C'est dimanche ; en attendant de revenir demain à l'esclavage, voulez-vous que je vous propose, comme exemple, un titre à la mode dans le discours politique français ? En voici un : « Le manque de charisme du Premier Ministre impactera-t-il de façon pérenne son action régalienne ?".
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Vous avez remarqué sans doute que ce titre veut simplement dire : "Le manque d'autorité rayonnante de notre Premier Ministre l'empêchera-t-il de prendre les décisions qui s'imposent dans des domaines essentiels?".
En lieu et place d'une telle formulation, consternante de banalité voire de désuétude, celle que je vous propose ici réunit quatre mots-clés de notre vocabulaire médiatico-politique actuel. Le seul point sur lequel je m'interroge en écrivant ce post est l'ordre dans lequel je dois mettre ces deux termes : médiatico-politique ou politico-médiatique ? Je ne vais pas vous refaire le coup de l'âne de Buridan et je ne vois pas de mot-valise sauf un médiocre "polimédiatique" que les incertitudes orthographiques si communes aujourd'hui peuvent rendre ambigu.
Il ne fait pas de doute que la vogue de ces termes (je ne m'en tiens qu'aux plus récents que leur fréquence même rend insupportables) tient à l'ignorance encyclopédique de la plupart de nos politiques et de nos journalistes ; à chaque mot nouveau pour eux (ce qui est un phénomène relativement courant vu leur niveau de connaissance de la langue française), ils sont comme des enfants qui ont trouvé un nouveau joujou dans l'une ou l'autre de leurs friandises et qui ne s'en séparent plus aussi longtemps que dure l'émerveillement devant pareille nouveauté.
Je leur signale car, sans doute cet attrait du neuf finira-t-il par disparaître, qu'ils pourraient ajouter à cette liste, relativement courte, un verbe que j'aime beaucoup et qui souvent n'est malheureusement pas compris, en dépit du fait qu'on peut en user dans nombre de circonstances, en particulier en politique.
Il s'agit du verbe "gazer" ; non pas le verbe sinistre qu'ont hélas popularisé les camps de concentration et la Shoah, pour en faire, comme disait l'autre, un "détail de l'histoire" et qui est dérivé du substantif "gaz", (en la circonstance asphyxiant), mais d'un verbe "gazer", de forme identique , mais beaucoup plus joli, dans son étymologie en tout cas, puisqu'il dérive, non pas du "gaz" (mot rudement masculin) mais de la "gaze", terme féminin qui qualifie un tissu dont il a le charme léger, la douceur et le léger pouvoir d'occultation. "Gazer" une réalité, ce n'est en rien la cacher et moins encore la détruire, mais voiler d'une "gaze" légère qui en adoucit les contours et en masque les défauts. Quoi de plus précieux en politique ?
Le peu charismatique Monsieur Ayrault pourrait donc, faute d'un impact pérenne dans sa fonction régalienne de gestion de nos finances, s'employer, sinon à réduire ou à faire disparaître nos difficultés et déficits, du moins à les "gazer", c'est-à-dire à les couvrir de voiles légers, qui en atténuent la rudesse inquiétante, sans pour autant chercher, sottement voire malhonnêtement, à les dissimuler totalement à nos regards.
Monsieur le Premier Ministre, avec tout le respect que je vous dois, je vous en prie, acceptez ce conseil (gratuit comme toujours chez Usbek Consulting &Co) et suivez-le donc : « Gazez ! Gazez ! Gazez !".
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