J'ai déjà, dans un post précédent, évoqué le déplacement de François Hollande vers l'Afrique, mais dans une perspective différente, en relation plus directe avec son éventuelle participation au XIVe Sommet de la francophonie qui se tiendra cette semaine à Kinshasa.
Ce sera pour lui une forme de premier contact avec l'Afrique, puisque, semble-t-il, il n'est guère allé sur ce continent qu'à l'époque, déjà lointaine, où il était encore stagiaire à l'ENA ; il a eu toutefois la sagesse de prendre des avis différents, les uns du côté du ministère des affaires étrangères (ce ne sont pas forcément les meilleurs), les autres du côté de diverses personnalités sénégalaises dont la plus remarquable est assurément Mamadou Diouf. Ce dernier n'a pourtant peut-être pas, en tant que Sénégalais (même s'il vit désormais aux États-Unis), toute la liberté de parole qu'on pourrait attendre. F. Hollande ne semble pas avoir consulté la seule personnalité à laquelle je m'adresserais moi-même si j'étais Président de la République (ce qu'à Dieu ne plaise) et si j'avais à consulter un seul expert sur les problèmes de l'Afrique. Il s'agit, vous l'aurez peut-être deviné déjà, d'Antoine Glaser dont les avis me semblent toujours des mieux fondés, même s'ils me paraissent désormais plus circonspects.
Ce voyage sera très symbolique, puisqu'en fait, il ne séjournera en Afrique qu'à peine plus de 24 heures ; il doit arriver à Dakar dans la journée du vendredi 12 octobre 2012 et quittera Kinshasa dans la soirée de samedi 13, sans participer à la réunion finale du Sommet le dimanche 14. Pour ce qui est du séjour proprement dit à Kinshasa, il fera néanmoins mieux (puisque nous sommes dans la perspective des comparaisons) que Nicolas Sarkozy qui n'y avait séjourné que quatre heures quand il s'y était rendu, en d'autres circonstances il est vrai.
Lors de mon dernier post sur le sujet, qui était consacré surtout à la participation au Sommet de Kinshasa, je n'avais pas insisté sur le passage à Dakar, sauf pour le prendre en considération sous l'aspect "malien" si l'on peut dire. Il n'était pas encore question, à ce moment, d'un "discours de Dakar", qui est évidemment destiné à faire pendant à celui de Nicolas Sarkozy qui avait fait grand bruit en Afrique. L'insistance même à souligner qu'il ne s'agit en rien d'une réponse au discours de Nicolas Sarkozy est évidemment la preuve que c'est là une des raisons essentielles de cette intervention.
Je m'amusais ce matin d'ailleurs d'entendre, sur l'une de nos radios bignoles, Bernard Kouchner évoquer le discours de 2007 comme si cette affaire ne l'avait en rien concerté, alors que, si modeste qu'ait son action dans cette fonction, on doit se souvenir qu'il était à l'époque ministre des affaires étrangères. Même dans la structure française où survit, tant bien que mal, cet étrange ministère de la coopération, cette intervention le concernait tout de même quelque peu.
Il faut tout de même rappeler ici, moins les termes de ce discours de Nicolas Sarkozy (dont la fameuse phrase selon laquelle "l'homme africain n'est pas encore assez entré dans l'histoire", formule dont le sens même me pose problème) que le lieu où ce discours de cinquante minutes a été prononcé.
J'ai entendu récemment Monsieur Henri Guaino à qui on reparlait de ce discours, se montrer lui aussi extrêmement évasif (ces gens-là n'ont pas de mémoire !), alors qu'il en est, semble-t-il, l'auteur. Ce détail a même permis au président sénégalais Wade, quelques mois plus tard, de faire un bon mot en disant que, dans cette circonstance, le Président de la République française « avait été victime de son nègre ». La formule est jolie et même piquante !
L'une des choses les plus surprenantes dans toute cette affaire et que je n'ai d'ailleurs apprise très récemment est que ce discours, dont je croyais qu'il avait été prononcé à l'Assemblée nationale ou dans quelque lieu de même nature, a été, en fait, lu par Nicolas Sarkozy à l'Université Cheikh Anta Diop. Pour transposer tout ça en France, c'était un peu faire rédiger par Jean-Marie Le Pen un discours qui serait prononcé à l'Université de Saint-Denis (ex-Vincennes), à la grande époque bien sûr. Il faut toute l'inculture française à propos de l'Afrique et/ou un sens aigu de la provocation pour faire tenir pareil discours en pareil lieu, quand on sait, si peu que ce soit, qui était Cheikh Anta Diop et quelles étaient ses positions que j'ai quelques scrupules à dire scientifiques, mais qui n'en sont pas moins toujours affirmées par certains au moins et, en tout cas, parfaitement connues de tous.
Je ne sais pas exactement ce que dira François Hollande, mais serais-je sa place que je refuserais de prononcer le discours prévu dans le même lieu, ne serait-ce que pour mettre un terme à cette inévitable comparaison. On nous annonce déjà la nième version de l'abandon de la Françafrique (Rappelez-moi de faire le post que je médite sur les mots-valises car j'en ai un qui n'est pas triste, pas de mot-valise mais de post !) ; air connu ! Si je persistais dans l'idée absurde de me mettre à la place de François Hollande, je crois que je m'abstiendrais de toute référence au discours d'Henri Guaino lu par Nicolas Sarkozy, car, en l'occurrence, une telle attitude consisterait à tirer, même pas sur une ambulance mais plutôt sur un corbillard.
Quand j'ai appris la brève escale sénégalaise sur la route de Kinshasa, je me suis demandé si notre président ne cherchait pas un peu, par là, un prétexte pour ne pas se rendre à Kinshasa où tout indiquait qu'il n'avait pas, à juste titre, une très grande envie d'aller. Les petites provocations des jours derniers à l'égard de la République (si joliment dite) Démocratique du Congo paraissaient confirmer cette hypothèse ; on semblait titiller les Congolais Démocratiques pour les amener à avoir quelques paroles malheureuses qui fourniraient la matière d'un mini-incident diplomatique qui empêcherait finalement la visite de notre Président de la République. Bernique ! Il ne semble pas que les choses doivent se passer ainsi.
A mon humble avis, il serait bien plus opportun pour notre président (il est assez malin pour trouver ça tout seul) d'insister plutôt sur le bel exemple de démocratie, méritoire mais un peu laborieux quand même, que nous ont récemment donné les Sénégalais, en dépit des tentatives quasi putschistes d'un président qui voulait installer son fils à sa place, moyennant un petit changement constitutionnel, mais qui a tout de même fini par céder, avec une certaine élégance, devant le choix du peuple. L'éloge de la démocratie sénégalaise pourrait lui permettre de glisser joliment vers la suggestion d'un règlement également démocratique, tant de la question congolaise (je ne sais pas si François Hollande ira jusqu'au bout de son intention affirmée de rencontrer à Kinshasa, l'opposition au président Kabila) mais également malienne. Dans l'un et l'autre cas, François Hollande (futur Prix Nobel de la paix car on y manque toujours de candidats !) pourrait aspirer au rôle de grand médiateur démocratique de l'Afrique, en proposant de tenir, dans l'année qui vient, des États Généraux des peuples africains en cause ou un Grenelle des démocraties d'Afrique, formes d'actions qu'il semble tellement apprécier. Saura-t-il être le nouveau Mandela ?
Il pourra d'ailleurs juger sur pièces à Kinshasa de l'évolution qui se dessine en Afrique, puisque les embouteillages gigantesques qui bloquent habituellement la route de Gombe, à Kinshasa, auront peut-être disparu, lors du Sommet, si les Chinois ont achevé de construire la route à six voies qu'ils sont, paraît-il, en train de faire dans cette zone.
Tout un symbole me semble-t-il. Ce sont les Chinois qui construisent désormais toutes les routes en Afrique, " mais quelles routes!" me disait, il y a quelques mois, un spécialiste de la question qui a fait toute sa carrière dans cette activité sur ce continent. En la circonstance, il n'y a pas trop d'inquiétude à avoir ; si la route est achevée dans la semaine qui précède le Sommet, elle tiendra bien le coup au moins jusqu'au dimanche soir où il s'achèvera !
1 commentaire:
bonsoir
effectivement FH a été vif lors de sa conférence de presse à l'égard du Congo...RAS
A Dakar le discours était élégant pour dire restez vigilants avec les investisseurs émergents, croyons en l'avenir, précédemment la France a mal géré l'accueil de vos étudiants...je vous épargne
et "j'irai a Mali" en résumé...avec vous là!
et la France Afrique, terminée, là je vous redonne la valise, elle est devenue sans fond et sans poignée mais on continue à la rouler
Enregistrer un commentaire