Comme souvent, il faut aller chercher hors de France une information que notre presse nationale se refuse à nous donner. Je ne parle pas ici des tabloïds anglais ou américains mais de la très sérieuse presse suisse francophone. Ainsi, dans le Temps du 7 novembre 2008 Sylvain Besson écrivait à propos de la politique et du sexe :
"Ce n’est pas un ouf, mais un hourra de soulagement qu’a poussé la classe politique française. De la gauche radicale à la droite musclée, une unanimité rare a salué le maintien de Dominique Strauss-Kahn à la tête du Fonds monétaire international (FMI). Le fait qu’il ait été blanchi par une enquête interne, après une liaison extraconjugale avec une salariée, a été vu comme une victoire de la France gauloise et épicurienne sur l’Amérique puritaine.
Mais l’affaire a aussi délié les langues, à la fois sur le rapport aux femmes des politiciens français et sur le tempérament singulier de Dominique Strauss-Kahn.
Depuis quelques jours, les médias laissent suppurer des allusions à sa “gourmandise” (L’Express) ou à de “vieilles histoires” (Le Figaro) qui circulaient bien avant son arrivée au FMI, en 2007. L’intéressé a réagi en promettant de poursuivre en justice ceux qui relaieraient des “rumeurs malveillantes” sur son compte. De quoi s’agit-il ? Pour l’essentiel, de témoignages montrant que le dérapage de Dominique Strauss-Kahn au FMI était programmé. La faute à un comportement pesant, presque obsessionnel envers les femmes, que le contexte permissif du milieu politique français a sans doute encouragé.
Le récit le plus détaillé est celui de Tristane Banon, une journaliste et romancière qui a rencontré DSK il y a plusieurs années pour une interview. Le lieu du rendez-vous était insolite : une garçonnière proche de l’Assemblée nationale, avec pour tout mobilier un grand lit et une télévision. “La partie interview a duré cinq minutes et demie”, précise Tristane Banon ; le temps que l’ancien ministre de l’Economie pose sa main sur elle et lui propose de transformer l’entretien en ce que la terminologie du FMI appellerait une physical affair. “J’ai déjà croisé des dragueurs un peu lourds, dit-elle. Mais là, c’était effrayant. Il n’était plus lui-même.”
Le mutisme des médias favorise toutes les rumeurs
Un journaliste qui a enquêté sur l’affaire relativise : “Il a mis sa main sur sa cuisse, elle a dit non et puis basta.” Ce qui n’enlève rien au caractère désagréable de l’expérience. “Une drague aussi crue peut être très impressionnante lorsqu’elle vient d’un homme public”, estime le psychiatre Paul Bensussan. “Car elle traduit une abolition du sens du risque”, de la part d’un personnage dont la position exposée devrait lui interdire de tels comportements. Tristane Banon n’est pas la seule à être ressortie choquée de sa rencontre avec Dominique Strauss-Kahn. Ainsi, l’avocat parisien Emmanuel Pierrat explique avoir été approché par une femme gravitant dans le milieu politique, qui avait répondu à une “annonce censée améliorer sa situation professionnelle”. Confrontée à des avances pressantes du politicien, elle a “pris la poudre d’escampette avant que les choses ne dégénèrent”, affirme l’avocat.
Aurélie Filippetti, aujourd’hui porte-parole du groupe socialiste à l’Assemblée nationale, a gardé un mauvais souvenir d’une tentative de drague “très lourde, très appuyée” de son camarade de parti. Depuis, “je me suis arrangée pour ne pas me retrouver seule avec lui dans un endroit fermé”, explique-t-elle. D’autres témoignages décrivent toujours le même comportement : une sollicitation immédiate, insistante et directe, suivie de coups de téléphone et d’envois de SMS qui peuvent durer des jours. Mais les médias français observent un silence presque absolu sur ces pratiques.
Cette tolérance générale a deux inconvénients. D’abord, estime Christophe Deloire, coauteur du best-seller Sexus politicus (éd. J’ai lu, 2008), “la place de la femme en politique a longtemps été très liée aux amours du prince”. Ensuite, le mutisme des médias a transformé Paris en un nid de rumeurs malsaines, où les préférences sexuelles des personnalités sont avidement consignées par des officines parapolitiques, voire par la police elle-même. Divulgués il y a peu, les carnets d’Yves Bertrand, ancien patron des Renseignements généraux, fourmillent d’anecdotes sur les liaisons ou les déviances supposées des uns et des autres.
Dans le cas de Dominique Strauss-Kahn, le problème semble aller au-delà d’un manque de maîtrise vis-à-vis des femmes. “Il a un comportement transgressif, il considère que les règles ne s’appliquent pas à lui”, confie une personne qui a travaillé à ses côtés. Ce complexe de “maître du monde” se serait aggravé après 1999, lorsque Dominique Strauss-Kahn dut démissionner du ministère de l’Economie à cause d’une affaire de financement politique où on lui reprochait une lettre antidatée. La justice a conclu au non-lieu. Très réactif durant la crise au FMI, l’entourage de DSK est devenu ces derniers jours curieusement silencieux. Son avocat et ses communicants de l’agence Euro-RSCG n’ont pas répondu aux questions du Temps. “Je ne me crois pas autorisé à faire de la psychanalyse sauvage à propos du directeur du Fonds monétaire international”, commente son ancien bras droit au PS, Jean-Christophe Cambadélis".Sylvain Besson, Le Temps, 7 novembre 2008.
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