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mercredi 20 mars 2013

Du syndicalisme français comme l'un des beaux-arts. (S 6). Nicole nota(t) ?


Biographie, brève mais fulgurante comme pour la plupart de nos leaders syndicaux.
La principale caractéristique de Nicole Notat et qu'elle a été la première femme, non pas diriger un syndicat comme on le dit partout, car il y a eu d'autres femmes dans l'éducation nationale par exemple, mais une confédération syndicale majeure, la CFDT.

Pour le reste, rien de très particulier dans la carrière de Nicole Notat. Née en 1947, elle devient institutrice à sa sortie de l'école normale d'instituteurs de Bar-le-Duc et adhère à la CFDT dès 1969. Comme d'autres dans d'autres syndicats, elle y a une carrière fulgurante, puisque, dès l'année suivante, la voilà Secrétaire du Sgen-CFDT de la Meuse, puis deux ans plus tard, membre de la commission exécutive Lorraine. On ne saurait gravir plus rapidement (deux à deux, sinon quatre à quatre) les échelons de la carrière syndicale. Au probable détriment de sa carrière professionnelle car celle-ci est, elle, beaucoup plus courte ; dès 1982, elle devient "permanente" de la CFDT et entre, comme Secrétaire nationale à la Commission exécutive confédérale. En 1988, la voilà Secrétaire générale adjointe puis, en octobre 1992, Secrétaire générale de la CFDT.

Celle qu'on appelle souvent : « la tsarine », passera dix ans dans ce poste, mais ne sollicitera pas, en 2002, le renouvellement de son mandat car, en 1996, le soutien qu'elle avait apporté, en 1995-1996 au Plan Juppé avait singulièrement compromis son image syndicale.

Au fond jusque-là, rien de très étonnant dans la carrière de Nicole Notat, lorsqu'on la compare à celles de la plupart des leaders syndicaux, sinon dans le fait qu'elle est une femme dans un monde d'hommes.

La suite est, en revanche, beaucoup plus étonnante, car à peine a-t-elle quitté son poste de Secrétaire générale de la CFDT qu'elle se lance immédiatement dans une activité commerciale. Une telle mutation est pour le moins inattendue de la part d'une militante de sa trempe. Dès juin 2002, elle crée en effet une "agence de notation sociale et environnementale" qu'elle baptise d'un nom latin Vigeo. Libération, qui annonce la création de Vigeo, s'offre le luxe d'en donner l'étymologie latine (du latin : "Je suis sur le qui-vive") ; elle est naturellement fausse car Libé confond avec "vigilare" (qui a lui ce sens), le verbe "vigeo" qui signifie "être fort, vigoureux, florissant" et est, par là, plus propre à délier la bourse des investisseurs qui ne sont pas forcément soucieux de "vigilance" de la part de leurs évaluateurs!

Le plus étonnant de la chose n'est sans doute pas là, mais plutôt dans le fait qu'en si peu de temps, N. Notat réunit un capital de départ de 12 millions d'euros, crée Vigeo, une société anonyme de droit français et reprend les activités d'ARESE, première
agence d’analyse ISR en France. 39 % de la nouvelle société sont détenus par EULIA, holding commun constitué par la Caisse des dépôts et consignations et des caisses d'épargne. Le capital se répartit surtout entre des investisseurs dont en particulier Danone, Carrefour, le Crédit Lyonnais, ACCOR, Total, AXA, GDF et... la CFDT qui met aussi la main à la poche.


Vigeo démarre ses activités en principe en janvier 2003. Il semble y avoir eu toutefois, en dépit de ces parrainages flatteurs, quelques difficultés de démarrage puisqu'en 2004, on trouve mention dans Google d'une intervention publique de la présidente de Vigeo qui est reportée, la manifestation étant déclarée introuvable.

Toutefois en 2004, voilà Madame Notat installée au 28e étage d'une tour d'affaires parisienne et elle semble avoir réussi dans ce qu'elle appelle elle-même son "intuition"  (« Je sentais que les entreprises seraient de plus en plus tenues d'être responsables, qu'elles devraient informer et rendre des comptes, en garantissant leur objectivité ce qui implique une évaluation extérieure. J'en ai parlé à des dirigeants d'entreprise, des financiers et des institutionnels. Ils ont confirmé que ce besoin était réel et croissant. Certain ont apporté des capitaux pour assurer la création de l'agence. »).

Il n'y a pas lieu de poursuivre ici le récit de ce triomphe entrepreneurial qui semble une parfaite réussite à en juger par son développement (75 salariés dont on espère qu'ils sont syndiqués à la CFDT), mais aussi les présidences et les responsabilités que cumule à l'envi désormais Madame Notat, sollicitée de toutes parts. Pour ne citer que la plus récente, elle vient d'être choisie comme chef de file du groupe de travail « Promouvoir et valoriser l'entreprenariat responsable" des futures Assises de l'entreprenariat mise en place par la ministre Fleur Pellerin.

Puisque Madame Notat semble aimer le latin à en juger par le choix du nom qu'elle a fait pour la société qu'elle a créée, on peut se demander si le succès de son entreprise ne repose pas plutôt sur le nom même de sa créatrice car fonder une agence de notation quand on s'appelle Notat (qui est en outre aussi bien français que latin!), c'est, ou bien croire dur comme fer à la prédestination, ou bien montrer un grand sens de l'humour, ce qui, au fond, n'est pas incompatible et peut, dans un cas comme dans l'autre, séduire les entrepreneurs et les investisseurs.

 

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