Allègre était un adversaire résolu et lucide des sciences de l’éducation dont il aimait à se moquer. Je pense ici au ballon, cher à cet ancien basketteur, que les sciences de l’éducation nomment le « référentiel bondissant » dans un exemple que C. Allègre lui-même se plaît à rappeler. La formule complète (je cite de mémoire) est que le joueur « doit se situer dans le temps et dans l’espace par rapport au référentiel bondissant », ce qui, en langage normal, veut dire simplement « recevoir ou intercepter la balle ».

L’échec des IUFM a été patent et, selon le bon vieux principe du pendule si cher à l’administration française, on a décidé de revenir au point de départ, en aggravant la situation. On va donc réintégrer les IUFM dans les universités, au lieu de les supprimer. Comment le faire d’ailleurs car que ferait-on des enseignants des IUFM, dont une partie relève du secondaire et n’a pas le statut des enseignants du supérieur ? 0n ne va donc rien changer aux défauts des IUFM, tout en créant de nouveaux problèmes dans les universités.

En fait, tout ce que j’ai dit, dans des blogs précédents, des sciences de l’éducation et de Philippe Meirieu, s’applique ici. Ph. Meirieu a été non seulement le gourou de la création de ces Instituts, mais, pas fou, s’est lui-même récupéré, au terme de sa faveur politique, à la direction de l’IUFM de Lyon, pour y attendre la retraite en s'essayant à la politique.

Un des moments forts – l’un des rares passages intéressants et surtout sincères de l’émission - a été celui où un jeune enseignant a osé expliquer qu’alors que le stage IUFM commençait en septembre, c’est en février qu’on donnait les formations sur la lutte contre la violence en classe (arts martiaux, etc… ?).

Vu l'intérêt et la nature de telles « formations », cela ne me paraît pas trop grave, simplement inepte, comme bien d’autres choses. Moment comique aussi quand ce même jeune enseignant, dans la consternation générale, évoque l’une des perles du pédagogisme des "sciences de l’éduc."dans les IUFM. Les stagiaires, assis sur des tapis de sport, sont invités à pratiquer collectivement un exercice dans lequel ils se voient, tour à tour, lancer une balle dont la réception leur accorde une minute de temps de parole. Au terme de la minute, qu’ils aient parlé ou non et quel que soit le propos, ils repassent la balle à l’animateur, qui va la renvoyer à un autre stagiaire. Cette affaire est si ridicule qu’aucun des participants à l'émission n’ose même en parler ; le dénommé Jacques Durand, pressé par N. Demorand et sans doute rompu à la pratique du "tapis de parole uéfèmien", finit par noyer le poisson dans un flot de propos aussi généraux qu'insipides ! On a tout de même eu un bref instant de sincérité et de vérité.

Tout confirme (mais qui en doute encore ?) que les sciences de l’éducation sont en fait un « pédangogisme » dans lequel les recettes d’une prétendue didactique sont plaquées sur des connaissances disciplinaires de plus en plus réduites et incertaines. Il est significatif de voir que les étudiants se plaignent, d’une seule voix, du niveau trop élevé des concours qui pourtant n’a guère varié.

En fait, sauf à considérer comme de réelles formations les discours théoriques sur la lutte contre la violence ou les pitreries de passage de parole par l’envoi d’un ballon…,les IUFM ne forment à rien du tout et leur création n’a rien changé. Le malheur est qu'on a mis vingt ans à le reconnaître, sans décider d'essayer d'abord de voir les problèmes.

Autrefois, pour prendre l’exemple du CAPES, celui ou celle qui était reçu à ce concours faisait un stage, une année durant, avec en général deux maîtres de stage différents et en alternant stage actif et passif. En fin d’année, on passait un CAPES « pratique » avant de rejoindre son premier poste. Les IUFM n’ont à peu près rien changé sur ce point pourtant essentiel. Il y a toujours une année de formation plus ou moins bidon, avec, en plus, à l’IUFM, les discours sur la lutte contre la violence et les jeux de ballon évoqués ci-dessus. Les enseignants continuent donc à ne pas être formés. On peut d’ailleurs s’interroger sur la possibilité même de former réellement à un tel métier et nous y reviendrons. L’enseignement, comme la médecine, est un art ; il y a des gens doués, sans avoir jamais appris à enseigner, comme il y en a qui ne le sont pas et qu’il faudrait, en vain peut-être, essayer de former, si l’on ne peut les inviter à choisir un autre métier. En, revanche, ce qui est inévitablement catastrophique est de ne pas bien connaître ce que l’on prétend enseigner, car on ajoute l’insécurité à la maladresse.

C’est ainsi qu’au CAPES interne de physique, par exemple, on propose au candidat un problème du niveau de la 4ème. En apparence, c'est logique puisqu’il enseignera la physique à ce niveau et on présente ainsi la chose. En réalité, si on lui donnait un vrai problème de physique, sans aller jusqu'au niveau du CAPES (le concours externe), pour évaluer par là, son vrai niveau de compétence en cette matière, il ne saurait pas le résoudre. Rien d’étonnant à cela, puisque la très grande majorité de ceux et celles qui passent ce concours interne ont, dans le passé, échoué au concours externe !

Dernière remarque pour Nicolas Demorand, qui s’il parle bien anglais et aime à le faire savoir, à des lacunes en latin et en français. On dit, en effet, « eT cetera… » (eT = et) et non pas « eK cetera).

Aucun commentaire: