Commentaire d'Expat (comme toujours intéressant et
bien informé) sur mon post d'hier ; je le reproduis ici car la plupart ne l'ont
sans doute pas lu.
"Cher Usbek,
Je pense qu'en termes de négociations entre la France et le Tchad, s'agissant de cet engagement et peut-être davantage, Idriss Déby est mieux armé, si j'ose dire, que Hollande.
Sur un point de vue militaire, lui sait au moins de quoi il parle puisque ce n'est pas un politique, mais un militaire ayant pris le pouvoir, en plus avec le soutien des Français, les militaires ayant sans aucun doute joué de leur influence pour qu'on se débarrasse enfin de Hissène Habré en faveur de celui qu'ils considéraient comme leur poulain. Sur ce dernier point je peux témoigner de la cote de popularité qu'il pouvait avoir auprès du commandement français au Tchad au cours des années 80 quand il était alors le commandant en chef, très efficace par ailleurs, des forces tchadiennes. Tout ça pour dire que la guerre et ce type de guerre il connait pour l'avoir vécu, comme il connait nos faiblesses sur ce type de terrain face à ce type d'ennemis.
Maintenant il faut considérer les intérêts réciproques des uns et des autres.
S'agissant du Mali, inutile de s'étendre sur le fait que l'apport tchadien est fondamental.
Sur un plan plus global, on considèrera que Déby ayant troqué sa djellaba de comchef des forces armées tchadiennes contre le costume cravate du chef d'Etat ne s'est pas bonifié, c'est une litote. Reste qu'on l'a sorti une ou deux fois de la panade. La dernière fois on en était aux dernières extrémités puisque le palais présidentiel était encerclé et lui dedans. Ce qui veut dire qu'il est sans doute plus utile qu'un éventuel successeur inconnu. Déby est le dernier avatar de ces gens du Nord au pouvoir depuis la fin des années 70. Il y avait le duo Goukouni-Habré qui se disputait régulièrement le pouvoir, et vite Déby est apparu comme un remplaçant possible et même crédible. Depuis c'est moins clair ou disons qu'on n'a pas de réel "poulain". Donc notre intérêt est peut-être de garder celui qu'on connait et qui nous garantit un positionnement intéressant dans cette région de l'Afrique, surtout depuis que notre présence en Centrafrique est devenue symbolique.
Tout ça pour dire que pour l'instant, il profite dans ses rapports avec la France d'une situation qui lui est favorable, ce qui lui permet effectivement de fanfaronner".
Je pense qu'en termes de négociations entre la France et le Tchad, s'agissant de cet engagement et peut-être davantage, Idriss Déby est mieux armé, si j'ose dire, que Hollande.
Sur un point de vue militaire, lui sait au moins de quoi il parle puisque ce n'est pas un politique, mais un militaire ayant pris le pouvoir, en plus avec le soutien des Français, les militaires ayant sans aucun doute joué de leur influence pour qu'on se débarrasse enfin de Hissène Habré en faveur de celui qu'ils considéraient comme leur poulain. Sur ce dernier point je peux témoigner de la cote de popularité qu'il pouvait avoir auprès du commandement français au Tchad au cours des années 80 quand il était alors le commandant en chef, très efficace par ailleurs, des forces tchadiennes. Tout ça pour dire que la guerre et ce type de guerre il connait pour l'avoir vécu, comme il connait nos faiblesses sur ce type de terrain face à ce type d'ennemis.
Maintenant il faut considérer les intérêts réciproques des uns et des autres.
S'agissant du Mali, inutile de s'étendre sur le fait que l'apport tchadien est fondamental.
Sur un plan plus global, on considèrera que Déby ayant troqué sa djellaba de comchef des forces armées tchadiennes contre le costume cravate du chef d'Etat ne s'est pas bonifié, c'est une litote. Reste qu'on l'a sorti une ou deux fois de la panade. La dernière fois on en était aux dernières extrémités puisque le palais présidentiel était encerclé et lui dedans. Ce qui veut dire qu'il est sans doute plus utile qu'un éventuel successeur inconnu. Déby est le dernier avatar de ces gens du Nord au pouvoir depuis la fin des années 70. Il y avait le duo Goukouni-Habré qui se disputait régulièrement le pouvoir, et vite Déby est apparu comme un remplaçant possible et même crédible. Depuis c'est moins clair ou disons qu'on n'a pas de réel "poulain". Donc notre intérêt est peut-être de garder celui qu'on connait et qui nous garantit un positionnement intéressant dans cette région de l'Afrique, surtout depuis que notre présence en Centrafrique est devenue symbolique.
Tout ça pour dire que pour l'instant, il profite dans ses rapports avec la France d'une situation qui lui est favorable, ce qui lui permet effectivement de fanfaronner".
Mes
hypothèses sur les relations entre Hollande et Deby durant le dernier trimestre
2012 sont confirmées par un texte, paru à l'époque (4/12/12) sur internet. Je ne l'ai trouvé qu'hier, par hasard, après la publication
de mon blog dont il confirme l'hypothèse et les conclusions. Voici ce texte
paru dans Survie.org :
"Hollande fait la paix avec Déby et prépare la guerre
Après
quelques hésitations, le dictateur tchadien Idriss Déby sera reçu à l’Elysée
par François Hollande mercredi. Cette rencontre plusieurs fois reportée, aura
lieu sur fond de négociation sur une intervention militaire au Mali appuyée par
la France, qui souhaite mobiliser les troupes claniques de l’armée tchadienne.
L’accueil
annoncé à l’Elysée du dictateur tchadien Idriss Déby le 5 décembre conclut un
vrai-faux suspense qui a duré plusieurs semaines. Les reports de ce rendez-vous
sont probablement le signe de houleuses tractations dans lesquelles les
questions liées aux violations des droits humains au Tchad n’auront au final
pas pesé lourd face à la volonté de la France d’obtenir le soutien de N’djamena
dans le dossier malien. En effet, pour des raisons géostratégiques décidées en
dehors de la volonté souveraine du Mali, la France fait depuis plusieurs mois
pression sur le président tchadien pour obtenir la participation de ses troupes
et de ses moyens militaires dans l’ « opération africaine » qu’elle promeut.
Une participation évidemment compromise si Hollande n’accepte pas de donner un
minimum de caution diplomatique à Déby en le recevant à l’Elysée.
Le
cas tchadien illustre cette incapacité de l’exécutif français à définir une
ligne diplomatique claire et assumée concernant ses relations avec les
dictateurs africains. A quoi bon en effet tenir un discours sur les droits
humains sur les terres d’un dictateur à Kinshasa en octobre et se pincer le nez
face à lui, si c’était pour rencontrer discrètement dans la même journée les
despotes congolais et camerounais Denis Sassou Nguesso et Paul Biya ou si c’est
pour recevoir à l’Elysée le dictateur tchadien Idriss Déby quelques semaines
plus tard ?
Rappelons
qu’Idriss Déby, souhaitant faire jouer au maximum son potentiel de négociation,
avait pris soin de décliner l’invitation à Kinshasa, sans doute d’en l’attente
d’être « mieux traité » à Paris. C’était prendre peu de risques. Les visites
ministérielles au Tchad en juillet dernier de Laurent Fabius et Pascal Canfin
avaient en effet laissé envisager, sur fond de crise au Mali, une continuité
dans la politique française de soutien « pragmatique » au dictateur, le chef de la diplomatie française y faisant étalage des «
relations d’amitié qui demeurent » .
En
fait d’amitié, c’est l’armée tchadienne qui est soutenue sans discontinuer par
le dispositif militaire français Epervier, lancé en 1986 par le gouvernement
Fabius – ce dispositif est constitué d’un millier d’hommes, d’une force
d’aviation et de renseignement sophistiqué, renforcé ces dernières semaines.
L’armée tchadienne, en phase avec la volonté farouche d’Idriss Deby de se
maintenir au pouvoir, est une des plus puissantes de la région. Habituée à des
opérations dans des zones désertiques, elle compterait « 30.000 hommes équipés
d’armes modernes et de moyens aériens ». Dans un pays classé parmi les plus
pauvres de la planète, l’armée plétorique de ce pouvoir couvé par les bons
soins de la France aurait davantage de quoi inquiéter que de réjouir quiconque.
En
effet, Idriss Déby est responsable d’une partie des massacres et atrocités
commises sous le régime d’Hissène Habré, dont il fut le chef d’État major,
avant de le renverser en 1990 avec l’appui de la France. A la tête de l’État,
il n’hésita pas à ordonner de nouveaux massacres et des exactions insoutenables, et s’est maintenu au pouvoir par les
armes, toujours soutenu par la France. Un soutien tricolore multiforme :
économique, via les largesses en aide publique ; diplomatique, par la validation
d’élections truquées (quand la France n’a pas elle-même contribué à organiser
la fraude comme lors de la présidentielle de 2001) ; militaire enfin, l’armée
française repoussant les rébellions de 2006 ou 2008 et continuant à fournir en
armes un régime qui a renoncé à investir dans les secteurs sociaux de base et
n’hésite pas, comme le dénonce Amnesty International, à recruter des enfants
soldats.
Aujourd’hui,
alors que les Tchadiens réclament la démocratie, la fin de la répression contre
les opposants, victimes d’arrestations arbitraires, la vérité dans les
multiples affaires criminelles impliquant le régime tchadien (dont la
disparition de l’opposant Ibni Oumar Mahamet Saleh en février 2008), et surtout
des politiques publiques au service des populations, la France accepte de
redonner une caution d’honorabilité à Idriss Déby. Avec pour seul espoir que
les soldats tchadiens, supposés spécialistes du Sahel (du moins quand la France
les appuie), sinistrement réputés pour leur clanisme, leurs exactions et leurs
multiples retournement d’alliances dans les différents conflits internes, ne
constituent un soutien utile sur le terrain malien.
Naïvement
ou à dessein, le Président de la république française s’engouffre dans une
realpolitik promue avec son Ministre des Affaires Etrangères Laurent Fabius et
opte délibérément, sous des prétextes fallacieux, pour une politique criminelle
de réhabilitation d’un des pires despotes du continent. Un manque de lucidité
particulièrement étonnant tant les exactions du régime Déby sont connues et
documentées, y compris par des conseillers du président de la République, telle
l’ancienne députée Marie-Hélène Aubert qui de part ses travaux passés est bien
informée de la nature du régime d’Idriss Déby .
Une diplomatie française qui s’évertue à voir Idriss
Déby comme une solution plutôt que comme un problème n’est décidément pas prête
à rompre avec la Françafrique".
Pour
voir à quel point la vision de la situation au Tchad diffère de celle qu'on
nous présente, un texte tout récent publié sur internet là-bas (24 mars 2013) par
Moussa
Guetane Moussa dans
Alwihdainfo.com :
"Après
une longue série de tergiversations, la France reconnait à
contrecœur la mort du chef terroriste Abou Zeid. Cette reconnaissance forcée a
été longuement accentuée par la volonté affichée des FATIM et des hautes
autorités tchadiennes de ne pas se laisser cette capitale victoire contre le
terrorisme. Reste aussi pour la France de reconnaitre la mort de l’autre chef
terroriste Moukhtar Belmoukhtar. Le Tchad quant à lui maintient mordicus sa
déclaration sur la mort de ce dernier qui a été abattu grâce à la bravoure et
au professionnalisme des forces armées tchadiennes qui entendent lancer un
message fort à tous ceux
qui rêvent de rééditer l’expérience malienne sur le sol tchadien qu’ils seront
sévèrement battus à platcouture et leur
ambition macabre vouée à un échec cuisant et mémorable.
La France et
les pays de la
CEDEAO doivent implicitement reconnaitre que le Tchad est un partenaire
incontournable dans la stabilité et la lutte contre le
terrorisme dans la sous-région. Il est temps que les grandes puissances luttant
contre le terrorisme accordent une oreille attentive à notre pays en l’aidant
dans sa politique sécuritaire et en veillant à sa stabilité, un verrou important
dans la lutte contre le terrorisme. Avec la nouvelle donne sur l’implantation
des cellules terroristes actives et dormantes dans le Sahel, la stabilité du Tchad est un
atout indéniable pour la sécurité du reste de la région. Tout déstabilisation
ou trouble conflictuel au Tchad débordement au-delà de nos frontières pour
sonner le glas de la sécurité et de la stabilité dans la sous-region.
Le sacrifice
de nos vaillants soldats au Mali sera inscrit dans les annales de l’histoire de
la lutte contre le terrorisme. Le Tchad jadis considéré comme un pays de
troubles et de conflits incessants a su remonter la pente pour s’engager dans
le sillage des pays œuvrant pour la paix au-delà de leur frontière. Il est
primordial et capital pour les autorités tchadiennes de prendre toutes les
mesures pour doter encore nos forces armées et de sécurité des moyens plus
importants et sophistiqués pour défendre nos frontières et veiller à lutter
efficacement contre le terrorisme. La sous-region tirera un privilège
sécuritaire indéniable. C’est en modernisant nos forces armées et de sécurité
qu’on récoltera les fruits de notre investissement pour sécuriser et stabiliser
notre pays contre les visées déstabilisatrices et les actes de terrorisme. La
sécurité et la stabilité du Tchad est l’affaire de tous les Tchadiens d’abord,
ensuite viendrait l’aide de nos amis et partenaires étrangers. ".
Je laisse de côté ici les événements de RCA et la chute de Bozizé ! L'auberge va s'aggrandir !
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