Je n'ai évidemment pas vu le film « La conquête » qui vient d'être présenté à Cannes et je ne le verrai certainement pas. Toutefois, comme vous le devinez déjà, ce n’est pas à mes yeux une raison pour n’en point parler.
J'en ai vu en effet quelques extraits, toujours les mêmes naturellement, qui ont été présentés par les télés pour appâter le chaland dans le lancement de cette production. J'ai trouvé l'acteur qui joue Sarkozy remarquable dans l'imitation qu'il fait du personnage, avec, en particulier, pour masquer sa calvitie, une perruque très réussie ; il m'a semblé aussi que les autres protagonistes étaient assez ressemblants ce qui est une forme de réussite en pareil cas.
En effet, dans un film « historique » (car c’en est un, quoique contemporain), la tentation est grande pour le spectateur de chercher à l'écran des représentations des personnages qui soient conformes à celles qu'il peut lui-même avoir, qu'il s'agisse de personnages réels qu'il connaît, ou de personnages historiques qu'il imagine à travers les représentations qu'on en a donné. Pour prendre un exemple fort éloigné de « la conquête », j'ai personnellement été choqué, dans la série télévisée des « Tudors » qui, par ailleurs, n'était pas mauvaise, de voir un Henri VIII fringant d'un bout à l'autre de son histoire, alors que la représentation que nous en avons, plutôt sur la fin de sa vie, est celle d'un obèse répugnant à peu près infirme.
Et Sarkozy me direz-vous ? Rien à dire sur le personnage lui-même qui paraît effectivement représenté à la fois avec exactitude et talent et même une forme de mimétisme, par Denis Podalydès. J’ai trouvé aussi, dans le peu de séquences que j'ai vues, Villepin tout à fait ressemblant (j'ai même cru un instant que Galouzeau avait joué son propre rôle), mais le plus remarquable de tous m'a paru Chirac, à peine entrevu, que campe Bernard Lecoq. Il est vrai que ce qui est à mes yeux le plus ressemblant et le plus remarquable dans le personnage (Que Bernard Lecoq veuille bien m’excuser !) est moins Chirac lui-même que son pantalon !
Le pantalon de Chirac est en effet à mon sens le clou du film. Au-delà de la ressemblance flagrante, il me paraît symboliser en effet, en quelque sorte, l'évolution historico-politique globale du personnage.
Le Chirac jeune, fringant et impétueux,( comme disait Acaste, « fort aimé du beau sexe et bien auprès du maître »), portait son pantalon comme tout le monde et si je puis dire comme sa jeunesse. Au fur et à mesure, qu'au fil des décennies, Chirac a gravi les marches de la politique et du pouvoir (n'oublions pas que, selon ses dires, il a commencé par vendre l'Humanité sur les marchés, en portant son futal à la façon des camarades ), son pantalon est progressivement remonté en direction de ses épaules. Comme vous avez certainement remarqué ce détail, je ne vous ferai pas l'exégèse de cette migration du pantalon chiraquien, de la ceinture vers les aisselles.
Je pense que cette irrésistible ascension ne doit pas être interprétée que de façon symbolique mais aussi et surtout comme une conséquence d’une évolution physiologique, avec la naissance et la montée de l'embonpoint de Chirac, à force de têtes de veau et de Coronas. Nous autres pauvres hommes, lorsque notre taille s'épaissit et que notre ventre commence à pointer, nous n'avons plus guère que deux solutions, hors du régime hollandais.
La première, celle que choisit DSK, est de s’offrir un super tailleur qui, à prix d'or, vous fasse, sur mesures, des vêtements coupés de façon si habile qu'ils donnent l'apparence de la sveltesse au ventre le plus rebondi. L'autre solution, celle qu'a adoptée Chirac,lui qui souvent laisse son veston ouvert, est de choisir entre les deux positions possibles de la ceinture, lorsque l'embonpoint nous conduit à renoncer à l'emplacement médian qui est normalement celui du haut du pantalon et de la ceinture elle-même. Deux choix s'offrent alors ; soit on laisse le ventre repousser le pantalon vers le bas, ce qui est, en général, le choix populaire, voire prolétarien ; la bedaine déborde alors largement sur la ceinture au point qu'on ne la voit plus guère et qu'elle devient, en fait, une sorte de sous-ventrière. Soit, on enferme l'embonpoint dans un pantalon qui le contraint et tente de le dissimuler, mais ce choix conduit inévitablement à faire remonter le pantalon vers le haut. Plus le ventre s'arrondit, plus le pantalon s'élève en direction des aisselles. Ce second choix a été clairement celui de Chirac qui a la fâcheuse habitude de laisser son veston ouvert.
Son pantalon finit donc par ressembler à ces bleus ou salopettes de travail que les ouvriers portaient autrefois et qui montaient aux épaules, presque sous le menton. On pourrait donc imaginer évidemment que, par un tel choix, Chirac retrouve, au moins sous cet angle vestimentaire, les origines sociales et politiques qui furent un moment les siennes au temps de sa jeunesse.
Est-ce « la conquête » du pouvoir par Sarkozy ou le retour de Chirac aux sources prolétariennes ?
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