Après cette interruption, sportive et dominicale, j'en reviens à la fraude sociale.
Comme j'ai déjà eu l'occasion de dire et comme cela se fait toujours, on s'en prend toujours aux petits plutôt qu'aux gros ; dans le même ordre d'idées, on culpabilise les millions d'assurés sociaux, qui; il est vrai, coûtent très cher à la Sécurité sociale (ce qui est parfaitement exact précisément car ils sont des millions), sans s'en prendre réellement aux véritables responsables et/ou bénéficiaires d'une bonne partie des fraudes.
J'ai essayé avant-hier de montrer comment le système déclaratif de certains professionnels de santé semble être conçu pour empêcher tout contrôle et, par là même, pour les encourager à la fraude, s'ils jugent leur rémunération insuffisante (mais qui n'est pas de cet avis!) et s'ils ne sont pas parfaitement honnêtes. Je ne parle même pas ici de l'incurie et de la gabegie des services de la Sécurité sociale, qui peuvent facturer trois, quatre ou cinq fois la même activité pour un professionnel de santé, sans même s'en apercevoir. Ce détail ne gêne personne, à moins que l'on ne suppose une complicité entre le dit personnel de santé et les employés de la SS qui sont chargés de la facturation. Dans notre belle région marseillaise rien n'est impossible dans ce domaine, comme on a pu le constater à propos d'autres cas.
Toutefois l'affaire des infirmières de la Gironde, que j'ai citée à partir du site infoSecu qui lui-même reprenait des informations parues dans la presse, montre qu'on est là un autre niveau que le simple bricolage sur le nombre de déplacements, l'heure des visites ou le cumul des indemnités. Comme disait Fernandel dans Topaze à propos des pissotières à roulettes : "Tout ça, c'est pas des affaires, c'est de la poésie !".
Le fin du fin pour deux ou trois infirmier(e)s qui veulent vivre sur un grand pied sans s'embêter dans le va-et-vient matutinal et vespéral des visites à domicile, il y a une solution élégante et radicale qui est celle qu'avaient adoptée les infirmières girondines mais qui semble fort loin d'être un cas unique.
Il suffit de créer une société anonyme à responsabilité limitée (une SARL) qui, en fait, ne s'intéressera qu'aux cas graves de longue maladie (à 100%) ou de soins palliatifs, car on ne va pas s'embêter à bricoler pour deux tubes d'aspirine ou trois bandes Velpeau. Le principal problème en la circonstance est sans doute de s'assurer l'amicale complicité d'un ou deux médecins (petit pourcentage sur les affaires ?) qui vous remettront des ordonnances vierges, sur lesquelles vous pourrez établir les commandes qui seront essentielles dans ce genre de commerce.
Sans que cela soit vous qui assurez les soins à domicile (trop peu rémunérateur ou pénible), vous allez vous occuper uniquement des commandes, non pas des médicaments (trop surveillé) mais de ce que les documents de la Sécurité sociale nomment pudiquement « accessoire" (au singulier ce qui est pour le moins curieux vu les quantités et les tarifs). Ce seront là des seringues, des gants, des sacs poubelles, des tubulures, etc. ; tous ces accessoires sont, en général, peu coûteux, mais si vous les commandez pas en énormes cartons eux-mêmes en nombre important, cela finit par faire du chiffre. Pour vous donner un exemple réel et précis, pour trois mois, 18 000 € !
Dans la mesure où vous avez des ordonnances vierges, nul besoin de passer réellement par le médecin et vous êtes totalement maître des commandes passées. Il faut, en revanche, que votre malade dispose d'un espace suffisant pour stocker les énormes et multiples cartons où se trouvent les produits en cause, cartons qui sont d'autant plus gros et grands que ces produits, peu coûteux, sont volumineux.
Pas besoin de vous faire un dessin sur le fonctionnement du système que personne ne contrôle puisque les factures sont réglées rubis sur l'ongle par la SS qui ne regarde pas plus loin que le bout de son ordinateur.
Le fin du fin est que si votre malade en soins palliatifs passe l'arme à gauche ou si celui qui est en longue maladie voit son état s'améliorer au point que le traitement devient inutile, vous ne manquez pas, à ce moment là, de récupérer (sans inventaire de retour!) tous les cartons pleins d'accessoires, stockés d'avance mais inutilisés, que la Sécurité sociale vous a déjà payés et que vous pouvez, sans le moindre problème, revendre à d'autres malades; en faisant payer à nouveau ses articles déjà payés par la SS. Simple mais efficace non ?
C.Q.F.D. : non pas ce qu'il fallait démontrer, mais ce qu'il faudrait dénoncer !
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